«JE SUIS SAUVÉ! ALLÉLUIA! GLOIRE À DIEU! JE SUIS SAUVÉ!»
ET VOUS?
«Je suis sauvé! Alléluia! Gloire à Dieu! je suis sauvé!»
Que signifient ces paroles?
À quelle épouvantable catastrophe cette femme ou cet homme vient-il d’échapper pour qu’un tel sentiment de délivrance se fasse sentir dans leur voix?
«Avant j’étais perdu, mais MAINTENANT j’ai l’assurance de mon salut.»
L’angoisse que l’un ou l’autre vient de traverser met encore une note émue et vibrante d’intensité dans ces paroles si mystérieuses pour beaucoup d’entre vous. Et le cœur se serre tandis qu’une impression poignante nous étreint, si indifférents que nous soyons, car nous sentons passer dans notre propre âme un malaise indéfinissable.
Le mystère de l’Infini nous effleure et notre âme tressaille et palpite en écoutant ce cri de délivrance; les voies de l’au delà se déchirent quelque peu et nous pouvons le sonder une seconde fugitive une seconde très brève. Et, bien que vous ayez encore la faculté de pouvoir garder votre sourire sceptique, bien que vous sachiez hausser les épaules et ricaner, vous attendez, quand même avec impatience, la suite des paroles prononcées, vous attendez l’explication de ce mystère.
– Vous souriez, mais vous attendez pourtant quelque chose de spécial qui soit bon pour vous-mêmes.
– Vous souriez, mais tout au fond de votre cœur vous désirez avec ardeur que ces paroles soient l’expression de la Vérité, car vous avez soif de quelque chose que vous ne savez pas analyser, mais vous avez cette soif en vous.
Soif d’idéal, soif de beauté, soif d’immortalité. Alors dans ces mots, dans ce témoignage quelquefois haché, saccadé, vous aspirez à trouver, à entendre et à saisir la note qui sera pour vous. «JE SUIS SAUVÉ!»
Avant, je vivais dans le monde, aveugle et sourde, tout en réalisant mon état de déchéance et mes nombreuses infirmités.
Avant je souffrais du mensonge, de l’orgueil, de l’égoïsme et de la dépravation, mais en ce moment même, maintenant, je crois en Jésus-Christ et je suis sauvé et je suis guéri.
Et maintenant je crois que je suis né pour être autre chose qu’un peu d’égoïsme, un peu de propre justice, un peu de tous les péchés, un peu de tout le mal, un peu de toute la nuit qui règne ici bas.
Je crois en Jésus-Christ et parce que j’ai cru, parce que je me suis approché avec un tel besoin, un si profond besoin de le trouver, avec un si profond besoin de Le comprendre et de Le suivre, j’ai trouvé en Lui la compréhension complète, absolue, de ce qui est le Bien, la Bonté, la Charité.
Avant, je végétais, j’étais une chose perdue parmi beaucoup d’autres choses semblables, mais maintenant ma personnalité chrétienne s’affirme, s’impose, je suis un être ressuscité!
Semblable à Lazare, j’ai quitté mon tombeau: «Lève-toi et suis-moi!» — Me voici Seigneur pour faire Ta volonté.
Et vous, les mondains sceptiques, vous écoutez ce témoignage vivant; vous riez, et pourtant vous vous dites «Mon Dieu, si ce témoignage volontaire pouvait être la preuve que l’au-delà existe et que les forces de l’Infini ne sont pas un vain mot! que le ciel existe et qu’il peut s’ouvrir devant l’âme qui s’arrête pour frapper.»
Vous, mondains sceptiques et railleurs, vous désirez tous de toutes vos forces, de toute votre intellectualité en déroute, de toute votre âme meurtrie, que ce témoignage soit une vérité, soit la Vérité. Car si vous pouvez sourire devant la galerie, pouvez-vous sourire, quand vous êtes malheureux, seuls vis-à-vis de vous-mêmes?
Vous pouvez vous moquer de celui qui se dit sauvé par Christ, mais dans le secret de votre cœur, les larmes ne sont-elles pas prêtes à jaillir?
Vous pouvez feindre l’indifférence au sujet des choses de Dieu, mais pouvez-vous feindre et éprouver cette même indifférence vis-à-vis de vos désespoirs, de votre solitude morale, de vos chutes?
Vous pouvez tromper les gens autour de vous, quant à votre état réel, mais votre cœur en devient-il plus léger et la vie vous semble-t-elle plus douce?
Souffrir seul! souffrir sans Dieu, souffrir sans pouvoir prier, souffrir en sentant le Néant à votre côté.
Supplice affreux qui arrache des plaintes à notre âme, supplice que Dante aurait pu mettre dans son «Enfer» «JE SOUFFRE!» le ciel reste muet «JE SOUFFRE!» la nuit reste reste paisible! «JE SOUFFRE!» nos parents, nos amis, dorment paisiblement, ignorant tout de cette lutte morale, de cette agonie douloureuse. «JE SOUFFRE! JE SOUFFRE! JE SOUFFRE!»
Le silence seul nous répond et, pire que le silence, pire que le désert, LA MEUTE DES RELATIONS MONDAINES qui par mille petits détails, par mille petites allusions, par mille petits manques de tact, agrandit la plaie, et nous la rend plus sensible.
Puis encore la souffrance que peut nous infliger ceux qui nous aiment le plus, ceux qui seraient prêts à tout supporter pour nous.
La maladresse des gestes et des paroles qui, involontairement font notre solitude plus complète, plus amère.
Puis la haine qui peu à peu s’infiltre en nous, car nous trouvons suprêmement injuste de n’être pas compris ou aidé par ceux qui nous aiment le plus, et ainsi devraient nous connaître et nous comprendre le plus «JE SUIS SAUVÉ!
Quelle immense responsabilité assume celui ou celle qui prononce cette profession de foi. «JE SUIS SAUVÉ!»
Je ne suis pas meilleur que vous, mais la différence qu’il y a entre vous et moi,
– c’est que, maintenant je lutte contre mes péchés,
– c’est que, maintenant, je fuis la boue des actions honteuses,
– c’est que, maintenant, je cherche heure après heure à élever mon âme, mes pensées, à purifier mes aspirations.
– C’est que je veux devenir meilleur,
– c’est que je veux imiter l’exemple du Christ et suivre Sa doctrine.
VOILÀ POURQUOI, MOI,
«JE SUIS SAUVÉ!»
Reconnaître enfin que le mal dont on souffre, c’est l’intense besoin de croire en mieux que soi! Et après avoir ouvert son cœur à cette doctrine d’Amour magnifique et Éternel, tendre la main à son prochain, sentant combien nous serions lâches devant Dieu, si nous ne rendions pas témoignage de ce que nous avons trouvé.
Sentir le besoin de ne plus chercher dans l’humanité des ennemis! sentir le besoin de trouver, dans cette humanité, des frères qui souffrent, pensent, vivent comme vous-mêmes l’avez fait.
Ne plus chercher la nuit et le péché autour de nous, mais vouloir trouver ceux qui nous entourent meilleurs que nous.
Ah! l'immense fatigue, l’immense écœurement quand toujours, toujours, nous cherchons le mal et la fausseté chez les autres; l’immense et suprême dégoût quand nous nions la lumière et la possibilité même de cette lumière.
Nous avons besoin de croire dans les autres, nous sentons le besoin de reconnaître notre voisin comme étant plus honnête, plus digne que nous, et quand nous critiquons, quand nous regardons avec une clairvoyance mauvaise et que nous analysons dans le venin, nous nous blessons, nous nous faisons souffrir un peu plus.
Croire! oui, croire, les mains tendues vers l’Infini; croire que le Ciel va s’ouvrir, et qu’à notre cri de supplication une voix répondra...
«JE SUIS SAUVÉ! JE SUIS UN DISCIPLE DU CHRIST!»
Être un disciple du Christ, donc chercher toujours plus à élargir en soi la conception de sa responsabilité personnelle envers son prochain. Aimer, aimer d’une immense affection, d’une affection qui, ayant franchi les limites de la raison et de l’esprit humains, participe seulement de Dieu et du domaine divin, et des lois de l’Infini Amour.
Assumer la responsabilité des péchés, des fautes, des erreurs qui nous entourent et venir, non par des discours, non par des sermons, non par des dons anonymes ou personnels, mais venir soi-même, avec son cœur, son âme, son intelligence, venir avec un ardent besoin d’imiter Christ.
Venir et se dépenser soi-même, et se fatiguer soi-même, et se priver et subir la persécution soi-même. Le don magnifique et entier de son «moi» à tous ceux qui souffrent et luttent dans la solitude, les ténèbres!
Ce merveilleux amour, cette puissance irrésistible qui soulève les flots et renverse les montagnes des conventions humaines dans les âmes de ceux qui en sont les témoins,
Le renoncement personnel qui fait courir vers le froid, la faim, les insultes, les larmes, les déboires et les privations de toutes sortes, mais qui aussi nous fait réaliser, d’une façon absolue, la présence réelle complète de Christ en nous.
Non, pas chanter ou dire que nous voulons porter notre croix, mais porter notre croix et aller vers elle si elle ne vient pas vers nous.
Tant de misères existent autour de nous!
Que faites-vous de votre vie?
Êtes-vous aussi un disciple de Jésus?
En avant 1914 02 07
Table des matières |