LA MAIN QUI NOUS SAUVE
Deux peintres étaient occupés à décorer les murs d’une cathédrale. L’un d’eux, ayant achevé une peinture, se mit à la considérer avec un grand soin. Oubliant bientôt, dans son admiration, qu'il se trouvait sur un rustique échafaudage, à vingt mètres du sol, il recula lentement, et arriva enfin tout au bord de la dernière planche. À ce moment, son camarade se retourna soudain.
Presque paralysé d’horreur, il vit l’imminence de son péril; encore un instant, et le pauvre enthousiaste allait se trouver précipité sur le pavé. S’il parlait, la mort était certaine; s’il ne disait rien, elle l’était également.
Soudain, un trait lumineux traversa son esprit. Saisissant son pinceau il aspergea de couleur le chef-d’œuvre que son compagnon admirait, et l’abîma.
Hors de lui, le peintre se précipita en avant dans la direction de son camarade. Il s’arrêta néanmoins avant de se jeter sur lui pour se venger de l’outrage qu’il venait de recevoir et écouta le récit de son danger. Mesurant alors d’un regard l’abîme dans lequel il avait failli être précipité, il bénit, avec des larmes de reconnaissance, la main qui l’avait sauvé.
Il nous arrive aussi parfois de nous laisser absorber par les séduisantes peintures du monde, et dans notre admiration de reculer incessamment loin de Dieu.
Dans sa bonté le Tout-Puissant brise alors ces images et, alors que nous sommes tentés de nous plaindre de ses voies, il nous attire dans ses bras d’amour.
(Extrait).
En avant 1910 08 20
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