LA COMMUNION DE SES SOUFFRANCES
En troisième lieu, les souffrances nous sont nécessaires, pour que nous ayons communion avec Jésus-Christ. Il nous est impossible d'être en communion intime avec ceux qui souffrent sauf dans la mesure où nous avons nous-mêmes passé par leurs souffrances.
Celui, par exemple, qui n’a jamais encore connu le deuil, ne saurait comprendre ceux qui passent, par des épreuves de ce genre, et compatir avec eux. Il pourra éprouver une certaine sympathie peut-être, en voyant la souffrance de son ami, mais il ne peut être en profonde communion avec lui sur ce point.
Mais lorsqu’il est frappé à son tour, il entre alors dans une intimité plus profonde avec son semblable.
Il en est précisément de même avec nous et notre Seigneur.
Pour Le comprendre et Le connaître intimement,
il nous faut passer par où II a passé.
Pour pouvoir compatir à nos faiblesses, Jésus est venu vivre dans une chair comme la nôtre, et Son cœur tendre a été broyé par les douleurs et les chagrins sans nombre.
Maintenant, nous qui L’aimons, et qui voulons une communion pleine et entière avec Lui, nous ne pouvons l’avoir autrement qu’en parcourant le même chemin.
Sommes-nous effrayés par cette perspective?
Ah non! Comme St-Paul, nous pouvons dire: «De même que les souffrances de Christ abondant en nous, de même notre consolation abonde par Christ.» (2 Cor. 1, 5).
En vue de la joie qui nous est proposée, nous accepterons la croix, et la prière qui jaillit du fond de notre cœur est exprimée par ces lignes:
«Laisse-moi, Jésus, souffrir avec Toi
Si tes autres Te délaissent,
Tu pourras compter sur moi.»
Saint-Paul témoigne du même désir ardent lorsqu’il écrit aux Philippiens (chap. 3). «J’ai renoncé à tout,» dit-il, «et je les regarde comme de la boue... afin de connaître Christ, et la puissance de Sa résurrection, et la communion de ses souffrances, en devenant conforme à Lui dans sa mort...»
Notons la progression de la vie divine!
– Connaître Christ; avoir le Christ ressuscité en soi;
– expérimenté ses souffrances:
– devenir conforme à Lui dans Sa mort!
Voyons maintenant de quelle façon nous pouvons nous attendre à l’exaucement de notre prière. Comment nous donnera-t-Il la communion de ses souffrances?
Il est évident d’après tout ce que nous avons déjà dit, que l’exaucement viendra du côté de nos circonstances. Celles-ci ressembleront de plus en plus à celles de notre modèle. Tournons donc nos regards vers Lui!
«Il est venu chez les siens, et les siens ne l'ont point reçu!».
Voilà une souffrance incalculable pour le cœur plein d’amour de notre Sauveur. Cette nation pour laquelle Dieu avait tout fait, à laquelle II s’était merveilleusement révélé tant de fois dans le passé, ne veut rien connaître de Son Saint-Fils.
L’AMOUR QUI S’OFFRE NE RENCONTRE GUÈRE
QUE DES CŒURS QUI LE REFUSENT.
De la part d’une autre nation, ayant toujours ignoré l’Éternel, cela pourrait être compréhensible. Mais, de la part «des siens». Ah! quelle douleur amère! et Jésus en pleura! (Luc. 19, 41).
– Avez-vous senti cela?
– Est ce que votre cœur souffre du rejet de ceux pour lesquels vous avez tant travaillé et peiné?
– Est-ce que vos intimes amis, sur lesquels vous pensiez pouvoir compter, vous font défaut, ou ne veulent rien de votre affection?
Ne vous plaignez pas alors! Ce serait perdre la bénédiction qui vous est offerte.
Mais acceptez de souffrir ainsi, sans un mot, et tout en pleurant continuez à répandre votre amour sur eux, et vous irez, avec une joie intérieure bien profonde, un peu plus loin dans la communion des souffrances de votre Seigneur.
L’Esprit de Christ, parlant par la bouche du prophète Ésaïe, dit: «J'ai été seul à fouler au pressoir, et nul homme d'entre les peuples n'était avec moi.» (Ésaïe 63, 3).
Nul n’a connu la solitude comme Jésus, bien qu’il ait été constamment entouré de gens. Pas une âme pouvait Le comprendre.
Sa pensée, Sa communion avec le Père, étaient tellement au-dessus des idées humaines, qu’il ne pouvait même en parler à Ses disciples les plus aimés. Il était continuellement mal compris, mal jugé, et mal interprété.
Nous aussi, si nous avançons dans Sa connaissance, nous trouverons le chemin solitaire, et de moins en moins fréquenté. Nous verrons avec chagrin que nous sommes souvent mal compris de nos meilleurs compagnons de route; nous pourrions le supporter du monde, MAIS de nos frères et de nos sœurs dans la Foi, ah! c’est pénible!
Mais malgré vos larmes, cher camarade inconnu, marchez en avant, sans récrimination, sans plainte, sans chercher à établir votre justice (Dieu se charge de cela).
Considérez bien plutôt comme un privilège d’avoir part ainsi aux souffrances de Christ.
Notre Maître était toujours en contact avec des personnes d'un tout autre caractère et d’un tempérament bien différent du sien, et tous bien éloignés de la perfection. Certainement leur manière de faire, et leur manière de parler devaient être tous les jours une véritable torture pour Lui.
Qui saura jamais ce qu’il a ressenti d’avoir un Judas auprès de Lui?
Pourtant, tout en connaissant le cœur du traître, Il agit avec celui-ci exactement comme les autres; il lui témoigne le même amour, la même douceur qu’à Jean ou à Pierre à tel point que la nuit tragique où II dit. «Un de vous me trahira», personne ne pense à Judas, mais tous disent, «est-ce moi?»
Et nous?
Y’a-t-il quelqu’un qui soit pour nous une écharde dans la chair?
Nous en connaissons sans doute. Si nous voulons comprendre le cœur de notre Sauveur, il ne faut plus nous endurcir contre ces personnes «épineuses»; ni faire tout notre possible pour les éviter, mais au contraire nous laisser déchirer, les acceptant comme les moyens dont Dieu se sert pour nous faire jouir d’une plus intime communion avec Son Fils. «Ne boirai je pas la coupe que le Père m’a donné à boire?»
C’est le Père qui la donne, même si Judas l’apporte.
Qui nous dépeindra la douleur de Jésus en voyant le peu d’empressement pour apprendre manifesté par Ses disciples; leur manque de foi, et la facilité avec laquelle Satan pouvait travailler en eux et par eux?
Ils trouvent plus intéressant de discuter qui sera le premier, que d'entrer dans l’esprit de leur humble et doux Maître. Celui-ci, avant sa crucifixion, aurait aimé leur ouvrir Son cœur. Il dit: «J’ai encore beaucoup de choses à vous dire mais vous ne pouvez pas les porter maintenant.» (Jean 16, 12).
Nous passerons par bien des expériences semblables.
L’ignorance et les ténèbres chez d’autres nous feront souffrir. Mais, patience! Souvenons-nous de notre Seigneur, et ne cherchons pas à forcer les choses.
Vous aimeriez bien donner vos idées ou communiquer vos lumières à telle âme qui vous intéresse. Mais il faut vous taire; elle n’est pas encore assez forte pour les supporter. D’ailleurs il se pourrait que Dieu ait choisi quelqu’un d’autre pour le faire, et dans ce cas c’est à vous de vous écrier avec un tressaillement de joie: «Père, je te loue de ce que tu l’as voulu ainsi!». (Matth. 11, 26).
(À suivre.)
En avant 1910 07 30
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