Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

----------

UN OBSERVATEUR DU DIMANCHE


À la dernière conférence internationale pour le repos du dimanche, tenue à Bruxelles (En octobre 1885), un industriel bien connu a fait le récit suivant:

Je désire vous montrer, par mon exemple, que l’homme n’a rien à perdre et tout à gagner à l’observation de la loi de Dieu sur la sanctification du dimanche.

Je suis arrivé à Bruxelles en décembre 1844, à l’âge de vingt-et-un ans. J’étais sans fortune et je cherchais une place. J’en trouvai une dans une grande maison de denrées coloniales, mais au bout de dix-huit mois, voyant que je n’y avais aucun avenir, je songeai à la quitter, et je priai Dieu de m’en accorder une autre.

J'allai offrir mes services dans une importante maison de banque de la même ville. Je fus agréé. Le patron me prévint qu’il fallait venir au bureau le dimanche jusqu’à midi:

«S’il vous plaît, monsieur, lui dis-je, je suis protestant. Le culte dans mon église est à 11 heures le dimanche ; permettez-moi de quitter le bureau à 10 heures et demie pour y assister.»

Il me le permit.


Au bout de trois mois, le patron, faisant la tournée de ses bureaux, s’arrêta derrière moi et me complimenta sur la belle tenue du registre dont j’étais chargé. Presque aussitôt après, j’allai le trouver dans son cabinet et je lui dis:

«Puisque vous avez bien voulu me témoigner que vous étiez content de mon service, je viens vous demander une faveur.

Laquelle?

Celle de ne pas venir du tout au bureau le dimanche. Je vous promets que mon travail n’en souffrira pas, et s'il faut veiller plus tard le samedi et venir plus tôt le lundi, je suis tout prêt.

Accordé.»

À partir de ce jour, et pendant six ans et demi que je passai dans la maison, je n’allai plus jamais au bureau le dimanche. Mon chef était très bienveillant pour moi, paraissait m’estimer, et il me le témoigna à diverses reprises. Malheureusement ma santé, gravement altérée, m’obligea à quitter la maison et à renoncer pendant bien des mois à tout travail. Je les passai dans ma famille.

Quand je fus à peu près rétabli, j’éprouvai le désir de ne plus être à charge aux miens et me mis à écrire à un de mes anciens amis de Bruxelles que j’accepterais la première place convenable, qui se présenterait à moi, soit à Bruxelles, soit en Allemagne. J'avais à peine fini ma lettre que j'en reçus une de cet ami, par laquelle il me priait, au nom de son patron, banquier, de venir tout de suite à Bruxelles pour y diriger la comptabilité générale d’un établissement industriel, dans lequel ledit banquier était intéressé en qualité de commanditaire.

Je partis aussitôt et me présentai au fabricant, patron de l'usine. Les premiers mots de celui-ci furent pour m’avertir qu’on travaillait le dimanche jusqu’à midi.

«Pardon, monsieur, lui dis-je, mon temps vous appartient du lundi matin au samedi soir, mais mon dimanche est à moi, et j’entends me le réserver tout entier.»

Il me regarda d’un air stupéfait et furieux, mais au ton dont j’avais dit cela, il comprit qu'il n’y avait pas à marchander et il en prit son parti. Peu de temps après, nous étions devenus les meilleurs amis du monde, et je puis affirmer qu’il n’a pas eu à se plaindre de ce chômage du dimanche.


Au bout d'environ six ans un de mes amis me proposa de m’associer à lui pour fonder près de Bruxelles une raffinerie de sucre. Il devait y être chargé de la partie industrielle, et moi de la partie commerciale. Nous nous mîmes aussitôt à l’oeuvre, après nous être assuré le concours d’un directeur expérimenté et d’un contre maître.

Nous chargeâmes celui-ci d'initier aux différentes branches du travail de la raffinerie des ouvriers de la campagne pris de partout, car nous ne voulions absolument pas embaucher des ouvriers des raffineries concurrentes existantes.

Quant à moi, je n’étais point familiarisé avec le travail technique de cette industrie, et tandis que mon associé surveillait la construction et la mise en marche de l’usine, je restais au bureau pour faire la correspondance, nouer des relations, établir la comptabilité.

Un dimanche, de ma chambre, je remarquai avec surprise que la cheminée fumait, que le tuyau de vapeur lançait des bouffées blanches comme les autres jours. Je fis venir le directeur.

«Vous travaillez donc le dimanche? lui demandai-je.

Mais, monsieur, me répondit-il, dans la raffinerie c’est absolument nécessaire. Nous avons dans les filtres des solutions sucrées qui entreraient en fermentation si le travail était interrompu un jour. Nous avons les fours à revivifier le noir animal dont la marche ne peut être un moment suspendue.»

Je me contentais de pousser un simple «ah!», mais je me dis à part moi, qu’aussitôt que j'aurais réussi à procurer une bonne place à mon directeur, je prendrais moi-même en main la direction de la fabrication et que nous verrions bien!


Trois mois après nous eûmes l’occasion de placer le directeur dans un grand établissement de Marseille. Le contre maître voulut partir aussi à la suite d’une altercation avec mon associé. Je leur souhaitai bon voyage, et je me mis à la tête de mon personnel d’ouvriers déjà à peu près formé, avec l’idée bien arrêtée que dans ma raffinerie on ne travaillerait pas le dimanche, puisque c’était la volonté de Dieu que l’homme se reposât ce jour-là.

J’étudiai une après l’autre les objections qui m’avaient été faites.

En ce qui concerne la clarification du sucre, j’augmentai, le samedi, l’alcalinité et la densité des solutions sucrées à filtrer ; je réglai, au soir de ce jour, les robinets des filtres, de manière que l’émission des liquides filtrés fût en rapport avec la capacité des réservoirs alimentaires des filtres ou de l’appareil à cuire dans le vide. De cette façon la filtration continuait sans interruption et automatiquement, jusqu'à la reprise générale du travail le lundi suivant.

Quant à la revivification du noir, elle fut aussi et a été dorénavant interrompue dans la nuit du samedi au dimanche. Le feu est éteint, les cornues sont vidées, le séchoir est garni de noir lavé et encore humide qui y sèche lentement jusqu’au lundi matin. Le nettoyage et l’entretien de l’outillage de l’usine en général, des machines à vapeur et des turbines se fait quotidiennement pendant les heures de repas, et si une réparation est devenue nécessaire, elle est entreprise immédiatement, mais ne se fait jamais le dimanche.

Bref, en très peu de temps, et continuellement depuis lors, le travail dans ma raffinerie a cessé le dimanche de grand matin, après que tout a été nettoyé et mis en ordre, et l’usine reste fermée jusqu’au lundi matin, sans autre personnel que le veilleur de nuit.

La paie se fait chez moi le vendredi à 4 heures du soir. Une demi-heure est accordée aux ouvriers pour porter leur argent à leurs femmes ou à leurs familles. Ils doivent être rentrés à l’atelier à 4 heures et demie, et n’ont pas ainsi le temps d'aller dépenser au cabaret une partie de leur salaire. La femme peut, faire le lendemain, samedi, les achats et les préparatifs nécessaires pour avoir un intérieur propre et agréable le dimanche, et y faire régner une atmosphère de bien-être indispensable pour attacher l’ouvrier à la maison.

Mon personnel est en général meilleur que celui des autres usines. Je ne permets jamais qu’on manque le lundi, sauf en cas de maladie bien constatée ne provenant pas de débauche ou d’excès de boisson. Mon usine et mes bureaux sont absolument fermés le dimanche. Je n'accepte ni n’expédie aucune dépêche télégraphique, aucune communication téléphonique.

La correspondance adressée à ma maison n’est ouverte que le lundi matin à 7 heures. On m’avait prédit la faillite quand, au début de mon établissement, je me refusai à toute transaction commerciale le dimanche.

Des courtiers et gens intéressés en furent irrités, mais la bonté miséricordieuse de Dieu a reposé sur mon usine.

Construite et aménagée en vue d’une production annuelle de 1 million de kilogrammes de sucre au maximum, elle a pu, malgré le repos du dimanche, produire jusqu’à 5 millions de kilogrammes, ce qui a été un sujet d’étonnement pour les hommes compétents.

En outre mes ouvriers sont très heureux, et jouissent dans le voisinage et dans les autres raffineries d’une excellente réputation. Voilà ce qui arrive quand on aime les commandements de Dieu et qu’on veut leur obéir, coûte que coûte.


Ce témoignage, que nous venons de citer textuellement, avec l’approbation de son auteur, a été corroboré par des témoignages analogues donnés par d’autres industriels. Le directeur des grandes aciéries dépendantes des établissements Cockerill à Seraing a déclaré qu’il était arrivé peu à peu, et sans aucun inconvénient, à supprimer la plus grande partie du travail du dimanche qui avait jusqu’alors été jugé indispensable.

Des fabricants de papier d’Annonay, qui arrêtent complètement leur fabrication le dimanche, affirmant qu’ils produisent plus et plus économiquement que leurs concurrents qui travaillent sans interruption pendant les sept jours de la semaine.

Dans les hauts-fourneaux mêmes, dans les usines à gaz, en un mot dans les industries qui semblent, par leur nature, les plus réfractaires aux arrêts périodiques, on est arrivé, en se donnant de la peine, à réaliser ces arrêts, dans une très grande mesure du moins, et à reconnaître qu’après tout cela valait mieux.

Que faut-il en conclure?

Ce que les chrétiens devraient tous savoir et proclamer, c’est que:


LES LOIS DE DIEU SONT DES LOIS SAGES.


Celui qui a créé l’homme sait ce qui convient à l’homme, c’est qu’en lui commandant de travailler six jours et de se reposer le septième, il lui a indiqué une des conditions, une des lois de son bien-être physique et moral; c’est que les lois du progrès et de la prospérité des sociétés ne peuvent pas être en contradiction avec les lois divines, et que lorsque ce désaccord semble exister, il est du devoir des chrétiens d’en étudier les causes et de s’efforcer de les faire disparaître.

En y mettant de l’attention, de la bonne volonté, de la persévérance, en se donnant de la peine en un mot, on arrive à triompher de difficultés jugées longtemps insurmontables.

Les cas de force majeure, derrière lesquels on croyait pouvoir se retrancher pour désobéir à Dieu, deviennent de plus en plus rares, et chaque nouvelle conquête faite dans ce domaine sur l’ignorance, l’habitude et le préjugé, se trouve être une source de bénédictions pour son auteur et le signal de la délivrance, et d’une augmentation considérable de bien-être pour un grand nombre de créatures humaines.

(Reproduit).

En avant 1910 05 14



Table des matières