Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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LA DERNIÈRE CHANCE D’UN JOUEUR


Un homme, à l’allure douteuse, se faufile dans une allée obscure. Là, se croyant à l’abri de tout regard inquisiteur, il fouille la poche de sa veste pour y retrouver le petit paquet de poudre qu’on lui a donné en échange de sa dernière pièce de monnaie.

Un policier qui l’a remarqué, passant de l’autre côté de la rue, et qui juge à son air qu’il se cache pour voler ou se suicider, fond sur lui comme un aigle sur sa proie, juste à temps pour saisir le papier et vider son contenu sur le sol.

Les deux hommes se regardent fixement, puis un rire forcé s’échappe des lèvres finement dessinées de celui qui allaient s’empoisonner.

Vous arrivez mal, brigadier, et je ne vous suis guère reconnaissant de me sauver la vie. Qu’allez-vous faire de ma personne?

Cela dépend absolument de vous, répond l’agent, discernant promptement qu’il a affaire à quelqu’un d’éduqué. Je préférerais vous conduire à la Colonie de l’Armée du Salut plutôt qu’au «violon», pour ce qui me concerne.

Vous parlez à bon escient, brigadier, et je serais volontiers de votre avis, mais un homme comme moi devenir pensionnaire de l’Armée du Salut, voyez-vous ça?

De plus élevés que vous sont devenus leurs hôtes, mon ami. D’ailleurs, si je ne me trompe, c’est la seule chance qui vous reste; vous feriez mieux d’en profiter!


La flèche pénétra dans le cerveau de l’homme. Sa «DERNIÈRE CHANCE!» Oui, ce pourrait bien être la dernière. Il en avait eu beaucoup.

Né dans une classe où rien n’est plus commun que les occasions dorées, il les avait toutes méprisées ou manquées et, sans ce brave policier, à l’heure qu’il est, on n’eut plus trouvé de lui qu’un cadavre noir et convulsionné.

Sans lui, plus de chance, ni pour la vie présente, ni pour l’éternité.

Vous avez raison, brigadier, reprit-il de son ton léger, «où le diable mène, il faut aller!» — Il se peut que le diable vous ait mené dur, mon ami, mais il n’a rien à faire ici, croyez-moi, répartit le policier d’un ton sérieux.

Et, presque sans échanger un mot, tous deux marchèrent côte à côte jusqu’à la «Métropole» salutiste.

Le Capitaine d'E.-M. lança un coup d’œil scrutateur à son nouvel hôte; quelques questions franches suivirent, auxquelles celui-ci répondit à voix basse. Remarquant son air gêné, le Capitaine changea de ton, appela un de ses subordonnés et lui donna quelques ordres relatifs au confort de l’étranger. Puis se tournant vers le policier, il le remercia de ses soins pour le malheureux près de périr.

Tous vos remerciements vont au Général qui nous donne l’occasion de faire mieux que d’envoyer les désespérés en prison. Bonsoir, Dieu vous bénisse!

L’agent sortit et l’Officier éleva son cœur vers Celui qui nous a gagné tant de cœurs dévoués parmi les autorités.

Les jours suivants, l’homme se donna toute la peine possible pour satisfaire ses bienfaiteurs, se conformant aux ordres donnés, triant le vieux papiers, tant pour s’occuper que pour diminuer le coût de sa pension, prêtant attention aux conseils qu’on lui donnait. Un soir, après une réunion de Mme Booth, il vint au banc des pénitents et se releva, un homme nouveau. Ensuite il raconta son histoire à l'Officier qui l’avait aidé à saisir le salut.


* * *


De bonne famille et étudiant à Oxford, il y avait contracté une telle passion pour le jeu qu’il ne s’intéressait plus à quoi que ce soit d’autre. Tout ce qu’il hérita de son père passa au jeu, une fortune immense lui échut d’une tante, qu’il perdit de la même manière. Un troisième héritage fut dépensé aux courses de chevaux.

Il avait tout dissipé, sauf quelques francs destinés à acheter par petites quantités, dans plusieurs magasins, assez de poison pour s’ôter la vie. C’est alors que le policier, ami de l'Armée, était intervenu, pour lui offrir une dernière chance de salut.

Aujourd’hui, sauvé et le cœur inondé de joie, il recommence la vie, nouveau trophée de l’Oeuvre Sociale salutiste.

En avant 1910 03 12



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