UNE BIBLE DÉCHIRÉE ET LA NUIT BLANCHE.
Au coucher du soleil, raconte l’Agent de la Société biblique en Égypte, nous entrons dans le village de B., un des villages du Delta. Nous nous présentons chez le gouverneur qui nous fait un cordial accueil. On venait justement de servir le repas du soir. Bientôt nous étions douze à table (une manière de parler, car le repas était servi sur le sol).
Après souper, nous voilà sur les divans causant librement de l’objet de notre voyage. Je me rends bientôt compte que notre hôte, tout mahométan qu’il est, est un lecteur assidu et intrépide de la Bible.
D’un trou pratiqué dans le mur, il prend plusieurs livres arabes, parmi lesquels une Bible très usée, avec la moitié des feuilles déchirées. Je demande: «Pourquoi ces feuilles ont-elles été déchirées?»
Il me répond. «Je vais vous le dire. Je passe presque tout mon temps aux champs. Je ne puis pas prendre un si gros livre avec moi, aussi, chaque jour, j’en déchire deux feuillets, je les prends avec moi pour les lire et pour en apprendre par cœur le plus possible tout en allant et venant dans les champs. Le soir, je les remets à leur place, et le jour suivant j’en prends deux autres. Quand j’aurai ainsi étudié le livre entier, je le ferai relier à nouveau soigneusement.»
Cet ami de la Bible nous logea pendant la nuit. Comme c’était la fête du Ramadan, la nuit entière fut consacrée à des réjouissances et au chant de morceaux du Coran. La nuit fut longue; de sommeil, pas question. Le matin, toutefois, aux premiers rayons, la maison devint tranquille et nous eûmes quelque repos. Et quand nous sortîmes notre hôte nous rejoignit et pris congé de nous en nous disant: «Ne manquez pas de revenir. Ma maison sera la vôtre.»
Le Messager des Messagers.
En avant 1910 01 22
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