Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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DEUX SŒURS, DEUX FLEURS



Connaissez-vous ces deux sœurs jumelles?

Blondes toutes deux, même front, même bleu dans le regard, même taille élancée, et pourtant si différentes l’une de l’autre! Aussi différentes que le ciel est différent de la terre!

Ève, la plus aimable, a toujours le sourire sur les lèvres, une parole agréable qui ne lui coûte rien. Chacun l’aime, chacun la recherche et aussi chacun la craint. Elle est chrétienne ou salutiste, ne vous déplaise, MAIS À L’OCCASION ELLE SERA CE QUE VOUS VOUDREZ. Elle vous parlera de Dieu, du Salut, comme de sa cuisine ou de son jardin. Elle paraît s’intéresser à tout — mais rien en elle ne vibre, et, en vous approchant de sa personne, vous vous demanderez peut-être: «Est-ce possible qu’Ève ait un cœur?»

Et pourtant vous voyez chacun tourner autour d’elle et briguer à l’envi, l’un de ses sourires ou l’une de ses faveurs.


Éva ne sourit guère et parle peu, mais lorsque vous voyez sa bouche s’entr’ouvrir, vous sentez que tout son cœur est monté à ses lèvres. Son cœur se montre encore dans ses yeux aimants, dans les actions de ses mains serviables, mais peu de personnes les voient et les connaissent.

Éva est une violette que le monde méconnaît. Son parfum se répand cependant, mais la fleur reste cachée aux yeux du vulgaire passant. Il est des fleurs qui se ressemblent à s’y méprendre, mais les unes s’en vont emportées par le vent sans rien produire, les autres meurent sur place en donnant naissance à un fruit qui va mûrir aux rayons du soleil.

Ève et Éva sont ces fleurs qui se ressemblent à l’extérieur, mais dont la fin sera éternellement différente. Le fond de leur être est différent, leurs mobiles sont différents, le but de leur vie est différent!

L’une ne vit que pour elle-même.

Si elle se marie, elle vivra pour son mari, pour son enfant, parce que ce sont les siens. Elle met ses intérêts au-dessus de tout, et ses aises, ses convenances doivent être satisfaites avant tout. À côté de cela, vous la verrez souvent s’occuper des autres, donner largement à celui-ci, se dépenser pour celle-là. Mais soyez sûr que, dans toutes ces choses, C’EST SON INTÉRÊT QU’ELLE RECHERCHE et qu’elle l’y trouvera. Dans tout ce qu’elle entreprendra, elle gagnera toujours quelque chose, (même en donnant aux malheureux), ce ne sera peut-être pas toujours de l’argent, mais des honneurs, la faveur de celle-ci, l’appui de celle-là.

Et cependant, il y a une chose qu’elle n’a pas encore gagnée et qu’elle n’obtiendra jamais:


C’EST LE VRAI BONHEUR, LE CONTENTEMENT D’ESPRIT.


Vous la voyez toujours agitée, jamais en paix. Ses yeux ont peine à regarder les vôtres, ils évitent le coup d’oeil observateur, car ils ne reflètent pas une bonne conscience. À son contact vous vous sentez mal à l’aise, et quoique chacun répète qu’on est heureux dans la maison d’Ève, chacun s’y lasse et se hâte d’en sortir.

L’autre sœur ne vit que pour les autres.

Elle se marie et sa maison est ouverte à chacun. Le pauvre, le misérable y est reçu à bras ouverts et jamais personne n’en est repoussé. Éva cherche toujours l’intérêt des autres avant le sien; elle se dévoue, elle se dépense, elle renonce à elle-même. Ses aises, elle ne sait ce que c’est! Ses goûts, ses convenances, elle n’en a plus! Elle ne cherche que le bonheur des autres, et.... ô merveille! elle y trouve le sien. Dieu la récompense en lui donnant Sa paix, la vraie joie, le contentement d’esprit! Ses yeux reflètent la lumière du ciel, ils peuvent soutenir tous les regards parce qu’une bonne conscience s’y lit au fond.

Malgré cela, peu de gens l’aiment, peu de gens la comprennent. On pense qu’elle n’est pas bien douée, que son intelligence est bornée, qu’elle est originale.

Ève lui est si supérieure! ! C’est qu’Éva est d'un autre monde! DANS LE CIEL ON LA COMPREND; elle y a des sœurs qui lui ressemblent; mais elle ne s’attriste pas d’être méconnue ici-bas. Elle poursuit sa route en aimant ceux qui la méprisent ou qui ne peuvent rien lui donner en retour.

- Éva est comme la fleur qui meurt et qui produit du fruit;

- Ève comme celle que le vent emporte, car, après elle, il ne reste rien, pas même un souvenir.

Vous avez reconnu ces deux sœurs; elles se trouvent dans votre ville, dans votre village, dans votre maison peut-être:


L’une c’est l’Égoïsme

et

L’autre c’est l’Amour


S. R.

En avant 1899 05 20



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