Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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PRIS SUR LE VIF

II


Une rue montante derrière Notre-Dame-de-Lorette, une mansarde au sixième. Nous frappons, la porte s’ouvre et nous introduit dans un petit espace où nous ne pouvons nous tenir trois.

Une figure rayonnante nous accueille, une figure éclairée de la lumière qui est la «véritable lumière»: c’est celle d’une vaillante femme ouvrière; elle n’a jamais au ce qu’était le repos ou le confort, ses cheveux ont blanchi, sa taille s’est courbée à la tâche. Elle gagne trente sous par jour (en 1904).

Le Dimanche est consacré au Seigneur et à la guerre du Salut, car c'est une Soldat du Salut et c’est ce qui fait sa joie.

Elle passe inaperçue souvent, elle ne fait pas grand bruit, mais ses prières sont entendues Là-haut, sa foi est exaucée quand elle prie «pour le monde perdu», comme elle le lit avec moi ce matin-là.

Sur la petite table, à côté des Évangiles, de l’En Avant, des Chants du Salut, du fil et des aiguilles, il y a un petit sac qui, jour après jour, reçoit les épargnes de notre camarade:

«Je puis y mettre quelquefois dix sous par jour, Colonelle, et tout cela, c’est pour le bon Dieu.»

Ah! ce n’est pas une dîme cela, c’est une offrande volontaire plus précieuse que l’or et l’argent superflus. Je regarde la mansarde, l’unique chaise, le petit lit-cage plié, la lucarne ouverte — que le ciel a l’air près, vu de cette petite lucarne! — et je ne puisque tomber à genoux et bénir le Seigneur pour ces merveilleuses lumières qui brillent sans le savoir, qui éclairent inconsciemment les ténèbres du monde et qui «brilleront comme les étoiles du ciel, à toujours et à perpétuité».



* * *


«Quel sera mon lieu de repos?»

C’est le Très-Haut qui parle, Il est le créateur des Cieux et de la Terre, Il possède toutes choses, Il parle et la lumière est. Il parle et les montagnes s’aplanissent, les vallées s’exhaussent, et cependant II cherche un «lieu de repos».

Sera-ce des édifices merveilleux élevés à force de millions, sera-ce telle ou telle admirable institution même?

Non, le lieu de repos de l’Éternel, C’EST LE CŒUR SOUMIS, vide de toute préoccupation personnelle, égoïste ou ambitieuse, le cœur prêt à obéir, à aller sur l'ordre du Maître, à rester dans le calme toujours, partout, le cœur qui ne discute pas les ordres divins, mais qui adore, sert avec délices le Très Haut!


Nos cœurs deviendront-ils les «lieux de repos» du Seigneur?


* * *


Dans le quartier Montceau à Paris. Le Parc baigné de lumière en cette journée de printemps hâtif ne m'avait jamais paru plus beau. Les tendres pousses vertes commençaient à paraître, les oiseaux chantaient, les enfants s’ébattaient dans les gracieuses allées au sable fin.

Tout ne parle-t-il pas de richesse, de beauté, de jouissance, en ces quartiers privilégiés?

Et cependant on y souffre. On y agonise, on y meurt: et on y meurt dans le désespoir.

On m’avait mandé auprès d’une étrangère demeurant à Paris depuis des années. Elle se mourait au milieu de souffrances atroces causées par un cancer; on m’avait averti qu’elle était incrédule, opposée à toute religion, et que sa fille,— une cantatrice distinguée venue en toute hâte d’une capitale européenne où elle avait ses engagements d’hiver, pour revoir sa mère mourante, — n'était pas plus favorable qu’elle aux choses d’En-Haut.

Nous sonnons — et dans ce milieu où deux jours auparavant, il avait été déclaré qu’on ne voulait rien avoir à faire avec des gens religieux. — nous voici introduits.

Pourquoi, comment, je ne sais, sauf qu’il a été dit: «J’ai mis devant toi une porte ouverte que personnene peut fermer».

À genoux auprès de la chère malade, nous lui parlons de Celui qui guérit, qui redonne, qui sauve qui éclaire la Vallée de la Mort sa présence se fait sentir, tandis que nous implorons Celui qui seul peut donner le repos à nos âmes,

«Oh! que c’est beau, que c’est beau» murmure la mourante en pleurant.

Vous regarderez à Jésus? N’est-ce pas?

Oui, oui!»

Incrédule? Opposée à toute religion?

Je ne sais, en tout cas, incrédulité et opposition avaient disparu devant l’amour de Jésus-Christ. D’ailleurs, y a-t-il un cœur humain qui soit réellement ennemi d’un Dieu d’amour? Je n’en ai pas trouvé un seul insensible à la prière!

Oh! que ceux qui veulent enlever à notre Sauveur Sa divinité, Sa grâce, Sa puissance, mettent à l’épreuve tout à nouveau la prière faite en Son nom, Sa force transformatrice, Sa parole vivifiante!

Blanche Peyron-Roussel.

En avant 1904 03 19



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