COUPS RÉPÉTÉS
Par le Commissaire.
Voici, je me tiens à la porte, et je frappe. (Apocalypse III. 20.)
C'est après avoir adressé aux indifférents cet avertissement solennel: Ainsi, parce que tu es tiède, et que tu n’es ni froid ni bouillant, je te vomirai de ma bouche, que le Seigneur, dans un dernier et suprême effort d’amour, ajoute:
«VOICI, JE ME TIENS À LA PORTE ET JE FRAPPE».
D’un côté le soldat du Christ presque ressaisi par le monde, ses convoitises et ses péchés, l’âme sur le point de sombrer;
de l’autre le Christ plaidant avec elle, pour la dernière fois peut-être, et lui offrant son aide et son pardon.
Un si grand amour ne peut se mesurer qu’à un si grand danger!
En effet, que peut-on concevoir de plus triste:
– qu’une âme sauvée retournant aux péchés qu’elle avait délaissés,
– quoi de plus amer qu’un racheté du Christ trahissant son Sauveur,
– quelle position plus périlleuse que celle d’une âme née à la vie, à la paix, au Ciel, mais retournant à la mort, aux tourments, à l’enfer!
Christ frappant à la porte du cœur qui le renie, quelle tendresse! Son enfant lui préférant le monde et le péché, quel lâche abandon!
* * *
Pourquoi frappe-t-il encore, Lui, le Seigneur de gloire?
Parce qu’il aime encore sa brebis qui s’égare!
Pourquoi persévère-t-il dans ses efforts?
Parce qu’il sait qu’à moins qu’elle ne revienne à lui repentante et brisée, prête à délaisser le mal, le péché, le sort le plus terrible lui est réservé: L’ABANDON FINAL, LA CONDAMNATION ÉTERNELLE, LE DÉSESPOIR, L’ENFER.
Oh! quelle sombre perspective que celle du rétrograde! Quel sort plus affreux que celui d’une âme ayant connu Dieu, goûté les joies célestes, entendu résonner à ses oreilles l’harmonie céleste, mais qui est retournée â ses péchés et à ses vices!
Quel sombre avenir: ce ciel qu’on avait entrevu, mais maintenant perdu! cet enfer qu’on avait fui, mais dont on est redevenu la victime!
* * *
Et cependant Christ frappe, Il frappe encore à la porte de ce cœur rebelle, de cette âme sur le point de sombrer.
* * *
Il frappe d'abord doucement par les souvenirs bénis du passé:
«Pense à ce que j’ai fait pour toi», semble-t-il dire;
«Souviens-toi de ton passé, souviens-toi du Calvaire, des épines, de l’angoisse de la Croix, du Sang versé pour toi! Souviens-toi des maux que j’ai subis pour toi.
Le Fils de Dieu agonisant pour tes péchés ne te parle-t-il pas en ce moment?
Pourquoi le trahir encore, Lui qui a tant aimé?»
Il frappe ensuite, mais avec quelle douceur infinie! en faisant sentir à son enfant tout ce qu’il a perdu de paix, de joie, de bonheur réel depuis le jour où il a abandonné son Maître.
Il frappe encore — ce coup ne te réveille-t-il pas, mon frère, ma sœur? — par la vision d’un Paradis perdu, mais qui peut être reconquis.
Il
frappe
toujours
attendant que l’âme s’ouvre à nouveau, que le cœur s’attendrisse
et s’humilie: Il désire tant le posséder tout entier! PUIS QUAND
L’ÂME S’OUVRE ENFIN. Il LA BÉNIT, LA SAUVE.
IL FRAPPE UNE DERNIÈRE FOIS et, lors que sourde à ses appels, l’âme reste close à jamais, n’ayant d’yeux que pour le monde, de sens que pour le péché, de cœur que pour ce qui passe, Il murmure comme un doux zéphir: «JE T’AIME» ET... IL S’EN VA.
En avant 1904 03 05
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