Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

EN AVANT

ET

CRI DE GUERRE

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LA FÊTE DES PAUVRES


La Noël est une fête qui nous offre chaque année des occasions uniques pour annoncer la «bonne nouvelle» aux pauvres et aux enfants. Aussi, cette année, en avons-nous profité pour atteindre le plus grand nombre possible.

Ne pouvant facilement les faire venir dans notre salle, et, d’autre part, beaucoup d’entre eux n’ayant aucune joie de famille, aucune fête leur rappelant la naissance d’un Sauveur, nous avons organisé une soirée familière, un banquet des pauvres.

Dans les carrefours, dans de sombres rues, de noires mansardes, comme sur les places publiques, on est allé les inviter. Joyeusement les pauvres ont répondu à notre invitation. Ils étaient là autour des tables bien garnies, les yeux brillants de joie et un heureux sourire sur les lèvres.

L’appétit marchait très bien. L’un d’eux m’a dit qu’il n’avait pas mangé depuis deux jours, et peut-être n’était-il malheureusement pas le seul. La soupe, les légumes, la viande, tout disparaissait comme par enchantement.

LA SEULE MALADIE D’ESTOMAC QU’ONT CES GENS, C’EST LA FAIM, la faim qui les tenaille et souvent, hélas! qui est leur mauvais génie.

Une fois l’estomac rempli, c’est avec une religieuse attention qu’ils écoutèrent nos chants, nos poésies et nos allocutions.

Bien des larmes coulaient sur les visages. J’ai vu une mère, tenant deux enfants dans ses bras, qui ne cessait de pleurer durant toute la réunion.

De nouveaux horizons se sont certainement ouverts devant plusieurs âmes et l’éternité nous révélera le fruit de notre travail. 


Presque dans chaque Corps quelque chose de spécial a été fait, et, béni soit Dieu, le succès à couronné nos efforts. Comme je l’ai déjà dit ailleurs, la crèche de Bethléem sera toujours: AIDER LE PAUVRE, LUI PROCURER DE LA JOIE EN SOULAGEANT UN PEU SES MISÈRES.

Et, en agissant ainsi, on éprouve soi-même une joie suprême.

À ce propos, il me revient à l’esprit une petite histoire que j’ai entendu raconter dans mon enfance.

«C’était en hiver. Un voyageur du nom de Jean traversait un jour une haute montagne. Il y avait beaucoup de neige, il faisait très froid, il n’avançait que péniblement, et ses membres commençaient à s’engourdir, lorsque soudain Jean rencontra sur son chemin, couché dans la neige, un homme à demi mort.

S’étant arrêté, il l’examina, et puis, avec énergie, frotta son corps jusqu’à ce que le malheureux fût comme ressuscité. Le sang avait repris sa circulation normale, et, ô merveille! Jean s’était lui-même réchauffé».

C’est ainsi qu’en s’oubliant soi-même on reçoit de précieux encouragements. N’est-ce pas là une fidèle image de ce que nous avons désiré faire pendant les fêtes de Noël? Mais laissons plutôt parler nos Officiers. Écoutez-les:


À Nîmes, le Seigneur nous a abondamment bénis.

Il nous a fait au delà de notre foi. Le soir des pauvres, malgré une pluie battante, et on sait comme les Nîmois ont peur de la pluie — nos convives attendaient derrière la porte bien avant l'heure. Aussi en un instant la salle fut bondée. Quelle joie franche, familière pendant le repas! Quel entrain dans le chant du cantique:

Proclamons à la France

Jésus, sa délivrance,

Il donne la liberté,

La seule fraternité

Et l’amour le plus beau,

Le plus digne d’envie.

«Oh! c’est magnifique! c’est merveilleux»: disaient les Soldats ou amis qui arrivaient en retard. Eh! oui, c’est magnifique de faire quelque chose pour ceux qui souffrent...

La Capitaine Ballé, de Lyon:

Nous avons été bénis; tout particulièrement par le moyen des fêtes nous avons réalisé que DIEU SE MANIFESTE DANS LA FAIBLESSE. Le soir des pauvres, c'était un beau coup d’œil de voir chacun à l’aise par l'accueil amical qui leur était fait. L’attitude de ces gens qui semblaient entendre parler de Jésus pour la première fois était inspirante. Nous croyons que des fruits éternels ressortiront de cette soirée.

L’Enseigne Sahy, de Saint-Étienne:

Nous avions 40 personnes qui avaient l’air heureuses et qui ont écouté avec beaucoup d’intérêt tout ce qui a été dit.

L’Enseigne Loosli d’Audincourt nous parle d’un chocolat et il ajoute:

La fête des pauvres fut aussi très réussie. Nous avions 140 personnes, grands et petits. Depuis 4 h. 1/2 jusqu’à 7 heures du soir, nous en avons fait ce que nous en avons voulu. Ce fut réellement charmant. Tous étaient si contents. Beaucoup de bien, a été fait et de nouvelles sympathies gagnées, ainsi que de nouveaux auditeurs.

De Lamastre, la Capitaine Combes écrit:

Oui, nous avons eu une bonne soirée avec les pauvres... Tout était nouveau pour eux. Ils ont beaucoup joui de la soirée et nous ont promis de revenir, surtout... lorsqu’il y aura une fête.

De Rochefort, la Capitaine Nydegger écrit:

La soirée avec.les pauvres a été magnifique. La plupart des convives n’avaient jamais assisté aux réunions de l’Armée du Salut. Aussi ont-ils été vivement touchés par les prières et les chants. Les larmes coulaient avec abondance. Tous, ou presque tous ont promis de revenir aux réunions. C’était beau de voir leurs visages illuminés de joie. Ce qui les a le plus touchés au repas, c’était de voir les nappes blanches sur les tables et de se voir servir par les Officières. Il paraît que nous leur avons fait un grand honneur. Aussi ont-ils crié: «Vive l’Armée du Salut!» à plusieurs reprises.

De Bordeaux, le Capitaine Boisson nous écrit:

«Glorieuse soirée. Nous avons fait beaucoup d'heureux. Personne n’a été renvoyé, et nous avons eu pour tous. Nous avons tous réalisé les paroles de saint Jacques disant: Celui qui met en pratique, trouvera le bonheur dans son activité même. Nous avons distribué 45 kilos de pain, 15 kilos de viande, deux ou trois assiettées de soupe, du café et des gâteaux.

Un silence parfait, une joie insondable à décrire autant chez les Soldats que chez les invités».

Les Oflicières d’Alais, Capitaine Courbier et Lieutenante Blein, écrivent:

«L’idée de faire un repas pour les pauvres a été excellente. Nous sommes assurées que cela aura fait beaucoup de bien à Alais. C’était si facile de collecter! Nous l’avons fait tout en dehors de l'œuvre. Chacun a été si sympathique que tout a marché comme sur des roulettes. Nous avons eu une très jolie soirée; tous furent heureux et reconnaissants du bon repas. Ils écoutèrent ensuite avec émotion le Brigadier Châtelain, qui sait trouver le chemin des cœurs.»

Le Capitaine Crausaz, de Valence:

«...Il est vrai que nous n'avons pas vu d'âmes au banc des pénitents, mais l'effet produit sur ces braves gens a été excellent. Ces deux fêtes ont sérieusement contribué à gagner leur sympathie pour l’Armée. Toutes les mamans du voisinage nous ont chaudement remerciés et nous aurons désormais libre entrée dans leurs demeures. Ce sera, nous le croyons, le point de départ, d’une œuvre de salut qui va se poursuivre dans ce quartier. Nous sommes reconnaissants envers le Seigneur de l’occasion qu’il nous a donnée de faire des heureux.»

L’Enseigne Blachier, des Bordes, dans l’Ariège, où presque tout le monde est pauvre, écrit:

«Hier, à deux heures, nous avons eu le repas des enfants; 57 étaient là. C’était un coup d’œil superbe. Les enfants ne repartirent pas avec la faim. Les parents ont été touchés de la bonté des Salutistes.»

L’Enseigne S. Blanc, de Die:

«Les deux fêtes pour les pauvres laisseront des traces lumineuses dans ce poste. Les convives envoient à ceux qui en ont été les auteurs les remerciements les plus affectueux: aux Commissaires Cosandey, aux Brigadiers Châtelain, au Major Peyron... Ce repas a non seulement fait du bien aux pauvres, mais aussi aux camarades et aux amis. «Ah! c’est ainsi, a-t-on dit, que l’Armée du Salut fait. Bravo! Bravo!»

L’Enseigne Steinmann, de Grenoble:

«Le repas des pauvres a été notre joie: 40 avaient répondu à l’invitation. Chacun a aidé de tout son cœur, de sorte que nous n’avons pas eu trop de travail. M. et Mme... sont venus et ont été vivement intéressés. Madame a aidé à servir et Monsieur a adressé quelques paroles aux convives. Les pauvres ont été très contents de ce repas... Il ne nous reste qu’un délicieux souvenir de cette soirée.»


Et maintenant, je pourrais encore vous parler de Marseille, de Mazamet, du Mas-d’Azil, de Saint-Jean-du-Gard qui ont aussi fait quelque chose pour les pauvres. Et puis de Ganges, de Saint Hippolyte, qui ont eu de beaux arbres de Noël; mais mon rapport est déjà bien long. Je dois boucler en vous disant que nous avons donné 1.200 repas et collecté 650 francs (en 1904) à cet effet. Gloire à Jésus!

C’est peu de chose, bien peu de chose en comparaison de tout ce que nous aurions pu faire dans cette direction-là. Mais c’est un commencement, et comme le dit le L.-Colonel:

«L'ANNÉE PROCHAINE NOUS FERONS MIEUX.»

En avant 1904 01 23


 

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