UN JOUR À LA FOIS
J. R. Miller
1903
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«Il y eut un soir et il y eut un matin: c'est le premier jour.» Genèse 1:5
L'un des secrets d'une vie heureuse et belle est de VIVRE UN JOUR À LA FOIS.
Si nous l'apprenions, cela nous éviterait l'inquiétude qui, chez tant de gens, gâche les journées, et ajouterait de façon incommensurable à la valeur du travail que nous accomplissons. Car, en réalité, nous n'avons rien d'autre à faire chaque jour que d'accomplir un peu de la volonté de Dieu pour ce jour-là.
Si nous faisons bien, nous n'avons absolument rien d'autre à faire.
Le temps nous est donné en jours. Il en a été ainsi dès le début.
Il n'est pas nécessaire d'essayer de comprendre quel était le «jour» au cours duquel Dieu a créé l'univers – nous pouvons laisser cette question aux scientifiques et aux théologiens; mais il est intéressant de savoir que chaque jour a eu sa part de responsabilité dans cette œuvre stupéfiante.
À la fin de chaque période de création, nous lisons: «Il y eut un soir et il y eut un matin, un jour». IL EN A TOUJOURS ÉTÉ AINSI.
Pour nous, le temps se mesure en jours. Chaque jour a sa propre tâche, quelque chose qui se situe entre le lever et le coucher du soleil, qui ne peut pas être fait du tout s'il n'est pas fait dans ses propres heures.
«Il y eut un soir et il y eut un matin, un jour, un second jour, un troisième jour».
Ce découpage du temps en petites portions quotidiennes a une signification bien plus grande que ce que nous avons l'habitude de penser.
D'une part, elle illustre la douceur et la bonté de Dieu. La vie aurait été intolérablement lourde si l'année, au lieu du jour, avait été l'unité de division. Il aurait été difficile de porter un lourd fardeau, d'endurer un grand chagrin ou de poursuivre une tâche difficile pendant une période aussi longue.
Comme notre travail commun serait ennuyeux – s'il n'y avait pas de pause, si nous devions garder la main à la charrue pendant toute une année! Nous ne pourrions jamais poursuivre nos luttes, nos batailles, nos souffrances, si la nuit ne s'installait pas miséricordieusement dans l'obscurité et ne nous invitait pas à nous reposer et à renouveler nos forces.
Nous ne comprenons pas à quel point la brièveté de nos jours est une grande miséricorde pour nous.
S'ils étaient deux fois plus longs qu'ils ne le sont, la vie serait intolérable.
Souvent, lorsque le soleil se couche, nous avons l'impression que nous n'aurions guère pu faire un pas de plus. Nous nous serions évanouis dans la défaite si l'appel au repos n'était pas arrivé à point nommé.
La nuit, avec ses ténèbres, semble être une tache sur la blancheur du jour. Elle semble tomber sur notre chemin comme une interruption de notre activité, nous obligeant à abandonner notre travail alors que nous sommes en plein milieu de celui-ci, ne le laissant qu'à moitié terminé.
Elle semble nous faire perdre un temps précieux accaparant la moitié des heures. Combien de choses nous pourrions accomplir, disons-nous parfois, si le soleil ne se couchait pas, si nous pouvions continuer sans relâche! La nuit jette son lourd voile sur les belles choses de ce monde, les cachant à nos yeux.
Pourtant, la nuit n'est pas une tache sur la splendeur du jour, ni un voleur de temps, ni un gâcheur d'heures dorées, ni un obscurcisseur de beauté.
Elle révèle autant de beauté qu'elle en cache, car à peine le soleil s'est-il couché, laissant dans l'obscurité la splendeur des paysages, des jardins et des forêts de la terre, qu'éclate à nos yeux l'autre splendeur du ciel rempli d'étoiles glorieuses.
Lorsque le privilège du travail est interrompu, Dieu offre une autre bénédiction, celle du sommeil.
On peut calculer avec une certitude mathématique que c'est une perte de temps que de passer un tiers de la journée dans l'oisiveté du sommeil. Mais ces heures, qui semblent perdues, pendant lesquelles nous semblons ne rien faire, nous apportent de nouveaux cadeaux de la part de Dieu.
Une ancienne version rend le verset du psaume: «Il donne son bien-aimé dans le sommeil».
(En vain vous levez-vous matin, vous couchez-vous tard, Et mangez-vous le pain de douleur; Il en donne autant à ses bien-aimés pendant leur sommeil. Psaume 127: 2. V. Segond)
Nous nous couchons, épuisés par les efforts et les luttes de la journée. Puis, pendant que nous dormons, Dieu vient à nous dans le silence et l'immobilité, et remplit à nouveau les fontaines vides.
C'est vraiment une nouvelle création qui s'opère en nous pendant notre sommeil – UN MIRACLE DE RENOUVELLEMENT ET DE RESTAURATION! Nous mourons, pour ainsi dire, et nous sommes ramenés à la vie.
Nous percevons ainsi la grâce de la bienveillance divine qui nous accorde du temps en courtes périodes de jours, que nous pouvons facilement traverser, et non en longues années, où nous nous évanouirions et tomberions en cours de route. Cela nous permet de traverser toutes les longues années sans être accablés, car nous ne recevons jamais plus que ce que nous pouvons faire entre le matin et le soir.
Non seulement les jours sont courts, afin que nous puissions poursuivre jusqu'au soir notre travail ou notre fardeau, mais ils sont séparés comme par un mur infranchissable, de sorte qu'il ne peut y avoir de débordement d'un jour sur l'autre en matière de soins ou de responsabilités.
La nuit dépose son rideau sombre entre les jours, de sorte que nous ne pouvons voir aujourd'hui rien de ce qui se trouve dans le lendemain. Notre Seigneur nous a enseigné que nous péchons si nous nous laissons porter par le poids d'un jour, si ce n'est celui-ci.
«Ne vous inquiétez donc pas du lendemain;
car le lendemain aura soin de lui-même.
A chaque jour suffit sa peine.»
(Matthieu 6: 34. V. Segond)
Si nous nous permettons d'emprunter l'anxiété du lendemain, nous nous apercevrons que nous avons un fardeau plus lourd que nous ne pouvons le porter.
La seule véritable façon de vivre est donc de vivre un jour à la fois. Cela signifie que nous devons donner toutes nos forces au travail du jour présent, que nous devons terminer les tâches de chaque jour avant la tombée de la nuit, en ne laissant rien en suspens au coucher du soleil que nous aurions dû faire.
Puis, lorsqu'un nouveau matin se lève, nous devrions accepter ses devoirs, la part de la volonté de Dieu qu'il déroule pour nous, et faire tout ce qu'il nous est donné de faire.
Soyons sûrs aussi qu'il y a quelque chose à faire à chaque instant, et que si nous gaspillons une partie de notre journée, nous ne pourrons la compléter.
Nous devrions apporter toute l'énergie et toute l'habileté de notre esprit, de notre coeur et de nos mains à notre tâche au fur et à mesure que nous l'entreprenons, sans rien faire de négligent ou d'imprudent.
Nous pouvons alors remettre notre journée entre les mains de Dieu à la tombée de la nuit, avec confiance, en disant: «Père, j'ai achevé le travail que tu m'as donné à faire aujourd'hui».
Mais nous ne devrions jamais nous inquiéter d'hier ou de demain.
HIER est passé et nous ne pourrons jamais le récupérer pour y changer quoi que ce soit. Il est donc inutile de perdre un moment de temps ou une particule de force à s'en préoccuper.
DEMAIN n'est pas encore à nous, et nous ne pouvons pas toucher à sa vie – jusqu'à ce qu'il devienne notre aujourd'hui.
Dieu veut que nous mettions toute notre énergie à accomplir le travail du jour présent.
Si nous faisons cela, nous aurons suffisamment à faire pour remplir toutes les heures et pour engager notre meilleure énergie, nos compétences et nos forces.
De cette façon aussi, nous préparerons au mieux demain.
Un devoir d'un jour négligé
prépare le lendemain à la confusion et à la surcharge.
Les jours sont tous tissés ensemble dans le plan de Dieu, chacun suivant le jour précédent et s'intégrant dans le jour qui le suit. Chacun reprend le travail que le jour précédent a mis à ses pieds et le porte en avant pour le remettre à celui qui attend.
Une journée gâchée ou vide, où qu'elle soit,
gâche la trame, perd le fil.
Si nous apprenons bien la leçon qui consiste à VIVRE UN JOUR À LA FOIS, sans nous préoccuper d'hier ou de demain, nous aurons trouvé l'un des grands secrets de la paix chrétienne.
C'est la façon dont Dieu nous enseigne à vivre.
C'est la leçon de la Bible et de la nature.
Si nous l'apprenons, elle nous guérira de toute anxiété, elle nous sauvera de toute hâte fiévreuse, elle nous permettra de vivre avec douceur dans n'importe quelle expérience.
Fin
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