«C'EST ICI VOTRE HEURE»
(Lisez Luc XXIII, 26-43.)
Le Seigneur l'avait dit: «C'est ici votre heure et le pouvoir des ténèbres» (Luc XXII, 53).
Mais, inattentifs à ses paroles, ne songeant qu'à se débarrasser de Lui, le peuple poursuit aveuglément son chemin d'opposition effrénée et d'inimitié contre Dieu.
Trois fois l'occasion leur est donnée de revenir à d'autres sentiments; mais, tandis que l'indifférence du gouverneur est aussi évidente que l'insolence désappointée d'Hérode, la voix du peuple, chaque fois, ne fait que s'élever plus haut pour demander la mort du Messie; et, pour l'apaiser, Pilate relâche le coupable Barabbas, qu'on lui demande, et il livre Jésus à la volonté de la foule.
C'est une heure terrible, une heure de violence.
Peu leur importe l'homme qu'ils rencontrent, pourvu qu'ils puissent le forcer à leur venir en aide dans leur iniquité. Leur heure avait sonné, et ils s'accordent TOUS pour rejeter et outrager Christ, avec cette seule différence que les Juifs agissent avec plus de connaissance que les Gentils, quelle que soit d'ailleurs, chez les filles de Jérusalem, l'expression des sentiments naturels suscités par les circonstances.
Elles ne comprenaient ni la croix de Christ, ni le sort terrible qui les attendait. On peut être touché de compassion, comme si on était supérieur à Christ, et tomber sous le jugement qui est la conséquence de son rejet et de sa mort. Aucune humiliation ne peut jamais empêcher Jésus de s'occuper des autres de la part de Dieu.
Hélas! ce n'était pas seulement sur Pilate et Hérode, ou sur les principaux sacrificateurs que le jugement allait tomber, mais aussi sur les femmes qui se lamentaient et pleuraient sur Jésus, dans l'ignorance de leur propre condition et de la condamnation qui pesait sur elles.
Conscience naturelle, sentiments naturels, tout est insuffisant, tout, sauf la gloire de Dieu en Christ.
Et si Lui, le vivant et vrai Cep, qui portait réellement du fruit pour Dieu, était traité ainsi, quelle serait la part des branches stériles ou du bois sec?
Où paraîtra l'impie et le pécheur?
L'homme rejette le bois vert et Dieu rejette le bois sec.
La vie était là, dans la personne de Jésus, et ils n'en ont pas voulu, et par conséquent sont rejetés; cette vie est là maintenant pour nous, mais on ne peut y avoir part que par un Christ mort et ressuscité.
Vers. 32-43. Toutes les espérances de délivrance présente sur la terre sont mises de côté: il faut que Christ meure. Mais si Dieu nous montre jusqu'à quel point l'homme peut s'abaisser moralement, II nous montre en même temps que Christ, dans sa grâce, peut descendre plus bas encore: «A moins que le grain de froment ne tombe en terre et ne meure, il demeure seul» (Jean XII, 24).
C'est pourquoi toutes les fois qu'on tentera (et c'est l'effort de la religion de l'homme) d'associer un Christ vivant, avant la mort et la résurrection, avec des pécheurs vivants, vous pouvez compter qu'on est dans l'erreur; car c'est unir le péché avec le Seigneur du ciel, et c'est nier que les gages du péché c'est la mort.
Si Christ était descendu de la croix, comme les gouverneurs et le peuple l'y invitaient, en se moquant de Lui, Il ne nous aurait pas délivrés.
Il faut que Jésus passe par la mort et qu'il prenne une place plus élevée dans la résurrection; et là Il nous prend à Lui.
L'incarnation par elle-même ne peut pas donner la vie et la rédemption à ceux qui sont morts dans leurs fautes et dans leurs péchés; il faut que Dieu nous donne une place bien au delà, DANS la vie de résurrection en Christ.
Ainsi donc, en dépit de la grâce de Jésus qui intercède, les Juifs et les Gentils s'associent pour l'outrager et le crucifier.
Aucune douleur, aucune honte, aucune souffrance n'accable assez le cœur naturel pour qu'il n'insulte pas Jésus: un malfaiteur crucifié l'outrage!
II y a, dans tout cœur non renouvelé, une opposition instinctive contre Jésus, que la puissance de l'amour, qui faisait descendre le Fils de Dieu jusque dans la plus profonde humiliation pour souffrir la colère due au péché, n'apaise même pas.
Ne dites pas que vous soyez en aucune manière meilleurs que ce misérable: «II n'y a pas de juste, non pas même un seul; il n'y a personne qui ait de l'intelligence, il n'y a personne qui recherche Dieu; ils se sont tous détournés du droit chemin; ils se sont tous ensemble rendus inutiles»; — en un mot, «il n'y a pas de différence!»
Vous êtes aussi mauvais devant Dieu que le brigand impénitent et moqueur.
Mais Dieu avait préparé, même ici, de la consolation pour Jésus, dans l'œuvre de sa grâce envers un pauvre pécheur. Voyez en effet l'autre brigand.
La grâce opère dans un homme, dont la condition est tout aussi dégradée que celle de celui qui, en dépit de sa propre agonie et de son sort ignominieux, trouvait son plaisir à outrager le Seigneur de gloire: tous les deux, en effet, ils avaient insulté Christ (Marc XV, 32). Mais quoi de plus glorieux et de plus certain que le salut de ce malfaiteur, lorsqu'il s'incline devant le nom de Jésus? IL S'EN VA AU PARADIS AVEC LE SEIGNEUR, QU'IL RECONNAÎT COMME TEL.
C'est ici le seul moyen
par lequel un pauvre pécheur, quel qu'il soit, peut être sauvé;
IL N'Y A QU'UN SEUL ET MÊME SALUT POUR TOUS.
Le temps eût manqué, évidemment s'il se fût agi de faire quoi que ce soit; mais TOUT EST FAIT POUR LE PÉCHEUR QUI CROIT.
Ce même jour, ses jambes devaient être brisées, comment pouvait-il entrer dans le paradis?
Christ opérait sa délivrance par sa propre mort, et l'œil du brigand était ouvert pour saisir par la foi ce que Christ accomplissait.
Tout n'était pas joie. La conscience était réveillée; il y avait un vrai sentiment du bien et du mal, car, en esprit, le brigand avait trouvé la présence de Dieu; et ainsi, oubliant ses propres circonstances, il devenait «prédicateur de justice». Il reconnaît la justice de sa, propre condamnation dans la sincère et loyale confession de son péché; mais quel témoignage merveilleux il rend en même temps à Christ! «Celui-ci n'a rien fait qui ne se dût faire».
Il parle comme s'il avait connu Christ toute sa vie; il a une perception divine du caractère du Sauveur.
Le brigand croyait que Jésus était le Seigneur, le Fils de Dieu, et il pouvait répondre ainsi, avec assurance, pour ce qu'il avait été comme homme.
Son cœur se tourne instinctivement vers Christ.
Rien ne le distrait de Lui; et il devient le glorieux témoin de la grâce parfaite et du salut éternel par le sang de Jésus.
(Extrait.)
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