LA CONDUITE DE L’HOMME ENVERS DIEU

ET

LA CONDUITE DE DIEU ENVERS L'HOMME

À l'Église chrétienne réformée de Nérac

***

«VOICI, JE ME TIENS À LA PORTE, ET JE FRAPPE;

si quelqu’un entend ma voix et m’ouvre la porte,

j’entrerai chez lui, je souperai avec! lui, et lui avec moi.»

Apocalypse III, 20.


Ce n’est que sur la première partie de ce texte que nous avons dessein d’appeler votre attention aujourd’hui. «Voici, je me tiens à la porte, et je frappe.» Dans une autre méditation, si le Seigneur nous en accorde la grâce, nous pourrons en reprendre la suite.

Avant tout, il nous convient de déterminer de qui ces paroles sont émanées, et c’est une chose assez facile, puisqu’elles font partie d’une lettre écrite à l’Ange ou au Pasteur de l’église de Laodicée, et que nous trouvons en tête de cette lettre: «L’Amen, le témoin fidèle et véritable, le commencement de la créature de Dieu, dit ces choses.»

À de semblables titres, on doit reconnaître Jésus-Christ à qui seul ils peuvent convenir, et qui, dans ce livre des Révélations de saint Jean, prend tour à tour une multitude de noms très-significatifs, qui le caractérisent comme étant le centre de toutes les perfections, «Dieu sur toutes choses, béni aux siècles des siècles.»

C’est donc Jésus-Christ, «la Parole faite chair,» «le vrai Dieu et la vie éternelle,» qui nous parle et qui nous dit: «Voici, je me tiens à la porte, et je frappe.»

Nous disons que c’est à nous qu’il parle, car, mes chers Auditeurs, quoique primitivement adressées au pasteur d’une église de l’Asie Mineure, ces paroles sont d’une application générale, et s’adressent à tous les hommes sans exception.

Du moment qu’elles se trouvent consignées dans le Volume sacré, elles font partie de cet Évangile éternel qui intéresse toute créature vivante, et qui doit être prêché jusqu’aux extrémités de la terre, «à toute nation, à toute tribu, à toute langue et à tout peuple.»

Mais qu’a voulu dire le Seigneur par ces paroles: «Je me tiens à la porte, et je frappe?»

Il a voulu exprimer la conduite de l’homme envers lui, sa propre conduite envers l’homme, et par le mot «VOICI,» qui précède sa déclaration, il a voulu nous rendre attentifs à l’une et à l’autre.

C’est au développement de ces trois idées que nous allons nous attacher.

Puissent notre ingratitude et notre culpabilité vis-à-vis de notre Créateur, et sa bonté et Son support miséricordieux à notre égard, ressortir tellement de cette méditation, qu’il n’y ait personne ici qui n’en soit salutairement touché, et qui n’en prenne occasion,

ou de se convertir en embrassant cordialement les promesses de l’Évangile,

ou de se dévouer, par une nouvelle consécration, à servir Dieu et à le glorifier par sa vie tout entière!

Amen.

* * *

La conduite de l’homme envers Dieu n’est ici mentionnée que d’une manière implicite, et nous pouvons cependant, en y faisant attention, nous en faire des idées justes et précises.

Qu’est-il dit en effet?

Que Dieu se «tient à la porte et qu’il frappe

Mais à la porte de qui se tient-il et frappe-t-il?

À la porte de l’homme, sans doute, puisqu’il est ajouté immédiatement après, que «si quelqu’un entend sa voix, et lui ouvre, il entrera chez lui

Bien que ce soit ici un langage figuré, il n’y a personne qui ne puisse aisément en comprendre la signification. L’homme y est représenté comme une maison, comme un sanctuaire où Dieu veut habiter; et ce n’est pas une chose extraordinaire dans la Bible qu’une semblable comparaison.

Quelquefois, notre corps en particulier, considéré par rapport à l’âme qu’il renferme, est nommé, par les Écrivains inspirés, «une maison,» «une tente d’argile,» «un tabernacle.» Et d’autres fois, l’âme ou l’homme tout entier, par rapport à Dieu qui en est le Maître souverain, est appelé «un temple» ou «une maison spirituelle

Lors donc que le Seigneur déclare qu’il se «tient à la porte,» n’exprime-t-il pas qu’il est dehors?

Et quand il ajoute qu’il «frappe,» n’indique-t-il pas que la porte est fermée, et qu’il y a obstacle à ce qu’il entre librement?

Or, mes chers Auditeurs, ce sont là les DEUX GRANDS TRAITS DE LA CONDUITE DE L'HOMME, envers Celui qui lui «donne la vie, le mouvement et l’être

1) Le premier de ces traits, c’est qu’il a mis Dieu dehors de chez lui, il l’a chassé, il lui a dit en quelque sorte: «Retire-toi, je ne veux pas que tu règnes en moi.» Il avait été créé pour lui servir de temple, et pour être comme le pavillon de sa gloire. On n’a pour s’en convaincre qu’à considérer ce qui est dit du chrétien ou de l’homme régénéré.

«Ne savez-vous pas,» écrivait saint Paul aux Corinthiens, «que vous êtes le temple de Dieu, et que son Esprit habite en vous (1 Corinth. III, 16.)

«Vous êtes édifiés ensemble, disait-il aux Éphésiens «pour être un tabernacle de Dieu en esprit (Éphésiens II, 22.)

Et ailleurs, il exhorte ceux de Corinthe à «s’examiner pour savoir s’ils ont la foi, ou pour reconnaître si Jésus-Christ est en eux (2 Corinth. XIII, 5.)

Il ne peut y avoir aucun doute d’après ces passages, puisque l'effet du Christianisme est, en sauvant l’homme, de le remettre en communion avec son Créateur, comme il y était en sortant de ses mains et avant sa chute dans le péché; il ne peut y avoir aucun doute, disons-nous, qu’originairement Dieu n’habitât en l’homme.

Oui, certainement, il y habitait, ne serait-ce que par les traits de son image et de sa ressemblance dont il l’avait empreint.

Il y habitait, ne serait-ce que par l’innocence et la sainteté dont il lui avait fait comme une couronne d’honneur, qui ombrageait son front.

Il y habitait, ne serait-ce que par «Cet esprit de vie,» émanation de lui-même, qu’il avait soufflé dans ses narines, et par lequel il avait été créé en âme vivante.

Il habitait dans son intelligence par les justes notions qu’il lui avait données de son être, de sa grandeur et de sa majesté.

Il habitait dans sa mémoire par le souvenir toujours présent que l’homme conservait de ses bienfaits.

Il habitait dans son cœur, enfin, par l’amour et par tous les sentiments de reconnaissance, de respect et de soumission qu’il ne cessait de lui inspirer, et dont l'homme innocent se plaisait à lui faire hommage.

Mais s’il est vrai qu’à tous ces égards Dieu habitait primitivement dans l’homme, il n’est que trop vrai aussi qu’à tous ces égards l’homme prévaricateur (transgresseur de la loi divine) a chassé Dieu hors de lui.

– Il s’est dépouillé de son auguste image;

– il a jeté loin de lui toute vraie justice et toute vraie sainteté;

– il a éteint l’esprit vivifiant qu’il en avait reçu;

et, par une apostasie aussi complète que criminelle, il a banni Dieu de son intelligence, de sorte qu’il ne le connaît plus, et qu’ayant son entendement tout rempli de ténèbres, il ne s'en fait plus que des idées fausses ou inexactes;

il l'a banni de sa mémoire, de sorte qu’insensible à ses bienfaits de tous les jours, il les laisse passer inaperçus, sans en tenir compte, sans en garder le moindre souvenir, et qu’il peut se lever, se coucher, travailler, se livrer au repos, manger, boire et se réjouir, sans être préoccupé de sa pensée, et sans se retracer les témoignages de sa bonté.

Il l’a banni de son cœur, enfin, de sorte que, si on excepte un sentiment de crainte servile, dont il ne peut toujours se défendre, il n’éprouve pour lui aucune affection, ni respect, ni amour, ni gratitude, ni confiance, ni désir de lui plaire; et qu’il n’y a aucune exagération à dire qu’il vit sans Dieu dans le monde.

C’est ainsi que l’homme a rompu toute relation avec l’Auteur de son existence;

c’est ainsi qu’il l’a chassé hors de lui.

Mais à ce premier trait de sa conduite, un second trait doit être ajouté.

2) Non seulement l’homme a mis Dieu dehors, et s’en est éloigné autant qu’il a pu, mais il n’est nullement disposé à s’en rapprocher, à le rappeler, pas même, à le laisser rentrer lorsque Dieu se présente de lui-même, et s’offre à rétablir ses premiers rapports avec lui.

L’ayant chassé, il a fermé sa porte, et il refuse de l’ouvrir, opposé qu’il est à ce que son Seigneur rentre, et reprenne en lui la place dont il n’aurait dû jamais être dépossédé. C’est encore ce qui est bien clairement donné à entendre par ces mots: «Je me tiens à la porte, et je frappe.»

Et n’est-ce pas aussi ce qui est attesté par l’expérience de tous les jours?

Est-il rien qui soit mieux démontré, par les faits, que la mauvaise volonté des hommes à connaître le vrai Dieu, et que la préférence qu’ils donnent aux ténèbres sur la lumière?

Si l’on considère, d’un côté, les voies diverses par lesquelles l’Etre infini s’est rendu manifeste, et, d’un autre côté, l’ignorance, les erreurs, les superstitions, l’incrédulité et les préjugés de toute sorte, qui règnent à son égard dans le monde, n’est-on pas obligé de conclure qu’il doit y avoir nécessairement dans les hommes une répugnance extrême à recevoir la connaissance de Dieu, et qu’ils lui ferment la «porte,» c’est-à-dire, tout ce qui pourrait lui donner passage, pour arriver dans le fond de leur âme?

Eh quoi! au magnifique livre de la nature, qui en parle dans un langage si clair et si énergique, a été ajoutée, avec le témoignage de la conscience, la révélation positive de l’Ancien et du Nouveau-Testament; et néanmoins des multitudes, comprenant des individus de tout rang, de toute classe, de tout degré de culture, ignorent ce que Dieu est, quels sont ses droits, et ce qui lui est dû!

Eh quoi! le Puissant, le Juste, le Saint, le Bon et le Miséricordieux, est ignoré, méconnu près de nous comme loin de nous, par l’immense majorité des hommes, qui ne l’adorent, ni ne le servent comme Dieu!

– Et cependant «les cieux racontent sa gloire, et l’étendue donne à connaître l’œuvre de ses mains (Ps. XIX, 2.)....»

– Et cependant «ses perfections invisibles, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’œil depuis la création du monde, quand on considère ses ouvrages (Rom. I, 20.)...»

– Et cependant, après avoir «parlé anciennement par Moïse et par les prophètes, à plusieurs fois, et en diverses manières; il a parlé dans les derniers temps par son Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, et par lequel il a fait les siècles (Hébr. I, 1-2.)

Ah! mes chers Auditeurs, quand on rapproche du désordre, de la confusion et de l’obscurité des idées, si généralement répandues en matière de religion et de Christianisme, les sources d’où la vérité divine surgit si pure et si éclatante, peut-on ne pas reconnaître que LES HOMMES SE PLAISENT DANS LEUR AVEUGLEMENT, que leur ignorance est VOLONTAIRE, qu’ils n’ont aucun souci de connaître Dieu, et que même, après l’avoir chassé, ils s’obstinent à lui tenir la porte fermée, ne voulant pas qu’il rentre chez eux?

Nous pourrions entrer dans bien d’autres détails, qui serviraient à confirmer cette triste vérité: mais après le coup-d’oeil que nous venons de jeter sur la conduite de l’homme envers Dieu, il nous importe de considérer la conduite de Dieu envers l’homme; et c’est ce que nous nous hâtons de faire.

* * *

Quant à la manière dont Dieu agit à notre égard, elle est bien formellement exprimée dans notre texte.

D’abord, il se tient à notre porte: «JE ME TIENS à la porte,» nous dit-il lui-même.

Ce trait de la conduite de Dieu n’est-il pas bien touchant? Q

Quelle douceur, quels trésors de bonté n’annonce-t-il pas en lui?

Quel est le père, le frère, le parent ou l’ami qui, chassé, mis dehors par son fils, son frère, son parent ou son ami, n’en serait ému dans son cœur, ne s’en tînt pour gravement offensé, et qui, peut-être transporté d’indignation et de colère, ne s’éloignât avec la résolution de s’en venger, on, du moins, de ne jamais consentir à s’en rapprocher?

Mais il en est tout autrement du Roi de gloire.

Il se laisse détrôner et bannir par l’homme, son enfant de prédilection, sans se livrer au moindre ressentiment contre lui. En agissant selon sa justice, il pourrait anéantir sa créature ingrate et coupable, il pourrait au moins, sans qu’aucun reproche pût lui être fait, laisser sa créature rebelle subir toutes les conséquences de sa révolte, et tomber et se perdre, sans retour, au fond de l’abîme de misère, qu’elle s’est creusé en s’isolant de la source de tout bien.

Oui, sûrement, Dieu, chassé par l’homme après l’avoir doté de tant de privilèges, n’aurait rien fait qui n’eût été conforme aux principes du droit et de la justice, s’il l’avait abandonné à lui-même.

Mais l’ingratitude et l’iniquité de l’homme

ne détruisent pas l’amour de Dieu pour lui.

Il l’a créé pour le bonheur, et il sait que sa destination est manquée, s’il ne reprend sa place dans son cœur; il sait que s’il s’éloigne, c’en est fait de lui pour toujours, que les canaux de la vie resteront interceptés, qu’il ne pourra que traîner une existence misérable sur la terre, en proie, à des désirs que rien ne pourra satisfaire, en proie à une faim que rien ne pourra apaiser, en proie à une soif que rien ne pourra éteindre; et qu’à ces désirs, à cette faim et à cette soif, devenus encore plus brûlants, se joindra l’angoisse des remords, dès son entrée dans le gouffre de l’éternité.

Ô effrayante destinée de l’homme pécheur !...

Dieu ne peut la considérer sans en être touché; ses entrailles en sont émues, et sa charité le retient auprès du malheureux, quelque coupable qu’il soit.

Quoique chassé par lui,

il ne s’éloignera pas,

il restera près de sa créature,

il la suivra dans ses égarements, ses yeux ne la perdront pas un seul instant de vue, ses oreilles seront attentives à ses cris,

il comptera tous ses pas, et en se tenant à sa porte quoique fermée pour lui,

il se révélera comme un Dieu clément et débonnaire, qui ne veut pas que le pécheur périsse, et comme un Dieu patient et de longue attente, dont la gratuité est plus grande envers les enfants des hommes, que les cieux ne sont élevés au-dessus de la terre.

Tel est le premier trait de la conduite de Dieu: et cette conduite, mes chers Auditeurs, il n’est personne ici envers qui il ne l'ait tenue et ne la tienne encore.

Enfants d’Adam transgresseur, nous avons TOUS participé à son apostasie, et à l’inimitié contre Dieu qui en fut la conséquence.

«Conçus dans le péché et échauffés dans l’iniquité», TOUS, nous sommes nés avec un principe inhérent à notre nature, qui nous éloigne de Dieu, et qui se révèle plus ou moins par nos mépris et nos violations de ses lois, par nos vices et par nos désordres.

Mais, quelque opposés que nous ayons été, ou que nous nous soyons montrés à ses droits et à ses desseins sur nous, le Dieu de toute bonté s’est constamment tenu à notre porte, attendant qu’elle lui fût ouverte pour entrer et établir sa demeure chez nous.

Sa bonté nous accueillit au lever de nos jours, elle protégea notre berceau, elle entoura notre enfance, jamais elle ne cessa de veiller sur nous; et pour comprendre de quel support, et de quelle patience nous avons été l’objet de sa part, il faudrait que nous pussions concevoir quelle horreur il a pour le mal, qu’il nous a presque toujours vu commettre, sans cependant se détourner de nous avec haine et mépris?

Mais si le Seigneur se tient à la porte des hommes, il faut ajouter que ce n’est pas dans l’oisiveté et dans l’inaction qu’il y demeure.

Outre qu’il agit bien souvent pour réfréner leurs passions, et pour prévenir une partie des maux qu’ils se feraient à eux-mêmes et aux autres, en les empêchant de se livrer à toute la fureur de leurs emportements; sans quoi la société serait entièrement bouleversée et rendue impossible:

outre, disons-nous, cette action générale de la Providence que Dieu exerce, pour préserver les hommes contre les excès, dans lesquels la perversité de leur nature les jetterait, si elle n’était contenue.

Il agit encore d’une manière toute particulière auprès de chacun d’eux, pour VAINCRE leur résistance, pour BRISER la dureté de leur cœur, pour DISSIPER les ténèbres qui enveloppent leur entendement, pour mettre fin à leur surdité et à leur aveuglement spirituels, pour les ARRACHER à leur sommeil de mort,

pour les disposer, en un mot,

à se réconcilier avec lui, et à rentrer dans sa communion.

«Il frappe à leur porte,» ce qui doit s’entendre de tous les moyens de grâce qu’il a établis pour instruire, réveiller et convertir les pécheurs; ce qui doit s'entendre de sa parole surtout, si bien appelée,

tantôt «le marteau» qui brise la pierre,

tantôt «l’épée à deux tranchants» qui atteint au centre de l’âme,

tantôt «la semence incorruptible» qui régénère,

et tantôt «la puissance de Dieu pour le salut des croyants

ce qui doit s’entendre de son culte, de ses sacrements, de la prédication de l’Évangile, et de tout le ministère de ses fidèles serviteurs.

«Il frappe à leur porte» quelquefois par des bienfaits, pour les émouvoir et les faire remonter à la main qui les dispense; quelquefois par des revers, des accidents, des pertes et bien d’autres afflictions, pour les porter à écouter «la verge et celui qui l’a assignée.»

«Il frappe à la porte» de tant de manières, dans tant d’occasions, et toujours avec tant d’amour et tant de sagesse, que si vous n’avez pas encore entendu sa voix, mes chers Auditeurs, et si vous ne vous êtes pas rendus à ses appels miséricordieux, vous ne sauriez vous en faire une juste idée....

Il n’y a que ton enfant, ô mon Dieu! ton enfant adopté en Jésus-Christ, et qui s’est approché de toi par le sang de l’expiation, qui sache quels soins tu te donnes, pour t’ouvrir un accès dans les âmes d’où le péché t’a banni, et qui puisse comprendre combien sont multipliés et admirables, les anneaux de cette chaîne providentielle et gracieuse, par laquelle tu attires à toi les pécheurs!

Ô mon Dieu! accrois, accrois le nombre de ceux qui te reconnaissent en Jésus-Christ pour Celui qui est «venu chercher et sauver ce qui était perdu,» et pour le bon berger qui court, sans se lasser, après la brebis égarée; qui la poursuit dans les plaines et sur les coteaux, sur les montagnes et sur les rochers, au milieu des ronces et des épines, et qui ne s’épargne en rien pour la ramener!

Telle est, en effet, la conduite de Dieu envers les pécheurs, conduite exprimée par ces mots: «Je frappe à la porte.»

Il y «frappe» dans l’enfance, dans l’adolescence, dans l’âge mûr, dans la vieillesse;

il y «frappe» le jour, la nuit;

il y «frappe», que nous soyons dans les champs ou dans la ville, dans la solitude ou dans le monde, en santé ou en maladie;

il y «frappe» par l’amitié et par la haine de nos semblables, par les hommes et par les choses, par les rencontres et les événements, quelquefois, les plus insignifiants en apparence.

TOUT lui sert d’écho pour faire retentir sa voix, et la faire arriver à nos cœurs.

Oh! convertissez-vous, chers et bien-aimés Auditeurs, et alors vous verrez, dans toute votre histoire, des traces non interrompues de sa miséricorde à votre égard; vous reconnaîtrez que pas un jour de votre vie ne s’est écoulé sans qu’il ne vous cherchât, sans qu’il ne vous appelât, et ne vous sollicitât, d’une manière ou d’une autre, de vous donner à lui pour avoir la vie et jouir de la paix.

Aujourd’hui, du moins, Hommes frères, soyez attentifs, comme il vous y invite lui-même, attentifs, et à votre conduite envers lui, et à sa conduite envers vous! Le mot «VOICI,» qui se trouve en tête de notre texte, est à lui seul un avertissesement solennel qu’il vous donne, et un appel grave qu’il vous fait, pour que vous rentriez en vous-mêmes, et pour que vous cherchiez à vous rendre compte de vos rapports actuels avec lui.

«Voici, je me tiens à la porte et je frappe!»

Voyez donc, examinez si réellement votre Créateur, le Grand Dieu qui donne la respiration et toutes choses, votre suprême Bienfaiteur, est encore hors de vous, réduit à attendre à votre porte; et s’il était vrai que, par incrédulité, par indifférence, par mondanité, ou autrement, vous fussiez encore séparés de lui, privés de sa paix, et que vous l’eussiez repoussé jusqu’à ce jour: oh! NE TARDEZ PLUS À LUI OUVRIR VOTRE ÂME, et à lui laisser prendre la place qu’il veut y occuper.

«Aujourd’hui! aujourd’hui que vous entendez sa voix, n’endurcissez point votre cœur, mais cherchez-le pendant qu’il se trouve, et invoquez-le pendant qu’il est près de vous!»

Et nous aussi, mes Frères, qui faisons profession d’avoir reçu Jésus-Christ par la foi, et d’être rentrés dans la communion avec notre Dieu; et nous aussi, soyons rendus attentifs par le mot «VOICI.»

Ceux de Laodicée faisaient la même profession que nous, ils avaient embrassé le Christianisme, ils se disaient, ils se croyaient chrétiens, ils passaient pour l’être... Et cependant, c’est à eux que les paroles de notre texte furent adressées tout premièrement; c’est à eux que le Seigneur disait: «Voici, je me tiens à la porte et je frappe.»

Ah! prenons garde que comme eux nous ne soyons «NI FROIDS NI BOUILLANTS,» et que, nous trompant et nous séduisant nous-mêmes par des apparences, nous ne disions, dans la tiédeur de notre foi et dans l’absence de tout véritable amour: «Nous sommes riches, et nous n’avons besoin de rien, tandis qu’en réalité nous pouvons être dans la misère, pauvres, aveugles et nus (Apocalypse III, 16, 17.)

Prenons garde qu’étant appelés à être le temple de Dieu, la partie de ce temple, où il veut surtout être reçu, établir son trône et avoir notre culte pour agréable, ne lui soit encore fermée.

Rappelons-nous que ce n’est ni dans le parvis, ni dans le lieu saint, mais dans le Saint des Saints qu’il avait fixé sa demeure.

Nous pouvons bien lui avoir ouvert le parvis, auquel correspond notre corps, dont les sens, la vue et l’ouïe sont la porte: mais cela ne lui suffit point.

Lire, écouter sa Parole, fréquenter les assemblées religieuses, accomplir des actes de dévotion extérieure, sont des exercices corporels qui peuvent être bons, mais qui peuvent aussi n’être utiles qu’à peu de chose.

Nous pouvons également lui avoir ouvert ce qui, en nous, correspond au lieu saint, c’est-à-dire, notre esprit dont l’entendement est la porte: mais cela encore ne saurait lui suffire.

Se borner à connaître sa Parole, à comprendre l’Évangile et ses doctrines, ou, en d’autres termes, n’admettre Dieu que dans son intelligence, c’est le laisser dehors, et lui tenir la portée fermée.

Il n’y a que le Saint des Saints qu’il veuille agréer pour son sanctuaire, et ce Saint des Saints, en nous, C’EST NOTRE CŒUR dont les affections pures, l’humilité, la confiance, la reconnaissance et l’amour sont la porte.

Dans le Saint des Saints était déposée «l’arche de l’alliance,» symbole sacré de sa présence adorable. C’était là qu’il rendait ses oracles, là qu’il manifestait sa gloire, là qu’il dispensait ses pardons et ses grâces.

Ce n’est aussi qu’alors qu’il est entré DANS NOTRE CŒUR, qu’il nous communique la vie; qu’il nous assure, par les témoignages de son Esprit, que nous sommes ses enfants; qu’il nous remplit de paix et de joie, et qu’il nous fait sentir les douceurs ineffables de sa communion.

Soyons donc attentifs, mes chers Frères, et, quand nous l’entendons dire aujourd’hui: «Voici, je me tiens à la porte et je frappe»

demandons-nous si ce n’est pas à nous que cette parole s’adresse;

examinons bien si véritablement nous lui avons ouvert le tabernacle de nos cœurs, s’il y vit, s’il y règne et s’il y est adoré, sans partage, dans la foi au Sauveur Jésus.

Oh! puissions-nous n’avoir aucun motif de douter que bien réellement nous avons entendu sa voix, que bien réellement nous lui avons ouvert la porte, que bien réellement il a pris possession de son sanctuaire, et que son esprit habite en nous!

Amen.

À l'Église chrétienne réformée de Nérac

J.-J. AUDEBEZ – 1837





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