Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

COMMENT PRIES-TU?

FRÉDÉRIC DE ROUGEMONT

1869

***

COMMENT PRIES-TU?


I


Tu pries soir et matin, et tu ne demandes à Dieu rien de contraire à sa loi:

Mais comment l’abordes-tu?

- Debout et la tête levée?

- D’un air distrait?

- Avec hâte?


Prends garde!

Il est ton Seigneur: ne le traite pas plus cavalièrement que tu n’oserais faire ton roi.

Il est ton Père céleste: témoigne-lui au moins le respect que ton père terrestre réclame de toi.

Viens à lui dans le sentiment de ton néant et de son infinitude, de tes péchés et de sa sainteté, de ton pardon en Jésus-Christ.

Ne l’aborde qu’aspergé du sang de son Fils; mais avec ce sang avance-toi, confiant et joyeux, vers le trône de grâce et de miséricorde.


Souviens-toi de ce qu’a dit Salomon:

«Ne te précipite point à parler, et que ton cœur ne se hâte point de prononcer aucune parole devant Dieu; car il est au ciel et toi sur la terre; use donc de peu de paroles (Ecclés. V, 2.)

Mais réjouis-toi en même temps de l’exhortation de l’Apôtre:

«Puisque nous avons par le sang de Jésus la liberté d’entrer dans les lieux saints, approchons-nous de Dieu avec une confiance pleine et parfaite (Héb. X, 19-22; IV, 16.)


II


Tu t’étonnes de la solennelle déclaration du Sauveur:

«Tout ce que vous demanderez en priant, croyez que vous le recevrez, et il vous sera accordé (Marc XI, 24.)

Il te semble que chaque jour dans l’église devrait retentir la joyeuse nouvelle de supplications visiblement exaucées, et que le monde devrait être plein du bruit de ces perpétuels miracles.

Tu les cherches autour de toi, et en trouves fort peu.

Tu les cherches dans ta propre vie, et ne te souviens d’aucun.

Te voilà doutant non de toi et de tes prières,


MAIS DE JÉSUS-CHRIST ET DE SES PROMESSES.


Cependant la réponse à tes doutes se lit au verset suivant:

«Mais quand vous vous présenterez pour faire votre prière, pardonnez...»


Ne comprends-tu pas?

Pour que Dieu t’exauce, il faut qu’il ait pardonné TES péchés.

Pour qu’il te pardonne, IL FAUT QUE TU AIES PARDONNÉ AUX AUTRES LEURS OFFENSES.


Il n’agréera ton offrande QUE si PREMIÈREMENT tu t’es réconcilié avec celui de tes frères qui a quelque chose contre toi (Matth. V, 23.).

1. Va donc le trouver dans sa demeure,

2. fais les premières démarches,

3. surmonte ton secret et vieux ressentiment,

4. abaisse ton orgueil.

C’est dur à la chair; mais cela n’est pas impossible, puisque Dieu le commande.

Après cela, prie; mais prie sans douter, prie avec une foi entière, et Dieu t’exaucera.

Il le fera en Dieu et à sa manière.


III


Appuyé sur les promesses illimitées que Jésus a faites à la prière, tu demandes avec instance à Dieu une délivrance temporelle, qui serait un vrai miracle. Mais as-tu remarqué que des siècles se sont passés sous l’ancienne alliance sans qu’il en ait fait un seul?

Tu me rappelles les privilèges de l’Alliance de grâce. Ils sont immenses, je le sais.

Mais considère donc au prix de quels efforts les prophètes et les justes en Israël obtenaient de l’Éternel un acte d’extraordinaire intervention!

Esaü avec ses quatre cents hommes va se jeter sur Jacob et sa famille et les égorger:

Jacob, qu’oppressait le souvenir de ses torts envers son frère, dut lutter une nuit entière avec l’Ange avant de lui arracher son pardon et sa délivrance (Gen. XXXII.).

Quand Élie sur le Carmel demande sept fois à Dieu la pluie, quelle attitude prend-il devant le Souverain de la nature? Il ne peut assez s’humilier, et met son visage entre ses genoux (1 Rois XVIII, 42.).


J’ai connu quelqu’un dont la fille unique était en danger de mort.

Seul dans sa chambre, il était plongé dans une sombre douleur, quand une voix intérieure lui dit: Prie.


Il se jette à genoux et veut implorer de Dieu la guérison de son enfant chérie.

Mais une puissance mystérieuse l’arrête;

il se sent comme précipité dans l’abîme sans fond de son néant et de ses péchés; là, dans les ténèbres,

il comprend à quel point il est indigne de recevoir la moindre grâce, et c’est alors seulement qu’il peut s’élever vers Dieu et lui présenter sa requête.

Deux fois dans cette même nuit, la même voix le pressa de nouveau de prier; la même puissance le plongea toujours plus bas dans l’abîme, et le fit monter toujours plus haut vers le ciel. — L’enfant ne mourut pas.

On a dit que l’âme pécheresse doit par sa repentance descendre en enfer pour monter au ciel avec son pardon. Cette route est aussi celle de la grande prière.



 

- Table des matières -