Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LES DEUX VOIES

FRÉDÉRIC DE ROUGEMONT

1869

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La loi a été notre pédagogue pour nous amener à Christ. Gal. III, 24.

Dans les temps passés, Dieu a laissé marcher toutes les nations dans leurs voies. Actes XIV, 16.


Les hommes arrivent par deux chemins opposés au pied de la croix de Jésus-Christ.

L’un est celui de la révélation et de la conscience,

l’autre celui du monde et de la soif du bonheur.

De droite, arrivent ceux qui ont connu dès leur première enfance le but où ils devaient tendre.

Ils ont été élevés par des mères pieuses et par de pieux pasteurs; leur conscience a été formée, éclairée, aiguisée par les saintes Écritures; sa voix les a préservés du mal ou les a poursuivis dans leurs égarements, et elle ne leur a pas laissé de repos jusqu’au jour où ils sont allés à Jésus-Christ pour obtenir, avec le pardon, la sainteté.

De gauche, arrivent ceux qui, nés de parents mondains, négligés par l’Église, ont vécu selon les instincts de leur cœur.

Ils ne demandent à la vie que le bonheur, et ils le cherchent dans les plaisirs, les richesses, les honneurs, les arts ou les sciences.

Mais, au lieu du bonheur qu’ils ont rêvé, c’est l’ennui et la souffrance qu’ils trouvent; leurs illusions tombent et, convaincus que tout n’est que vanité, ils se tournent vers Jésus-Christ pour avoir le pardon, la paix et la joie.

La conscience pousse à Jésus-Christ l’humanité par la soif d’une justice idéale, et le monde, par la réalité de la misère.

La première de ces voies était celle du peuple élu;

la seconde était, est encore, celle des païens.

Dieu, par une grâce toute gratuite, fit lui-même l’éducation d’Israël, et le prépara de très loin par l’école de la loi à ce vif sentiment de repentance, qui se fit jour au temps de Jean-Baptiste et qu’apaisa le pardon apporté par le Messie.

Abandonnés à eux-mêmes, les païens tentèrent tous les genres de bonheurs terrestres, et tous, avant la venue de Jésus, s’étaient convaincus que rien au monde ne sauve les nations de la misère, de l’esclavage, de la corruption, de la mort politique, morale et intellectuelle.

– Les Phéniciens avaient éprouvé la vanité du commerce;

– les Babyloniens, de l’industrie;

– les Assyriens, des conquêtes et du pillage;

– les Égyptiens, des institutions les plus sages;

– les Grecs, des beaux arts et des sciences;

– les Chaldéens, les Perses, les Macédoniens, les Romains, de la domination sur le monde entier.

Tous étaient accablés et chargés, et Jésus-Christ pouvait dire à tous les hommes:


«VENEZ À MOI POUR AVOIR LE REPOS DE VOS ÂMES.»


Ô sagesse ingénieuse de l’éternel qui, par des voies contraires, conduit directement et en personne à son Fils le peuple privilégié, et fait arriver au même but, par plusieurs détours, las nations qu’il laissait marcher dans leurs voies!

Ô amour impartial de l’Éternel, qui semblait n’avoir d’yeux que pour les Israélites, maintenus par une salutaire discipline sur la seule voie royale, et qui cependant ne perdait pas un seul instant de vue les Gentils, s’égarant par vingt sentiers divers et se préparant par leurs souffrances à revenir à lui dans le temps fixé!

Ô justice redoutable et non moins impartiale de l’Éternel qui, après avoir recueilli dans l’Église les membres vivants d’Israël, a livré le corps mort aux aigles romaines de Titus, et qui, après avoir recueilli dans la même Église les membres vivants du monde romain, l’a livré aux Barbares d’Alaric et d’Attila.


 
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