Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA DISEUSE DE BONNE AVENTURE.

Société des Traités Religieux (Paris)

1829

***

Je surveillais avec intérêt l’éducation religieuse des jeunes filles d’un village à cent lieues de Paris, dans lequel est située notre campagne, quand j’appris, avec autant de peine que de surprise, que plusieurs d’entre elles avaient été se faire dire leur bonne aventure dans un hameau voisin, et cela même deux jours avant leur première communion!

Affligée d’une démarche aussi répréhensible, je les interrogeai sur ce qui avait pu les y déterminer.

Nous entendions sans cesse parler de la femme Catherine, répondirent-elles; on nous assurait qu’elle nous dirait tout ce qui devait nous arriver, et nous n’avons pas su résister à cette tentation, doutant plus que nous ne croyions pas mal faire en allant la consulter

Croyez-vous donc sérieusement qu’une femme ou aucune autre créature humaine puisse prédire l’avenir?

Tout le monde nous l’assurait, et même les personnes les plus respectables du village.

Il faut alors déplorer leur aveuglement, mes chers enfants, et prier Dieu de vous en garantir, en faisant fructifier l’instruction que vous recevez en ce moment.


Lui seul connaît notre destinée et la dirige à son gré;

IL N’A DONNÉ À PERSONNE DE SAVOIR L’AVENIR, qu’autant que sa Parole nous le révèle.


Croyez-vous donc que Dieu dévoile à une femme, et par l’indigne moyen d'un jeu de cartes, les secrets qu’il n’a pas daigné divulguer à ses enfants; que pour quelques sous vous puissiez obtenir des connaissances que tous les trésors du monde ne sauraient nous procurer; et qu’il veuille accorder aux déceptions de celle malheureuse ce qu’il refuse aux prières de ses plus fidèles serviteurs?

Prenez-y bien garde, vous êtes trompées, et vous courez le danger d’attirer sur vous la colère de Celui qui voit tout et qui gouverne tout.

Nous ne pouvons rien que par LUI; aussi devons-nous considérer comme le temps le plus précieux de notre vie celui où l’on nous enseigne à le connaître, à l’aimer et à le servir!

Désirant m’assurer par moi-même de ce qu’était cette femme Catherine, je me fis conduire à sa chaumière par sa petite fille, âgée de sept ans, qui venait régulièrement à l’école du Dimanche.

Elle me fit gravir une ou deux collines escarpées, pour gagner le sentier qui mène au hameau en serpentant à travers des châtaigniers et des mûriers. Nous approchâmes enfin de la demeure de la pauvre Catherine.

Marie nous précéda, et nous entrâmes en nous courbant sous le feuillage touffu d’un double rang de châtaigniers.


Quel contraste nous y attendait! Nous quittions un air pur, embaumé, le plus beau ciel du monde, une nature riche et variée, dont l’aspect enchanteur excitait cette pieuse reconnaissance et cette admiration sans bornes si bien rendues par les chants du Roi prophète: nous entrâmes dans une chaumière basse, étouffée, obscure, que recouvraient à peine de mauvais lambeaux de toiture, et qui n’était fermée que par une porte sans serrure et un contrevent à moitié brisé. À droite était un lit recouvert de haillons, dans lequel les trois ou quatre membres de la famille paraissaient avoir tous reposé; dans le fond était une malle délabrée qui renfermait tout leur avoir.

C’est là qu’était assise, au coin d’un triste feu, la pauvre Catherine, malade, exténuée, un enfant nouveau-né dans ses bras, qu’elle s’efforçait en vain de ranimer par un lait qu’une mauvaise nourriture et des privations sans nombre avaient altéré.

À ses côtés étaient deux petites filles de cinq à sept ans, dont la plus jeune était infirme, et leur malheureux père, tout pâle d’inanition.

L’âme oppressée à la vue de tant de misère, je ne trouvai plus la force de réprimander sévèrement l’infortunée, entraînée par les premiers besoins de la vie à son condamnable système de déception. Je me contentai d’implorer sur elle la miséricorde de Celui qui est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus, et consoler ceux qui sont travaillés et chargés; me réservant d’employer plus tard tous les moyens d’une douce persuasion, pour la convaincre de la gravité de ses erreurs.

Cet exemple, entre beaucoup d’autres, m’a confirmée dans la pensée de l’extrême circonspection que l’on doit toujours apporter à condamner l’auteur de fautes graves, jusqu’à ce que l’on ait acquis une entière connaissance des circonstances atténuantes.

On ne doit point pour cela les excuser; mais, en les blâmant, il faut compatir à la faiblesse humaine, et se prévaloir de cette même faiblesse pour leur faire sentir l’absolue nécessité de recourir à la source divine de toute force véritable.

Je commençai par pourvoir à leurs premiers besoins, espérant les amener ensuite à la connaissance de ce qui éclaire l’âme et lui fait du bien. Le mari et la femme, reconnaissants, promirent de venir me voir dès que leur santé le leur permettrait.


Au bout de quinze jours, Catherine arriva chez moi.

Je la questionnai sur l’éducation qu’elle avait reçue, et sur ce qu’elle savait de la religion; elle répondit à tout beaucoup mieux qu’on n’aurait pu l’imaginer.

Comment se peut-il alors, répliquai-je, que vous abusiez, comme vous le faites, de la crédulité publique, en faisant le métier de diseuse de bonne aventure?

Je ne croyais pas mal faire. Une de mes soeurs m’avait appris à faire les cartes. En arrivant dans ce hameau, on me persuada que, vu la superstition qui y règne, ce serait pour moi et mes enfants un moyen d’existence, que de continuer à faire les cartes; et qu’en ne prenant que deux sous par personne, Je me ferais encore 30 fr. par an. Vous sentez bien, Madame, que dans ma triste position, cela m’était une grande ressource.

Vous connaissez la Bible, me dites-vous, et vous y croyez? Vous n’avez donc point fait attention aux passages qui vous condamnent?

Je lui lus alors les passages suivants, que j’avais transcrits à son intention:

«Qu’il ne se trouve point au milieu de vous, ni d’enchanteurs, ni d’hommes qui consultent l’esprit de Python, ni de diseurs de bonne aventure, ni aucun qui interroge les morts. Car quiconque fait ces choses, est en abomination à l'Éternel (Deut. XVIII, 11-12) «etc., etc.

Connaissiez-vous ces passages?

Non, Madame.

Eh bien! comme vous me dites que vous n’avez plus de Bible, je vais vous en prêter une; je ne vous la donne pas. Je vous la prête, à condition que vous la lisiez tous les jours, et, s’il se peut, à la veillée, pour en édifier vos voisins, et les amener à faire autant de sacrifices pour obtenir la possession de ce livre sacré, qu'ils en ont fait auparavant pour entendre vos blâmables prédictions. Je prierai Dieu de bénir ces lectures et vos réflexions, pour que vous renonciez bientôt à une habitude d'autant plus criminelle, que vous en entraînez plusieurs dans votre condamnation.

Dernièrement, deux jeunes filles, à la veille de recevoir la communion et de faire une profession publique de leur foi aux doctrines de l’Évangile, sont allées chez vous se faire dire leur bonne aventure.

Votre responsabilité est donc terrible! Pensez-y sérieusement.

Votre conduite passée a été coupable sous bien des rapports. D’abord, il y a de l'hypocrisie et du mensonge en ce que vous prétendez connaître ce que vous ignorez entièrement; ensuite demandant de l’argent, vous commettez un véritable vol, et cela sur de pauvres ignorants et sur des enfants; vous corrompez les esprits par vos prétendues prédictions, en les détournant de leurs devoirs et en excitant toutes sortes de mauvaises passions, qui les portent à se conduire indignement, et à braver l’Éternel!

Songez bien qu’il ne s’agit point ici de renoncer à votre odieux trafic par déférence pour telle ou telle personne, mais de sonder votre coeur et d’examiner votre conduite, à l'aide de la Parole de Dieu, et d’agir ensuite d’après cette conviction intérieure que la vérité produit infailliblement dans ceux qui sont sincères dans leurs recherches et fervents dans leurs prières...

Ne vous le dissimulez pas, vous avez péché...., grandement péché; mais si, par un effet de la grâce divine, vous vous repentez sincèrement, et qu’humiliée sous le poids de vos fautes vous recouriez au Sauveur des pécheurs, malgré vos souffrances temporelles, vous jouirez bientôt du bonheur réservé à ceux qui croient en lui et s’efforcent de lui plaire.

Ne perdez pas un moment. Comme mère de famille, ce devoir est encore plus sacré !... Quel exemple pour vos pauvres enfants !...

Qu’auriez-vous à répondre un jour à Celui qui vous demandera compte des sentiments que vous leur aurez inspirés?

Confuse, anéantie, baignée de larmes, cette pauvre femme se retira, promettant bien de lire et de méditer cette Parole de vie, seule capable de nous conduire dans la voie étroite, mais sûre de salut!

Mais hélas! combien, lorsque nous sommes abandonnés à nous-mêmes, nos résolutions sont faibles et impuissantes; semblables à la rosée du matin, elles ne durent qu’un moment; et d’ailleurs, comme le dit si énergiquement l'Écriture: l'Éthiopien changerait-il sa peau, ou le léopard ses taches? (Jérémie XIII, 23) Non, cela est impossible, du moins jusqu’à ce que nous ayons placé tout notre espoir en Celui qui seul peut fortifier nos résolutions et renouveler nos cœurs.


Quelque temps après, je retournai chez la diseuse de bonne aventure; et le premier objet que j’aperçus me causa de la peine. Sur une table, à côté de la Bible, je retrouvai ces malheureuses cartes! J’en exprimai ma douleur; je renouvelai mes exhortations, et la suppliai de joindre ses prières aux miennes pour obtenir du Seigneur qu’il convertît son cœur, afin que, comme ceux d’Éphèse, dont je lui lus l’histoire dans le XIXe chap. des Actes, elle pût détruire ces vilaines cartes, et montrer par là publiquement la puissance de la Parole de Dieu sur son âme....

Je la laissai triste, découragée, mais non pas touchée.


Six semaines s’écoulèrent sans voir aucun membre de la famille. Je savais, par des informations exactes, que la femme continuait son indigne métier, mais à la dérobée, ce qui était un tort de plus.

Un jour, on me remet une lettre de son mari, le pauvre Louis, que je transcris, en n’en corrigeant que l'orthographe. Craignant de ne pouvoir me parler, il en exprimait le désir en ces termes;

«Je me suis pris la liberté, très chère dame, de vous écrire ici quelques lignes pour vous faire connaître mon sentiment et ma manière de penser. C’est que j’ai voulu vous remercier des bienfaits que votre bonté a daigné nous accorder, et il est juste que je vous en témoigne ma juste reconnaissance.

Il y avait longtemps que je désirais pouvoir vous parler en particulier; mais étant tenu par la crainte, je n’ai pas osé entrer chez vous, de peur de vous trop importuner; c’est pourquoi aujourd’hui je vous prie de m’accorder cette faveur, parce que l’on dit que vous partirez bientôt d’ici.

Il me serait fâcheux de ne pas vous remercier, car ce sont des bienfaits qui surpassent mon entendement.

Vous savez que nous avons cette Bible, que je ne sais si vous nous la prêtez ou si vous voudrez nous la vendre; car c’est un livre que je tiens plus précieux que l’or et l’argent: vous ne sauriez connaître la joie que j’ai reçue dans mon âme... : c’est ma consolation; jamais je ne suis si joyeux que quand je parcours ces beaux passages: il me semble que le temps me passe comme une ombre.

Que Dieu vous accompagne dans votre voyage, vous donne un bon retour; et j’espère de vous revoir en bonne santé, s’il plaît à Dieu; et si je n'ai pas le bonheur de vous pouvoir parler, je vous vous salue du plus profond de mon cœur»

Louis.

P. S. Je vous prie de me pardonner ma grossièreté.»


Je le fis monter sur-le-champ:

«Ah! Madame, me dit-il, je ne viens plus vous demander de quoi manger ou de quoi me vêtir; vous nous avez donné plus que tout cela en nous laissant la Bible.

Vous savez donc lire, mon pauvre Louis?

Oh! oui, Madame , et j’en bénis Dieu! Levé et en course dès trois heures du matin, pour ramasser péniblement un malheureux fagot que je vends à peine 30 sous, je rentre le soir, à sept ou huit heures, n'en pouvant plus..., Aussitôt après avoir mangé un morceau, je prends mon cher livre, et j’en lis quelquefois des dix, douze chapitres de suite. Je ne peux pas dire comme ce livre me fait du bien....; je sens quelque chose là (mettant la main sur son cœur) qui me monte aux yeux....; je pleure.... : mais n’allez pas croire au moins que ce soit de chagrin; oh non c'est comme de la joie, et cela lors même que je ne sais pas si nous aurons du pain pour ma pauvre petite famille le lendemain.

D’où me viendrait cette joie dans mon malheur, si ce n’était de l'Esprit de Dieu!...

Oh! ma chère dame, avec toute ma misère, je suis plus heureux qu’un roi!... et c’est à vous que nous devons ce bonheur, puisque c’est vous qui nous avez prêté cette précieuse Bible que nous n'avions pas le moyen d’acheter! Mais je travaillerai, s’il le faut, et la nuit et le jour, pour souscrire un sou par semaine, afin de l’avoir à moi.

Vous êtes si pauvre, mon cher Louis, et de plus estropié, que c’est déjà tout ce que vous pouvez faire que de soutenir votre famille.

C'est égal: ce bon Dieu pour lequel je le fais m'en donnera la force et les moyens!

Émues au fond de l'âme de cette touchante conversation, ces paroles de saint Jacques me frappèrent: «Dieu n’a-t-il pas choisi les pauvres de ce monde, riches en foi, pour hériter de son royaume! (Jacques II, 5)» Et j’élevai mon cœur à lui, pour obtenir que ce fût là le bonheur du pauvre Louis.

Votre femme continue-t-elle toujours son malheureux métier? lui dis-je.

Hélas! oui, Madame; mais enfin je me suis fâché tout à fait contre elle, et lui ai absolument défendu de le faire encore.

Vous avez bien fait d’user de votre autorité de père de famille. Mais ce n’est pas le tout que de le lui interdire; il faut surtout la persuader, la convaincre: c’est ce que vous obtiendrez en priant pour elle et en lui faisant méditer avec vous la Loi du Seigneur!

Ah! si elle pensait comme moi, elle ne le ferait plus jamais, coûte qui coûte; car voyez-vous, Madame, au milieu de tout cela, ce sont les 30 fr. auxquels elle et de la peine à renoncer; et le monde ici est si ignorant, qu’elle est sure de les gagner.

II est vrai Louis, que l’ignorance favorise les progrès du vice et de la superstition, et que dans sa position, c’est une grande tentation que de gagner de l’argent; aussi n’y a-t-il qu’une foi sincère au Sauveur, et la haine du péché, qui en est l’inévitable conséquence, qui puisse la lui faire surmonter. Unissons nos prières pour obtenir cette grâce.

De tout mon cœur!

Cette famille intéressante et malheureuse sous plus d’un rapport, est venue s’établir dans mon village, peut-être avec le désir de fuir de mauvaises habitudes ou pour se rapprocher des secours dont elle a un si grand besoin.

J’ai été la voir dans sa nouvelle demeure, où sept ou huit familles également misérables se sont entassées les unes près des autres. L’aspect de tant de pauvreté et de misère m’a vivement émue, et je sentis plus que jamais combien sont coupables envers Dieu et envers leurs semblables, les personnes riches qui ne cherchent pas à secourir les malheureux et à relever leurs âmes abattues, par les espérances de la gloire éternelle, que le Sauveur nous a acquise au prix de son sang.

Je fus frappée de l’accablement de Catherine: Qu’avez-vous? lui dis-je; est-ce que ce changement de lieux vous attriste?

— Non, me dit-elle en fondant en larmes, mais c’est le sentiment profond de mes fautes passées. Je ne les avais jamais considérées sous le rapport sérieux où je les vois aujourd’hui; mais, en relisant avec mon mari la Parole de Dieu, je m’en suis convaincue.... Oh! que ne donnerais-je pas maintenant pour n’avoir jamais agi d’une manière aussi contraire à ce que Dieu demande de nous et h ce que la Bible nous enseigne. Que puis-je faire maintenant pour obtenir mon pardon?

— Recourir à ce Sauveur qui est tout-puissant et plein de miséricorde; vous confier en son divin sacrifice pour obtenir la rémission de vos péchés; le prier sans cesse de vous donner la foi, et de l’augmenter au point de changer tout votre être et de vous faire marcher «en nouveauté de vie!» Priez-le de manifester sa force dans votre infirmité, en vous faisant résister aux tentations dont vous pouvez être encore journellement assaillie; peut-être pourrez-vous un jour, par sa grâce, faire autant de bien par votre exemple, que vous avez fait de mal jusqu’à présent!

Après quelques instants de réflexion, elle me répondit: Je n’avais encore pu prendre sur moi de brûler mes cartes; mais je m'en vais les jeter au feu devant vous, en vous promettant de ne jamais plus en avoir chez moi.

Ce n’est point à moi qu’il faut le promettre, ma pauvre Catherine, mais c’est à ce Dieu plein de long support et de miséricorde, que vous avez offensé! à Celui qui, dans ce moment même, juge de la sincérité de vos paroles! Malheur à vous si elles n’étaient pas la fidèle expression de ce que vous ressentez.


Elle se leva, alla prendre sur une mauvaise étagère deux vieux jeux de cartes qu’elle jeta au feu: C’est à mon Dieu, dit-elle, que je les sacrifie, et je lui promets du fond de mon cœur que, s’il me soutient dans ma résolution, je n’userai plus jamais de semblables moyens pour nourrir mes malheureux enfants....

Je ne veux plus espérer qu’en lui! persuadée qu’il n’abandonnera jamais ceux qui l’aiment et le servent de toute leur âme! Et maintenant, Madame , si vous voulez me laisser de bons livres, au lieu de m’occuper de nouvelles tromperies, je les lirai à mes voisins, dans nos veillées d’hiver; car ils ne connaissent point même leurs lettres; peut-être même pourrai-je les leur enseigner.

Quand les preuves de la sincérité de mon repentir auront été aussi évidentes que les fautes de ma conduite passée, alors je pourrai espérer de faire un peu de bien autour de moi.

Je rends grâces à Dieu des heureuses dispositions que vous manifestez; mais méfiez-vous toujours de vos anciennes habitudes, et fuyez toutes les occasions d’y retomber.

Rappelez-vous aussi que, pour être enfant de Dieu, il ne suffit pas de changer telle ou telle habitude mais il faut naître de nouveau en justice et en sainteté, selon les Écritures.

Priez donc, pour que Dieu crée en vous un cœur nouveau, source pure d'où seule découlent toutes sortes de bonnes actions. Je vais bientôt m'éloigner d’ici; mais je ne cesserai de prier le Seigneur d’achever en vous l’œuvre qui, j’espère, est déjà commencée. Il faudra m’écrire et me dire en toute confiance ce que vous aurez fait, et si on cherche à vous ébranler dans vos bonnes résolutions pour que je tâche, de mon côté, vous soutenir.

Le bon mari, touché de cet entretien, bénissait Dieu de ce qu’il venait d’exaucer sa prière. Trois petits enfants, groupés au milieu de nous, semblaient par leur joie enfantine, être interprètes des douces émotions dont nous étions pénétrés; l’asile même de la misère semblait éclairé des rayons d’une joie céleste.

Je les quittai, pénétrée de reconnaissance et d’amour pour ce Dieu qui protégeait si spécialement mes faibles efforts.

Peu de temps après, avant de partir pour Paris, je réunis dans ce même quartier, du village dix-neuf de mes souscripteurs bibliques. Quel groupe se présentait à mes yeux!

J’y distinguai la pauvre Catherine; une fille infortunée qui, par suite d'une faute grave, n’avait pas osé, depuis quatre ans franchir le seuil de sa porte, et deux femmes qui, brouillées depuis six ans, ne s’étaient point parlé depuis cette époque.

La lecture de quelques Nouvelles des heureux effets de la distribution de la Bible en France et dans l’Étranger, suivie de celle d’un chapitre de l’Épître de saint Jean sur l’amour du prochain, et terminée par une prière, furent les moyens d’édification mis en usage dans cette petite réunion.

La plupart de ces pauvres paysannes ne sachant pas lire, étaient toute attention; et ayant à peine entendu nommer d’autres pays que je leur, faisaient, à la lecture des Nouvelles (Ces Nouvelles se trouvent dans tes Bulletins de la Société biblique et dans le Journal de la Société des missions évangéliques chez les peuples non chrétiens), des exclamations de surprise et d’admiration.

La pauvre et repentante Catherine s’occupe déjà du bien à faire aux malheureux qui l’entourent. Un ouvrier âgé de plus de cinquante ans, père de famille, sans avoir contracté le lien sacré du mariage, et la mère de ses enfants, passent toutes leurs veillées chez Louis et sa femme; elle leur lit la Bible et le Voyage du chrétien vers l'Éternité bienheureuse).

Ces lectures ont déjà si puissamment influé sur le cœur de ce vieillard, qu’il veut réparer publiquement une partie de ses fautes, en faisant légitimer son union; il désire vivement élever ses enfants dans la crainte de ce Dieu qu’il a si indignement outragé.

Ces faits démontrent la justesse de cette pensée qu’a exprimée un homme célèbre:

«Qui peut jamais prévoir quel sera le résultat d'une démarche, s'il plaît au Seigneur de la bénir?»

Elle est encourageante pour tout chrétien de cœur, et doit lui faire saisir les moindres occasions de le servir.

En effet, comment ce Dieu Sauveur, qui est tout-puissant, présent partout, qui sonde jusqu’aux derniers replis de nos cœurs, n’assurerait-il pas le succès de tout ce que nous entreprenons par amour pour lui et par zèle pour sa gloire.


«TRAVAILLONS DONC SANS CESSE, TANDIS QU’IL FAIT JOUR;

LA NUIT VIENT OÙ NUL NE POURRA PLUS RIEN FAIRE.»



 
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