Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

MESSAGES AU FÉMININ

AUX ISOLÉS

***

(deuxième lettre)


J’ai appris avec joie que mon premier message, paru dans le dernier numéro du Bulletin des Unions, a trouvé le chemin des cœurs et a fait du bien à quelques-uns.

On me demande de vous en adresser un second, qui par l’organe du Journal de la Jeune Fille parviendra sans doute à beaucoup de celles qui ont lu mon article «Aux Isolés,» où j'ai parlé des dangers et des avantages de l’isolement au point de vue de la piété.

C’est donc à vous, mes jeunes sœurs en la foi isolées, au près ou au loin, que j’adresse ces lignes. Quoiqu’inconnus les uns aux autres, une même foi, une même espérance, une même charité nous unissent à Celui qui est le Sauveur et le Seigneur de nos vies; ces liens tout spirituels, mais bien réels pourtant, ne sont-ils pas déjà une force pour tous ceux qui au-dessus de toutes les barrières, redisent du fond du cœur, avec émotion, cette parole du Symbole: «Je crois la communion des saints?»

Il faut donc que cette communion des saints devienne pour vous, malgré votre isolement extérieur, une réalité bénie.

Et comment cela pourra-t-il être?

Comment cette unité de la vie dans tous les enfants de Dieu remportera-t-elle sur le sentiment de votre solitude, sur toutes les causes d'affaiblissement ou de découragement qui agissent sur votre âme?

Ce ne sera que par le même moyen qui nous donne toute victoire: la loi en Christ, ou plutôt Jésus lui-même vivant en nous.

Pour réagir contre votre isolement, que dès le matin votre première pensée soit la présence adorable du Sauveur et que votre âme attentive s’ouvre à la voix de sa Parole et de son Esprit.

Connaissez-vous ce beau passage d’Ésaïe L, 4:

«Il éveille, chaque matin, Il éveille mon oreille pour que j’écoute comme écoutent les disciples?»

Est-il devenu l’heureuse expérience de chacune de vos journées?

Oh! alors, j’en suis bien sûr, vous ne vous sentez plus seule, car vous avez entendu la voix fidèle du Berger qui marche devant vous, et en Le suivant, tous les devoirs, toutes les douleurs et toutes les joies que la journée amène s’illuminent d’une clarté céleste parce que, de votre coté, vous avez appris à placer toutes choses sous la lumière d’En-Haut.

Quand vous êtes ainsi fondée et enracinée dans l’amour de Christ pour vous, si parfois encore la pensée de votre solitude spirituelle vous trouble, vous abat, il reste une précieuse ressource, celle que recommandait le missionnaire Gobât, perdu au fond de l’Abyssinie: la prière d’intercession.

Vos parents, vos amis ne sont pas sous vos yeux; que votre souvenir les rassemble pour les présenter au Père céleste et avant que vous ayez énuméré à Dieu toutes ces personnes qui vous sont chères, pour peu que vous avez un cœur aimant, vous serez entourée en esprit d’assez d’amis, de frères ou de sœurs en la foi pour que votre solitude soit devenue un jardin de l’Éternel.

D’ailleurs, si vous faites luire fidèlement votre lumière dans votre entourage, il est impossible que cette solitude se prolonge, que vous ne trouviez tôt ou tard une âme qui s’ouvre à l'influence de cette grâce, qui jaillissant des profondeurs de votre cœur se montrera sur vos lèvres et dans toute votre manière d’être.

Les qualités sociables que la nature vous a données, sanctifiées par l’Évangile, vous feront rechercher d’autres jeunes tilles ou les attireront vers vous; que vous soyez dans votre famille ou chez des étrangers, en service, dans un atelier, à la ville ou à la campagne, votre amour pourra s’exercer, ne fut-ce qu’en faveur d’une seule compagne; et qui aime n’est déjà plus seul.

Si au contraire vous vous renfermez dans votre timidité ou dans une certaine fierté, qui n’est qu’un orgueilleux égoïsme, oui vous resterez seule, mais en ce cas n’accusez que vous. On admire, mais de loin, ces sommets des Alpes couverts de neiges éternelles; quelques hardis touristes les gravissent, mais n’y séjournent pas; voudriez-vous ressembler à ces cimes désolées autour desquelles se forment les orages?

Il est aussi des vallons solitaires, aux frais ombrages, où le calme et le recueillement saisissent l’âme; ce silence, cette paix que rien ne trouble, ces retraites discrètes où une source cachée entretient la fraîcheur et la vie, avez-vous trouvé cela quelquefois dans la campagne?

Vous aurez dit alors: «Qu’il fait bon ici, loin de l’agitation et du bruit! Que n’y puis-je rester toujours!»

Si votre vie intérieure ressemble à cette solitaire retraite, si elle est arrosée aussi par la source d’eau vive, elle sera heureuse et utile.

Ne vous plaignez plus de votre portion ici-bas, car ceux qui soupirent après la paix iront à vous et apprendront à bénir Celui qui par votre moyen les a rafraîchis et restaurés.

Voilà, mes soeurs, votre mission et mon vœu affectueux pour vous.

L. Vasseroz

* * *

COELUM VERUM


De la plaine, le ciel est bleu,

D’un bleu léger, doux et limpide,

C’est l’azur flottant sur le vide,

Voile d’amour jeté par Dieu.

Élevons-nous, l’azur s’efface;

Du haut des monts, le ciel est noir.

Gouffre sans fond, ciel sans espoir,

C’est la nuit, la nuit de l’espace.

Il n’est qu’un ciel qui, de tout lieu,

De loin, de près, reste immuable,

Aussi limpide qu’insondable,

De ciel d’un cœur qui croit en Dieu.

Eugène Rambert

Extrait du «Livre de la Jeune fille».

Organe des Unions chrétiennes de jeunes filles – 20 mars 1893



 

- Table des matières -