Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

ONZIÈME LEÇON

EXODE, V, 1-11


5:1 Moïse et Aaron se rendirent ensuite auprès de Pharaon, et lui dirent: Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël: Laisse aller mon peuple, pour qu’il célèbre au désert une fête en mon honneur.

2 Pharaon répondit: Qui est l’Éternel, pour que j’obéisse à sa voix, en laissant aller Israël? Je ne connais point l’Éternel, et je ne laisserai point aller Israël.

3 Ils dirent: Le Dieu des Hébreux nous est apparu. Permets-nous de faire trois journées de marche dans le désert, pour offrir des sacrifices à l’Éternel, afin qu’il ne nous frappe pas de la peste ou de l’épée.

4 Et le roi d’Égypte leur dit: Moïse et Aaron, pourquoi détournez-vous le peuple de son ouvrage? Allez à vos travaux.

5 Pharaon dit: Voici, ce peuple est maintenant nombreux dans le pays, et vous lui feriez interrompre ses travaux!

6 Et ce jour même, Pharaon donna cet ordre aux inspecteurs du peuple et aux commissaires:

7 Vous ne donnerez plus comme auparavant de la paille au peuple pour faire des briques; qu’ils aillent eux-mêmes se ramasser de la paille.

8 Vous leur imposerez néanmoins la quantité de briques qu’ils faisaient auparavant, vous n’en retrancherez rien; car ce sont des paresseux; voilà pourquoi ils crient, en disant: Allons offrir des sacrifices à notre Dieu!

9 Que l’on charge de travail ces gens, qu’ils s’en occupent, et ils ne prendront plus garde à des paroles de mensonge.

10 Les inspecteurs du peuple et les commissaires vinrent dire au peuple: Ainsi parle Pharaon: Je ne vous donne plus de paille;

11 allez vous-mêmes vous procurer de la paille où vous en trouverez, car l’on ne retranche rien de votre travail.


* * *


Moïse s’en allait donc en Égypte pour délivrer les enfants d’Israël et les amener en Canaan, afin qu’ils y devinssent ce peuple à part auquel seraient confiés les oracles de Dieu (Romains, III, 2)» et dans lequel naîtrait plus tard le Messie, le Rédempteur du monde.

Qu’elle était grande et redoutable la mission de ce pauvre voyageur des montagnes!

Quel changement dans sa vie, et quel contraste entre la place où nous le laissâmes dimanche et celle où nous le trouvons aujourd’hui!

Le voici sur les rives bruyantes et splendides du Nil, traversant les plaines populeuses du pays d’Égypte, entouré de somptueux bâtiments, d’obélisques magnifiques, de pyramides à perte de vue; puis arrivant enfin avec son frère dans la brillante demeure du grand roi Pharaon à Rahmésès.

Que devait-il éprouver, après quarante années d’une vie champêtre si tranquille, si humble, si retirée et si douce, en se retrouvant au sein de ce grand peuple, en rentrant dans ce palais où il avait passé sa jeunesse, en revoyant ces lieux où il avait été élevé par sa mère adoptive (morte probablement depuis trente-trois années), en rencontrant ces grands avec lesquels il avait passé le commencement de sa vie, ces officiers d’une armée dont il avait fait partie, ces savants auprès desquels il avait appris la science des Égyptiens, et surtout cette foule de prêtres imposteurs?

Mais, sans doute, Moïse regardait bien peu à toutes ces choses. Il «préférait l’opprobre de Christ aux trésors de l’Égypte;» il venait délivrer le peuple de Dieu; il devait accomplir la tâche qui lui était imposée; il apportait au grand roi Pharaon les messages du Roi des rois, du Seigneur des seigneurs.

Vous vous rappelez que dès qu’il était arrivé avec son cher Aaron, les Israélites l’avaient écouté, l’avaient cru, et que, pleins d’admiration pour les miséricordes de l’Éternel à leur égard, ils s’étaient prosternés le visage contre terre et avaient adoré le Dieu d’Israël.

Ah! mes enfants, quand un peuple s’humilie devant son Dieu, sa délivrance est proche!

Mais si les Israélites s’humiliaient, c’est que Dieu, dans sa grande bonté, avait daigné toucher et attendrir leurs méchants cœurs par son Saint-Esprit; car ils étaient «un peuple de col roide,» nous dit souvent l’Écriture.

Le Seigneur, qui «fait miséricorde à qui il veut, et qui endurcit qui il veut» faisait alors miséricorde aux enfants d’Israël, qui ne le méritaient pas, et livrait Pharaon, comme il le méritait, aux convoitises de son mauvais cœur, faisant «d’une même masse», ainsi que le dit saint Paul à l’occasion de Pharaon, faisant, dis-je, de cette même masse des enfants d’Adam, qui pourtant sont tous nés dans le péché et enclins au mal, des «vases à honneur et des vases à déshonneur (Rom., IX, 18-21)

Cependant Pharaon apprit que des Hébreux demandaient une audience. Il ordonna de les faire entrer, et vit apparaître deux vieillards, l’un de quatre-vingts, l’autre de quatre-vingt-trois ans, qui se présentèrent devant lui, sans doute avec respect, mais sans frayeur; car il est écrit que, «par la foi, Moïse ne craignit pas le courroux du roi (Héb., XI, 27)

Il fallait bien du courage; mais dans tous les temps s’est accomplie pour les élus et les serviteurs de Dieu cette promesse que le Seigneur a faite plus tard à ses disciples:

«Quand vous serez menés devant les gouverneurs et même devant les rois à cause de moi, pour rendre témoignage à eux et aux nations, ne soyez point en peine de ce que vous aurez à dire, ni comment vous parlerez, parce qu’il vous sera donné, dans ce moment-là, ce que vous aurez à dire, et ce n’est pas vous qui parlez mais c’est l’Esprit de votre Père qui parle en vous...

Et ne craignez point ceux qui ne tuent que le corps et qui ne peuvent point tuer l’âme (Matth., X, 18, 20, 28.)...»

C’est aussi dans tous les temps que s’est accomplie cette prière des apôtres: «Seigneur regarde à leurs menaces et donne à tes serviteurs d’annoncer ta Parole avec toute hardiesse (Actes, IV, 29.)

Mais s’ils venaient avec une sainte hardiesse, les deux hommes de Dieu étaient bien loin de se présenter devant Pharaon avec des airs insolents, avec des manières ou un ton d’arrogance, selon la disposition trop habituelle en nos jours chez les hommes, qui, ne possédant pas la crainte de Dieu, méprisent les autorités et les puissances. «Craignez Dieu et honorez le roi,» nous dit l’Écriture (1 Pierre, II, 17.).

Moïse et Aaron viennent donc avec liberté mais avec respect devant Pharaon. Ils ne profèrent point de menaces, quoique Dieu leur ait dit: «Je le punirai;» ce n’est pas leur affaire.

Ils ne demandent pas même l’affranchissement du peuple, quoique Dieu leur ait dit: «Je le délivrerai;» ce n’est pas leur affaire.

Ils ne font pas même de miracles, quoique Dieu leur en ait promis le pouvoir. Non; ils ne doivent en ce moment que présenter leur requête: Ainsi a dit l’Éternel, le Dieu d’Israël: Laisse aller mon peuple, afin qu’il me célèbre une fête solennelle dans le désert.

C’est Jéhovah, Celui qui est, le Dieu d’Israël, qui envoie ce message; c’est le Dieu de TOUS les hommes en tant que CRÉATEUR et MAÎTRE, et le Dieu d’Israël en tant que Père par adoption.

Ah! Pharaon fut bien coupable de ne pas écouter; mais rappelez-vous, chers enfants, que tout ce qui vous est dit à vous-mêmes dans l’Écriture vous est également crié du ciel de la part du Seigneur; car:

la Bible n’est pas la parole des hommes mais celle de Dieu!

L'’Apôtre rendait grâces de ce que les Thessaloniciens l’avaient reçue comme telle: Dieu leur ayant fait miséricorde; sans quoi ils auraient aussi endurci leur cœur (1 Thes., II, 13.).

Moïse et Aaron venaient demander au roi une simple absence, à trois journées de distance dans le désert de Sinaï, pour que le peuple célébrât une fête solennelle,

1. sans distraction,

2. sans être inquiétés par les Égyptiens,

3. sans les choquer par une religion et des rites si différents des leurs.

Et cette demande, ils la faisaient, non en leur propre nom, mais au nom d’un plus puissant qu’eux.

Il faut que je vous donne ici une petite explication qu’on m’a demandée:

«Moïse et Aaron pouvaient-ils, avec sincérité, demander à Pharaon d’aller à trois journées de chemin, puisqu’ils avaient l’intention de partir pour prendre possession de la terre de Canaan, et de quitter pour toujours cet odieux pays d’Égypte?»

Certainement ils étaient sincères; ils ne demandaient que cela; et si Pharaon le leur avait accordé ils n’auraient pas demandé davantage; mais Dieu leur avait dit que Pharaon s’y refuserait, et que lui, l’Éternel, l’y forcerait et les retirerait à bras étendu.

Alors pourquoi le demandent-ils?

Pour mettre au grand jour, d’un côté la modération de leurs requêtes, et de l’autre la méchanceté du cœur de Pharaon.

C’est comme si j’élevais une petite fille violente et opiniâtre, et que j’apprisse qu’elle s’est montrée impolie et impertinente envers sa bonne. «Mon enfant,» lui dirais-je, «allez demander excuse à celle que vous avez offensée et lui exprimez votre regret.»

Connaissant son caractère obstiné et hautain, je sais très bien qu’elle s’y refusera, et que je serai forcé de la punir; cependant je ne lui en demanderai pas moins cet acte d’humiliation et de réparation.

Pourquoi?

Pour mettre au grand jour et sa faute et le mal de son caractère, afin qu’elle comprenne bien la justice de ma punition, et que peut-être elle vienne à se repentir et à demander à Dieu le pardon et le changement de son coeur.

Eh bien, c’est pour une raison semblable que Dieu faisait dire à Pharaon: «Laisse aller ce peuple à trois jours de distance pour rendre à Dieu son culte.»

Mais écoutez la réponse du malheureux Pharaon: Qui est l'Éternel pour que j’obéisse à sa voix et que je laisse aller Israël? je ne connais point l’Éternel et je ne laisserai point aller Israël.

Quel mépris pour son Créateur et son Juge, soit qu’il n’eût réellement jamais entendu parler de lui; soit que sachant par ouï-dire que Jéhovah était le Dieu des Hébreux, il méprisât un Dieu qui n’avait pu les empêcher d’être écrasés sous ses pieds, «Je connais mes dieux, mais je ne connais pas le vôtre!» semble-t-il s’écrier. «Qui est Jéhovah, pour que j’obéisse à sa voix? Je ne le connais pas.»

Hélas! c’est la parole de Jésus à ceux qu’il repoussera au dernier jour: «JE NE VOUS CONNAIS POINT (Matth., XXV, 12.)

Et pourquoi Pharaon ne connaissait-il pas l’Éternel?

Parce qu’il ne l’avait pas voulu; parce qu’il ne s’était pas «soucié de le connaître,» comme dit saint Paul (Rom., I, 28).

Ah! malheur à ceux qui ne le connaissent pas; car «la vie éternelle c’est de te connaître, toi seul, vrai Dieu, et Jésus-Christ, que tu as envoyé (Jean, XVII, 3)

La différence entre les justes et les injustes consiste justement à le connaître ou non, la condition spirituelle des malheureux qui se perdent est souvent désignée dans l’Écriture par ce seul mot: «Ils ne connaissent pas Dieu,» et il nous est dit que ce sont ceux-là que Jésus viendra châtier avec des «flammes de feu (2 Thes., I, 8)

Chers enfants, si vous disiez à quelqu’un: «Voilà ton père qui passe,» et qu’il vous répondît: «Je ne le connais pas;» et que vous ajoutassiez: «C’est ton protecteur, l’ami de ton enfance, celui qui t’a aimé, qui t’a gardé;» trouveriez-vous cet homme innocent, s’il vous répondait encore: «Je ne le connais pas?»

Tout le péché de l’homme c’est de ne pas connaître Dieu; et voyez où il mène.

Voyez comment Pharaon résiste en face, en disant: Je ne laisserai point aller le peuple, et comment Dieu l'endurcit.

Ce n’est certes pas, comme je vous l’ai déjà dit, en mettant le mal dans son cœur mauvais, mais C’EST EN LE LIVRANT À TOUTES LES CONVOITISES DE CE CŒUR, à son avarice, à son orgueil, à son obstination; voilà pourquoi nous devons dire chaque jour à Dieu:

«Ne nous amène pas en tentation, mais délivre-nous du Malin!»

Maintenant écoutez la réponse modérée de Moïse et d’Aaron; ils n’en veulent pas appeler encore à leurs miracles; ils ne veulent pas non plus menacer le roi; ils se contentent de lui parler des maux qui pourraient les atteindre s’ils n’obéissaient pas à leur Dieu.

Alors le roi leur dit: Moïse et Aaron, pourquoi détournez-vous le peuple de son ouvrage? Allez maintenant à vos charges.

On voit là en Pharaon ce qu’on a vu, dans tous les temps, chez les hommes qui ne veulent pas recevoir les messages de Dieu: ils nient l’existence de ces messages et attribuent à de tout autres motifs le zèle de ceux qui les leur apportent.

Ils les accusent d’orgueil ou d’ambition; ils les traitent d’hommes dangereux, de gens remuants, de révolutionnaires. — On disait de Jésus-Christ qu’il était un «ennemi de César (Jean, XIX, 12.);» de Paul qu’il était «une peste publique;» qu’il «excitait des séditions;» qu’il «troublait la ville (Actes, XXIV, 5; XVI, 20-21)».

Dans les temps de persécution également, on a dit les mêmes choses, en France et ailleurs, des protestants, et même, au milieu des protestants, des chrétiens zélés.

Allez à vos charges, dit Pharaon aux deux vieillards.

Il veut les envoyer aussi au travail et les traiter, avec leur peuple, comme la boue qu’il foulait aux pieds. Encore est-ce sans doute par une protection spéciale de Dieu qu’ils ne furent pas jetés en prison ou même mis à mort: Vous détournez le peuple de son ouvrage, leur dit-il, vous lui faites perdre son temps en assemblées.

Qu’on ne donne plus de paille à ce peuple pour faire des briques, mais qu’ils aillent et s’amassent de la paille.

Pourquoi cette paille, mes amis?

On ne l’a pas su pendant longtemps; mais dernièrement, en examinant d’anciennes briques retrouvées, soit sur les bords de l’Euphrate, soit en Égypte, on a découvert que leur intérieur renferme une multitude de brins de paille; de même qu’en mêlant des pierres à la chaux on rend les murs plus solides, les Orientaux avaient reconnu que la paille hachée donnait à la substance des briques une beaucoup plus grande dureté.

Qu'on ne leur fournisse plus de paille, et qu’ils fassent néanmoins la même quantité de brique, dit le roi, sans même s’informer si la chose est possible. «Ce sont des paresseux; ils ont trop de temps; je ne veux pas qu’ils s’occupent de religion; je veux qu’ils fassent mon ouvrage.»

Nous reviendrons dimanche sur ce sujet; mais, avant de terminer, je veux répondre à deux objections qui m’ont été faites sur ma précédente leçon.

«Comment savez-vous,» m’a-t-on dit, «que Moïse ait renvoyé sa femme? cela n’est pas dans le texte.»

Je pourrais le savoir déjà, ai-je répondu, par un fait très simple:

c’est que nous avons vu, au verset 20 du chapitre IVe, Moïse partir de Madian, avec sa femme et ses deux fils, pour le pays d’Égypte et arriver dans une hôtellerie;

puis, au verset 27e, se retrouver dans le pays de Madian; car ce n’est pas en Égypte, c’est sur le Sinaï que son frère Aaron le rencontra et que ces deux hommes de Dieu se jetèrent dans les bras l’un de l’autre: Moïse y était donc retourné. Mais il y a une réponse plus simple et plus positive encore; c’est que, plus tard, on voit Jéthro ramener à Moïse, au bord de la mer Rouge, sa femme et ses deux fils. Lisez-moi ce récit au chapitre XVIII, de 1 à 7.

Quand Moïse arriva pour la première fois chez lui, le vieux Réhuel avait sept filles et deux fils: Jéthro et Hobab.

Quarante ans plus tard, quand Moïse partit pour l’Égypte avec Séphora, Réhuel était sans doute mort, et son fils aîné Jéthro, selon l’usage des Orientaux enfants d’Abraham, était devenu à sa place sacrificateur et chef de toute la famille.

Il ne faut donc confondre Jéthro ni avec Réhuel son père, ni avec Hobab son frère; car Jéthro, après avoir ramené Séphora à Moïse retourna au pays de Madian, tandis que Hobab, son frère cadet, se joignit, avec toute sa maison, au peuple d’Israël et devint plus tard le père des fameux Récabites dont nous avons lu l’histoire, il y a quelques semaines, au chapitre XXXV du prophète Jérémie.

La seconde objection qu’on m’a faite concerne le nom de beau-frère de Moïse donné par moi à Jéthro tandis que notre texte l’appelle son beau-père.

J’y ai déjà répondu précédemment en vous expliquant que le mot hébreu kothen signifie simplement un allié par mariage et peut s’appliquer également à un beau-père et à un beau-frère.

C’est comme si je dis en français mes parents, ce mot peut indiquer des frères, des neveux, des cousins, tandis que sa traduction latine ne désignerait que mon père et ma mère.





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