Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

DIXIÈME LEÇON

EXODE, IV, 21-31.


21 L’Éternel dit à Moïse: En partant pour retourner en Égypte, vois tous les prodiges que je mets en ta main: tu les feras devant Pharaon. Et moi, j’endurcirai son coeur, et il ne laissera point aller le peuple.

22 Tu diras à Pharaon: Ainsi parle l’Éternel: Israël est mon fils, mon premier-né.

23 Je te dis: Laisse aller mon fils, pour qu’il me serve; si tu refuses de le laisser aller, voici, je ferai périr ton fils, ton premier-né.

24 Pendant le voyage, en un lieu où Moïse passa la nuit, l’Éternel l’attaqua et voulut le faire mourir.

25 Séphora prit une pierre aiguë, coupa le prépuce de son fils, et le jeta aux pieds de Moïse, en disant: Tu es pour moi un époux de sang!

26 Et l’Éternel le laissa. C’est alors qu’elle dit: Époux de sang! à cause de la circoncision.

27 L’Éternel dit à Aaron: Va dans le désert au-devant de Moïse. Aaron partit; il rencontra Moïse à la montagne de Dieu, et il le baisa.

28 Moïse fit connaître à Aaron toutes les paroles de l’Éternel qui l’avait envoyé, et tous les signes qu’il lui avait ordonné de faire.

29 Moïse et Aaron poursuivirent leur chemin, et ils assemblèrent tous les anciens des enfants d’Israël.

30 Aaron rapporta toutes les paroles que l’Éternel avait dites à Moïse, et il exécuta les signes aux yeux du peuple.

31 Et le peuple crut. Ils apprirent que l’Éternel avait visité les enfants d’Israël, qu’il avait vu leur souffrance; et ils s’inclinèrent et se prosternèrent.


* * *

Notre leçon de ce jour renferme quatre sujets dignes de toute notre attention, mais qui présentent quelques difficultés.

1. Le premier c’est le jugement terrible de Dieu contre Pharaon.

2. Le second, non moins mystérieux, c’est la scène extraordinaire et violente qui se passe dans l’hôtellerie; c’est Moïse que Dieu châtie et qui est près de mourir; c’est Séphora qui circoncit son fils, semble-t-il, avec grande douleur et grande colère, et qui se sépare de son mari, et c’est Moïse qui, renonçant pour un temps au voyage d’Égypte, la reconduit chez son frère Jéthro, au pays de Madian (Exode, XVIII, 1-6.)

3. Le troisième objet c’est le très touchant spectacle de ces deux saints vieillards, de ces deux frères, qui se jettent dans les bras l’un de l’autre, qui se retrouvent après une séparation de quarante années et qui se rendent ensemble en Égypte pour y porter les messages et les signes de l’Éternel.

4. Le quatrième objet enfin, c’est le peuple qui croit ces messages et ces signes et qui, dans sa reconnaissance, s’incline et se prosterne devant son Dieu.

Reprenons successivement ces quatre points.

Et d’abord qu’elle est effrayante et terrible, mais aussi qu’elle est mystérieuse par un certain côté, cette parole de l’Éternel concernant Pharaon: J’endurcirai son cœur!

Elle nous montre:

1. la méchanceté naturelle de l’homme, qui s’endurcit dès que Dieu l’abandonne;

2. le jugement effroyable que le Seigneur prononcera un jour contre les personnes qui auront, comme Pharaon, méprisé sa parole et résisté aux appels de sa grâce; car, hélas! il ne faut point l’oublier, il vient enfin un moment où Dieu les laisse.

Alors ils s’endurcissent de plus en plus; alors ils sont perdus! et, d’après les déclarations de la Bible, PERDUS POUR TOUJOURS!

Et pourquoi pour toujours?

Parce qu’ils ne sauront plus se convertir et ne le pourront plus; parce que leur cœur sera endurci pour jamais. Ce sera là leur jugement!

C’est un sujet terrible, mes enfants; mais l’Écriture nous enseigne positivement que Dieu exerce quelquefois ce jugement dès ici-bas.

Lorsqu’on a longtemps négligé ses appels, il vient un moment où le Seigneur dit:

«Puisqu’il veut se perdre, qu’il se perde!

Puisqu’il veut s’endurcir, qu’il s’endurcisse!

Je l’abandonne pour jamais à la dureté de son cœur!... »

Ah! je vous le demande, y a-t-il un malheur comparable à celui-là?

Pharaon était un grand prince; il commandait au plus puissant royaume de l’univers; il était assis sur le plus brillant des trônes de la terre; un peuple innombrable lui était assujéti; il avait des trésors immenses; il avait élevé ces pyramides gigantesques qu’on admire encore aujourd’hui en Égypte; il avait des armées nombreuses, de la cavalerie, des chariots de guerre; mais, hélas! qu’était toute cette richesse, sinon un affreux dénuement? Et toute cette gloire, sinon une horrible confusion? Car, sous le tissu d’or et les précieux joyaux dont il se parait sans doute, il portait un cœur endurci!

Il avait préparé une pyramide pour son corps, mais l’enfer pour son âme.

C’était un malheureux digne de la plus immense pitié; et il eût mieux valu pour lui n’être jamais né, puisque toute sa gloire devait finir par cette sentence: J’endurcirai son cœur!

Hélas! qui sait? Il y a eu peut-être dans cet oratoire, depuis tant d’années qu’on y donne ces leçons du dimanche, tel ou tel enfant qui y était d’abord venu avec sérieux, avec intérêt, qui avait été touché et qui, plus tard, s’en est dégoûté, ou qui a eu peur du monde et des moqueries de quelque camarade, ou qui est tombé dans quelque péché, dans quelque mauvaise habitude; en sorte que sa conscience ne le laissant plus à l’aise, il s’est toujours plus éloigné de Dieu, qui l’avait peut-être appelé neuf fois comme Pharaon.

Comme lui aussi, il a dit souvent: «Je me repens; je veux revenir à Dieu;», mais il ne l’a pas fait, et maintenant il n’en a plus même le désir; il ne sent plus rien, il ne s’embarrasse plus de rien, il se moque des enfants pieux, il tient des propos irréligieux.

Peut-être que Dieu le relèvera; mais aussi, qui sait?

Peut-être qu’il n’y a plus de remède?

Peut-être que Dieu l’a abandonné?

Peut-être qu’il a dit de lui: «J’endurcirai son cœur!»

Ah! prenez-y garde, mes enfants: il faut se tourner vers le Sauveur, avec DROITURE, sans fraude, et lui crier: «O Éternel! crée en moi un cœur net et un esprit bien disposé!» Si Pharaon était revenu à Dieu, la miséricorde se serait, sans doute, encore étendue sur lui malgré ses crimes.

Mais quelqu’un de vous dira peut-être, comme on le faisait déjà au temps de saint Paul: «Si Dieu l’endurcit, est-ce sa faute?»

Ces mots demandent, en effet, une explication; ils sont instructifs et solennels, et réclament votre plus sérieuse attention.

Il faut d’abord poser avec soin un premier principe:

C’EST QUE DIEU N’A JAMAIS MIS LE MAL DANS LE CŒUR DE PERSONNE.

Celui qui est lumière ne peut créer les ténèbres; la sainteté ne peut créer l’impureté; la Bible nous le déclare formellement:

«Quand quelqu’un est tenté, qu’il ne dise point: Je suis tenté de Dieu; car Dieu ne peut être tenté par le mal, et aussi ne tente-t-il personne. Mais chacun est tenté quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise (Jacq., 1,13, 14.)

«Tout ce qui est au monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie, n’est point du Père, mais est du monde (1 Jean, Il, 16.)

Dieu, qui a horreur du mal, ne met pas le désir du mal dans le cœur des hommes; mais quand une mauvaise pensée, une tentation vient dans ces cœurs, et qu’au lieu de la combattre et de crier à Dieu pour en être délivré, nous nous y complaisons, nous la laissons revenir, alors elle finit par être plus forte que nous. «CE DÉSIR ENFANTE LE PÉCHÉ, ET LE PÉCHÉ ENFANTE LA MORT (Jacq, I, 15.)» et la condamnation.

Comme tous les hommes ont des yeux, des oreilles, une bouche, pour voir, pour entendre, pour parler, de même aussi tous les hommes ont dans leur intérieur une chambre qu’on appelle la conscience et où Dieu parle; mais s’ils résistent longtemps à cette voix, il vient un moment où elle cesse de se faire entendre.

Quand le Seigneur s’est «tenu à la porte (Apoc., III, 20.),» quand il a laissé aux vierges beaucoup de temps pour avoir leurs «lampes prêtes (Matth., XXV, 1-13.),» et qu’il n’a point été écouté, alors un moment vient où il ne frappe plus, où il n’appelle plus.

«Mon peuple n’a point écouté ma voix et Israël ne m’a point eu à gré.

C’est pourquoi JE LES AI ABANDONNÉS À LA DURETÉ DE LEUR CŒUR et ils ont marché selon leurs conseils (Ps. LXXXI, 11,12.),» dit le Seigneur.

«Parce que j’ai crié et que vous avez refusé d’ouïr;

parce que j’ai étendu ma main et qu’il n’y a eu personne qui y prît garde;

parce que vous avez rejeté tout mon conseil et que vous n’avez point eu à gré que je vous reprisse:

aussi je me rirai de votre calamité; je me moquerai quand votre effroi surviendra; alors on criera vers moi, mais JE NE RÉPONDRAI point; on me cherchera de grand matin, mais ON NE ME TROUVERA POINT, parce qu'ils auront haï la science, et qu’ils n’auront point choisi la crainte de l’Éternel.

Ils n’ont point aimé mon conseil; ils ont dédaigné toutes mes répréhensions: qu’ils mangent donc le fruit de leur voie et qu’ils se rassasient de leurs conseils (Prov., I, 24-31.)».

«Comme ils ne se sont pas souciés de connaître Dieu, aussi Dieu les a livrés à un esprit dépourvu de tout jugement pour commettre des choses qui ne sont nullement convenables.» dit encore saint Paul (Rom., I, 28.).

Vous comprenez maintenant, je l’espère, comment Dieu endurcit: c’est en laissant un pécheur qui le fuit le fuir encore; c’est en abandonnant un mauvais cœur à la malice de ses pensées. Il ne met pas le mal dans ce cœur, mais il l’y laisse et ne le combat plus. Il dit du pécheur comme des hommes du déluge: «Mon Esprit ne contestera plus avec lui (Gen., VI, 3.)

Je veux tâcher de vous faire saisir cette distinction par un ou deux exemples. Je descends dans un profond et noir souterrain.

Est-ce moi qui y apporte la nuit? Non: elle y est; mais si j’y vais avec une lumière il y fera clair; et quand la lumière sera éteinte ou que je l’emporterai en remontant, qu’est-ce qui y reviendra? — La nuit. — Sera-ce moi qui l’y aurai produite? — Dans un sens oui, car j’en aurai ôté la lumière.

Si j’ai une masse de plomb dans un vase de fer, est-ce moi qui la rends dure? — Non. — Si je la place sur des charbons ardents, elle fondra. Si je la laisse à elle-même, elle se durcira de nouveau. Dans un sens on pourra donc dire que c’est moi qui l’ai durcie.

Si l’un de vous se jette dans le Rhône et que je m’y précipite pour le retirer, puis qu’il s’y jette de nouveau une seconde, une troisième fois et que je l'en retire encore; s’il s’y lance une quatrième, et que, lassé, je le laisse périr, pourra-t-on dire que c’est moi qui l’y ai précipité? — Non certes: c’est lui, c’est sa fureur ou sa folie.

Tout cela s’explique, toute la Bible s’explique quand une fois on a bien reçu et reconnu une seule chose: c’est que nous sommes «de pauvres pécheurs, nés dans la corruption, enclins au mal, incapables par nous-mêmes de faire le bien.»

Alors on comprend que par nature nous ne faisons que le mal parce que nous n’aimons pas Dieu; et que quand nous venons à l’aimer, c’est par un don de sa pure grâce.

Alors les difficultés et les objections disparaissent, parce que l’homme reconnaît que c’est à lui seul qu’il doit imputer le mal, et que tout ce qu’il a de bon vient d’en haut.

C’est justement à des objections de cette nature que saint Paul répond en citant l’exemple de Pharaon:

«Y a-t-il de l’iniquité en Dieu?

A Dieu ne plaise, car il dit à Moïse: J’aurai compassion de celui de qui j’aurai compassion, et je ferai miséricorde à celui à qui je ferai miséricorde. L’Écriture dit à Pharaon: Je t’ai fait subsister afin de démontrer en toi ma puissance, et afin que mon nom soit publié dans toute la terre. Il a donc compassion de celui qu’il veut et il endurcit celui qu’il veut. Or, tu me diras:

Pourquoi se plaint-il encore? car qui est-ce qui peut résister à sa volonté?

Mais plutôt, ô homme, qui es-tu, toi qui contestes contre Dieu? La chose formée dira-t-elle à celui qui l’a formée: Pourquoi m’as-tu ainsi faite (Rom., IX, 14-20.)

Je voudrais pouvoir m’arrêter plus longtemps sur ce sujet, mais je suis obligé de passer aux suivants et d’abord au second.

Moïse était arrivé dans une auberge, sur les frontières de l’Égypte, avec son âne, sa femme et ses deux jeunes garçons; il y avait pris son gîte quand l'Éternel le rencontra et chercha à le faire mourir, dit notre verset 24e.

Il ne nous est pas expliqué comment Dieu lui manifesta son déplaisir; peut-être en lui faisant voir un ange avec une épée flamboyante; peut-être en lui envoyant de cruelles souffrances et une maladie mortelle. Quoi qu’il en soit, Moïse vit sur lui des signes manifestes de la colère de son Dieu. — Et pourquoi cela? — Parce qu’en se mariant au pays de Madian, il avait perdu de vue une ordonnance, une cérémonie instituée quatre cents ans auparavant pour Abraham et pour sa race.

Il paraît que les Madianites, quoique descendants d’Abraham, avaient négligé d’observer le sacrement de la circoncision, et que Moïse s’était laissé entraîner à cette négligence, probablement par complaisance pour sa femme et pour sa nouvelle famille.

Dieu ressent vivement les manquements et les infidélités de ses serviteurs, mes enfants.

Il est écrit que son «jugement commence par sa propre maison;» il est dit aussi que «le juste ne se sauve qu’avec peine (1 Pierre, IV, 17,18.);» et Paul dit encore aux chrétiens de Corinthe que c’est parce qu’ils étaient négligents dans l’observation de la cène, que plusieurs d’entre eux «étaient malades et que quelques-uns étaient morts (1 Cor, XI, 30.)

Nous devons donc veiller avec le plus grand soin sur notre cœur et sur nos voies, et prendre garde que des ménagements de famille, et la crainte de déplaire à tel ou tel de nos proches, ne nous fasse jamais négliger nos devoirs envers Dieu, et, entre autres, la pleine confession de son nom.

Moïse fut donc miraculeusement visité dans l’hôtellerie par un danger de mort, et Dieu lui fit connaître, ainsi qu’à Séphora, que cette visitation sévère avait pour cause sa négligence et sa lâche complaisance pour elle, en différant jusqu’à ce jour de circoncire ses deux fils, comme l’Éternel l’avait ordonné.

Cette cérémonie était destinée à exprimer, sous l’ancienne alliance, la même doctrine que nous prêche le baptême sous la nouvelle, savoir: que nul ne peut entrer dans le royaume des cieux s’il n’est changé, converti, réengendré, engendré d’en Haut comme par, une seconde naissance.

Elle était un signe du changement qui doit s’opérer dans l’homme pour qu’il puisse entrer au royaume des cieux: «un signe et un sceau de la justice que nous obtenons par la foi,» nous dit saint Paul (Rom., IV, 10,11.), et qui est un don de Dieu. «Venez à moi,» dit l’Éternel, «et je vous donnerai un nouveau cœur, et je mettrai au dedans de vous un esprit nouveau. J’ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair (Ézéch., XXXVI, 26.)

Quand Séphora vit que cette ordonnance, négligée par son peuple, était imposée par le Seigneur et que Moïse allait mourir si la volonté de Dieu n’était pas exécutée, elle fut saisie, à ce qu’il semble, d’un violent dépit; et, prenant un couteau tranchant, elle circoncit elle-même ses fils sous les yeux de leur père, et jetant à ses pieds leur chair sanglante elle s’écria: Tu m’es un époux de sang.

Moïse blâma cette violence et comprit qu’il ne devait pas prendre Séphora avec lui pour sa mission en Égypte; car si elle n’était pas encore soumise à la volonté de Dieu, elle lui serait en obstacle plutôt qu’en aide pour accomplir sa terrible tâche; c’est pourquoi, à la suite de cette nuit douloureuse, il la reconduisit au pays de Madian, où elle dut l’attendre jusqu’à ce qu’il sortit d’Égypte avec le peuple d’Israël; alors Jéthro la lui ramena au camp du désert avec Guerson et son jeune frère.

Ce fut là, sans doute, une rude épreuve domestique pour le pieux Moïse; mais il s’était hâté de se ranger à son devoir dès que Dieu le lui avait fait reconnaître; et vous allez voir qu’une riche compensation lui était réservée dans sa famille même. S’il était privé de sa femme parce qu’elle lui aurait été peut-être un empêchement ou un piège, Dieu lui accordait le bonheur de retrouver son frère. C’est notre troisième objet.

Je vois ces deux vieillards qui s’embrassent sur la montagne; ils sont remplis des hautes pensées du ciel; Dieu est avec eux; ils attendent la «Cité qui a des fondements;» ils ont préféré «l’opprobre de Christ (Héb., XI, 10, 26.)» aux joies de la vie; ils se racontent l’un à l’autre les grandes œuvres de Dieu et ses voies merveilleuses; puis ils se mettent en route; ils arrivent en Égypte; ils assemblent les anciens d’Israël; ils font devant le peuple les signes de Dieu, et ce peuple les écoute et croit que l’Éternel a regardé son affliction.

C’est notre quatrième objet; mais nous devons le réserver pour dimanche prochain.



 

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