Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LE JUGEMENT DERNIER.

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Le jugement dernier 01

Il est des gens qui voudraient, de nos jours, dégrader le ministère évangélique, en le réduisant à des sermons d'apparat ou de commande, propres à exciter la curiosité et à chatouiller les oreilles des auditeurs sans atteindre leurs consciences. Des leçons d'une morale tout humaine, quelques émotions qui n'aient en elles-mêmes rien de sérieux, des discours fleuris qui plaisent à l'imagination, voilà ce que l'on demande des prédicateurs de la Parole; et s'ils le dépassent, ils sont menacés des accusations et des épithètes les plus injurieuses. Mais malheur aux pasteurs qui, oubliant leur haute vocation, céderaient à de telles exigences, et leur sacrifieraient la sainte et austère vente.


  • La vie terrestre est aussi importante qu'elle est courte;
  • l'éternité est aussi proche qu'elle est sérieuse;
  • le Seigneur est aussi juste qu'il est saint;
  • le chemin du ciel est aussi étroit qu'il est peu connu;


Le siècle où nous vivons est aussi aveugle qu'il est enflé d'orgueil; et la multitude est aussi endormie que menacée, si ce n'est dévorée des erreurs les plus dangereuses. Dans de telles circonstances il n'y a pas à hésiter; c'est le temps ou jamais d'emboucher la trompette du jugement et de faire retentir les solennels avertissements de la sainte Parole: Réveille-toi, toi qui dors, et te relève d'entre les morts, et Christ t'éclairera.Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement.

Permettez-moi de vous aborder aujourd'hui avec de tels accents à la bouche. — Tout comme moi, en effet, vous vous hâtez au devant du sépulcre, du jugement et de l'éternité: aussi bien que moi, VOUS DEVEZ VOUS PRÉPARER À COMPARAÎTRE DEVANT LE TRÔNE DU SOUVERAIN JUGE; et de même que moi, vous avez besoin de grâce et de salut.

Que le Seigneur bénisse les paroles que j'ai à vous adresser, en sorte qu'elles vous réveillent et vous édifient! Amen!


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Texte. Or, quand le Fils de l'homme viendra dans ta gloire avec tous les saints anges, alors il s'asseyera sur le trône de sa gloire et toutes les nations seront assemblées devant lui etc.

Matth. XXXV, 31-46.


Voici, mes bien-aimés frères, un texte qui vous concerne tous. Vous verrez tous l'événement qu'il annonce, ici ou là, à droite ou à gauche, mais tous, sans exception. — Je ne sollicite pas davantage votre attention; car si le tableau que vient de vous tracer l'Évangile ne vous rendait pas attentifs, ce ne seraient pas mes sollicitations qui pourraient le faire. — Et qui est Celui qui soulève ainsi le voile de votre avenir?

C'est Jésus lui-même. Aussi la vérité de ce qu'enseignent ces paroles est-elle hors de doute; à moins que des incrédules, quel que soit leur nom, n'aient plus d'autorité auprès de vous que le Sauveur. Mais cela même est impossible; car, dans ce cas, vous ne seriez pas là pour prêter l'oreille à cette prédication. Vous accordez au Seigneur Jésus l'honneur d'être le Docteur par excellence; et s'il en est ainsi, que celui gui a des oreilles, écoule ce que l'Esprit dit a l'Église!

Le grand jour du jugement: tel est l'objet que je me propose de méditer avec vous. Mes réflexions se dirigeront successivement:

  1. sur le Juge,
  2. sur ceux qui doivent être jugés,
  3. et enfin sur la sentence elle-même.


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I. Quand le Fils de l'homme viendra...


Remarquez que le Sauveur dit: quand le Fils de l'homme viendra; et qu'il ne dit pas: si le Fils de l'homme revient, comme s'il parlait d'une chose douteuse et incertaine. Le jour est fixé, et ce jour ne peut manquer de paraître.

L'œil de la foi le voit déjà dans tout son éclat, et il pénètre même bien plus avant encore. — Le monde ne découvre rien de grand dans l'avenir; car que présagent ces prophètes, lorsqu'ils se hasardent à faire des prédictions? C'est la terre couverte d'un réseau de chemins de fer; c'est une époque plus riche que la nôtre en jouissances sensuelles; c'est un siècle où l'on possédera généralement une plus grande liberté politique, où le bien-être sera également réparti; c'est une génération plus cultivée, qui aura lu les écrivains célèbres et qui saura les apprécier: voilà se que les plus hardis osent rêver pour la suite. Et cependant, que ces vues sont courtes! que ce cercle d'idées est misérable! mais c'est là un effet de la malédiction qui pèse sur l'incrédulité, que, même dans ses plus grands élans, semblable au serpent qui l'introduisit dans le monde, elle rampe encore sur son ventre, se nourrit de poussière, et ne peut jamais se sortir de ce qui est périssable et matériel.

Elle ne peut saisir qu'un cercle perpétuel de choses terrestres: elle ne peut rien concevoir à la marche sublime de la Providence divine dans le gouvernement de l'univers, et elle ne comprend ni la destination de l'humanité, ni les moyens merveilleux par lesquels elle y tend pendant cette vie. La foi seule peut pénétrer avec certitude à travers les siècles à venir. À ses yeux le livre de l'histoire est ouvert, et en quelque sorte décacheté, pour les temps futurs comme pour les temps écoulés. Elle sait déjà quelle sera l'issue de toutes choses, et elle contemple la gloire de Dieu dans le passé, dans le présent et dans l'avenir.

Quand le Fils de l'homme viendra, et tous ses saints anges avec lui.

Écoutez bien ceci, incrédules à qui parviennent peut-être mes paroles. Où en êtes-vous, vous qui ne voyez en Jésus qu'un simple homme, qu'un excellent docteur sans doute, mais n'ayant pas un lieu d'origine plus relevé que Nazareth? N'êtes-vous pas profondément saisis, en voyant combien, d'un seul mot, Christ se place au-dessus des misérables idées que vous vous faites de sa personne?

Souvenez-vous qu'il décidera des destinées de tous les hommes sans exception; qu'il assignera aux uns la vie éternelle, et aux autres la mort éternelle, qu'il ouvrira le ciel aux uns et qu'il précipitera les autres en enfer. Or, qu'il veuille ainsi juger le monde, ce n'est point un disciple enthousiaste qui dit cela de lui: c'est lui-même qui le déclare; c'est lui-même qui, de la manière la plus expresse, se pose en juge des vivants et des morts.

Quiconque ne le reconnaîtra pas pour tel, le fait menteur, lors même qu'il lui donnerait des baisers à la Judas, des flatteries à la manière d'Hérode ou des louanges à l'exemple des pharisiens. — Oh! le grand jour que celui où Jésus se dépouillera des derniers voiles qui nous cachent encore sa face royale et reparaîtra glorieux dans ce monde, témoin jadis de son abaissement! Les cieux s'ouvrent, et, accompagné les mille milliers qui environnent son trône, descend sur la terre dans l'éclat de sa dignité.

Il ne vient plus comme serviteur, mais comme Seigneur et comme Maître. Ce n'est plus un diadème d'épines qui couvre son front, mais la couronne du monde entier est sur sa tête, et il tient à la main le sceptre, l'épée et la balance du jugement.

Le temps d'attente est aussi passé pour lui; le jour d'un triomphe complet et d'une éternelle victoire est arrivé. Ses amis vont à sa rencontre en poussant des cris de joie. Ses ennemis,... ô détresse! ô renversement de leurs calculs et des systèmes de leur invention! ses ennemis sont là confondus avec leurs livres qui lui enlevaient sa couronne, avec leurs discours où ils le rabaissaient au rang d'un simple sage humain, avec leurs sarcasmes et leurs moqueries dont ils accablaient ceux qui fléchissaient le genou devant lui. Maintenant ils voient celui qu'ils ont percé; maintenant ils comprennent que ceux qu'ils méprisaient, avaient raison; ils reconnaissent que ce que l'Évangile dit de Christ, est véritable; ils confessent que leurs prétendues explications n'étaient que des erreurs, que ceux qu'on vantait comme les flambeaux du siècle, n'étaient que de faux prophètes, et que leurs théories n'étaient que des feux follets qui les ont trompés.

Maintenant ils voient toutes ces choses: mais trop tard!

Quand le Fils de l'homme viendra, et tous les saints anges avec lui, Alors, dit notre texte, que fera-t-il?...

Heurtera-t-il encore en ami à la porte des pécheurs?

Criera-t-il encore: Venez à moi, vous tous qui êtes travaillés et chargés, et je vous soulagerai?

Dira-t-il encore une fois à ceux qui sont morts spirituellement: Revenez à la vie?

Jettera-t-il encore une fois le filet de son amour après ceux qui périssent loin de lui?

Non, non! le temps de grâce est passé. Alors il s'assiéra, non plus au puits de Jacob, non plus dans la barque des pêcheurs, non plus à la table des péagers; mais il s'assiéra sur le trône de sa gloire: car le grand jour du jugement dernier sera venu.

Spectacle terrible pour tous ceux qui n'auront pas mis leur attente en lui! Mais aussi pourquoi n'ont-ils pas cru en lui? Les Écritures ne leur parlaient-elles pas de sa gloire? Ne pouvaient-ils pas voir sa majesté dans le gouvernement de son Église? Ne les conjurait-on pas de recevoir la Parole, et d'éprouver par là si la doctrine de Jésus est de Dieu ou s'il parlait de lui-même?

Hélas! ce ne sont pas les moyens de conviction qui leur ont manqué; mais ils n'ont pas voulu que Christ régnât sur eux; ils lui ont refusé l'honneur qui lui revient. Alors ils seront forcés de le faire, mais sans qu'ils en reçoivent de récompense; CAR POUR CELUI QUI N'A PAS SU RECONNAÎTRE DANS JÉSUS CRUCIFIÉ LE FILS GLORIEUX DU PÈRE, LA VUE DE JÉSUS GLORIFIÉ SERA AU DERNIER JOUR SA CONDAMNATION.


***


II. Voyons maintenant le Seigneur levant de plus en plus le voile qui nous cache ce grand spectacle à venir.


Le Juge est à sa place. La trompette de la résurrection fait retentir à travers les sépulcres ses sons éclatants, et soudain tous les peuples sont rassemblés devant son trône, oui! devant le trône de ce Jésus si méconnu, si méprisé des hommes.

— Toi aussi, qui m'écoutes, tu seras là, et le Seigneur prononcera sur toi en dernier ressort. Tout dépend en effet de sa sentence; et à son tribunal le jugement du monde est réputé comme rien.

— Remarquez bien que ce n'est pas à nous de décider, quoique si souvent nous ayons la prétention d'être juges. À entendre les mondains, ce n'est pas seulement Isaac qui vit auprès de Dieu, mais c'est aussi Ismaël; c'est tout gai compagnon de leurs plaisirs, tout ami qui partage leurs fêtes, en un mot, quiconque leur est utile ou les amuse, ne blesse pas leur amour-propre et ne se met pas sur leur chemin. Leur principe par rapport au ciel est de «vivre et de laisser vivre;»leur mot d'ordre est celui-ci: «plus d'enfer, et pardon à tous les pécheurs.»

Mais leurs sentences ne sont que du vent. Un autre qu'eux aura le dernier mot dans cette décisive affaire; il les mesurera avec une autre mesure et les pèsera à une autre balance que les leurs. Devant son trône, les maximes et les prétentions des hommes prendront fin: là il n'y aura plus ni maîtres, ni serviteurs; là les dignités et le pouvoir seront de vains sons, les titres et les signes d'honneurs des puérilités sans portée; là il n'y aura plus de différence entre le riche et le pauvre, entre l'homme distingué et l'homme de basse condition; là les couronnes qui ornent les têtes des savants et des poètes s'en iront en poussière comme une feuille desséchée. Là apparaîtront pâles et sans éclat mille choses auxquelles le monde attache un grand mérite, qu'il exalte comme un développement admirable de l'esprit ou comme une preuve d'énergie, qu'il divinise et qu'il déclare dignes d'une couronne d'honneur.

Oui, monuments de l'art humain, productions du génie, écrits pleins d'érudition, poésies qui font battre des milliers de cœurs, palais et monuments célèbres de l'architecture, vous aurez eu votre temps; alors il sera passé! Alors le néant, semblable à une violente tempête, consumera tout ce qui appartient à ce monde et tout ce qui est le fruit de son esprit, pour faire place à des monuments plus relevés et plus durables. Il n'y a qu'une seule chose qui ne sera point désavouée. Que cette chose se trouve dans le cœur d'un péager, et le péager sera reçu; tandis que celui qui passait pour saint, mais à qui cette chose manque sera rejeté. Le moindre journalier qui possède cette chose, sera élevé par le souverain tandis que le roi qui ne la possède point sera abaissé. Il n'y a rien, en effet, qui puisse remplacer cette chose: ni noblesse, ni dignité, ni prétendue vertu, ni œuvre quelconque. Tout dépend de cette seule chose nécessaire, et elle seule constituera toute la différence qu'il y aura devant le Seigneur entre un homme et un autre homme.

Non, ce n'est point nous qui avons inventé distinction, si odieuse au monde, d'après laquelle il n'y a sur la terre que deux classes de personnel si on les considère au point de vue moral.

Jetez un regard dans l'Évangile, et partout vous verrez qu'il y est parlé d'enfants de lumière et d'enfants de ténèbres, d'enfants de Dieu et d'enfants du Diable, de gens qui marchent dans le chemin large et spacieux, et de gens qui suivent la route étroite. Et que lisez-vous dans notre texte d'aujourd'hui? Il séparera les uns d'avec les autres, comme un berger sépare les brebis d'avec les boucs. Et il mettra les brebis à sa droite et les boucs à sa gauche. Il n'est ainsi parlé que de boucs et de brebis. Intérieurement la séparation était dès longtemps faite; mais alors même se fera aussi extérieurement.

Se séparer !... Quel triste mot, surtout quand il s'agit d'une séparation qui doit être éternelle!Alors, l'ami saluera une dernière fois son ami; le frère celui qui a été porté dans le même sein que lui; l'époux la compagne de sa vie, et le pasteur le troupeau qui lui avait été confié.

Et il ne s'agira plus dans cette grande et terrible journée, de savoir si nous nous sommes aimés, si nous resterions volontiers ensemble. Oh! s'il ne s'agissait que de cela !... Mais alors tout dépendra de la réponse que nous pourrons faire à cette question: Avons-nous bâti sur l'unique fondement qui a été posé, savoir Jésus-Christ? Que l'un ait mis son attente en lui, et, non pas toi,... dès lors, prenez congé l'un de l'autre, donnez-vous encore un dernier adieu: car le temps de se séparer est venu; et ni larmes, ni génuflexions, ni prières ne peuvent l'empêcher: vous ne vous reverrez, plus durant l'éternité tout entière.

Lisez ce que Luc nous rapporte au chapitre XVII: De deux hommes qui seront aux champs, l'un sera pris et. l'autre laissé. De deux femmes qui moudront ensemble, l'une sera prise et l’autre laissée. De deux personnes qui seront dans un même lit, l'une sera prise et l'autre laissée.

Quand on pense sérieusement à ces choses, oh! qu'on se sent profondément triste, et qu'on a vite le cœur serré!... Mais malgré tout, la chose arrivera ainsi.

Il n'y a qu'un lien qui dure à toujours: c'est celui qui repose sur une foi commune en Jésus-Christ. Les mains qui se seront unies dans le Crucifié, demeureront à jamais unies. Les alliances formées en son nom et dans son amour, survivront au temps, au ciel et à la terre; mais elles seules survivront. Si donc c'est de cœur que vous aimez, comment pouvez-vous goûter un instant de bonheur dans la possession des personnes qui vous sont chères, aussi longtemps que vous n'êtes pas assurés de les posséder pour l'éternité? O trésor de tous les trésors, que le sentiment qu'on marche ensemble du côté de la Jérusalem céleste! Unissez-vous en Jésus, et vous posséderez cette perle de grand prix!


***

III. Les préparatifs du jugement achevés, le jugement lui-même commence.


Le Roi dirige d'abord ses regards sur ceux qui sont à sa droite: c'est un peuple de peu d'apparence; il n'y a là ni beaucoup de nobles, ni beaucoup de sages, ni beaucoup de puissants selon la chair. Pour la plupart ce sont des petits, des gens méprisés; aux yeux du monde, c'étaient des esprits faibles, des insensés, des hommes dont on ne faisait aucun cas. Toutes les tempêtes ont fondu sur ce peuple; il a été désigné par mille termes injurieux. Maintenant il est élevé en gloire!

C'est lui que le Roi honore le premier de ses regards; et quel amour que celui qui se reflète dans ses yeux! Jésus ouvre sa bouche pour faire entendre leur sentence, et quelles douces paroles que celles qu'il va prononcer! Venez, dit-il, vous qui êtes les bénis de mon Père; possédez en héritage le royaume qui vous a été préparé dès la création du monde. Quel ravissant accueil!Venez: c'est l'appel d'un ami; c'est l'invitation du grand Roi à se jeter dans ses bras et à le presser sur son cœur.

Oh! qu'un tel mot: Venez! termine et couronne seulement notre pèlerinage; et peu importe que, dans maintes circonstances de notre vie, nous ayons entendu le cri: Marchez! quand nous n'avions devant nous qu'un chemin obscur, qu'un désert aride, qu'une Mer Rouge à passer, ou des flammes de feu à traverser!

Venez, les bénis de mon Père... Quel beau nom, quel titre précieux! Bien-aimés de mon Père, ses joyaux, ses élus! 0 noblesse sans égale! qu'ils sont haut élevés, ces pécheurs!

Venez et héritez... Comprenez bien ce mot; la vie éternelle est un héritage, un legs, et non point une récompense méritée. Tout sujet de nous glorifier est exclu; et c'est la mort de notre Frère premier-né qui nous a ainsi rendus riches.


Héritez le royaume... le royaume de la perfection, de la félicité et de la gloire. Non, mes amis, le monde ne finit pas à ces rivages lointains où la tempête mugit solitaire; il ne finit point à ces espaces où la lune répand ses pâles lueurs, et d'où les étoiles silencieuses regardent avec mélancolie vers la terre. Il y a, au delà, une autre région, plus vaste et jouissant de plus de clartés. Oh! là, il fait bien meilleur qu'ici. Là on ne tresse plus de couronnes pour orner des pierres sépulcrales; là ceux qui s'aiment n'ont plus à craindre de séparation; là aucune goutte de fiel n'empoisonne plus la coupe de la joie.

Un tel monde existe; car l'existence d'un Dieu le rend nécessaire: il doit y avoir un grenier où le Père de famille rassemble du désert ses précieux épis; il doit y avoir un lieu où les contradictions, les énigmes, les dissonances que nous rencontrons si souvent ici-bas, s'expliquent et s'harmonisent pour nous. Ce monde du bonheur le plus pur, c'est celui que les élus obtiendront en héritage.

Possédez en héritage le royaume qui vous a été préparé dès la création du monde. Écoutez bien: cette félicité vous a été préparée avant que vous fussiez nés. Ainsi c'est dans la pure grâce de Dieu que votre rédemption a sa source; et c'est ce qui rend aussi profonde qu'elle est glorieuse, la sentence prononcée par Jésus-Christ. À son ouïe, les rachetés se prosternent aux pieds du Roi, et l'adorent avec joie.

Puis le Juge se tourne vers ceux qui sont à sa gauche:

c'est un immense peuple; là se trouvent de grandes notabilités, des noms que l'histoire révère, des héros, des érudits, des poètes du premier rang, des honnêtes gens que le monde vantait comme des modèles de vertu, des dévots, mais à leur façon, même des pasteurs et des conducteurs d'église. Aucun rayon de soleil de justice et d'amour n'éclaire ces malheureux. Le Roi fixe sur eux un regard sévère, et le jugement qu'il porte contre eux forme le plus tranchant contraste avec la sentence qu'il vient de prononcer.

Là il avait dit: Venez, ici: Retirez-vous de moi;

là: Vous qui êtes bénis de mon Père, ici: Maudits;

là: Possédez en héritage le royaume, ici: Allez dans le feu éternel;

là: Le royaume qui vous est préparé, à vous enfants, ici: Le feu qui est préparé au Diable et à ses anges!....


Quelle épouvantable sentence! Et cependant le Roi la prononcera; et elle ne sera pas moins ferme que la première. Dans l'une comme dans l'autre, notre grand Dieu se glorifiera également: le ciel, avec ses alléluiah louera sa miséricorde; tout comme l'enfer, avec ses cris d'angoisse, rendra hommage à sa justice et à sa vérité.

Mais où donc se trouve la cause de deux jugements si contraires?

Dans la présence ou dans l'absence de cette seule chose dont nous vous avons déjà parlé. En effet, écoutez le Roi. Il dira à ceux qui seront à sa droite: J'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire; j'étais étranger, et vous m'avez recueilli; j'étais nu, et vous m'avez vêtu; j'étais malade, et vous m'avez visité; j'étais en prison, et vous m'êtes venus voir. À ces mots, les justes embarrassés, surpris et même effrayés, s'écrient: Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu avoir faim et que nous t'avons donné à manger, ou avoir soif et que nous t'avons donné à boire? et quand est-ce que nous t'avons vu étranger et que nous t'avons recueilli, ou nu et que nous t'avons vêtu? ou quand est-ce que nous t'avons vu malade ou en prison et que nous sommes venus te visiter? Et le Roi, répondant, leur dira: Je vous dis en vérité, qu'en tant que vous avez fait ces choses à l'un des plus petits de mes frères, vous me les avez faites à moi-même.

Ici l'on voit clairement... quoi donc? que le salut dépend des bonnes œuvres? Nullement. Les œuvres sont ici mentionnées, non comme moyen d'acquérir la vie, mais seulement comme signes ou comme preuves des sentiments et des dispositions intérieures auxquelles le royaume des cieux est promis.

Prenez garde, en effet, à ce mot Je, dont se sert Jésus. J'avais faim, dit-il, j'étais nu, j'étais étranger, et c'est moi que vous avez nourri, vêtu, recueilli. Christ était donc la vie de ces personnes: c'est lui qu'elles cherchaient et qu'elles aimaient, c'est pour lui qu'elles vivaient; c'est par amour pour lui qu'elles ont fait toutes ces choses; c'est en lui qu'elles espéraient; c'est lui qui était leur confiance. C'est par lui, et par lui seul qu'elles voulaient être sauvées; et cela est si vrai qu'elles s'effraient dès que le Roi commence à parler de leurs œuvres: elles s'effraient, tant elles ont peu songé à se faire de ces œuvres un trésor qu'elles puissent offrir en payement à Dieu; elles s'effraient, tant elles sont profondément convaincues que, si leur salut dépendait de leurs œuvres, elles seraient en réalité sans espérance; elles s'effraient, et leur question semble dire:

«Seigneur, nous serions-nous peut-être mépris, en te recevant pour notre seule justice, et comme pleinement suffisant pour nous sauver? Seigneur! si nous devons comparaître devant toi avec une justice qui nous soit propre, ah! c'en est fait de nous: nous aussi, nous sommes perdus!»

En un mot, la réponse que le Seigneur met dans leur bouche, les dépeint comme sentant profondément leur état de péché et d'impuissance à faire le bien, comme ne connaissant d'autre fondement à leurs espérances de salut, que Jésus-Christ et la médiation par son sang.

Or cette conviction que l'Écriture appelle la foi, et qui se montre nécessairement par les fruits de la piété, tels qu'une charité active envers ses frères; cette conviction, dis-je, est la justice qui seule peut subsister devant Dieu: elle est le sceau qui distingue les bienheureux pour lesquels Jésus a été pendu au bois, et à qui l'obéissance de ce grand souverain Sacrificateur est imputée de Dieu, comme si elle leur appartenait en propre.

Ceux qui sont à la gauche ne font pas moins connaître les sentiments qui les animent. À peine ont-ils entendu la parole du Roi: J'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire; j'étais étranger, et vous ne m'avez pas recueilli; j'étais nu, et vous ne m'avez pas vêtu; j'étais malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité; qu'ils protestent contre cette accusation qui leur semble mal fondée: Quand t'avons-nous vu avoir faim ou soif, être nu, étranger, malade ou en prison, et que ne nous t'avons pas assisté?

Mais dans cette réponse même se montrent des sentiments directement opposés à ceux des bienheureux placés à la droite.

Tandis que ceux-ci s'abaissent, ceux-là s'élèvent;

tandis que les premiers s'accusent, les autres ne pensent qu'à s'excuser et à se justifier;

tandis que les uns confessent leur pauvreté en bonnes œuvres, les autres donnent à entendre que s'ils eussent jamais vu Christ avoir faim, avoir soif ou être malade, ils l'auraient sûrement secouru.


Mais précisément parce qu'ils ne l'ont pas vu, ne l'ont pas cherché, ne l'ont pas reconnu, ne l'ont pas aimé, n'ont pas espéré en lui, ne l'ont pas eu en vue dans leurs œuvres, n'ont pas fait, par amour pour lui, tout ce qu'ils ont fait; c'est là ce qui témoigne contre eux, c'est là leur perdition.

La cause de leur condamnation éternelle se trouve ainsi dans l'éloignement de leur cœur pour Christ et nullement dans le manque de bonnes œuvres, selon le sens humain et vulgaire de ce mot.

En voilà assez, chers amis, pour vous faire comprendre que, si l'Écriture a plus de poids auprès de vous que les faux raisonnements ou la sagesse de ce siècle, le salut ne se trouve qu'en Christ, et que la seule justice qui puisse subsister devant Dieu, c'est celle de notre céleste Répondant, qui nous est imputée par la foi.

Si vous écoulez la Bible, et non pas les vaines explications par lesquelles on la tord, vous devez reconnaître que l'essentiel pour vous c'est d'avoir Jésus pour ami, puisque aujourd'hui ou demain il sera votre Juge.

Or vous savez que ceux-là seuls sont ses amis, qui, comme de pauvres pécheurs, mettent toute leur espérance en lui et dans les mérites de son sacrifice. Or comment les Écritures ne seraient-elles pas pour vous au-dessus de tout? Comment pourriez-vous douter que Jésus soit le Seigneur, qu'il vive et règne du haut de son trône glorieux? Est-ce que jusqu'à cette heure ses pieds ne se meuvent pas encore dans le monde? Jetez seulement un regard dans l'histoire de son Église, dans la plus récente surtout dans celle des missions! Combien elle doit vous couvrir de confusion, vous qui ne voulez pas croire! Combien elle rend vaines vos objections! Elle est la vraie apologie du christianisme: elle est, en faveur de l'Évangile, comme un journal paraissant par cahiers, que Dieu lui-même écrit, non avec des lettres, mais avec des faits, des prodiges et des miracles.

Incrédules, continuez, si vous le voulez, à nier que Jésus-Christ soit vivant; nous n'en voyons pas moins la colonne de nuée et de feu, symbole de sa présence: elle marche encore à travers le désert, et nous disons: Ici est notre Emmanuel!

— Moquez-vous de sa promesse: je suis toujours avec vous; et enfermez-le tant que vous voudrez dans le ciel: nous entendons dans le lointain des Hosanna mille fois répétés, et nous nous écrions avec joie: Qui est celui qui vient de Botsra, avec des vêlements teints en rouge, et qui marche avec tant de force? (Ésaïe XLIII, 1)

Accroupissez-vous devant vos pupitres, érudits aux âmes glacées, et cherchez à démontrer que tel ou tel morceau d'Ésaïe, de Daniel, des Évangiles, des épîtres n'est pas authentique; tandis que vous rongez des os décharnés et que vous perdez votre temps à battre de la paille, ces portions de là Bible que vous repoussez, passent par dessus le grand champ de mort de l'humanité; elles renversent vos idoles; elles créent derrière vous un autre monde, et ne s'inquiètent pas de prouver leur authenticité. Blasphémateurs impies, continuez à parler des histoires évangéliques comme de pures inventions, de fables et de mythes (L'auteur fait ici allusion au rationalisme allemand): pour nous, nous les voyons se réaliser encore de nos jours et attester leur vérité par des faits analogues; or que pouvez-vous contre les faits?

Est-ce un mythe, que ce cannibale qui, hier encore, était semblable à une bête féroce, et qui, aujourd'hui, ayant entendu la Parole que vous foulez aux pieds, est une nouvelle créature dans les bras du Sauveur?

Est-elle un mythe, cette île qui, comme le disent vos géographes, était naguère une hôtellerie de démons, plongée dans les ténèbres et dans toute espèce de vices, et qui, après avoir écouté la prédication de la croix, est devenue au milieu de l'océan comme un temple au Seigneur, rempli d'adorateurs pieux et sanctifiés? (Otahiti)

Les changements opérés par la Bible, le renouvellement du cœur et de la vie, l'amour, la paix, le courage, le désir de sainteté qu'elle produit souvent en un instant; tout cela, je vous le demande, est-ce un mythe, un rêve, une fable? 0 sceptiques, combien vous apparaissez faibles lorsqu'on vous attaque avec les armes que fournit l'expérience de chaque jour!

Vous avez de grands mots, et nous avons de grandes choses. Vous argumentez pour prouver qu'il ne peut pas se faire de miracles, et nous vous montrons des miracles. Que pouvez-vous encore leur opposer? Vous dites: C'est étonnant que le Seigneur.... soit Seigneur, n'est-ce pas? Mais nous, à l'exemple des apôtres, nous triomphons en disant: Nous avons vu sa gloire. Et dans celle conviction, nous demeurons au-dessus de toutes vos difficultés. Notre cause est confirmée par un miracle continuel, comme étant la cause même de Dieu. Le christianisme, semblable à la verge d'Aaron, pousse toute l'année des fleurs de vie et des fruits de paix, que l'on ne trouve chez aucun sage du siècle. Ainsi Jésus est Dieu; et c'est ce qui, de jour en jour, apparaît d'une manière plus frappante.

Efforcez-vous d'échapper à la perdition. Rendez hommage à Celui hors duquel vous ne sauriez trouver la vie. Baisez le Fils de peur qu'il ne se courrouce, et que vous ne périssiez dans cette voie, quand sa colère s'embrasera tant soit peu (Ps. II, 12). Puisez en lui cet amour, par lequel tout ce que vous ferez, vous le ferez pour Celui qui sera votre vie. Que nous ne vous rencontrions pas, au dernier jour, dans le nombre de ceux qui, étant à la gauche, s'entendront dire: Retirez-vous de moi, maudits!et qui iront aux peines éternelles. Mais que nous puissions vous trouver parmi ceux qui, placés à la droite, entendront ce glorieux appel du Seigneur:

Venez les bénis de mon Père, possédez en héritage le royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde! c'est-à-dire, parmi ces justes dont il est dit à la fin de notre texte, qu'ils iront à la vie éternelle. Amen!

FIN


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