(Cet Écrit s'adresseait aux Auditeurs-de-la-Table. NOUS LAISSONS DONC ABSOLUMENT DE CÔTÉ TOUTE AUTRE CONTROVERSE SUR LA NON-SUFFISANCE DE LA BIBLE.)
Quand Achazia, le fils d'Achab, envoya ses messagers s'enquérir de Baal-Zebub, dieu de Hékron, Élie, le prophète, se présenta devant eux et leur dit: Est-ce parce qu’il n’y a point de Dieu en Israël que vous allez consulter Baal-Zebub, dieu d’Ekron? 2 Rois 1, 3 (v. Segond)
N'Y A-T-IL POINT DE BIBLE A GENÈVE, dirons-nous aussi, — quoique d'une voix bien différente de celle du prophète! — à certains Auditeurs-de-la-Table, que vous alliez à du bois, et qu'ainsi vous vous enquériez de planches qu'assembla le menuisier?
N'est-il donc plus en nos maisons, poursuivrons-nous, ce Livre De L'Éternel où vous-mêmes vous pouvez lire ces mots:
Que s'ils vous disent:
Enquérez-vous des esprits de Python et des diseurs de bonne aventure, qui gazouillent et grommellent (Si l’on vous dit: Consultez ceux qui évoquent les morts et ceux qui prédisent l’avenir, Qui poussent des sifflements et des soupirs) :
Répondez-leur: Le peuple ne s'enquerra-t-il pas de son Dieu! Aller pour les vivants aux morts!! À la Loi et au Témoignage! Que s'ils ne parlent pas selon cette Parole, pour eux il n'y aura point de lumière? Ésaïe VIII, 19, 20 (Un peuple ne consultera-t-il pas son Dieu? S’adressera-t-il aux morts en faveur des vivants?A la loi et au témoignage! Si l’on ne parle pas ainsi, Il n’y aura point d’aurore pour le peuple.).
A-T-ELLE DONC TARI, DIRONS-NOUS ENCORE, DANS LA VILLE DE L'ÉVANGILE, CETTE SOURCE DE VÉRITÉ CÉLESTE QU'Y FIT JAILLIR LA BIENHEUREUSE RÉFORMATION, et dont les eaux, bien plus abondantes et plus limpides que le fleuve qui sort de nos murs, s'élancèrent sur tant de contrées, pour y porter la fertilité des cieux?
Mais, quelque profonde, et aussi quelque légitime, que soit notre douleur, à la vue de la déplorable aberration de ceux mêmes qu'on aimait à compter parmi les Disciples de la Bible, ce n'est pas de notre chagrin qu'il s'agit ici;
mais c'est de donner gloire à la Parole de Dieu, en montrant par elle à ces esprits égarés, quelle est l’Audace, quel est le Crime, et quelle est la Honte de ceux qui en viennent jusqu'à nous annoncer des Révélations divines et mystérieuses, ou des Communications entre le ciel et la terre, par le moyen d'une table.
C'est donc ici l'essentiel; nous voulons dire, de repousser, par la Bible, de telles énormités; et c'est aussi ce que va faire cette sainte Parole: si du moins on l'écoute!
Il est bien vrai que le cœur se serre, et que l'indignation s'émeut, à la vue d'une telle outrecuidance; et que le dégoût, autant que l'aversion qu'elle inspire, conseillerait de laisser là ces esprits avec leur maladie, et de se borner à demander à Dieu qu'il les ramène et les guérisse; mais, d'un autre côté, la Bible, la PURE ET BRILLANTE RÉVÉLATION DE DIEU, nous somme de la mettre en face de ces ténèbres; et cela même, pour que dans cette Genève, qui, depuis plus de trois siècles, a vu resplendir sur elle la lumière de la BIBLE, cette même lumière mette comme au grand jour l'Audace, le CRIME ET LA HONTE d'une entreprise qui n'a que trop de rapport avec celle de ces gens turbulents et hautains, qui, dans le camp d'Israël, prirent aussi l'encensoir et s'écrièrent: L'Éternel est avec nous! Nombres XVI, 1-3.
Que la Bible s'ouvre donc, et qu'elle nous montre, dans ces Auditeurs-de-la-Table,
C'était aux jours de l'impie Achab, roi d'Israël. Josaphat, le pieux roi de Juda, avait, par faiblesse, uni ses armes à celles de cet idolâtre; mais toutefois, avant d'aller au combat, il voulut consulter la bouche de l'Éternel.
Alors un vrai prophète, Michée, fils de Jimla, dut s'approcher des deux rois; mais il ne le fit que pour ne leur dire absolument que la parole même du Seigneur. Sur quoi, le bahalin (serviteur de Baal) Tsidkija, qui s'étant fait des cornes de fer, prophétisait que par elles Achab consumerait ses ennemis, s'approcha de Michée et le frappa sur la joue. 1 Rois XXII.
Quelle audace! s'écrie tout homme qui reconnaît en Michée le prophète du Dieu vivant; et non seulement de le frapper, mais de le faire en lui égalant, ou plutôt en lui préférant, les mensonges et les prétentions d'un bahalin (serviteur de Baal)!
Quelle audace encore! ajoutons-nous, que celle de ces autres vanteurs de révélations, que l'Éternel n'avait point envoyés, et auxquels il n'avait point parlé, et qui, cependant, produisaient avec assurance leurs visions de mensonge et la tromperie de leurs cœurs! Jérémie XIV, 14.
Quelle audace ensuite! disons-nous de plus, que celle de ces exorcistes, qui même invoquaient le Nom du Seigneur Jésus pour accomplir leurs ténébreuses pratiques! Actes XIX, 13 : Quelques exorcistes juifs ambulants essayèrent d’invoquer sur ceux qui avaient des esprits malins le nom du Seigneur Jésus, en disant: Je vous conjure par Jésus que Paul prêche!
Quelle Audace donc, concluons-nous, que celle de ces nouveaux bahalins (serviteur de Baal), de ces nouveaux vanteurs de révélations, de ces nouveaux fils de Scéva, qui aussi, de fait, frappent à la joue les Prophètes et les Apôtres, quand ils disent et impriment que l'Éternel leur a parlé, quoiqu'il ne l'ait jamais fait; et quand ils se permettent,... «et cela par le moyen d'une table!!» de produire et de réclamer l'Esprit Saint, et de faire le Fils de Dieu paraphraser un auteur équivoque!
N'est-ce pas, Vous qui craignez l'Éternel et qui croyez donc la Bible! n'est-ce pas qu'une telle superbe est à vos yeux une entreprise si monstrueuse, que vous hésitez entre la qualification de fous et d'aliénés, et celle d'impudents et de profanes, à donner à ceux qui même se targuent de leur effronterie!
Mais enfin calmons-nous; et nous renfermant dans la sobre et tranquille discussion du sujet :
voyons comment l’Audace de cette prétention à de nouvelles révélations célestes renferme, sans pudeur,
d'abord une censure de la conduite de Dieu;
ensuite un blâme sur l'Église de Christ,
et enfin un dédain, si ce n'est une moquerie, des pieux et savants travaux des défenseurs de la Bible.
Non point que nous écrivions maintenant un livre soit sur le Canon des Écritures, soit sur la complète inspiration du Livre de Dieu, puisque ce ne sont que quelques pages seulement que nous désirons présenter même aux plus simples du peuple: mais toutefois en reconnaissant en eux le beau caractère de Disciples de la Bible.
C'est donc à quiconque, chez nous, croit la Bible et lui soumet son cœur, que nous disons que l’audace des Auditeurs-de-la-Table se montre en ces trois procédés-ci:
1° C'est une censure de la conduite de Dieu.
En effet qu'a fait Dieu, quant à ses diverses Révélations? D'abord, au temps des Prophètes, il défendit absolument d'ajouter, sous quelque prétexte que ce fût, même une seule parole à ce que sa bouche avait prononcé.
N'AJOUTE RIEN À SA PAROLE, répéta le Fils de David, de peur qu'il ne te reprenne, et que tu ne sois trouvé menteur. Proverbes XXX, 5, 6 (Toute parole de Dieu est éprouvée. Il est un bouclier pour ceux qui cherchent en lui un refuge. N’ajoute rien à ses paroles, De peur qu’il ne te reprenne et que tu ne sois trouvé menteur.).
Ensuite, aux jours mêmes de Jésus-Christ et des Apôtres, IL FUT INTERDIT DE RIEN AJOUTER AUX PAROLES DE DIEU; et le Sauveur, en disant à ses Disciples: Si cela n'était pas, je vous l'eusse dit, affirma qu'il a dit toute la vérité que son Église doit entendre. Apocalypse XXII, 18 : Je le déclare à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre: Si quelqu’un y ajoute quelque chose, Dieu le frappera des fléaux décrits dans ce livre; Jean XIV, 2 : Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. Si cela n’était pas, je vous l’aurais dit. Je vais vous préparer une place.
N'est-ce donc pas censurer Dieu, et de fait taxer l'Esprit Saint d'avoir oublié le nécessaire, si même ce ne fut pas l'essentiel, que de dire que les vérités que révèle la Bible et que les enseignements qu'elle fournit, sont si peu complets et si peu suffisants, qu'il a fallu que de nouvelles et mystérieuses révélations s'y ajoutassent, et qu'ainsi de plus intimes communications s'établissent entre le ciel et la terre?
Et cette censure-là, comment la nommerons-nous, si ce n'est de L'AUDACE?
Et toutefois cette AUDACE ne se borne pas à censurer Dieu; elle accouple encore à cette faute.
2° Un blâme jeté sur l'Église de Christ.
Car enfin, si cette Église du Dieu vivant est la colonne et l'appui de la vérité, 1 Timothée III, 15, quelle colonne a donc été celle qui n'a pas porté tout l'édifice; puisque à cet édifice aurait manqué, jusqu'à ce jour, les Révélations divines et mystérieuses ou les Communications entre le ciel et la terre qu'une Table devait transmettre à ses Auditeurs?
Il a donc été faux cet appui de l'Église, et ainsi l'office, sur la terre, de cette Épouse du Fils de Dieu a été tout au moins infidèle, puisque, pendant plus de dix-huit cents années, loin de soutenir et garder toute la vérité de Dieu, elle en a laissé de côté certainement une portion, et qu'ainsi la Bible, le Livre du ciel, le Recueil et Canon des Saintes Écritures, n'a, au plus, été qu'un livre défectueux, où manquaient encore des feuillets; et par cela même qu'un Recueil à défauts et à lacunes!
Qu'a-t-elle donc fait cette Église de Christ, pendant ces dix-huit siècles? Quelle a été sa persuasion; comme aussi qu'ont été ses travaux, ses luttes, ses délivrances, ses triomphes et sa gloire; et bien particulièrement que furent la paix et l'allégresse de ses enfants, puisque tout cela ne fut qu'aventure, que téméraire et presque usurpé, et que le St-Esprit, s'il eût été plus attentif..., nous parlons en imprudent! — 2 Corinthiens XI, 23 (Je parle en homme qui extravague), n'eût certainement pas posé de telles couronnes sur un conseil de Dieu qui était encore incomplet?
Évidemment si la Table a récemment fourni des révélations divines, l'Église, qui n'avait pas encore la Table, n'eut donc pas non plus ces communications du ciel. Que l'Église donc a eu tort et d'avoir confiance et de triompher!
Or, parler ainsi, n'est-ce pas censurer et condamner aussi l'Église; et ce blâme-là, qu'est-il encore sinon de L'AUDACE? Mais y en aurait-il moins dans ce qui va suivre?
3° Le dédain pour les pieux et savants travaux des défenseurs de la Bible.
Certainement ce ne peut être qu'avec un sourire de pitié que les Auditeurs-de-la-Table regardent vers les études, les recherches, les travaux et le dévouement illimité de tant de docteurs, anciens et modernes, qui tous, finalement, se sont abusés et totalement mépris, quand ils ont reconnu et magnifié la perfection de l'ensemble des Saintes Écritures, et ainsi le caractère solennel, majestueux et immaculé du Livre de Dieu.
Pauvres intelligences! qui n'ont pas discerné que ces Révélations-là, toutes parfaites qu'elles semblaient être, n'étaient cependant qu'ébauchées, et qu'ainsi le dernier ciseau du Maître manquait encore a la beauté de leurs traits!
Pauvres ignares! qui n'ont pas vu que ces Révélations, ces Communications célestes, étaient encore incohérentes, et qu'elles attendaient donc que certain lien les rapprochât et les unît!
Pauvres, pauvres apprentis de la Bible, qui n'ont pas senti que le Témoignage du St-Esprit dont cette Bible s'accompagne, n'était encore que douteux, que hasardé; et qu'ainsi, quant au langage même de cet Esprit, ni les centaines de manuscrits recherchés et sondés; ni leur merveilleuse harmonie; ni l'accord tout aussi surprenant des versions les plus antiques et les plus diverses; ni la voix solennelle et puissante qui toujours sortit de ces volumes tant de fois roulés et déroulés; que tout cela ne fut, en définitive, qu'un essai, qu'un aperçu, qu'un son tremblant et de toute manière incertain, puisque le murmure de la Table ne s'était pas encore fait entendre!
O pieux et savant Bengelius! — pour ne nommer que toi! — qu'as-tu donc écrit à Reuss, ton cher disciple, quand tu lui disais: «Prends et mange en simplicité le pain de l'Écriture, sans t'inquiéter si tu rencontres ça et là quelque peu du sable que la meule du temps y mêla?» N'aurais-tu pas dû plutôt lui dire: «Mange-le, ce pain: mais comprends, en même temps, que tu n'y as pas encore tout le froment céleste; la Table, la Table, n'en ayant pas encore moulu les derniers grains?»
Mais c'est assez quant à l'impertinence — pour ne pas répéter ici le mot un peu dur d'AUDACE! — de nos Auditeurs.....
Et cependant, heureux seraient-ils encore si, à cette première iniquité contre la Bible, ils n'en joignaient pas une seconde, et qui est
Oui, le Crime; car si c'en est un, devant la loi du monde, que de fabriquer de la fausse-monnaie, ou même seulement de lui donner cours, en sera-ce un moindre, devant la loi céleste, que de produire et faire passer, au milieu d'esprits inattentifs ou peu clairvoyants, et pour Révélations divines et Communications célestes, ce que Dieu nomme des visions de mensonge, des divinations de néant et la tromperie du cœur? Jérémie XIV, 14.
Ne sera-ce donc pas un CRIME, que de mettre en circulation, comme or du Sanctuaire, ce qui n'est, certainement, que le vil et impur métal de l'abîme; et cela, parce que, avec une certaine adresse, on aura plus ou moins habilement contrefait l'effigie du Roi de Sion, et qu'on l'aura frappée sur la monnaie même de l'enfer?
«De l'enfer!» reprennent les Auditeurs-de-la-Table, et probablement avec irritation. De quel droit attribuez-vous ainsi au Démon, — et encore sans nous avoir entendus! — ce que le Sauveur lui-même nous révèle et nous communique? Tout au moins, attendez de nous lire et de connaître ce qu'il nous a dit; et ainsi soyez assez juste, si ce n'est assez loyal, pour vous informer de ces Révélations, avant que de les réprouver!»
Nous n'avons pas besoin, répondons-nous, pour juger le Menteur, de prêter l'oreille à tout ce qu'il saurait dire. Il nous suffit, pour reconnaître que c'est lui qui parle, de lire les dix ou douze mots qu'il a osé publier, quand il a dit qu'une Table lui fournissait des Révélations divines et mystérieuses, ou des Communications entre le ciel et la terre.
Ce peu de poison-là, nous dit assez que sa douceur est bien celle de l'arsenic; et ce serait, pensons-nous, se montrer plus qu'imprudent, que de s'en nourrir pour «s'assurer» qu'il tue.
Ne nous demandez donc pas d'attendre vos volumes, pour nous «assurer », par leur lecture, qu'ils ne renferment que les subtilités et les visions perfides du Menteur. Leur titre nous est plus que suffisant à cet égard; et aussi dès que nous avons lu, nous sommes-nous écriés, d'abord: Quelle AUDACE! puis bientôt après: Quel CRIME! Et c'est bien ce dernier mot que nous répétons, et aussi distinctement que possible.
Et nous le faisons, — vous redisons-nous, et sans nous émouvoir, — parce que NOTRE SAUVEUR, À NOUS, C'EST LE TÉMOIN FIDÈLE ET VÉRITABLE, et qu'il aurait cessé de l'être, si c'était sa voix qui fût sortie de votre Table. — En voici la preuve.
Ce Sauveur, ce vrai Sauveur, quand il parle sur lui-même, déclare qu'il est la Vérité; et puisqu'il lui, et corporellement, habite la divinité, dans toute sa plénitude, c'est donc bien en lui, et en lui seul, que se trouvent toutes les doctrines, toutes les promesses et toutes les grâces et leur puissance que Dieu communique du ciel à la terre.
Mais, d'un bout à l'autre de la Bible, Dieu déclare aussi que cette plénitude de lumière et de vie qui est en Jésus, ne nous parvient, absolument, QUE PAR L'EFFICACE DU ST-ESPRIT; et que, toujours et toujours, pour accomplir cette œuvre, LE ST-ESPRIT EMPLOIE LA PAROLE ÉCRITE DU SEIGNEUR: la Bible; et cela tellement, que jamais aucune grâce ni aucune force spirituelle ne parvient à l'Église, que par le moyen de cette Bible: c'est-à-dire de la Parole écrite de Dieu.
Or, que fait Satan, pour séduire, captiver et perdre finalement une âme?
Il réitère ce qu'il fit déjà dès le commencement, quand il réussit à détourner la Femme de la Parole même, du dire, de l'Éternel, et de lui faire croire autre chose que ce qu'avait prononcé la bouche de Dieu.
C'est-à-dire que le Démon, qui sait très bien QU'IL NE PEUT RIEN SUR L'HOMME QUI S'EN TIENT À LA BIBLE, s'efforce tout d'abord d'éloigner cet homme du Livre de Dieu, afin de l'éloigner par cela même du Sauveur à qui la Bible rend témoignage.
Et c'est pour y mieux réussir, que feignant de ne parler que de Jésus, il suppose et produit certains enseignements, certaines doctrines, certains ravissements, certaines extases, que des âmes avides d'émotions, ou que des imaginations exaltées, prennent facilement pour la vérité céleste, tandis que, de fait, elles se repaissent des plus funestes mensonges.
Et ce sont là précisément vos Révélations et vos Communications, Auditeurs-de-la-Table! Elles ne sont, les unes et les autres, que le subtil artifice du Menteur, qui d'abord par elles vous joue et vous asservit, et qui par vous, ensuite, veut s'asservir et, s'il le peut, perdre d'autres âmes.
Et si vous demandez encore d'où nous le savons, puisque nous n'avons pas encore lu vos livres, nous vous répondrons, sans erreur, que vous l'avez hautement déclaré, quand vous avez imprimé que vos Révélations et vos Communications célestes vous étaient transmises par une table.
Par une table!... Vous l'avez avoué! …… ce qui veut bien dire que ce n'est pas PAR LA BIBLE; et que par conséquent, puisque ce n'est jamais que par la BIBLE que l'Esprit Saint enseigne et bénit l'Église, évidemment vos Révélations ne sont rien moins que divines; et que quant à leur mystère, ce n'est assurément pas celui qui est en Jésus-Christ, puisque ce Chef, ou Tête, de l'Église ne communique à son Corps la vie qui est cachée avec lui en Dieu, Colossiens, III, 3, que par le moyen de la Parole écrite: c'est-à-dire de la Bible.
Impossible donc ici de nous tromper, quand nous affirmons que les Révélations que vous a transmises une Table, ne sont certainement pas celles que le St-Esprit reçoit de Dieu; et qu'ainsi donc, puisque vous les annoncez et produisez comme étant célestes, c'est bien de la fausse monnaie religieuse que vous fabriquez et répandez; et que c'est donc cela même qui, après vous avoir convaincus d'AUDACE, vous convainc encore du plus odieux des Crimes, et qui est de donner les mains au Meurtrier des âmes.
Et ne pensez pas qu'au bout du compte vous receviez jamais du monde le salaire que vous en espériez peut-être. C'est un mauvais Maître que celui qui vous subjugue à cette heure; et comme il est aussi… Vous pouvez le savoir!….. Le père du mensonge, s'il vous a leurrés par une promesse de quelque gloire, ou seulement même d'une approbation des hommes, il vous a menti; car ce qui vous reviendra de toute votre œuvre, sachez que ce ne sera que
Et cette HONTE, c'est le breuvage amer qui, pour vous, remplit et comble les Cinq Coupes que voici:
Première Coupe.
Le reproche secret de votre conscience: votre propre ennui.
«C'est tout le contraire! vous écriez-vous. Nous sommes parfaitement contents de notre œuvre: nous sommes sûrs qu'elle vient de Dieu, et aussi nous félicitons-nous de l'accomplir!»
Très bien! Messieurs! C'est en effet l'ordinaire; puisque dans aucun temps, quand une chose nouvelle a surgi, — que ç'ait été en religion ou en politique, ou même dans les brelans ouïes cavernes, — les auteurs de cette innovation-là n'ont commencé par s'en blâmer eux-mêmes.
Il y a dans l'élan fébrile et dans l'enthousiasme de toute entreprise nouvelle, — surtout si elle fronde les sentiments reçus et que par elle on se singularise, — une satisfaction d'orgueil et d'ambition à laquelle ne résiste guère notre pauvre nature; et ainsi, Messieurs, il n'est que très-naturel que le fanatisme et la superstition s'avancent alors de folie en folie, et aussi de chute en chute, avec l'aplomb, et même avec la fierté, que tel héros montra dans sa vaillance.
Mais la conscience, la conscience, n'en a pas moins ses droits; et aussi n'est-ce que d'eux seuls que nous vous parlons, quand nous vous demandons si, lorsque vous êtes sans témoins et seulement devant Dieu, — par exemple dans le silence d'une veille de la nuit! — vous n'en venez pas à vous demander, avec un pesant soupir, s'il est bien vrai que Celui qui vous sonde et qui rejette et maudit tout ce qui ne ressort pas de sa Parole ou qui ne lui donne pas gloire, reconnaisse et sanctionne réchauffement de vos pratiques; ou bien si, peut-être, il ne repousse point les curiosités, — pour ne pas vous dire un mot plus pénible! — d'une Table tournante?
Auditeurs-de-la-Table! vous le sentez, ce n'est point à nous à pénétrer dans votre for intérieur; mais enfin nous vous demandons si déjà vous ne buvez pas à cette Première Coupe?
Deuxième Coupe.
Vos défiances mutuelles. Ce n'est qu'entre les cœurs où l'Esprit Saint habite que la confiance est entière. S'il existe un certain accord entre les associés d'un même commerce, les affiliés d'une même corporation, les conjurés d'un même complot, les assermentés d'une même bande, et enfin les meneurs ou les suppôts d'un même pacte, toujours cet accord-là n'est-il que conditionnel et qu'intéressé; et aussi lie-t-il si peu le cœur et sa confiance, que, de coutume, le principal acteur de ce drame juge et contrôle du regard ses confrères et se complaît tellement dans son propre rôle, qu'il sourit intérieurement de la faute ou bévue qu'il vient d'apercevoir dans ses amis, et que, par excellence, il s'occupe du moi de sa personne, ne permettant pas qu'on en méconnaisse l'importance.
Telle est toute alliance dont la Bible n'est pas la force. Le faisceau que serre le lien pourri de l'intérêt est tout près de se dissoudre; et lors même qu'une horloge toute neuve, de son aiguille dorée montre le ciel, et que même encore elle sonne et répète des Révélations, si ce n'est pas l'Onction du Saint, 1 Jean II, 27, qui en assemble et en adoucisse les rouages, la machine, quelque solide et durable qu'elle ait d'abord paru, va s'user et s'altérer par de secrets frottements: et l'on ne tardera pas à dire ou bien qu'une des roues crie et s'arrête; ou bien que ses poids sont tombés; ou bien même qu'elle recule au lieu de marcher.
Ce qui veut dire que si l'intérêt, l'entraînement, le parti pris, la gloriole et maintes vanités forcent à continuer et à défendre ce qu'on annonça d'abord par des fanfares et des affiches, ce n'est bientôt plus qu'en baissant les yeux. «qu'en toussant et qu'en rougissant,» qu'on se rencontre, qu'on se félicite et s'encourage; qu'alors déjà les arrières pensées, les dépits et l'humeur introduisent leur sable et leur gravier dans les ressorts; et que même le fils ose à peine compter sur son père, qui, de son côté, ne lui donne plus qu'un des doigts de sa main.
Ainsi donc alors le doute, le soupçon et la méfiance se tiennent, comme en réserve, derrière les sourires; et déjà, — déjà! — le regret, avec tous ses déplaisirs ne fait plus de cette si belle coalition qu'une misérable et triste ligue.
Auditeurs-de-la-Table! n'est-il pas vrai, de nouveau, que cette Deuxième Coupe vous la tenez déjà, et que déjà vous l'avez goûtée?
Troisième Coupe.
Le mépris public. Car il est général; et c'est bien comme d'une seule et même bouche que dans nos villes et nos villages sortent le blâme et la moquerie, en même temps qu'un long cri de réprobation, sur votre folle et odieuse bravade.
Pauvres gens! murmurent les plus modérés. Quel égarement; quelle faiblesse d'esprit; quelle pitoyable absence de tout bon sens et de toute discrétion!
Misérables gens! s'écrient d'autres bouches. Quel orgueil; quelle sotte vanité; quelle manie de vouloir être quelque chose et de faire parler de soi!
Ce sont des fous! prononce la généralité, en haussant les épaules. Bien heureusement pour eux qu'il se trouve encore de la place aux Petites-Maisons.
Dites plutôt que ce sont des rusés! répliquent un grand nombre; et qu'ainsi chez eux, comme avec St-Simon ou Cabet, se rencontrent ceux qui profitent et ceux qui soutiennent.
Quelle honte! reprend avec indignation la classe instruite et cultivée, et qu'elle impudeur aussi, qu'on ose heurter de la sorte tous les sentiments et toutes les convenances, et fronder si cavalièrement tout ce qu'il y a de plus sacré: de plus solennellement reçu!
Où sont les gardiens de la morale publique! demandent enfin, et avec anxiété, bon nombre de ces familles où la Bible, la SAINTE BIBLE, est encore en honneur, et qui, à la lecture de votre impie proclamation, ont presque sangloté de douleur et d'amertume. Genève, oh! Genève est-elle donc si bas tombée, disent-ils, qu'au milieu d'elle ou mette publiquement une TABLE à la place du LIVRE DE DIEU! O Néhémie! Néhémie! ne peux-tu donc pas te relever chez nous et réparer nos brèches!
Tout autant de voix qui vous crient, — et qui ne s'en lasseront pas! — Auditeurs-de-la-Table! qu'elle est pleine, et jusqu'au bord, la Coupe de dédain et de repoussement que vous présente le peuple; et que quelle que soit votre répugnance, il faut, comprenez-le bien! oui, il faut que vous la buviez, et jusqu'à sa lie!
Quatrième Coupe.
Le gémissement de l'Église. Nous, Chrétiens, nous avions pour vous, nul de vous ne l'ignore!... le plus doux sentiment de fraternité; et jamais, jamais, nos affections cordiales n'eussent pu supposer qu'un jour viendrait où nous dirions, en pleurant: Ils sont sortis d'entre nous; mais ils n'étaient pas d'entre nous! 1 Jean II, 19……
Aujourd'hui, toute l'Église, à Genève, et d'un seul et même cœur, — car dans la charité n'est ni nationalisme ni dissidence! — se lamente sur vous et déplore votre chute: forcés que nous sommes de répéter, d'un côté: Comment l'or s'est-il ainsi terni? mais aussi, d'un autre côté: De quoi seraient-ils sages: eux qui rejettent la Parole de l'Éternel, pour consulter le bois? Ne sont-ils pas hébétés et fous, eux qui disent à une Table «enseigne-nous!» et qui par elle veulent communiquer avec Dieu? Lamentations IV, 1; Jérémie VIII, 9; X, 8.
C'est donc, en vérité, le deuil que nous, Chrétiens de Genève, nous avons revêtu, quand nous avons vu votre démence; parce qu'en elle nous avons cru voir aussi la réalisation de cette parole: Comme le Serpent séduisit Ève, par sa ruse, vos pensées, aussi, ne se sont-elles pas corrompues, en se détournant de la simplicité de Christ? 2 Corinthiens XI, 3. Et alors, en déplorant votre chute, — car serait-ce une apostasie, et faudrait-il que désormais votre nom fût celui d'hérétiques? — nous nous sommes couvert la face à votre endroit, en répétant: «Hélas! hélas! est-ce bien celui-là, et encore avec lui cet autre et cet autre, qui, abandonnant la Bible, la source des eaux vivantes, s'est creusé la citerne crevassée des inspirations d'une Table?» Jérémie II, 13. Serait-il possible que le Diable les ait pris pour qu'ils fassent sa volonté et qu'ils ne se réveillent plus de ce piège? 2 Timothée II, 25, 26.
Auditeurs-de-la-Table! la voilà cette Quatrième Coupe de Honte, qui se remplit, qui va déborder, et qu'il faut aussi que vous buviez, et à longs traits!
Mais que sera-ce encore, et certainement, de la Cinquième?
Cinquième Coupe.
Le jugement de Dieu. Soit dès à présent; soit, et infailliblement! dans l'éternité.
Sans doute vous êtes bien éloignés de réaliser cette Coupe de la colère, et même, à notre seul énoncé, vous souriez et vous plaignez notre sollicitude, ou plutôt notre incrédulité: et même encore, — car enfin, nous voulons vous croire de bonne foi! — vous déplorez, de votre côté, notre aveuglement, si ce n'est notre incapacité totale.
Mais votre illusion — nous pourrions dire, Dieu le sait! votre fanatisme! — effacera-t-elle de la Bible les dénonciations de l'Éternel contre toute insulte faite au St-Esprit; et n'est-ce pas une de ces insultes-là que vos citations des Oracles de Dieu, pour appeler les habitants du monde à écouter votre Table; et que votre invocation de la venue prochaine de Celui qui a été mort, mais qui est le Vivant, aux siècles des siècles, pour sommer notre peuple de prêter l'oreille, non pas à la BIBLE et à ses révélations, mais à vos planches?
Vous imagineriez-vous donc que l'Éternel, ôtant sa gloire de dessus sa Parole, va la donner à vos mystères, — pour ne pas dire à vos profondeurs! Apocalypse II, 24; — et qu'ainsi la vengeance que, dès ce monde, il veut tirer de toute imposture, passera par-dessus la vôtre, parce qu'à la folie vous aurez joint la révolte?
Préparez-vous, préparez-vous donc, Imitateurs de Simon le magicien! Actes VIII, 9, etc., à recevoir, à la face du peuple, et même bientôt, cette réprimande de la Bible: Votre cœur n'est pas droit devant Dieu; et à tâtonner, ensuite, dam vos propres ténèbres, comme Élymas à Paphos. Ibid. XIII, 6-11.
Et ce n'est pas tout! car si vous ne vous repentez, et si, vous endurcissant dans votre folie, comme autrefois le firent Jannès et Iambrès, 2 Timothée III, 8, vous allez de votre même pas d'aujourd'hui à la rencontre de l'éternité, c'est là qu'en effet vous rencontrerez l'Éternel: Amos IX, 12: en ce Jour redoutable, où, devant le trône de l'Agneau, se trouvera bien cette même BIBLE qu'ici-bas vous aurez écartée, mais où ne sera plus,….. non plus!….. VOTRE TABLE, et par conséquent plus aucune illusion; plus aucune déception; et plus aucune jonglerie!
Auditeur-de-la-Table! ne la voyez-vous donc pas cette Cinquième Coupe? N'est-ce pas la main même de Dieu qui la tient, et qui vous la fera boire?
À moins que ses compassions, selon tout notre désir, ne vous visitent et ne vous humilient! Déjà bien des fois la Sainte Parole, la bible, A reçu les attaques du Démon: mais tout autant de fois il a été dur à l'incrédule de regimber contre les aiguillons de la Vérité. Quant au désert un Coré; quand à Samarie, des bahalins; quand cet Elymas, en Chypre; quand un Munzer, en Franconie; quand les Libertins, à Genève; quand les Illuminés en Bavière; quand les Déistes en France, et finalement les Mormons, en Amérique et ailleurs, ont dit: «Écoutez-nous! Écoutez-nous! Le Ciel nous a parlé!» Est-ce pour longtemps que la Bible les a laissés faire, ou bien si toute leur jactance s'est honteusement brisée contre le Livre de Dieu, comme, en hiver, la vague se brise contre nos pierres à Niton?
Vous donc qui avez pu dire que d'une table sortait les Révélations du St-Esprit et les enseignements du Sauveur, ah! reconnaissez avec larmes, devant le Seigneur, votre AUDACE, votre CRIME, et votre HONTE, faites, et sans délai, le compte de vos voies, rebroussez chemin jusqu'aux témoignages de l'Éternel, Psaumes CXIX, 59, et abjurant ainsi, devant tous, votre égarement, recourez avec confiance aux miséricordes de celui qui pardonne tant et plus, pour l'amour de Jésus-Christ; et désormais, laissant, avec horreur, votre Table, soyez les disciples et les confesseur de la BIBLE!
FIN.
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