Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

BIOGRAPHIE RELIGIEUSE.

Fragments sur Richard Baxter.

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Nous avons entre les mains la biographie de cet éminent et illustre serviteur de Christ. Elle forme un volume d’environ cent cinquante pages, qui a été publié par la Société Américaine des Traités religieux. On nous fait espérer que cette notice va être traduite dans notre langue; on pourrait y joindre les Pensées à l'heure de la mort (Dying thoughts) de Baxter, ce qui ferait un livre plein d’intérêt et d’édification. En attendant, nous nous bornerons à puiser çà et là dans cette biographie quelques faits, qui ne pourront qu'inspirer à nos lecteurs le désir de lire le reste.

Richard Baxter avait une santé très délicate et de grandes infirmités. Il raconte de la manière suivante comment cette affliction devint pour lui une source de bénédiction.

«J’ai passé la plus grande partie de mon ministère sous le poids de ces infirmités, qui me faisaient vivre et prêcher dans l’attente continuelle d’une mort prochaine; et j’ai trouvé que cette dispensation était pour moi une inestimable source de grâces spirituelles.

- Car, en premier lieu, elle affaiblissait beaucoup la force des tentations auxquelles j'étais exposé.

- De plus, elle m’inspirait un grand renoncement au monde.

- Outre cela, elle m’enseignait à estimer beaucoup le temps; de sorte que si j’en perdais la moindre partie dans l’oisiveté ou dans des choses frivoles, c’était une véritable peine et un fardeau pour mon âme.

Aussi je dois dire à la louange du Dieu infiniment sage qui m’a conduit dans mon pèlerinage d’ici-bas, que le temps m’a toujours paru plus précieux que l’or ou que tout autre gain terrestre, et que je n’en ai pas méprisé les plus courts moments, non plus que je n’ai été séduit par aucun des péchés qui sont connus sous le nom général de paresse.

Enfin, mes souffrances de corps m’ont fait étudier et prêcher les choses nécessaires, et ont un peu excité mon cœur si tiède à parler aux pécheurs avec quelque compassion, comme un mourant doit parler à des mourants. Voilà les bienfaits que Dieu m’a donnés par cette affliction, et je bénis humblement sa miséricordieuse Providence de ce qu’elle a mis son trésor dans un vase de terre et m’a élevé à l’école de la douleur.»

C’est pendant qu’il était affligé d’une violente hémorragie qu’il composa le livre intitulé: Le Repos éternel des saints: ouvrage dont la salutaire influence a été plus vaste et plus profonde que ne peut l’apprécier aucune intelligence d’homme. Cet écrit a été une bénédiction pour le siècle dans lequel il a paru, et il l’est encore dans le nôtre. Lors même que Baxter n’eût composé que le Repos éternel des saints, il aurait un nom qui ne périra sur la terre que le jour où le monde lui-même sera consumé par le feu.

Richard Baxter ne pouvait plus, dans cette période d’extrême maladie, remplir ses fonctions de pasteur, et il gémissait de n’être plus utile aux progrès du règne de Dieu.

«Pendant que j’étais en santé, dit-il, je n’avais pas la moindre pensée de composer des livres, ni de servir le Seigneur d’une autre manière que par la prédication. Mais lorsque je me vis atteint d’une grande hémorragie, confiné dans ma chambre solitaire, n’ayant qu’un domestique auprès de moi, et condamné par les médecins, je commençai à réfléchir plus sérieusement sur ce repos éternel dont je touchais déjà les bords.

Afin que mes pensées ne fussent pas trop décousues, je me mis à écrire quelques pages sur ce sujet ne me proposant pas de passer les limites d'un ou deux sermons. Mais comme je continuais à être malade, et que je n’avais point de livres ni une meilleure occupation, j’étendis mon travail jusqu’au volume dans lequel il a été publié....

La première et la dernière partie ont été faites avant les autres, parce que je les destinais à mon propre usage; le reste du livre n’a été écrit que plus tard. Dieu daigna bénir tellement cet ouvrage pour la conversion de plusieurs, que cela m’encouragea à composer les autres livres que j’ai publiés depuis lors. En écrivant le Repos éternel des saints je n’avais que ma Bible et une concordance, et j’ai trouvé que le simple langage du cœur est ce qui frappe le plus le cœur des hommes.»

Un autre écrit de Baxter, connu sous le nom de «Appel aux inconvertis» y a obtenu aussi une célébrité et une influence remarquables. Voici comment l’auteur en parle:

«L’occasion de ce livre se trouve dans mes entretiens et mes rapports avec l’évêque Usher. Il approuvait beaucoup ma méthode ou mes directions pour la paix de la conscience, et il insistait beaucoup pour que j’écrivisse encore des directions adaptées aux différents états des chrétiens, et des réflexions contre certains vices particuliers. J’avais un grand respect pour l’évêque Usher, mais je ne me rendis pas à ses instances, pensant que je ne pouvais rien faire qui n’eut déjà été fait et mieux fait. Mais lorsqu’il fut mort, ses paroles revinrent fortement à mon esprit, et je résolus de suivre son conseil; je dois dire seulement qu’au lieu d’adresser de simples directions à la première classe d’hommes, aux inconvertis, je jugeai plus convenable de leur faire entendre de véhémentes exhortations.

Ainsi j’ai publié ce petit livre, dont le succès, par la bénédiction de Dieu, a surpassé celui de tous mes autres écrits, si l’on excepte «le Repos des saints». Dans l’espace d’un peu plus d’un an, vingt mille exemplaires de cet Appel furent imprimés avec ma propre autorisation, et dix mille autres exemplaires l'ont été depuis lors, outre plusieurs milliers qui ont paru dans des éditions clandestines, faites par le seul motif du gain. J’ai appris que des maisons presque tout entières, grâces en soient rendues à Dieu, avaient été converties par ce petit livre, dont je faisais si peu de cas.»

Mais ce n’est pas uniquement par ses livres que Richard Baxter travailla avec succès aux choses qui regardent le salut des âmes; il obtint aussi de grandes bénédictions dans l’exercice de ses fonctions pastorales.

Le troupeau qui lui était confié habitait le bourg de Kidderminster. Baxter donne lui-même quelques détails sur ses travaux et sur les grâces qu’il reçut pendant les quatorze ans qu’il passa dans cette paroisse.

«Avant la guerre, dit-il, je prêchais deux fois chaque dimanche; mais après la guerre (il s’agit de la guerre civile de l’Angleterre vers l’an 1660), je ne prêchai plus qu’une fois le dimanche, et une fois le jeudi, outre les sermons de circonstance. Tous les jeudis au soir, ceux qui avaient le plus de zèle et qui demeuraient dans mon voisinage, se réunissaient chez moi, et l’un d’eux répétait les principaux points du sermon; ensuite ils me proposaient leurs questions à ce sujet, ou toute autre difficulté sur des matières de religion, et j’y répondais.

Enfin, j’invitais souvent l’un ou l’autre des assistants à prier, et je priais moi-même avec eux. Une fois par semaine, outre cela, quelques-uns des plus jeunes, qui n’étaient pas en état de prier dans une si grande assemblée, formaient une petite réunion plus spéciale, où ils passaient trois heures ensemble en prières.

Chaque samedi soir, ces fidèles se réunissaient dans les maisons l’un de l’autre, afin de répéter le sermon du dimanche précédent, de prier et de se préparer pour le lendemain. Dans chaque intervalle de quelques semaines nous avions un jour d’humiliation pour une occasion ou une autre.

Pendant deux jours de chaque semaine, mon assistant et moi nous nous partagions quatorze familles pour les enseigner et les exhorter en particulier; il allait dans la campagne environnante, et moi, je parcourais les maisons de la ville....

Telles étaient mes occupations, et maintenant je dois vous raconter aussi, à la louange de mon miséricordieux Seigneur, quelques-uns de mes succès.

Ma prédication était suivie par un auditoire attentif et sérieux. L’esprit de controverse qui existait avant les guerres ayant cessé, je trouvai à Kidderminster un peuple docile et bienveillant. Le temple était habituellement rempli au-delà de ce qu’il pouvait contenir, en sorte que nous construisîmes successivement cinq galeries. Nos réunions particulières étaient également pleines. On ne voyait aucun désordre dans les rues le jour du dimanche, mais vous auriez pu entendre, en traversant les rues et les places publiques, plus de cent familles qui chantaient des psaumes et répétaient les sermons. En un mot, quand j’arrivai dans cette paroisse (et ceci soit dit en donnant gloire à Dieu pour les grâces inespérées qu’il a répandues sur les travaux d’un indigne serviteur tel que moi), il y avait à peine une famille dans chaque rue qui célébrât le culte domestique, et lorsque je m’éloignai de cette paroisse, il y avait dans plusieurs rues à peine une famille qui ne célébrât point ce culte, et qui ne donnât des preuves d’une sincère profession de l'Évangile. Et même dans les plus mauvaises familles, qui étaient composées en général des cabaretiers et autres semblables, il y avait toujours quelques personnes qui manifestaient des sentiments religieux....

Lorsque je commençai mes conférences personnelles dans chaque maison et mes catéchisations particulières, il y eut bien peu de familles dans la ville qui refusassent de les recevoir; et les récalcitrants étaient des mendiants à l’extrémité du bourg, lesquels avaient une si grande ignorance qu’ils étaient honteux de la laisser paraître. Rarement je quittais ces conférences privées sans que des larmes eussent été répandues, et que des promesses d’amendement eussent été faites.

Cependant il y avait encore au milieu de nous beaucoup de personnes ignorantes et inconverties; mais la plupart d’entre elles habitaient la campagne et non la ville. Plusieurs de nos pauvres gens comprenaient très bien les questions religieuses, et pouvaient juger de controverses très difficiles. Quelques-uns d’entre eux prononçaient de si excellentes prières que peu de ministres les auraient égalées pour l’ordre et la plénitude, pour le choix des expressions et la ferveur. Les dispositions de leur esprit et la pureté de leur vie étaient encore plus recommandables que leurs talents. Les personnes pieuses étaient, en général, humbles et dévouées, d’un caractère doux envers les autres, et sans reproche dans leur manière d’être et d’agir....

Après avoir raconté les succès que Dieu a daigné me faire obtenir dans ma paroisse, il est bon que je fasse également connaître les avantages spéciaux qui me facilitèrent cette œuvre: et j’entre dans ces détails pour l’instruction de mes frères dans le ministère évangélique.

Ce fut, d’abord, un avantage pour moi de venir auprès d’un peuple qui n’avait pas été placé auparavant sous un ministère propre à réveiller les âmes. Car s’ils eussent déjà résisté à une prédication puissante, et qu’ils se fussent endurcis contre le message de l’Évangile, j’aurais moins espéré.

Un autre avantage, c’est que j’avais un accent naturellement pathétique, chose assez importante pour des auditeurs du peuple. Et comme j’avais conservé ma vigueur d’esprit dans un corps extrêmement faible, mon âme avait plus de sérieux, et je prêchais en face des grandes réalités de la vie à venir. Le froid formalisme, assoupit les auditeurs au lieu de les réveiller. Il n’y a qu’une prédication sérieuse qui puisse rendre les hommes sérieux....

Je trouvai encore un grand avantage dans le zèle et l’activité des personnes pieuses de l’église, qui soupiraient après le salut de leurs frères, et m’aidaient beaucoup dans nos réunions privées. Comme elles étaient dispersées par toute la ville, chaque cercle qui se formait dans les maisons possédait un ou plusieurs membres toujours disposés à réprimer les discours profanes, à justifier la piété, à convaincre, à reprendre, à exhorter les gens selon leurs besoins, et à leur enseigner comment ils devaient prier et sanctifier le jour du Seigneur. Ces fidèles chrétiens se rendaient régulièrement dans les maisons de leurs voisins, afin de célébrer le culte domestique avec ceux qui ne pouvaient pas le faire par eux-mêmes. Leur conduite simple, humble, irréprochable, ajoutait un grand poids à leurs paroles. Les méchants ne pouvaient pas dire: Vos professeurs de religion sont aussi orgueilleux et aussi avares que les autres! Au contraire, la bonne vie des enfants de Dieu fermait la bouche aux adversaires, et ne fournissait aucun prétexte à la calomnie des mondains.»

Richard Baxter cite encore, parmi les avantages particuliers qui ont servi à étendre son œuvre, les réunions d’édification, la diffusion des livres saints et des traités religieux dans toutes les familles du troupeau, et même l’exercice de la médecine qu’il avait été appelé à entreprendre auprès de ses paroissiens les plus pauvres. Il leur rendait gratuitement ses services pour la guérison du corps, et cela les disposait à écouter plus favorablement ses exhortations pour la guérison de l'âme.

Baxter signale aussi, comme l’une des choses les plus précieuses pour ses travaux d’évangélisation, la piété qui régnait parmi tous les pasteurs des environs.

«C’étaient, dit-il, des ministres pleins de foi et de zèle, qui vivaient ensemble dans la plus parfaite union. Leur prédication était calme et forte, leur esprit paisible et doux; ils désavouaient hautement les trahisons et les iniquités de notre époque; ils se dévouaient avec un zèle ardent au salut des âmes; ils n’appartenaient à aucune faction, mais recherchaient tout ce qui est bien en toutes choses.»

Cependant Baxter fut en butte à de longues et cruelles persécutions; il dut comparaître devant le juge Jeffries, qui s’est fait un nom si infâme dans les annales de la justice humaine (surnommé le «juge qui pend»; mort à 43 ans). L’espace nous manque pour suivre le chrétien humble et ferme en présence de ce juge prévaricateur, et enfin sur son lit de mort. Nous pourrons y revenir.

Archives du christianisme 1838 07 28


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