Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

BIOGRAPHIE RELIGIEUSE.

Martyre de Rafaravavy dans l’île de Madagascar.

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Persécution.


Les faits édifiants et remarquables qu’on va lire sont traduits en abrégé d’une circulaire publiée récemment par la Société des Missions de Londres.

Depuis l’origine de la Société des Missions de Londres, disent les secrétaires du Comité, jamais l’assemblée des directeurs n’a éprouvé une sensation plus vive que celle qui a été produite lundi au soir, le 8 de ce mois (janvier), par les diverses communications verbales et écrites concernant les mesures de rigueur du gouvernement de Madagascar contre les disciples du Rédempteur dans cette contrée.

Toute autre affaire a été suspendue, et l’on a senti, sous l’influence d’une profonde émotion qui ne sera pas oubliée de longtemps, que c’était un devoir solennel de s’humilier devant Dieu, et d’offrir ses supplications au pied du trône de la grâce en faveur de la sainte cause que l’ennemi s’efforce d’abattre, et du troupeau persécuté qui résiste jusqu’au sang.

Oui, nous avons versé tout à la fois des pleurs de compassion et des pleurs de joie et de triomphe, en voyant que, par la grâce de Dieu, la persécution qui frappe les chrétiens de Madagascar a réveillé l’esprit de l’Église primitive, et produit, dans l’invincible fermeté de la première victime, une nouvelle démonstration de l’efficace et de la vérité de l’Évangile, Rafaravavy, femme pieuse et sainte, s’est montrée, comme Antipas, FIDÈLE JUSQU’À LA MORT, et a obtenu la couronne de vie.

Plusieurs des chrétiens indigènes ont été appelés à souffrir l’emprisonnement, l’esclavage et la perte de leurs biens. Jusqu’à présent l’histoire de cette persécution est pure de tout exempt d’apostasie. Dieu a fortifié la foi et la patience de ses serviteurs dans l’heure de l’épreuve; et ces fidèles, soutenus par les consolations de l’Évangile éternel, ont bravé les terreurs du monde, et suivi l’exemple des confesseurs et des martyrs qui ont honoré le berceau du christianisme.


«Il y a maintenant trois ans que la flamme de la persécution a été allumée avec violence à Madagascar par la publication d’un édit qui défendait toute œuvre d’instruction chrétienne dans ce pays. Quelque sincère que fût notre affliction à ce sujet, nous n’en fûmes point découragés. Notre espérance était soutenue, non seulement par le souvenir de l’histoire passée de l’église, et par la promesse consolante de son divin Fondateur que les portes de l’enfer ne prévaudraient point contre elle, mais encore par la connaissance que nous avions de plusieurs faits réjouissants qu’il ne nous était pas permis de publier.

«Le culte public du christianisme étant expressément défendu par l’édit de 1835 , ceux qui avaient professé la foi au Sauveur se trouvèrent placés dans l’alternative de s’exposer à la mort par une opposition directe aux ordres du souverain, ou de continuer en particulier l’usage du peu de moyens qui leur restaient pour leur instruction religieuse.

Sans provoquer ouvertement le déplaisir de la reine de Madagascar, ni s’enfermer timidement dans une entière obscurité, quelques-uns de ces chrétiens avaient l'habitude de se réunir le dimanche sur une montagne à quelque distance de la capitale, afin de lire l’Écriture, de chanter et de prier. Ils ont été récemment découverts, et cette circonstance a fait faire d’autres recherches.

Une boîte contenant des livres chrétiens ayant été trouvée près de la maison de la femme dont nous avons déjà parlé, celle-ci a été prise et conduite en prison; sa demeure et ses biens ont été immédiatement livrés au pillage; elle-même enfin, après avoir subi pendant plusieurs jours des tortures qui lui étaient infligées dans le but de lui faire déclarer les noms de ses compagnons, a été condamnée à souffrir une mort ignominieuse par la main des bourreaux. Quinze autres ont été saisis et condamnés à être esclaves, avec ces deux aggravations de peine, qu’ils ne pourraient jamais être rachetés par leurs amis, et que, s’ils étaient vendus à d’autres maîtres, ce serait sous la condition d’être forcés de travailler du matin au soir, jusqu’à la dernière limite de leurs forces. Leurs biens ont été en outre confisqués. Quant à ceux qui étaient mariés, leurs femmes et leurs enfants, qu’ils eussent fait profession du christianisme ou non, furent également réduits en esclavage, mais avec cet adoucissement qu’ils pourraient être rachetés. Le nombre total des victimes est d’environ cent personnes.

«Quelque grandes que soient les sympathies que nous inspirent ceux qui ont conservé la vie dans cette persécution, si toutefois ils vivent encore, notre intérêt s’est concentré spécialement sur les derniers jours de Rafaravavy, qui a été les prémices des martyrs à Madagascar. Comme elle est maintenant placée au-delà des atteintes de ceux qui ne peuvent tuer que le corps, nous nous sentons libres de par le Seigneur.

«Dans l’été de 1836, sa foi et sa patience furent mises à une rude épreuve, et, après l’avoir surmontée, elles devinrent plus précieuses que l’or qui a été éprouvé par le feu. Quelques-uns de ses esclaves l'accusèrent devant le gouvernement d’avoir observé le dimanche, gardé et lu un exemplaire des Écritures, et parlé de sujets religieux à plusieurs de ses amis. Tels étaient les crimes qu’on mettait à sa charge. Elle ne nia point; au contraire, elle reconnut la vérité de l’accusation, et ne se laissa entraîner à l’abandon de sa foi, ni par les cheveux blancs d’un père, zélé idolâtre, ni par les terribles menaces de sa souveraine. Placée chaque jour en face de la mort, elle déclara à l’un de ses amis, qui était le confident habituel des sentiments de son cœur, et qui mêlait souvent ses larmes aux siennes, qu’elle n’attachait aucun prix à la conservation de son existence, et qu'elle espérait, si son sang devait être répandu dans ce pays, qu’il y exciterait des émotions qui ne s'effaceraient plus.

«Le Seigneur ne nous a-t-il pas annoncé, disait-elle, que nous serions haïs de tous les hommes à cause de son nom? Le Fils de Dieu est mort à notre place, et cette mort nous délivrera bientôt de toutes nos souffrances. Je sais en qui j’ai cru; et, mon sang dut-il être versé, la Parole de Dieu doit retentir au loin dans cette contrée.»

Elle ajouta avec beaucoup d’émotion:

«Priez pour moi, afin que, si le Seigneur m’appelle à souffrir maintenant, il reçoive mon âme auprès de lui, et que, si je suis épargnée, je vive plus que jamais pour sa gloire.»

Elle poursuivit en disant que rien ne l’affligeait, sinon le triste état spirituel de ceux dont elle était entourée, et que la perspective du martyre lui était moins pénible que la vue de tous ses proches qui persistaient à vivre dans leur misère.

«La reine ne jugea pas à propos, dans ce temps-là, de lui infliger la peine de mort; on lui imposa une amende considérable et on l'avertit, avec de sévères menaces que, quoique sa vie fut maintenant épargnée, elle apprendrait à ne pas se jouer de l'édit de la reine.

«On trouverait difficilement dans toute l’histoire de l’église un plus frappant exemple de douceur et d’oubli des injures que celui quelle montra dans cette occasion. Tandis que plusieurs membres de sa famille, indignés contre ses accusateurs, lâches esclaves qui l’avaient bien mal récompensée de ses témoignages d’affection, les menaçaient d’un sévère châtiment, elle leur déclara, aussitôt qu’elle fut mise en liberté, qu’elle ne gardait aucun ressentiment de leurs mauvais procédés, mais qu’elle les leur pardonnait complètement. Elle implora la miséricorde divine en leur faveur, pria avec eux, leur adressa de bonnes exhortations, et s’efforça de les amener à la repentance et à la foi en Christ. Cet esprit de charité chrétienne envers ses accusateurs n’a pas été seulement une preuve de la réalité et de l’élévation de sa piété, il a porté aussi des fruits réjouissants.

«Après avoir vu cette esquisse de son caractère, on ne sera pas surpris d’apprendre que la nouvelle persécution l’ait rencontrée au nombre de ses premières victimes. Rafaravavy a eu l’honneur d’ouvrir la route du martyre à Madagascar. C’était auprès de sa résidence qu’on avait trouvé les livres défendus, c’est-à-dire la Bible et d’autres ouvrages sortis des presses de la mission. C’est donc sur elle que se sont appesanties les vengeances de la reine, et elle est tombée sous le glaive de l’exécuteur public; mais son esprit a été rejoindre les rachetés dans la gloire, et il est maintenant sorti de la grande tribulation.

Ses derniers moments ont été décrits de la manière suivante dans une lettre de M. Johns:

«Lorsqu’on eut trouvé les livres près de sa maison, tous ses biens furent pillés, sa personne saisie, ses pieds et ses mains liés de lourdes chaînes de fer. Pendant huit à dix jours, on employa inutilement tous les moyens possibles pour connaître les noms de ses compagnons; elle demeura ferme, parfaitement maîtresse d’elle-même, et subit le dernier supplice le 14 août 1837.

Elle avait écrit à diverses reprises à son amie Mme Johns: «N’ayez aucune crainte pour moi; je suis prête à mourir pour Christ, si telle est la volonté de Dieu.» Elle a été admirablement fortifiée jusqu’à l’heure de sa mort; elle était alors âgée de trente-huit ans.

Plusieurs personnes, même d’entre les plus âgées, observèrent qu’elles n’avaient jamais vu quelqu’un qui fut aussi opiniâtre que cette femme; car, quoique la reine lui défendit de prier, Rafaravavy priait encore dans les chaînes, et continua d’annoncer Christ aux officiers et à la foule qui l’accompagnèrent du lieu de la condamnation à celui de l’exécution. Là, elle ne cessa pas encore de prier, et exhorta tous ceux qui l’entouraient à croire en Jésus-Christ, jusqu’à ce que la lance du bourreau lui ayant percé le corps, l’eût empêchée de rendre ici-bas gloire à son Rédempteur.

«En racontant les détails de cette mort, M. Baker dit avec raison:

Il ne se trouve dans les annales de l’église aucun martyr qui ait souffert par des motifs plus purs, plus simples, et moins mêlés d’alliage humain. Cette femme n’avait jamais entendu parler de l’honneur du martyre sur la terre. Ce sujet n’était revêtu d’aucun éclat extérieur à ses yeux, puisqu’elle n’avait jamais lu aucune biographie de martyr. Il n’y avait pour elle qu’amertume et mépris. Son propre père et tous ses parents l’accusaient d’entêtement. On la regardait, en général, comme obstinée dans sa révolte, et par cela seul comme digne de punition. Elle n’avait près d’elle aucun ami terrestre pour la soutenir et la consoler.

Quant à sa position temporelle, cette femme n’était nullement pauvre, et, si elle avait voulu abjurer sa foi et demander pardon à la reine, elle aurait probablement sauvé sa vie. Mais tout son cœur, comme ses lettres l’attestent, était rempli de l’amour de Jésus. Elle endura la souffrance avec courage, comme voyant Celui qui est invisible. Ses lettres sont remplies de passages des Évangiles et des Épîtres, et ce sont ces déclarations de la Parole, sans doute, qui, sous l’influence du Saint-Esprit, ont affermi son âme dans sa dernière épreuve. Si le sang des martyrs est la semence de l’Église, nous pouvons espérer avec confiance que Rafaravavy n’aura pas péri inutilement. Elle est morte exclusivement et entièrement pour la défense de l’Évangile.

«Tels sont, continuent les secrétaires du Comité, les faits sur lesquels il nous semble superflu d’offrir un long commentaire. Et cependant, nous ne pouvons pas nous abstenir d’exprimer notre pieuse admiration, en contemplant une manifestation si évidente, si éclatante de la réalité et de l’efficace de l’Évangile. Il y a ici une femme païenne convertie, qui est soumise à l’épreuve du martyre, et qui refuse noblement d’être délivrée, parce qu’elle veut obtenir une meilleure résurrection; elle ne juge pas que sa vie mérite d’être estimée à la moindre valeur, si elle ne peut confesser le nom de Jésus-Christ.


«Quel est le chrétien qui n’éprouvera pas un sentiment de sainte joie et un doux transport, en voyant que, au bout de dix-huit siècles, l’Évangile qu’il a embrassé est toujours la grande consolation, même dans les moments les plus sombres et les plus périlleux de l’existence humaine?

- Où est l’ami des missions qui ne se lèvera pas en présence de ces faits, et ne rendra pas à Dieu les plus vives actions de grâces de ce que la religion de la croix peut encore susciter, même au milieu des cruautés du paganisme, ses confesseurs et ses martyrs?

- Où est le sceptique qui refusera de payer son tribut de respect, à la vue d’un courage moral si élevé, d’un principe si puissant au milieu des plus extrêmes périls, et d’une si humble soumission aux plus grandes souffrances?»

La circulaire de la Société des Missions de Londres se termine par une pressante invitation adressée à tous les chrétiens de consacrer la soirée du lundi, 29 janvier, à faire des réunions spéciales de prières pour les fidèles qui souffrent la persécution dans l’île de Madagascar. Cette époque est déjà passée depuis plusieurs semaines; mais nous pouvons et devons prier en tout temps pour nos frères, et nous espérons que nos lecteurs ne négligeront pas de remplir ce devoir.

Archives du christianisme 1838 02 24


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