Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

SITUATION RELIGIEUSE EXTÉRIEURE.

Hollande (3).

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Extraits du journal la Réformation, public à Amsterdam,

Septembre 1837.


Bunschoten, août. — Dans notre communauté civile il y a des maisons placées sous l’administration du gouvernement ecclésiastique des réformés, fondé en 1816, ou des pauvres sont logés gratis. Deux membres de cette Société ecclésiastique, alimentés comme pauvres, jouissaient de tels logements. La femme de l’un d’eux appartenait à l’Église réformée séparée, et comme les autres membres de leurs familles désapprouvaient la doctrine prêchée dans l’Église réformée nationale, ils assistèrent au culte des réformés séparés.

Ainsi ces deux familles allèrent ensemble écouter la bonne nouvelle du salut sans qu’on les inquiétât. Mais ce repos ne dura pas longtemps. D’abord un ancien et un diacre vinrent les exhorter à assister au culte de l’église nationale, ensuite ils le leur ordonnèrent expressément, en les menaçant de leur retirer leurs logements.

Comme ils ne se soumirent point à cette injonction, on leur fit payer le loyer; ensuite on voulut qu’ils présentassent de bonnes cautions pour leurs petits loyers; enfin on exigea le paiement sans retard.

Ces moyens ne réussissant pas pour ramener ces pauvres gens au culte national, on expulsa judiciairement de leurs demeures ces deux nombreuses familles, le bourgmestre leur donnant pour retraite le rivage de la mer, endroit qu’une marée ordinaire suffit pour inonder.

L’Église réformée séparée leur a fourni assez de toile pour se construire des tentes, les habitations étant fort rares dans ce lieu. Néanmoins on a mis tout en œuvre pour leur procurer un bon logement, et on espère qu’elles pourront en jouir bientôt. La femme de l’autre indigent, touchée par tout ce qui venait d’arriver, s’est jointe à notre église qui, malgré les garnisaires dont elle est chargée, jouit de cette paix de Dieu qui surpasse toute intelligence.


Oudloosdrecht, 6 août. — L’église de ce lieu, privée de son culte par la présence des garnisaires, a désiré profiter d’une visite du pasteur Brummelkamp pour entendre une prédication et recevoir les sacrements sur mer.

Les fidèles s’étaient réunis sur le bâtiment du frère N. Pos, lorsqu'ils virent s’approcher une barque montée par le bourgmestre de Loosdrecht et les garnisaires de ce village; ils descendirent aussitôt dans des chaloupes et s’éloignèrent du bâtiment, où il ne resta que seize personnes avec le propriétaire et sa femme, qui attendirent tranquillement l’issue de l’évènement. Bientôt un sergent s’approcha, sommant le propriétaire de faire sortir du bâtiment tous ceux qui s’y trouvaient, ce que celui-ci refusa, lui permettant d’examiner leur nombre. Cette visite fut refusée, et le bourgmestre cria: «Sergent! faites votre devoir,» celui-ci dit alors: «Tous doivent sortir!» Le bourgmestre ajouta: «Excepté les propriétaires.»

Les soldats montèrent sur le vaisseau avec grand bruit et en chassèrent avec violence tout ceux qui s’y trouvaient, menaçant de la crosse et de la baïonnette ceux qui étaient sur des chaloupes, ce qui obligea le propriétaire à prier ceux-ci de se retirer. Les soldats étant retournés sur le rivage, l’assemblée entonna le psaume LXVIIIe. À peine eut-on chanté la moitié du 1er verset, que le garde champêtre et un caporal se rendirent tous furieux dans le bateau du frère Lamine, dont la femme fut battue par le garde et menacée d’être taillée en pièces par le caporal, ainsi qu’une autre femme enceinte qui était avec elle, si elles ne quittaient pas le bateau; ce qu’elles ne pouvaient faire sans se jeter dans l’eau.

On commençait à craindre pour la vie de ces deux femmes, lorsque le mari de l’une d’elles arriva avec sa chaloupe et les sauva toutes deux. Lamme, qui avait voulu soustraire sa femme aux cruautés du garde, en reçut plusieurs coups de bâton et faillit être précipité dans l’eau. Le frère Stekelenburg , qui venait à son secours, fut traité de la même manière.

Les fidèles de retour dans le village se réunirent bientôt de nouveau dans la maison de M. Reymering, ancien de l’église, où ils soulagèrent leurs cœurs, en psalmodiant devant l’Éternel et en lui adressant leurs prières. Mais ils furent bientôt interrompus par les militaires qui, accompagnés tantôt du bourgmestre, tantôt du garde champêtre, firent des recherches chez tous les séparés, d’où ils chassèrent tous les étrangers dont le séjour n’avait pas été signalé au bourgmestre, en faisant les plus horribles imprécations; on les fit mettre ensuite hors du village par des gens armés.

On chercha encore dans la maison de M. Reymering, ami des séparés sans l'être lui-même, M. Hankok, demeurant à Lœnen; on ne la trouva pas: mais sa femme ayant été découverte dans une autre maison, la patrouille s’en empara. Le propriétaire de cette maison, M. Karsemeyer, voulant sortir pour faire sa déclaration, il en fut empêché par les soldats; étant parvenu néanmoins à sortir par une fenêtre, un soldat le poursuivit avec sa baïonnette, excité par son caporal qui lui criait: «Percez-le seulement.» Le juge fait une enquête sur ce qui s’est passé.

L’église ne put obtenir ce jour-là l’objet de ses désirs, mais le Seigneur exauça ses vœux dans la nuit du lundi au mardi suivant, où elle put entendre la prédication de l’Évangile et célébrer les sacrements avec l’église de Hilversum.


Bunschoten, 6 août. — Quelques personnes, venant du village de Huizen à sept heures du matin, furent empêchées par des militaires d’entrer dans la maison du frère R. Poort; et, se trouvant à neuf heures dans la maison du frère Baas, une patrouille voulut les faire sortir, mais comme ces soldats n’avaient point d’ordre à montrer qui les autorisât à cette démarche, ils refusèrent d’obéir; alors deux hommes furent traînés hors de la maison, et une femme fut très maltraitée. Quand on s’en plaignit au bourgmestre, il répondit que les militaires ne faisaient que leur devoir.


Zwolle, août. — Le nombre de nos frères prisonniers dans cette ville vient d’être augmenté d’un quatrième, qui, de même que les autres, ne pouvait payer l’amende à laquelle il était condamné à cause des réunions religieuses.


Bois-le-Duc, 18 août. — Deux frères, l’un d’Almkerk, l’autre d’Emmichoven , viennent encore d’être conduits ici enchaînés comme des criminels; en sorte que les prisonniers qui sont ici pour la cause du Seigneur sont au nombre de six, tous des deux villages susnommés.


Emmichoven, août. — Les séparés dans cette commune, ainsi que les autres chrétiens qui n’assistent plus au culte national, continuent d’avoir des garnisaires; on en met jusqu’à sept dans une maison; quelques familles n’en ont qu’un. Ils ne peuvent presque plus faire leur culte domestique, à cause des affreuses imprécations que cet acte de piété fait ordinairement vomir aux militaires.

Le jour du Seigneur est pour eux très pénible, parce que toute réunion leur est absolument interdite. Quelques-uns cherchent un refuge dans les oseraies où ils prient, chantent et s’édifient ensemble. Tout récemment ils se sont réunis sur une langue de terre écartée, où l’on se rendit de divers côtés en bateau pour assister à une prédication de notre pasteur Meerburg.

On peut facilement prouver par les faits que les violences employées contre les séparés n’ont d’autre but que de les faire rentrer dans la société ecclésiastique. Il n’y a qu’à se rendre auprès du pasteur de ladite société et auprès du bourgmestre en leur promettant de rentrer dans l’église nationale, et à confirmer cette promesse par sa présence au temple le dimanche suivant, et aussitôt les garnisaires sont retirés. C’est ce que quelques-uns ont fait.

L’ancien bourgmestre d’Emmichoven, M. J. den Dekker, dont la femme et les enfants se sont joints à l’église séparée, a dû loger sept soldats. Après avoir beaucoup souffert, satisfait à plusieurs demandes excessives, supporté la réalisation de plusieurs menaces, sans qu’il ait fait entendre la moindre plainte, il a été enfin obligé (on peut le dire sans exagération) pour sauver sa vie, de quitter sa maison avec toute sa famille, et de chercher une retraite près d’Almkerk , où il n’a pour demeure qu’une cuisine et un grenier, abandonnant sa maison aux militaires qui l’ont habitée encore 20 jours après son départ.


Hoorn, août. — Si nous nous sommes plaints dans le mois de juin dernier de l’insouciance de la police à l’égard des séparés, les abandonnant sans protection à la furie de la populace, après le procès contre M le pasteur H. de Cock , maintenant nous pouvons dire, à la louange du tribunal de cette ville, qu’il a pris sérieusement à cœur les outrages et les violences de la multitude irritée contre les séparés, et qu’il a fait des recherches exactes à ce sujet. Un grand nombre de coupables ont dû comparaître le 4 août devant le tribunal, qui les a condamnés, les uns plus, les autres moins, à l’amende, à la prison et aux frais.


Extrait du même journal. — Octobre.


«Les persécutions judiciaires, de même que les garnisaires, continuent toujours contre les églises des séparés.

Trois divers arrêts de la Cour, en date du 4 septembre, ont condamné notre frère H. Hœveker à Amsterdam à une amende de 630 fr. Le même jour notre pasteur Van Velzen fut condamné, de même qu’un autre membre de l’église, à payer 105 fr., et cela parce qu’il y avait eu plus de 20 personnes aux réunions religieuses.

Les amendes imposées jusqu’à ce jour pour de semblables délits, par les tribunaux d’Amsterdam seulement, s’élèvent à 4,200 fr. Des pétitions accompagnées de notre règlement d’église restent encore sans réponse.

Les tourments auxquels nous sommes exposés deviennent de plus en plus pour nous une épreuve salutaire; mais combien ne seront pas terribles les jugements de Dieu sur ceux qui persécutent son église!

Le juste, qui vit par la foi, peut supporter des persécutions, sachant que des biens meilleurs lui sont réservés dans le ciel. Quand même il nous faudrait quitter parents et patrie pour la cause de la religion, parce qu’on nous dérobe ici notre pain quotidien, Celui sans la volonté duquel un seul cheveu ne tombe pas de nos têtes, ne nous abandonnera pas.

«Les églises d’Almkerk et d’Emmichoven ont eu le bonheur de se réunir le 20 septembre sans être troublées dans l’exercice de leur culte. Dès 9 heures du matin, et même avant, 400 personnes environ se rendirent en bateaux, avec notre pasteur M. Meerburg, dans un champ éloigné où ils restèrent jusqu’à 6 heures du soir; à diverses reprises ils ont pu s’agenouiller sur la terre, suivant notre pasteur dans la confession de leurs péchés et dans la prière. L’église ne s’aperçut pas de l’absence d’édifice, et plusieurs s’en sont retournés dans leurs maisons, se réjouissant de ce que le Seigneur leur avait accordé une telle journée.»


Il y a, en principe, une différence entre ce qui se passe aujourd’hui en Hollande et les persécutions religieuses que nos pères ont souffertes en France, c'est que les dragonnades hollandaises ont lieu au dix-neuvième siècle, dans un pays et sous un gouvernement dits protestants.

Archives du christianisme 1837 11 11


 
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