Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

BIOGRAPHIE RELIGIEUSE.

QUELQUES DÉTAILS SUR LES TRAVAUX ÉVANGÉLIQUES DE HENRY PY.

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L'excellent frère que nous avons perdu, il y aura bientôt un an, a exprimé le désir que l’on ne publiât point de notice biographique à son sujet. Ce vœu d’une sincère et profonde humilité chrétienne doit être respecté, bien qu’il nous prive d’une abondante source d’édification.

Mais s’il ne nous est pas permis de communiquer à nos lecteurs des détails sur la personne même de M. Pyt, sur la manière dont il a été amené à l’Évangile et sur ses propres expériences spirituelles, nous croyons pouvoir du moins passer en revue quelques-uns des efforts qu’il a faits, dans le cours de son ministère, pour répandre en France les lumières et la bonne odeur de l’Évangile.


C’est en 1818 que Henry Pyt vint de Genève dans notre pays, et comme il prêchait ouvertement la rédemption gratuite par le sang de Christ, il fut bientôt désigné sous le nom de Morave.

On n’avait pas encore adopté à cette époque la désignation de méthodiste; ce mensonge 1ne s’est accrédité que plus tard sous le patronage des adversaires de la croix.

Le Morave de 1818, le méthodiste de 1850 s’établit d'abord à S***, dans le midi de la France. Le pasteur du lieu, déjà avancé en âge, lui confia toutes les fonctions de la prédication et de renseignement.

M. Pyt les remplit avec beaucoup de zèle; il prêcha, pendant plus d’un an, trois fois chaque dimanche, et il y avait, le soir de chaque jour de la semaine, une réunion où se rendaient avec empressement les protestants de la ville; on y voyait aussi venir les paysans des environs, au sortir du travail, avec leur bêche sur l'épaule.

Ces travaux parurent d’abord ne produire aucun résultat; mais les germes déposés dans le troupeau sortirent de terre au bout de quelque temps, et la ville de S*** recueille encore les fruits de la prédication de M. Pyt.


En 1819, une vocation lui fut adressée par la Société Continentale qui venait de s’organiser à Londres, et au service de laquelle il est resté jusqu’à la fin de son pèlerinage terrestre.

Il se rendit d’abord à V***, l’une des principales villes du département du Nord, et comme il ne s’y trouve qu’un très petit nombre de protestants, il essaya de commencer une œuvre parmi les catholiques. Il fit imprimer des cartes par lesquelles il annonçait des réunions où l’Évangile serait lu et explique.

Cette méthode amena, en effet, aux prédications de M. Pyt vingt à trente personnes, attirées les unes par la curiosité, les autres par l’intérêt. L’issue le fit bien voir; car après quelques temps il y eut plusieurs auditeurs qui vinrent sérieusement demander combien on leur paierait par mois, s’ils assistaient régulièrement à ces assemblées religieuses.

Le pasteur eut aussi à souffrir quelques tracasseries de la part des autorités civiles; on était alors sous la restauration. Après s’être adressé avec peu de succès aux catholiques et aux protestants de Y***, M. Pyt quitta cette ville, et s’établit à N***, village voisin.

Il y avait là une congrégation d’environ 150 protestants, qui étaient tous des prosélytes sortis de l’église romaine; mais ils ne connaissaient que très imparfaitement les doctrines fondamentales du Christianisme.

M. Pyt vint à eux la Bible à la main, et laissant de coté tout enseignement d’homme. Sa prédication les étonna d’abord, puis les porta, comme ceux de Bérée, à comparer ce qu’il disait avec le contenu de l’Écriture.

C’était un spectacle vraiment réjouissant que de voir ces paysans arriver avec empressement aux réunions, le Nouveau-Testament à la main, pour vérifier les choses qu’on leur annonçait. Ils étaient bien préparés à recevoir la bonne nouvelle du salut; car ils avaient un grand respect pour la Parole de Dieu.

M. Pyt ne tarda pas à reconnaître que le genre de prédication le plus utile à un tel auditoire, consistait dans de simples paraphrases de l’Écriture. Tous les dimanches, du matin au soir, les protestants de N*** entouraient M. Pyt, afin d’être instruits dans la voie de la vérité; chaque jour de la semaine, ils se réunissaient auprès de lui après leur travail, et ces réunions du plus haut intérêt se prolongeaient habituellement jusqu’a onze heures de la nuit.

Un grand réveil se manifesta d’abord parmi les jeunes gens, et leur conversion fut en grande bénédiction pour leurs parents qui ne pouvaient assez admirer la merveilleuse puissance de l’Évangile.

Que de fois plusieurs d'entre eux ont béni avec larmes le jour où Dieu leur avait envoyé son serviteur! Les catholiques eux-mêmes étaient forcés de reconnaître quelque chose de surnaturel dans ce changement de leurs amis et compagnons de désordre.


Tout véritable réveil se montre par des œuvres de piété et de charité. C’est ce qui arriva aussi à N***.

L’excellente idée du colportage des livres saints, qui est maintenant mise en pratique par la plupart des Sociétés Bibliques de langue française, et qui le sera bientôt par toutes les autres, est éclose et fut réalisée pour la première fois dans ce village auparavant inconnu des chrétiens. M. Pyt trouvait beaucoup de difficultés à répandre des exemplaires de la Bible, lorsque l’un des nouveaux convertis vint lui dire:

«Je suis libre, et par la grâce de Dieu, robuste; j’ai un peu de bien en fonds de terre; je vais le vendre. Avec cet argent j’aurai de quoi m'entretenir pendant plusieurs mois sans travailler; j’emploierai ce temps à parcourir les villages avec des Bibles et des Nouveaux Testaments; et tout en cherchant à les vendre, cela me procurera l’occasion d’annoncer l’Évangile de maison en maison. Puis, quand je n’aurai plus d’argent, je me remettrai à travailler.»

Ce fut un trait de lumière pour M. Pyt. L’auteur de cette proposition et l’un de ses amis chrétiens furent choisis pour cette œuvre. Ils partirent, la caisse de livres sur le dos, et accompagnés des prières de leurs frères; ils emportaient 93 exemplaires des Saintes Écritures.

On osait à peine espérer que cette précieuse provision se placerait pendant la semaine; mais deux jours après, les colporteurs revinrent, et arrivèrent précisément lorsque leurs frères étaient réunis pour prier Dieu en faveur de cette œuvre. Ils avaient tout vendu, et cela, en grande partie, dans un village où l'on ne pensait pas obtenir le moindre succès.

Le dépôt biblique fut bientôt épuisé, et il se vendit de cette manière une quantité considérable de livres saints. Par un résultat naturel du colportage, beaucoup de catholiques furent évangélisés; et comme ceux qui vendaient les Écritures avaient eux-mêmes appartenu à la religion romaine, il leur était d'autant plus facile de résoudre les objections et de dissiper les préjuges des catholiques auxquels ils s'adressaient.


Au mois de décembre 1820, M. Pyt alla prêcher l’Évangile à O***, dans le centre de la France. Mais l’église protestante de cette ville étant fort opposée à la doctrine de la croix, et les autorités civiles ne voulant pas permettre la libre prédication de la Parole, M. Pyt évangélisa dans les environs d’O***.

Beaucoup de préventions l’y avaient précédé, et il fut accueilli avec froideur. Cependant sa piété, son zèle, ses exhortations, ses visites particulières ne furent pas sans fruit. Un colporteur joignit ses efforts aux siens, et la connaissance du Seigneur pénétra dans quelques âmes; d’autres donnaient de bonnes espérances.


En 1821 , M. Pyt retourna dans le midi de la France pour examiner un nouveau champ de travail qui se présentait. Il reconnut qu’il y avait là une œuvre précieuse à faire, et se rendit au mois d’octobre dans la ville de B***.

Une famille pieuse qui s'y trouvait lui fit le plus cordial accueil. On ouvrit une souscription pour fonder une chapelle, et M. Pyt obtint du gouvernement l’autorisation d’y célébrer un culte régulier.

Ce qu’il y eut de remarquable à l’ouverture de cette chapelle, c’est qu’un assez grand nombre d'Israélites y vinrent écouler le message de Christ. M. Pyt ne les oublia point dans l’œuvre de son ministère; il fit imprimer un traité, le Messie promis, qu’il répandit parmi eux, et plaça beaucoup de Bibles entre leurs mains. Il tâcha aussi de se lier avec quelques-uns de ces enfants d'Abraham; mais, hélas! ils ne réalisèrent pas, pour le moment du moins, les espérances qu’ils avaient fait concevoir.

Leur attachement pour les biens de la terre, et surtout leur inimitié contre Christ retinrent encore «le voile sur leurs yeux.» Mais les protestants et quelques catholiques répondirent mieux à l’appel du souverain Pasteur des âmes.

Un peuple intéressant, qui habite les vallons des Basses-Pyrénées, et qui appartient a deux pays, la France et l’Espagne, sans se confondre avec ces deux nations, le peuple des Basques attira aussi l’attention de M. Pyt. Dans le siècle de la réforme, sous le règne de Jeanne d’Albret, les Basques abandonnèrent en grand nombre l’église romaine, et une traduction du Nouveau-Testament fut répandue parmi ces Vaudois des Pyrénées. Mais lors de la révocation de l’Édit de Nantes, les prêtres se hâtèrent d’enlever au peuple ce flambeau de la Parole. Un seul exemplaire de la nouvelle alliance échappa à leur jalouse inquisition; et, chose remarquable! il parvint à la bibliothèque d'Oxford où il fut soigneusement conservé.


En 1824, la Société Biblique britannique et étrangère chargea M. Pyt de faire revoir cette ancienne version, et de vérifier s’il convenait d’en publier une édition nouvelle. On essaya par un Évangile qui fut très bien accueilli. Ensuite le Nouveau-Testament tout entier parut dans la langue des Basques.

M. Pyt fit de fréquentes excursions dans le Béarn, et beaucoup d'âmes sortirent de leur sommeil de mort. Les protestants revinrent en grand nombre dans la voie de la vérité, et plusieurs catholiques suivirent leur exemple. Aussi l'évêque de ce diocèse s’alarma de ce mouvement qui menaçait de lui faire perdre beaucoup de ses brebis, et il imagina, en 1826, d’envoyer dans le Béarn une mission, à la tête de laquelle il se plaça lui-même avec toute sa pompe sacerdotale. Il débuta par une adresse imprimée aux protestants d’Orthès. M. Pyt fut chargé d’y répondre, ce qu'il lit sur-le-champ.

L'évêque répliqua par une deuxième lettre, plus volumineuse que la première, à laquelle M. Pyt répondit encore. Ce dernier ouvrage fut remarquablement béni. Une première édition tirée au nombre de 3,000 exemplaires, s'épuisa bientôt, et il fallut en faire une seconde.

Les catholiques lisaient avec approbation cet écrit où le langage de la charité s’unit toujours à l'exposition franche et fidèle de la vérité. L'évêque s’aperçut, mais trop tard, qu’il avait commis une faute en ouvrant cette controverse, où il n’avait ni l'Écriture ni la logique de son côté; et il finit par retirer de la main des libraires tous les exemplaires qui restaient encore de son livre.

Après huit ans et demi de séjour dans le midi de la France, M. Pyt revint dans le nord, à B***, ville où résident maintenant un grand nombre de familles anglaises. Il y rencontra des obstacles de plus d’un genre.

Les catholiques divisés en deux classes, les uns bigots, les autres incrédules, ne voulaient rien entendre de l’Évangile. M. Pyt ne resta pas longtemps dans cette contrée, et porta son ministère du côté de Paris ou commencement de 1831. Il alla prêcher dans une chapelle à Y***, qui avait été desservie jusqu’alors par un prédicateur anglais. L'usage de cette chapelle fut cédé à M. Pyt, qui y célébra un culte régulier. Plusieurs âmes furent amenées par ce moyen à la connaissance de la vérité.


En 1854, M. Pyt eut une nouvelle discussion avec un prêtre catholique, et publia une brochure dont nous avons rendu compte. (Quelques mots à M. l’abbé Guyon, Archives, 1835, p. 13)

Nous ne terminerons pas cet article sans quelques réflexions sur le caractère, les écrits et les travaux de notre pieux ami.

M. Pyt était membre de la plupart de nos Sociétés religieuses. Il montra constamment, dans le sein des comités, une intelligence élevée, des vues justes et larges, un grand amour de la paix et de l’union, un zèle infatigable. Sa mort y a laissé un grand vide, et nous prions Dieu de nous donner des compagnons de travail qui lui ressemblent. C’est avec de tels hommes que l'évangélisation de la France pourra faire, sous la bénédiction du Seigneur, de rapides progrès.

Comme écrivain, M. Pyt occupe une place distinguée, et qui serait plus haute encore, s'il eût écrit davantage. Mais la prédication, les visites et les réunions pastorales employaient la plus grande partie de son temps, et il dut laisser à d'autres le travail du cabinet. Le peu de pages sorties de sa plume appartiennent pour la plupart à la polémique de la réforme contre le catholicisme romain. Ces publications se font remarquer par une science étendue et mûrie; M. Pyt avait lu les bons controversistes, et ses propres méditations lui avaient fourni des arguments nouveaux, ou du moins modifiés selon le caractère et les besoins de notre époque. Il possédait parfaitement les Écritures et c’est là qu'il cherchait ses meilleures armes pour combattre et terrasser la religion du Vatican.

À la science, il joignait la charité, sans laquelle la science n’est que peu de chose. Il sut faire de la polémique sans aigreur, et discuter avec franchise, sans recourir aux injures ni aux expressions blessantes, chose rare dans tous les temps, et qui n’est pas commune dans le nôtre.

Le style des écrits de M. Pyt est simple, clair, sans recherche, sans prétention, et s’il ne présente pas des qualités éminentes, il a du moins la principale qualité du genre, je veux dire que M. Pyt emploie toujours le style de son sujet, ce qui n’est pas non plus un mérite vulgaire dans le siècle où nous vivons.

Comme prédicateur, ceux qui l’ont entendu savent qu’il y avait beaucoup de sérieux et d’énergie dans sa parole, une puissante dialectique dans son argumentation, et que ses discours, sa voix, son accent, son geste, l'orateur tout entier en un mot, étaient un vivant témoignage de son ardent amour pour les âmes.

La meilleure preuve en est dans le grand nombre de personnes auprès desquelles il a été un instrument de réveil et de conversion.

Henry Pyt est parti dans la maturité des années, et se repose maintenant de ses travaux. Il est mort le 21 juin 1855, âgé de quarante ans. Mais le pieux exemple qu’il nous a laissé doit vivre dans nos souvenirs, et nous encourager a remplir nos grandes obligations, avant que la nuit soit venue, dans laquelle personne ne peut travailler.

Archives du christianisme 1836 03 26

 

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