Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

BIOGRAPHIE RELIGIEUSE

Le coin du feu d’un Écossais


***


Un Écossais, M.  B., était allé s’établir en Amérique, et avait fixé sa résidence près de New York. Il y menait une douce et heureuse vie de famille, avec sa femme, quatre enfants et sa vénérable belle-mère.

En 1805, époque où la fièvre jaune exerçait de cruels ravages à New York, M.  B., rentrant un soir sous le toit domestique, dit à sa femme:

Ma chère amie, je crains d’avoir fait une chose qui ne vous sera pas agréable.

Et quoi donc?

J’ai rencontré un de mes vieux amis de collège, un compatriote, et je l’ai invité à venir demeurer chez nous jusqu'à ce que l’épidémie soit passée.

Mais je ne vois rien là qui puisse m’être désagréable.

Bien, mais j’ai peur que vous et lui, vous ne tombiez pas d'accord en matière de politique.

N’est-ce que cela? Il nous sera très facile de ne pas aborder ce sujet.

Non, ce n’est pas tout; il y a un autre point sur lequel vous serez encore moins d’accord. Mon ami M. n’a pas seulement adopté les opinions politiques des révolutionnaires français, il partage aussi leurs principes religieux: il est incrédule.

Ceci est fâcheux, en effet. Comment pourrons-nous l’accueillir de manière à ce qu’il se plaise chez nous, et observer pourtant les devoirs qui doivent se pratiquer dans une famille chrétienne?

Ma chère amie, nous n’en négligerons aucun, et je compte sur vous pour m’aider à remplir cette tâche. Lorsque l’heure du culte domestique sera venue, vous réunirez la famille, et nous ferons notre devoir comme d'habitude. M. M. est un homme bien élevé, et quelque opposé qu'il soit dans son cœur à la religion, la bienséance l'empêchera de la tourner en ridicule.

M. M. arriva dans le courant de la soirée, et quelques heures se passèrent à rappeler les doux, souvenirs du pays natal, les vertes montagnes d’Écosse, et les jeux de la première enfance.

À neuf heures, Mme B. donna trois coups de sonnette, signal accoutumé pour réunir la famille, et se tournant vers son hôte, elle lui dit:

Monsieur, nous avons conservé la bonne vieille habitude d’Écosse de prier en famille, j’espère que vous n’aurez aucune objection pour vous réunir à nous.

Certainement non, Madame, répondit M.  M.; je désire n’apporter que le moins de dérangement possible dans vos habitudes domestiques.

La famille s’assembla, et M.  M. se mit à genoux avec les autres. En se relevant il dit à Mme B. que, depuis dix ans, il n’avait pas courbé le genou pour le même motif. Cet aveu amena une conversation sérieuse, qui se continua fort tard dans la nuit. M.  M. présentait avec les formes les plus polies, mais avec ténacité, diverses objections contre la religion révélée.

Le lendemain, et tous les jours, on revint sur le même sujet. M.  et Mme B. mettaient une grande douceur à réfuter ses arguments, à combattre ses doutes. Bien loin de dire: Tiens-toi en arrière, je suis plus saint que toi! ils se disaient souvent l’un à l’autre: Qui est-ce qui a fait la différence entre lui et nous; et ils priaient ensemble le Seigneur d’avoir compassion de ce pauvre aveugle, et de bénir leurs entretiens, afin qu’il connût son péché et le péril de la position où il se trouvait.


Un jour, causant avec la belle-mère, M. M. lui dit:

J'ai traversé beaucoup de pays, j’ai vu un grand nombre de familles, mais nulle part je n'ai rencontré un bonheur aussi constant, aussi parfait que dans cette maison.

Peut-être, Monsieur, répondit cette vénérable servante du Seigneur, vous n'avez jamais été parmi ceux qui ont une espérance ferme en Christ, et qui savent que toutes choses, dans le temps et dans l'éternité, concourent au bien de ceux qui aiment Dieu.

Cette remarque est juste, Madame; depuis que j’ai quitté la maison paternelle, je me suis rarement trouvé avec des personnes pieuses.

M. M. resta quelque temps sous le toit de ces fidèles chrétiens, et il s'était particulièrement attaché à une charmante petite fille de deux ans, qu’il portait souvent à travers le jardin, en lui répétant de vieilles chansons écossaises.

MI.

L’épidémie ayant cessé, M. M. retourna dans la ville de New York, et y fit ses préparatifs pour se rendre aux Indes occidentales où l’appelaient des affaires de commerce. Pendant son voyage, il plut à Dieu de rappeler à lui l'aimable petite fille qui avait si souvent attiré son affectueuse attention.

De retour à New York, il eut peine à prendre la résolution d’aller voir cette famille affligée; car il craignait que sa présence ne renouvelât trop vivement la douleur de Mme B. Cependant il s’y décida, et la religion fut de nouveau le sujet de tous leurs entretiens.

M.  M. éprouva quelques pertes dans le commerce, et ses amis vinrent à son aide pour former sa pacotille dans un voyage qu’il allait encore entreprendre. Ils n’oublièrent pas les intérêts de son âme, tout en pensant à ses intérêts temporels.

Mme B. mit dans son envoi une petite Bible de poche, après avoir indiqué sur la feuille blanche différents passages qui paraissaient propres à faire impression sur un esprit incrédule. La belle-mère y ajouta le livre de Doddrigge sur les commencements et les progrès de la vraie piété, et M. B:. ÿ joignit une longue lettre, avec ce ses mots sur l'enveloppe: Ne l'ouvrir qu’en pleine mer.

Il se passa plusieurs mois sans qu’on entendit parler de M. M.; mais ses trois amis parlaient souvent de lui, se souvenaient de son nom devant le trône de miséricorde, et commençaient à concevoir un peu d’espérance, en se disant qu’il avait paru, dans sa dernière visite, plus sérieux que de coutume, et qu’il avait recherché les conversations religieuses. Enfin on reçut une lettre de M.  M., au bout de laquelle il écrivait qu’il n’avait pas l’espoir de goûter jamais le bonheur qui était leur partage, parce que sa vie avait été employée de telle sorte qu’il ne pouvait plus s’attendre à obtenir la faveur de Dieu.


Deux ans après, M. M. était de retour dans cette même chambre où il s’était agenouillé pour la première fois en dix ans, et il raconta à Mme B. et à un ami qui n’est plus maintenant dans ce monde, comment il avait trouve la paix par la foi. Nous le laisserons parler lui-même.

«C’est ici, dit il en montrant le parquet de son doigt, ici que je me suis mis à genoux par complaisance pour l’homme tandis que mon cœur était rempli d’inimitié contre Dieu. Oh! la longue attente, l’ineffable miséricorde du Seigneur qui à daigné faire d'un misérable tel que moi un enfant d'adoption!

Lorsque je me trouvai à genoux, mille souvenirs d’enfance se pressèrent dans mon esprit; je n’entendis pas un seul mot de la prière de M.  B.; car ma pensée me transporta aussitôt près d'un foyer chéri où j’avais passé mes premières années.

«Je me relevai comme si je me fusse réveillé d’un songe et depuis lors, cette question m’est souvent revenue: SI LA BIBLE EST VRAIE, QUE DEVIENDRAI-JE? Quand Dieu rappela du monde votre chère fille, je me sentis transporté de colère. Est-ce là, me dis-je, le Dieu dont on me vante la miséricorde et la justice?

Est-ce ainsi qu’il récompense ses plus fidèles serviteurs?

Oui, dans ce moment je l'aurais volontiers renversé de son trône, si je l’avais pu. Mais en venant vous voir, après cette grande affliction, je fus saisi et profondément touché des consolations que la piété vous avait données pour supporter une telle épreuve.

«Chaque fois que je m’entretenais avec vous et les autres membres de votre famille, je sentais que les chrétiens doivent avoir une source de bonheur qui m’était inconnue. J'aimais à vous entendre parler des choses religieuses, et quand je vous quittais, j’étais poursuivi de cette pensée que toute mon attente de bonheur qui se fondait sur la liberté l'égalité, la perfectibilité des hommes, n’était qu’une pure chimère, et que, pour ressaisir des réalités solides et incontestables, je devais remplacer mes auteurs incrédules par ce livre que j’avais regardé comme un recueil de contes pour les vieilles femmes.

«Étant arrivé en pleine mer, je lus la lettre de M.  B., je jetai un coup d’œil sur les livres qui l'accompagnaient chaque mot que je lisais prononçait contre moi une sentence de condamnation; je vis que la Bible me déclarait misérable et aveugle et nu, et que je ne pouvais que m’en remettre à la merci du Dieu que j’avais offensé.

Mais je ne voulais pas; un retour à la vie religieuse aurait compromis mes projets mondains. Je craignais les railleries de mes anciens amis, et comme le torrent des affaires me pressait, je ne m’arrêtai pas longtemps sur ces idées de conversion. Je mis la lettre et les livres au fond de ma valise, et tâchais de n’y plus penser.

«J'eus du succès dans mes entreprises, et c’est à cette époque que j’écrivis ma lettre à M.  B.; je mis à la fin quelques mots qui seront agréables, me disais-je alors, à ces bonnes gens qui sont certainement les plus aimables enthousiastes que j’aie jamais connus.

«Ces lignes me procurèrent une autre lettre de M.  B., qui ne me soupçonnait aucunement d'hypocrisie et qui voyait en moi une âme sérieusement occupée à chercher la voie du salut. Il me conseilla d’acheter les sermons de Saurin, et de lire celui qui traite des Compassions de Dieu. Mais je ne tins nul compte de toutes ces exhortations, et continuai à passer ma vie avec de joyeux compagnons de plaisir, cachant soigneusement les doutes et les angoisses qui venaient de temps à autre me persécuter.

«Quelques mois après, j’allai à un grand bal dans la ville d’A***. Nous avions assisté à un magnifique festin, et la chaleur du vin jointe à celle de la danse, fit que je ne savais plus modérer et diriger mes pas. Je tombai, et me cassai le bras. Le jeune médecin, qui était du bal, le remit, et tandis que mes compagnons s’en retournèrent gaiement chez eux, j’étais étendu dans une chambre basse du bâtiment, où je passai une terrible nuit d’insomnie, dévoré tout à la fois par la fièvre et par les terreurs d’une conscience qui commençait à se réveiller.

«Les souvenirs de mon enfance me revinrent de nouveau à l’esprit, et je me rappelai surtout les tendres avertissements de ma mère, qui m’avait tant de fois exhorté à m’approcher de Dieu. Oh! si je pouvais trouver, m’écriais-je, si je pouvais trouver le Dieu de ma mère, le Dieu qui a consolé si puissamment mes amis de New York dans leurs peines!

«Ma guérison fut longue, parce que mon bras avait été mal remis. Pendant ce temps je lus les sermons de Saurin et le livre de Doddrigge, dont chaque mot semblait se rapporter a mon état spirituel.

J’ouvris ma Bible trop longtemps négligée, j’y reconnus que j’étais justement condamné, et qu’il n’y avait pour moi aucun autre moyen de salut que la rédemption qui est en Jésus-Christ. Je me jetai dans les bras du Sauveur, et avant de quitter ma chambre de souffrance, j’avais trouvé en Jésus-Christ un avocat auprès du Père. Mes craintes sur l’avenir firent place à une joyeuse espérance, et je m’appuyai de toute mon âme sur Celui qui nous justifie de tout péché.

«Je renonçai dès ce moment à toutes les sociétés mondaines, et peu de semaines après, sachant que la communion serait donnée dans l’un des temples d’A***, je voulus que le lieu qui avait été le théâtre de ma folie fût aussi le témoin de ma profonde repentance et de mon humble confiance au Rédempteur. Je me consacrai publiquement et solennellement à lui; je demandai et reçus les symboles de son corps qui a été brisé pour nous, de son sang qui a été répandu pour la rémission de nos péchés.

«Et maintenant, chers amis, ne vous joindrez-vous pas à moi, pour bénir et magnifier le nom de notre Dieu, qui m'a retiré de l'abîme de l’incrédulité et des souillures du monde, et qui a daigné affermir mes pas sur le rocher des siècles?»


Tel fut le récit de M.  M., et depuis cette époque, il a marché fidèlement dans les voies du Seigneur. Sa foi s'est manifestée par ses oeuvres. Les assemblées de prières, les écoles du dimanche, toutes les institutions religieuses et charitables ont été les objets de sa constante sollicitude. Il est devenu ancien d’une église, et a mérité le glorieux nom

de «Howard de G.» Deux de ses amis sont allés, depuis lors, se réunir à lui dans les demeures célestes, et son exemple parle encore au milieu de tous ceux qui l’ont connu.


* * *


Lecteur! avez-vous aussi, peut-être, adopté les principes des incrédules?

Votre Bible, si vous avez une Bible, ne l'ouvrez-vous jamais?

Vos genoux ne fléchissent-ils jamais devant le Dieu qui vous a créé?

Prenez exemple sur l’histoire de M.  M., et ne vous fatiguez pas davantage à chercher le bonheur où vous ne le trouverez point.

Allez prendre votre Bible; voyez au psaume 14, verset 1, le caractère de celui qui a dit en son cœur: Il n'y a point de Dieu; puis, méditez sur ces précieuses paroles d'Ésaïe: «

Cherchez l'Éternel pendant qu’il se trouve; invoquez-le, tandis qu’il est proche.

Que le méchant délaisse sa voie, et l’homme inique ses pensées; et qu’il retourne à l’Éternel, et il aura pitié de lui; et à notre Dieu, car il pardonne abondamment» (55, 6, 7).


Le lecteur est-il pauvre? prétend-il qu’il n’a pas le temps de lire la Bible?

Ouvrez-la au Psaume 127, 2, vous y lirez: «C’est en vain que vous vous levez le matin et que vous vous couchez tard»; lisez ensuite dans l'Évangile de Saint Matthieu, 6, 33:


Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice,

et toutes ces choses vous seront données par dessus.


Obéissez à ce commandement, et croyez à celle promesse du Sauveur.

La narration qui précède est-elle lue dans une maison qui célèbre le culte domestique?

Que les parents y apprennent combien il importe d’enseigner de bonne heure à leurs enfants la crainte de Dieu et la connaissance de Jésus-Christ!

Qu’ils s'instruisent à être fidèles dans leur intérieur, et à contribuer au-dehors à l’éducation religieuse de l’enfance par les écoles du dimanche, les salles d'asile et toutes les institutions du même genre.

Que ce récit serve également à encourager les disciples du Rédempteur dans la pratique des commandements de Dieu; qu’ils rendent témoignage de leur foi devant ceux-là mêmes qui paraissent le plus éloignés du royaume des cieux; qu'ils leur parlent, en toute occasion convenable, des vérités du Christianisme; qu’ils se souviennent d'eux dans leurs

prières, et leur travail ne sera pas perdu.

Lecteur, qui que vous soyez, aussi longtemps que vous rejetez l’Évangile, «vous employez l’argent pour ce qui ne nourrit point, et votre travail pour ce qui ne rassasie point.»

Écoutez donc et recevez cette invitation de l'Éternel:


O vous tous qui êtes altérés, approchez-vous des eaux;

et vous qui n'avez point d’argent,

venez, achetez et mangez; venez, dis-je,

achetez sans argent et sans aucun prix, du vin et du lait

(Ésaïe 55, 1).


Archives du christianisme 1836 05 28


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