Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

BIOGRAPHIE RELIGIEUSE.

JOHN CRAIG

Réformateur d'Écosse sous le règne de Jacques VI.

1834


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Aucun de nos lecteurs peut-être n’a entendu parler de John Craig. Il ne sera donc pas inutile de faire connaître quelques-uns des traits de sa vie; on y pourra puiser de nouveaux motifs pour se confier en Dieu dans les périls les plus imminents.

Les faits qu’on va lire sont anciens, mais les instructions qui en découlent sont de tous les temps et de tous les pays.

John Craig était écossais de naissance.

Passons légèrement sur ses premières années, qui n’offrirent aucune circonstance remarquable. Il fit ses études dans l’université de Saint-André, entra dans une illustre maison comme précepteur, et peu après se vit jeté en prison, comme véhémentement soupçonné d’hérésie, quoiqu'il fut membre de l'ordre des Dominicains.

Au seizième siècle, quiconque avait un peu de science passait aisément pour hérétique, et du soupçon d'hérésie aux tristes murailles d’un cachot la distance n’était pas grande.

John Craig parvint à s’échapper, il alla en France, puis a Rome, ou il vécu dans la familiarité des plus savants prélats entre autres du cardinal Pole, qui le fit admettre dans un couvent de Dominicains à Bologne.

Le moine écossais, homme de profonde érudition et de caractère sérieux, ne tarda pas à être élevé aux principales dignités de son ordre. Tout pouvait faire craindre qu’il n’abandonnât le chemin de la vérité qu’il avait à peine entrevu de loin; mais Jésus-Christ, notre divin Berger, cherche et trouve les siens, en quelque lieu qu’ils se rendent, et ils entendent sa voix (Jean X. 16: J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là, il faut que je les amène; elles entendront ma voix, et il y aura un seul troupeau, un seul berger.).

La manière dont Craig fut converti à la foi évangélique en est une nouvelle preuve.

Il avait accès, comme dignitaire de l’ordre des Dominicains, à la bibliothèque de l’inquisition, et ses yeux tombent sur l’Institution chrétienne de Calvin; la lecture de ce livre produisit sur son esprit la plus vive impression; il reconnut pleinement les erreurs de l'Église romaine et embrassa toutes les doctrines enseignées dans les Saintes-Écritures.

Ne voulant pas cacher la lumière sous le boisseau, mais rendre ses frères participants au privilège qu'il avait obtenu, il s’ouvrit sur ses nouveaux sentiments à un pieux et vénérable vieillard.

Celui-ci le confirma dans les croyances qu’il avait adoptées; mais il l’encouragea en même temps à les tenir secrètes, parce que les jours étaient mauvais, et que la vérité n’était pas bonne à dire ni à répandre dans le patrimoine de Saint Pierre.

John Craig ne tint pas compte de ses timides conseils; les âmes nouvellement nées calculent moins ce qu’elles doivent à leur sûreté personnelle que ce qu’elles doivent au Sauveur qui les a rachetées de la mort, et les considérations de la prudence humaine pâlissent devant le zèle ardent qui les anime.

Lorsque Paul eut les yeux ouverts sur le chemin de Damas, incontinent il prêcha Christ; John Craig agit de même.

Son courage reçut bientôt le seul salaire qu’il pouvait attendre. Le Dominicain qui se déclarait disciple de Christ fut accusé d’hérésie, envoyé à Rome, enfermé neuf mois dans un cachot, jugé par le tribunal de l’Inquisition, et condamné à être brûlé vif le lendemain.

Mais le Seigneur avait une grande œuvre à faire par lui en Écosse; et observez combien ses voies sont admirables!

«Le méchant sera la rançon du juste, et le déloyal celle des hommes droits» (Prov. XXI, 18). Dans la nuit même, le Pape Paul IV mourut. Ce pontife était haï de la populace qui renversa sa statue de marbre, la traîna, pendant trois jours à travers les rues de Rome, et la jeta enfin dans le Tibre. Les prisons furent ouvertes au milieu de ce tumulte populaire, les prisonniers relâchés, et Craig redevint libre avec ses compagnons de captivité.

Il n’avait pas l’intention de s’arrêter longtemps à Rome, on peut le croire; mais où aller? Où fuir?

Il se rappelait bien un village, Bononia, où il trouverait quelques vieilles connaissances disposées à le servir; mais comment s’y rendre sans aucune ressource pour faire le voyage? Tandis qu’il se livrait à ces tristes pensées, le Seigneur vint à son aide d’une façon presque miraculeuse.

John Craig traversait à la hâte un des faubourgs, de Rome, lorsqu’il tomba tout à coup au milieu d’une troupe de «banditti». Il se crut perdu, mais l'un des brigands, le prenant à part, lui demanda s’il n’avait pas été à Bononia quelques années, auparavant.

Oui, répondit Craig, extrêmement surpris de cette question.

Eh bien! ne vous rappelez-vous pas, continua le brigand, qu’un pauvre soldat blessé se présenta devant vous, pendant que vous vous promeniez avec quelques personnes, et qu’il vous supplia de le secourir?

John Craig le regardait sans répondre.

Je le vois bien, poursuivit le brigand, vous avez perdu le souvenir de ce fait; mais je m’en souviens parfaitement, moi, et je n’oublierai jamais la tendre compassion que vous m'avez témoignée dans cette circonstance. Ne craignez rien, vous êtes en sûreté parmi nous.

Disant cela, il le conduisit au-delà des faubourgs, et lui donna tout l'argent nécessaire pour atteindre le terme de son voyage.

John Craig reconnut la bénédiction de Dieu dans cette étonnante rencontre qui suppléait à ses besoins par l’entremise d'un bandit: tant il est vrai que le Seigneur peut se servir, même des bêtes féroces, pour accomplir ses desseins de miséricorde!


Arrivé à Bononia, Craig ne trouva que des amis froids et craintifs. Il se retira secrètement, de peur de tomber encore une fois entre les mains de l'Inquisition, et se dirigea vers Milan.

«II lui arriva pendant le voyage quelque chose de si extraordinaire, de si incroyable,» dit son biographe, «que j'oserai à peine le rapporter, si John Craig n’eût fait plusieurs fois ce récit en présence des personnes les plus honorables, pour montrer la faveur spéciale dont il avait été l'objet de la part de Dieu.»

Voici la chose:

Après plusieurs jours de marche par des sentiers écartés, (car il évitait avec soin les grandes routes), il traversa une profonde et solitaire forêt; étant fatigué, il s'étendit sur des broussailles près d’un petit ruisseau. Pendant qu’il était là, pensif, inquiet ne sachant qu’elle route suivre ni à quel projet s'arrêter, survint un chien qui jouait avec une bourse qu’il tenait entre les dents, et qui la laissa tomber à ses pieds. Lui, saisi de crainte, se leva en remerciant Dieu de cette preuve signalée de sa bonté, et il poursuivit sa route jusqu'à ce qu'il fut parvenu à un petit village, où il rencontra quelques personnes qui allaient à Vienne, en Autriche. Cette conjoncture lui fit changer de plan, et il se rendit en Allemagne, de compagnie avec ces voyageurs.

En qualité de membre de l’ordre des Dominicains, Craig fut invité à prêcher devant l'empereur Maximilien II, à Vienne. Le prince fut charmé de ses talents oratoires, et montrait quelque désir de l’attacher à son service. Mais le Pape Pie III, ayant appris que John Craig était à Vienne, le fit réclamer auprès de l’Empereur, comme un fugitif condamné pour cause d'hérésie.

Maximilien, ne voulant ou n’osant pas s'opposer formellement à la volonté du pontife romain, remit à Craig des lettres de sauf-conduit pour qu’il pût continuer son voyage. C’est ainsi qu'il retourna en Angleterre, puis en Écosse, où la réforme commençait à prendre racine.

Une absence de vingt-quatre ans avait fait presque entièrement oublier à Craig sa langue maternelle, et il prêcha d’abord en latin dans une chapelle particulière de la ville d’Édimbourg. Mais il réapprit bientôt la langue de son pays, et il devint alors l’un des collègues les plus zélés du célébre John Knox.

Il exerça les fonctions du ministère évangélique à Édimbourg, à Aberdeen et en d’autres lieux. Douze à quinze ans après, en 1579, le roi d’Écosse, Jacques VI, l'appela auprès de lui comme chapelain. Il remplit cette charge jusqu’à ce que le poids des années fut venu lui opposer d’insurmontables obstacles. Il vécut alors dans la retraite, en se rappelant avec reconnaissance les miséricordes passées de l’Éternel à son égard, et en se préparant à une bienheureuse éternité.

Enfin, il mourut en paix au Seigneur, le 12 décembre 1601, âgé de 88 ans.


«Prends garde à l’homme intègre, et considère l’homme droit;

car la fin d’un tel homme est la paix.»

(Ps. XXXVII, 37.)


John Craig était un homme simple, sans ambition, sans faste, ne se mêlant point des affaires politiques, et consacrant toutes ses forces au service de son divin Maître. Il a composé plusieurs ouvrages; entre autres un excellent catéchisme, qui lui adopte par l'assemblée générale du clergé, en 1592, pour servir de règle aux instructions des catéchumènes, et qui a été admis dans le recueil des Confessions de foi de la Grande-Bretagne.

Archives du christianisme 1834 03 22


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