Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

MOEURS RELIGIEUSES.

AUTORITÉ PATERNELLE ET CONJUGALE

EN MATIÈRE DE RELIGION.

1834


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L’autorité du père sur ses enfants, l’autorité du mari sur sa femme sont des droits sacrés. La loi divine est d’accord sur ce point avec les lois humaines; elle commande aux enfants d’obéir à leur père, à la femme d’obéir à son mari, en rattachant de magnifiques promesses à l'accomplissement de ce devoir, et des menaces terribles à sa violation.

Quand des sophistes ont essayé de rompre ou de changer ces rapports entre le chef et les divers membres de la famille, la conscience publique les a couverts d’un juste mépris.


Si l’on est unanime à reconnaître ces droits,

ON NE L’EST PAS MOINS À LEUR PRESCRIRE CERTAINES LIMITES

MORALES ET SOCIALES QU’IL NE LEUR EST JAMAIS PERMIS DE FRANCHIR. 


Supposez qu’un père ordonne à son fils de commettre un crime, qu’un mari ordonne à sa femme de faire un acte déshonorant, ce fils et cette femme sont-ils tenus d’obéir?

Non certes, répondra-t-on d’une voix unanime.

Mais pourquoi l’obéissance n’est-elle plus alors obligatoire?

Parce que, dira-t-on de même tout d’une voix, l’autorité paternelle et conjugale ne doit pas l’emporter sur les lois morales et civiles.

Lorsqu’un père ou un mari ne respectent point ces bornes inviolables, ils abdiquent leur pouvoir; la faute serait alors, non de leur désobéir, mais de leur obéir.

Cela est si vrai que le législateur humain rend la femme et le fils (celui-ci au-dessus d’un certain âge) responsables de leurs actions, quand même ils allégueraient pour leur défense les ordres d’un père ou d’un mari.

Le Législateur divin les soumet à la même responsabilité.

Ces points établis, je demande: L’autorité paternelle et conjugale n’a-t-elle que des limites morales et sociales? n’a-t-elle pas aussi des limites religieuses?

En d’autres termes:

si le père et le mari n’ont pas le droit de faire transgresser par leurs enfants ou par leur femme les maximes de la conscience et les bornes du Code pénal,

ONT-ILS LE DROIT DE LEUR FAIRE VIOLER LES DEVOIRS DE LA RELIGION?


En d’autres termes encore, si l’obéissance cesse d’être due au père et au mari, quand ils ordonnent un crime ou une infamie devant les hommes, l’obéissance est-elle due, quand ils prétendent imposer la profanation et le mépris des commandements de Dieu?

Pour les chrétiens, cette question n’en est pas une.

La Bible leur paraît aussi respectable tout au moins que le Code pénal;

la volonté de Dieu, aussi obligatoire que les prescriptions de la loi civile;

la pratique de la religion, aussi essentielle que l’obéissance aux règles de l’ordre social;

le salut de l’âme, aussi important que la conservation de la liberté individuelle,

et ils pensent que s’il ne faut pas s'exposer à être mis en prison, pour obéir à un père ou à un mari, il ne faut pas non plus s'exposer à la condamnation de Dieu.

Ces idées portent avec elles la plus parfaite évidence; on pourra les calomnier en les exagérant, non les réfuter.


Ici pourtant se découvre l'une des plus tristes plaies de nos mœurs religieuses, et ce serait peu de dire qu’elle nous afflige, car elle nous épouvante.

Interrogez la plupart de ceux qui vous entourent, non seulement les hommes notoirement irréligieux, mais ceux-là mêmes qui se savent gré de leurs sentiments de piété. Les enfants et la femme, vous répondront-ils, doivent obéir au père et au mari sur toutes les choses qui regardent la religion.

Mais si un mari ordonnait à sa femme de ne mettre jamais le pied dans un temple, parce que les vérités chrétiennes lui déplaisent, à lui?

Elle doit obéir!

Mais si un père ordonnait à ses enfants de profaner de la manière la plus formelle le jour du dimanche?

Ils doivent obéir!

Mais si le père et le mari défendaient à tous les membres de la famille de ne jamais ouvrir la Parole de Dieu?

Ils doivent se soumettre!

Ainsi donc, l’autorité du père et du mari doit l’emporter sur tous les devoirs et tous les actes religieux?

Oui, sans doute; avant tout la paix, du ménage!

Mais si le chef de la famille ordonnait à sa femme ou à ses enfants de voler ce qui appartient à autrui?

Ah! c’est bien différent!

Comment donc? La paix du ménage ne serait-elle pas troublée aussi par leur désobéissance?

Eh! Monsieur, ce n’est pas là la question!

J’entends: on ne doit point conserver la paix du ménage au prix d’un vol, mais au prix des plus indignes transgressions de la loi de Dieu, qu’importe?


AU FOND DE CES MAXIMES QUI RÈGNENT PRESQUE PARTOUT EN FRANCE, et que chacun peut se faire répéter quand il voudra, même par des hommes réfléchis, même par des personnes qui s’estiment suffisamment pieuses, IL Y A UN EFFROYABLE MATÉRIALISME.

Voici la traduction du dialogue qu’on vient de lire:

Toutes les religions sont également vraies, également fausses, également inutiles; il est indifférent de les suivre ou de ne pas les suivre. Tant que ma femme et mes enfants s’y conforment par habitude, et que cette habitude ne me gêne en rien, à la bonne heure. Mais si la religion vient à me gêner le moins du monde, si l’un de mes enfants, par exemple, adopte des idées ou des pratiques qui ne sympathisent plus avec les miennes, périsse alors la religion! Je défendrai à cet enfant d’aller au temple; je lui prendrai sa Bible; je l’empêcherai d’entendre jamais un mot d’exhortation religieuse. S’il me résiste, je ne verrai plus en lui qu’un enfant désobéissant, rebelle, fanatique, qui méconnaît ma juste autorité.


Et remarquez bien que, le cas échéant, cet homme-là exécute à la lettre ce qu’il dit. Il vocifère que son autorité paternelle et conjugale est méconnue, pour peu que sa femme ou son enfant persistent à lire la Bible et à fréquenter le service divin, après qu'il leur a ordonné le contraire. Il crie de toutes ses forces à la désobéissance, à la révolte des membres de sa famille; et des milliers de voix, celle des pharisaïstes inclusivement, s’unissent à la sienne.

On n’imagine pas que l’autorité du père et du mari a des limites sacrées dans les commandements de Dieu.

On se soulèverait d’indignation contre un chef de famille qui viendrait se plaindre que sa femme et ses enfants n’auraient pas voulu lui obéir pour commettre un délit justiciable devant les tribunaux;

mais s’il se plaint d’une désobéissance pour des faits qui ne regardent que nos devoirs envers Dieu, chacun l’encourage à écraser sous ses pieds la religion de toute sa famille.

Si ce n’est pas là une manifestation du plus épouvantable matérialisme, qu’est-ce donc?

En général, et nous aurons bien souvent la douleur de le signaler dans nos articles de «Mœurs religieuses», LA RELIGION N'EST PLUS GUÈRE QUE DANS LES MOTS ET DANS QUELQUES FORMES; dès que l’on creuse jusqu’aux opinions et aux actes, le matérialisme apparaît tout entier.

On terminera ces courtes réflexions par une anecdote toute récente.

Un pasteur avait été appelé auprès d’une jeune personne, qui s’approchait rapidement du terme de son pèlerinage terrestre. Malgré l’état de souffrance où elle se trouvait, le père, qui était là, se plaignait avec amertume de ce que sa fille lui avait désobéi.

Quelle était donc sa faute?

ELLE AVAIT VOULU SANCTIFIER LE JOUR DU REPOS, SELON QUE DIEU L’A INSTITUÉ!

À des reproches si injustes et si peu convenables dans un pareil moment, la jeune personne ne répondit rien; mais elle ouvrit le Nouveau-Testament, et indiqua du doigt au pasteur le premier verset du sixième chapitre aux Éphésiens: Enfants, obéissez à vos pères et à vos mères selon le Seigneur.


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Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre;

Et quand il sera vieux, il ne s’en détournera pas.

Proverbes 22, 6


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Vous, pères, n’irritez pas vos enfants,

mais élevez-les en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur.

Éphésiens 6, 4


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