Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

BIOGRAPHIE RELIGIEUSE.

Marie LOTHROP

1834


***


Morte à Boston, le 18 mars 1831, âgée de six ans et trois mois.

Le Seigneur choisit les siens à tout âge; s’il réveille les uns, quand ils ont déjà un pied dans la tombe, il convertit les autres lorsqu'ils sortent à peine de leur berceau. Et non seulement cet appel de la grâce peut avoir lieu aux premières heures du matin comme à la dernière heure du soir; mais la nouvelle naissance rapproche encore, à divers égards, les deux extrêmes de la vie.

Pour être chrétien, le vieillard ne doit-il pas devenir un petit enfant?

Et le petit enfant, devenu chrétien, ne participe-t-il pas, sous quelques rapports, aux sentiments, aux idées et aux expériences d’un vieillard?

On s’expliquera donc pourquoi nous consacrons quelques colonnes de notre journal à une jeune fille de six ans. Les personnes avancées en âge, les pères et mères de famille surtout, pourront puiser, non moins que les enfants, de salutaires leçons dans cette courte notice biographique.

Marie Lothrop naquit à Boston, le 15 décembre 1824. Son excellente mère, qui n’ignorait pas qu’il faut commencer de très bonne heure l’éducation religieuse, lui parla de Dieu avant qu’elle eût même atteint l’âge de deux ans. Mme Lothrop savait employer les moyens les plus simples et les plus attrayants pour se faire comprendre.

Tantôt, en montrant à sa fille des fleurs ou tel autre objet de ce genre, elle lui disait qu’il y a un Dieu au ciel qui a créé toutes ces choses, un Dieu plein de bonté, qui aime les petits enfants, et qui écoute leurs prières.

Tantôt, lorsque le vent grondait ou que la pluie tombait dans un jour d’orage, elle lui apprenait que c’est ce même Dieu qui envoie le vent, la pluie, les saisons fertiles, et elle lui enseignait ainsi à le craindre et à l’aimer. La petite Marie assistait régulièrement, chaque jour, au culte domestique, et cet exercice religieux lui inspira, dès l’âge le plus tendre, des habitudes d’attention, de recueillement et de prière. Oh! combien sont coupables et insensés les parents qui ne se hâtent pas de répandre la bonne semence dans le cœur de leurs enfants, et qui le laissent remplir, ce cœur ouvert à toutes les impressions, par la funeste ivraie d’un monde corrompu!

La mère de Marie ne suivait pas l’usage trop généralement adopté de faire apprendre aux enfants quelques formules banales de prières, formules que les enfants répètent matin et soir sans y comprendre un seul mot, sans y apporter aucune attention, sans en retirer le moindre profit pour leur avancement dans la foi. Cette méthode routinière est plus propre à inspirer le dégoût que le besoin des exercices de piété.

Mme Lothrop, mieux éclairée que tant d’autres parents, ne faisait apprendre qu'une seule prière par cœur aux membres de sa jeune famille: l’Oraison dominicale.

Pour le reste, après leur avoir donné une idée aussi juste que possible de leur état de corruption et de l’amour de Dieu en Christ, elle amenait peu à peu ses enfants à présenter leurs requêtes au Seigneur dans leur propre langage, corrigeant avec douceur ce qu’il y avait de peu convenable dans leurs expressions; elle voulait qu’ils présentassent leurs besoins à leur Père céleste avec la même liberté dont ils usaient envers leurs parents, mais avec un grand respect et d’un cœur sérieux. De cette manière ils s’instruisirent, tout jeunes encore, à prier d’eux-mêmes l’Être infini qui daigne écouter les supplications des petits enfants.

Marie Lothrop, à peine âgée de quatre ans, manifesta un vif intérêt pour tout ce qui concernait la religion. Souvent elle demandait à sa mère ou à son institutrice de lui lire quelques passages de la Bible, spécialement ceux où Jésus parle des petits enfants. Elle aimait à entendre le chapitre vingt et unième de l’Apocalypse, où l’apôtre décrit les splendeurs et les félicités du séjour céleste. Elle écoutait aussi, avec un charme particulier, la narration ou la lecture des travaux des missionnaires, et mettait la plus grande partie de ses épargnes dans une boîte destinée à recueillir les offrandes de la famille pour les missions.

Au mois d’août 1830, comme plusieurs missionnaires allaient faire voile pour l’Inde, Marie s’y intéressa tellement et en parla si constamment, que sa mère la conduisit avec elle au vaisseau pour les voir s’embarquer. En revenant, Marie dit à sa mère: «Je pense que les missionnaires doivent être bienheureux d’aller et d’instruire les pauvres païens. Je suis contente qu’il y en ait tant qui parlent. Si Dieu me laisse vivre, j’espère être un jour missionnaire. J’ai une quantité de choses à dire aux païens sur notre bon Sauveur!»

Ce serait peu que des paroles, et nous n’attacherions qu’une médiocre importance à un babil de petit enfant qui répéterait, sans y attacher une idée nette et claire, des expressions qu’il a mille fois entendues. Mais la jeune Marie faisait beaucoup mieux que de parler des choses saintes; elle montrait dans toute sa conduite qu’elle possédait réellement un cœur nouveau.

Sans avoir une gravité déplacée à son âge, elle évitait soigneusement, dans ses récréations avec ses jeunes amies, tout ce qui aurait été inconvenant ou répréhensible. Ses institutrices ne se rappellent pas d’avoir eu un seul reproche sérieux à lui faire. Respectueuse et docile envers ses parents, elle se montrait douce et bonne dans ses rapports avec ses frères et sœurs.

Voici deux traits qui nous ont paru bien remarquables, et nous plaindrions celui qui ne saurait y voir que des faits puérils. Un jour, son frère, plus jeune qu’elle, la frappa, et fut puni pour cette faute. Elle en parut affligée, et le prenant par la main, elle sortit avec lui de la chambre. Elle revint bientôt après, et dit à sa mère: «Je ne crois pas que mon frère me batte désormais;» et sa mère découvrit qu’elle avait été prier avec lui!

Un autre jour, on lui avait fait espérer de la conduire chez une dame de sa connaissance; mais quand le moment fut venu, ses parents ne jugèrent pas convenable de l’emmener. Marie s’était promis beaucoup de plaisir de cette visite; aussi quand sa mère lui dit qu’elle ne pouvait y aller, elle fut extrêmement désappointée. Cherchant à rire, malgré ses larmes: «Chère maman, dit-elle, n’est-ce pas, ce ne serait pas un péché à moi de pleurer? Les larmes me viennent....»

Comprenez-vous, pères et mères, ce qu’il y a d’admirable, osons-le dire, ce qu’il y a de sublime dans cette réponse d’un enfant de cinq ans?

Quel autre moyen que la religion chrétienne, quel autre livre que la Bible, quelle autre force que celle du Saint-Esprit, pourraient donner à vos enfants et cette douceur et cette docilité, qui craint de désobéir, ne fut-ce que par des larmes involontaires?

Vous vous plaignez peut-être que vos enfants ne répondent à vos soins que par la désobéissance et l’ingratitude; mais, de bonne foi, à qui la faute? avez-vous fait tout ce qui était en votre pouvoir pour les rendre chrétiens? les avez-vous présentés à Jésus, afin qu’il leur imposât les mains et qu’il priât pour eux?

Marie avait une santé délicate et chancelante. À diverses reprises, la maladie était venue la frapper; enfin, dans la septième année de sa vie, elle parut s’approcher rapidement du tombeau. Atteinte d’une sorte de paralysie complète, elle était entièrement impotente, et ne pouvait plus que tourner péniblement la tête sur son chevet; sa respiration était gênée, et souvent elle tombait dans des spasmes qui la privaient de tout sentiment.

Quelle ne fut pas sa patience pendant ces longs mois de maladie!

O douleur! ô mort! vous avez été vaincues par un enfant, mais par un enfant chrétien!

Marie prenait plaisir à entendre les pieux cantiques dont les paroles étaient depuis longtemps gravées dans son cœur. Elle priait beaucoup, priait souvent, et demandait surtout à Dieu de lui accorder la patience nécessaire pour supporter les épreuves qu’il lui dispensait. Une fois, croyant n’avoir plus que quelques moments à vivre, elle appela ses jeunes sœurs près de sa couche, et les supplia de s’appliquer aux choses religieuses. «Promettez-moi, disait-elle, de demander à Dieu un cœur nouveau, et alors... oh! qu’il vous sera facile et doux de l’invoquer! J’ai longtemps cru aussi que c’était fort difficile, et que jamais Dieu ne me donnerait un nouveau cœur, mais... il vous exaucera, car il dit: J'aime ceux qui m’aiment, et ceux qui me cherchent soigneusement me trouveront.»

Le manque d’espace nous force de supprimer tous les autres détails; nous ne pouvons résister cependant au désir de transcrire le récit de ses derniers instant; notre propre émotion nous assure que nos lecteurs le liront avec intérêt.

C’était dans la nuit du 17 mars1831 «Vers les dix heures, elle dit avec l’instance la plus pénétrante. Madame H***, venez, mettez-vous à genoux près de moi et priez Dieu; priez avec ferveur, à haute voix.

Quand j’eus commencé, elle répéta avec force: O Dieu! soulage-moi! Comme je priais, je m’aperçus qu’elle respirait plus librement; et je prolongeai ma prière plus que je n’eusse fait sans cela. Quand j’eus fini, elle me dit d’un ton que je n’oublierai jamais: Ah! chère dame H***! vous m’avez bien soulagée. Dieu a entendu votre prière, et il a un peu adouci mes maux...

Elle sembla un peu mieux depuis ce moment, et elle dormit sans interruption pendant près d’une heure. Alors, son malaise augmentant, elle sembla consolée et fortifiée, comme elle l'avait été pendant sa maladie, lorsqu’on lui lisait des portions de l'Écriture, ou qu’on lui chantait des cantiques. Elle nous indiqua certains cantiques, et demanda qu’on lui lût quelque chose sur les souffrances du Sauveur; une ou deux fois, elle nous dit: Chantez quelque chose du ciel. À quatre heures, elle demanda de nouveau qu’on priât avec elle. Quand j’eus fini, elle me dit: Priez encore; ne cessez plus de prier! Elle continua de respirer jusqu’à huit heures du matin; alors son âme heureuse prit son essor vers ce Sauveur qu’elle avait tant honoré et chéri; et quand le pasteur entra dans la chambre un instant après, il s’écria, et moi avec lui: Heureuse mère! heureuse mère! je ne puis pleurer, je ne puis que me réjouir avec vous!»


Vous, pères, élevez vos enfants,

en les instruisant et en les avertissant selon le Seigneur. —

Je suis l’Éternel, qui fait miséricorde jusqu’à mille générations,

à ceux qui m’aiment et qui gardent mes commandements.

Éphésiens 6: 4; Exode 20: 6 et Deutéronome 5: 10


Archives du christianisme 1834 04 12


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