Un jour, un voyageur arrivait dans une petite
ville du département de..... C'était
un samedi. Après avoir informé de son
arrivée un de ses amis, qui l'attendait, il
se rendit chez une de ses anciennes connaissances
qu'il n'avait pas vue depuis des années.
Louis M... et sa femme, honnêtes
cultivateurs, parurent enchantés de cette
marque d'amitié.
- Vous voilà donc, M. Charles, lui dit Louis
M...., quel bon vent vous amène ?
Charles. Le désir de vous voir et de
vous serrer la main.
Louis.
Bien.
Femme, tu vois là un de mes anciens
camarades d'enfance, et dont les conseils ont
toujours été pour moi d'un grand
prix. Vous souvient-il, Charles, du jour où,
grâce à vos bons avis, j'évitai
une perte qui m'aurait réduit à la
misère ?
Charles. Je crois m'en souvenir ;
c'est
qu'aussi vous n'avez pas fermé l'oreille
à la voix d'un ami qui ne voulait que votre
bien.
Louis.
Et je ne
m'en repens pas. C'était pour un
cautionnement.
Charles. Dites-moi, Louis, et la
famille ? elle a grandi depuis que je vous ai
vu.
Louis.
Oui ! grâce à Dieu, j'ai trois
garçons et deux fillettes, tous bien
portants, mais qui me donnent déjà du
fil à retordre.
Charles. Nos enfants nous rendent ce que
nous avons donné nous-mêmes à
nos parents : beaucoup de peines.
Louis.
C'est
vrai ; mais qu'y faire ?
Charles. Où sont-ils vos
enfants ?
Marguerite.
Les
deux plus jeunes, chez une voisine, et les autres
s'amusent sur la place.
M. Charles était d'un caractère
observateur : Dans ses fréquentes
courses, il avait plus d'une fois été
peiné à la vue de cette sorte de
désarroi qui caractérise les maisons
de bien des gens de la campagne et des petites
villes. Ici, rien de pareil.
Les engrais étaient soigneusement
entassés ; les instruments agricoles
à leur place. Dans la cuisine, les vases
d'étain, brillant comme de
l'argenterie ; au foyer, bien nettoyé,
un pot-au-feu, renfermant, sans doute, le souper
des enfants qui couraient les rues. Dans la chambre
de ménage, servant à double, à
triple usage, rien qui dénotât la
négligence des habitants. Une certaine
aisance, fruit d'un travail soutenu, indiquait une
de ces demeures où régnerait le
bonheur domestique, s'il n'y manquait pas ce qui
seul en fait la base et la force.
Après quelques paroles de son ancien
camarade, M. Charles reprit :
- Vous me parliez de vos enfants ; ils vous
causent donc bien de la peine ?
Louis.
Ce n'est
que trop vrai. L'aîné veut faire tout
à sa tête, et, parce qu'il a quatorze
ans, il se croit déjà un homme. Le
second, qui en a douze (je puis bien vous le dire),
m'afflige beaucoup ; on ne peut compter sur ce
qu'il dit. Tenez, l'autre jour, il a menti... mais,
je ne veux pas vous ennuyer de toutes ces
misères.
Marguerite.
Non, n'en dis rien ; on sait assez que ce ne
sont que des enfants ; avec l'âge, ils
se corrigeront. Ils ont d'ailleurs le meilleur
coeur du monde.
Louis
(vivement). Et moi, je ne me gêne pas avec
cet ami. Et puis, est-ce la
désobéissance, est-ce le mensonge que
nous leur avons appris ?
Charles. Et l'autre ?
Louis.
Le
troisième est peut-être le moins
rebelle, mais il commence déjà
à faire comme les aînés.
Charles. Vous aimez vos enfants, cher Louis, et
je lis sur les traits de votre femme qu'elle a pour
eux toute l'affection possible ; seulement, je
crains qu'elle ne voie pas toute la profondeur du
mal et qu'elle ne les excuse trop.
Marguerite.
Qu'ai-je de plus cher au monde que mes
enfants ? Ne donnerais-je pas ma vie cour
eux ?
Charles. Je n'en doute pas, et vous seriez,
j'en suis presque assuré, tout
disposés l'un et l'autre à recourir
à un moyen que je veux vous proposer, pour
arrêter vos enfants dans la mauvaise voie
qu'ils suivent et leur en faire prendre une
autre.
Louis.
Certainement ; mais quel moyen ? Je
serais curieux de le connaître ;
avez-vous quelque secret ?
Charles. Ce n'est pas un secret, mais
quelque chose qui a fort bien réussi
ailleurs. Voulez-vous que je vous le
dise ?
Louis.
Mais
sans doute. Je sais bien comment on s'y prend pour
faire porter de bons fruits à un mauvais
pommier ou pour renouveler une vigne ; mais,
pour faire changer de conduite à des enfants
désobéissants, menteurs, je n'en
connais pas d'autres que la verge, à moins
que le bon Dieu n'y mette la main.
Charles. C'est précisément de ce
dernier moyen, trop peu connu, que je veux vous
parler. Dites-moi, que font-ils le
dimanche ?
Louis.
Le
dimanche, c'est le jour où ils sont le plus
insupportables. Dans la semaine, ils sont du moins
à l'école et ils n'ont guère
le temps de courir. Mais le dimanche, j'ai de la
peine à les faire aller à
l'église, et puis, quand ils y ont
été, on ne les revoit plus qu'aux
repas, et encore à peine.
Charles. Lisez-vous avec eux la Parole de
Dieu ?
Louis
(embarrassé). Oui, comme çà,
de temps en temps.
Charles. Priez-vous avec eux ?
Louis.
Quand le
pourrait-on ? Au point du jour, ne faut-il pas
soigner son bétail, courir au champ ou
à la vigne, tenir tout en ordre ; et la
femme, n'a-t-elle pas son ménage ?
Charles. Et le soir ?
Louis.
Le
soir ! vous le voyez, les enfants vous
échappent, et, dès qu'ils rentrent,
ils mangent leur soupe et vont au lit.
Charles. Et quand ils vous
désobéissent, vous mentent, que
faites-vous ?
Louis.
Je vous
l'avoue, la moutarde me monte au nez, et j'ai
là un objet dont plus d'une fois leur dos a
senti l'effet.
Charles. Et vous trouvez que c'est ainsi qu'on
doit les élever et les laisser
grandir ? Vous soignez admirablement bien
votre bétail et vous ne soignez pas mieux
vos enfants ? Louis, j'aime votre
franchise ; mais votre franchise vous fera
supporter la mienne, et puisque, autre fois, vous
avez suivi mon conseil, qui vous a
épargné une ruine désastreuse,
voulez-vous suivre celui que je vais vous donner au
sujet de vos enfants ?
Louis.
Voyons ! quel est-il ?
Charles. Vous me l'avez vous-même
indiqué : chercher à faire dans
leurs coeurs ce que vous faites si bien à un
mauvais arbre ou à une mauvaise vigne.
Louis.
Comment
donc ?
Charles. Je vais vous le dire. Je connais un
village dans lequel les enfants étaient,
pour la plupart, aussi méchants que les
vôtres. Ces enfants suivaient l'école
de la semaine et n'étaient pas moins
avancés que ceux des autres communes.
L'instituteur se donnait toutes les peines du monde
pour les instruire ; de son côté,
le pasteur faisait tout son possible, surtout
envers les plus grands, pour leur enseigner les
principes chrétiens. Malgré tout
cela, le mal s'accroissait : les jurements,
les mensonges, le maraudage, l'insubordination
envers leurs parents ; chez les
aînés, le goût de la boisson, et
d'autres vices encore souillaient cette
jeunesse.
Désobéissants envers Dieu, comment ne
l'auraient-ils pas été envers
pères et mères ? Ceux-ci,
même les moins religieux, s'alarmaient avec
raison de la conduite de leurs enfants. Quelle
digue pouvait-on opposer au torrent ? Vous
allez voir.
Il y avait dans ce village un brave père de
famille, nommé Claude J..., un de ces bons
et solides chrétiens qui puisent dans la
Parole de Dieu leur règle de foi et de vie.
Ses enfants, par ses soins vigilants, avaient
été préservés de ces
vices auxquels la plupart de leurs camarades se
livraient.
Ce n'était pas assez pour lui : il
avait voulu que ses enfants apprissent de bonne
heure à connaître leur état de
péché et le salut qui n'est qu'en
Jésus-Christ.
Dans ce but, outre son culte journalier fait chez
lui avec sa femme et ses enfants, il consacrait,
chaque dimanche, au moins une heure à les
entretenir de la Parole du Seigneur. Un de ses
voisins, étonné de la bonne conduite
des enfants de Claude, lui demanda de permettre aux
siens de prendre part à ses bonnes
instructions. Claude ne demandait pas mieux. Peu
à peu le nombre de ses élèves
s'accrut. Quelques-uns se
dégoûtèrent bien vite ;
d'autres persévérèrent et y
prirent un vrai plaisir.
Marguerite.
Mais, c'est comme chez François D..., qui
tient ce qu'il appelle une école du
dimanche !
Charles. C'est cela : une école
du dimanche, ou, si vous aimez mieux, une
réunion du dimanche pour l'éducation
morale et chrétienne des enfants.
Ceux qui continuèrent à se rendre
chez Claude, ont appris et senti ce qu'ils
ignoraient et ce qu'ils ne sentaient pas ;
c'est que, pauvres pécheurs, ils devaient se
convertir et croire que Jésus-Christ est
leur Sauveur. En y croyant, plusieurs ont appris
à l'aimer et à lui obéir.
Sur quatre enfants de Claude, il y en a trois qui
sont devenus chrétiens dans le bon sens du
mot. Son école réunit bientôt
une quarantaine d'élèves. Il est
encouragé par le pasteur, par
l'instituteur.
Le premier, s'y rend de temps en temps, soit pour
remercier Claude du bien qu'il fait, soit pour
exhorter les enfants à en profiter.
Aujourd'hui, ce même village, où les
enfants étaient tristement connus par leur
mauvaise conduite, possède le meilleur moyen
pour agir, comme je vous le disais, sur leur
conscience, sur leur coeur : la greffe est
posée, une sève nouvelle circule et
déjà des fruits se montrent.
Un jour, un de ces enfants arrive tout abattu chez
Claude, un peu avant l'heure de
l'école ; celui-ci l'aborde avec
douceur : Qu'as-tu, mon ami ? Tu as
pleuré.
L'enfant n'ouvre pas la bouche. As-tu quelque
chagrin ? Enfin, ému de cette
bonté de son instituteur, il lui dit :
Oui, j'ai eu un grand chagrin. - Lequel ?
- Vous ne savez pas : après la
leçon de dimanche passé, je
m'étais bien promis de ne plus
désobéir à ma mère, et
voilà que, hier, j'ai désobéi.
J'en ai pleuré encore ce matin. - Tu as donc
bien compris ces paroles :
« Enfants, obéissez à vos
pères et à vos mères, selon le
Seigneur ; car cela est juste. »
(Eph.
VI, 1.) - Oui !
- Eh bien ! rappelle-toi cette autre
parole : « Si quelqu'un a
péché, nous avons un avocat (un
défenseur) auprès du Père,
Jésus-Christ, le juste. »
(1 Jean
II, 1). Confesse-lui ton péché et il te
donnera, avec l'assurance du pardon, la force de
n'y plus retomber. Reconnais-le aussi auprès
de ta mère et elle te pardonnera.
Une autre fois, un des élèves de
Claude avait dérobé du fruit dans le
verger d'un voisin. Découvert par son
père, qui en informa Claude, l'enfant dut
aller chez le propriétaire du verger et lui
avouer sa faute. Cet homme, assez mal
disposé envers l'école du dimanche,
fut fort touché de cette démarche. -
Qui t'a envoyé vers moi, dit-il à
l'enfant ? - C'est M. Claude. - Tu vas donc
à son école ? - Oui ! -
C'est bon. Aussitôt il fait venir ses deux
enfants et leur dit : Vous irez dès
demain à l'école du dimanche de M.
Claude. Il vous apprendra quels sont vos
devoirs.
Louis.
Mais
c'est excellent, et comment avons-nous fait,
Marguerite, de ne pas envoyer les nôtres
à l'école du dimanche, nouvellement
ouverte près de chez nous ?
Marguerite.
Ils
n'auraient pas voulu, nos enfants ; je les
connais.
Charles. Demain, faites une chose ;
accompagnez-moi tous deux, à une heure, chez
M. François D... ; amenez-y vos enfants
et vous jugerez par vous-même ce qu'est une
école du dimanche.
Louis.
Soit,
nous le voulons bien.
M. Charles avait prévenu à temps le
directeur de l'école du dimanche, et
celui-ci avait recommandé aux enfants de
prier leurs parents de s'y rendre.
Cette école se tenait dans une salle de la
maison de François D... A la salle
étaient attenants deux cabinets et une vaste
cuisine. Dans la grande pièce étaient
des bancs symétriquement
rangés ; en face, une table sur une
petite estrade ; à droite, les filles,
sous les soins de quatre dames ; à
gauche, les garçons, ayant pour moniteurs,
à la tête de chaque groupe, des
membres de l'Union chrétienne des jeunes
gens ; entre chaque groupe, un intervalle.
Une soixantaine d'enfants de cinq à seize
ans, les plus jeunes près de l'estrade,
occupaient les bancs. Dans les deux pièces
attenantes à la cuisine, se
pressaient des pères, des mères, des
amis des enfants, accourus pour voir cette
réunion d'un nouveau genre dans cette
localité, et pour entendre le visiteur.
Quand M. Charles entra, avec Louis et sa famille,
tous les élèves étaient
à leurs places. Le directeur prononça
une prière simple, brève, mais
fervente et indiqua un chant. Toutes ces voix
enfantines, déjà bien
exercées, s'élevaient vers le ciel en
hymnes de louanges. Les chefs de groupe
s'assurèrent si chaque élève
avait correctement appris les passages
expliqués le dimanche
précédent ; puis ils leur
adressèrent des questions, des conseils
pratiques sur ces passages.
L'attention était soutenue ; les yeux
des enfants fixés sur leurs moniteurs :
rien de tendu, d'ennuyeux ; quelques anecdotes
à l'appui de la leçon du jour
intéressaient vivement et les
élèves et les instructeurs. Au bout
d'une demi-heure, silence absolu ; puis,
encore un chant. Toute la nombreuse assistance des
parents paraissait charmée de l'ordre, de
l'entrain qui régnait dans cette
école.
Après le chant, M. Charles monta sur la
modeste estrade et s'exprima en ces
termes :
« Mes jeunes amis, je suis fort
réjoui de vous voir réunis ici en
grand nombre, tout comme d'y voir vos parents et
les amis de cette bonne oeuvre. S'il y avait ici
quelqu'un qui se demandât :
« Qu'est-ce qu'une école du
dimanche, » je lui dirais :
« Voyez ! en voilà
une. » Mais ce ne serait pas assez. Il y
a peut-être ici des enfants ou des parents
qui n'en comprennent ni l'absolue
nécessité, ni les bienfaits. Je vais
tâcher de vous les démontrer.
« Je dis d'abord que l'école du
dimanche est nécessaire,
c'est-à-dire, qu'on ne peut s'en passer,
à moins que les parents ne veuillent que
leurs enfants grandissent dans
l'indifférence et restent sans Dieu et sans
espérance en ce monde. Mais, je vous entends
dire tout bas : N'avons-nous pas les
écoles de la semaine et l'instruction
religieuse des pasteurs ? J'apprécie
autant que qui que ce soit les écoles de la
semaine ; elles sont indispensables pour
apprendre aux enfants à lire, à
écrire, à compter ; mais chacun
sait que ces objets, fort utiles sans doute, ne
sont pas l'essentiel dans la grande question de
notre salut, et qu'un enfant pourrait être
bon lecteur, bon arithméticien et être
en même temps un malheureux impie.
« Chacun devrait aussi savoir que la
religion n'est pas une science, mais une vie, un
lien, qui nous relie à Dieu. L'école
primaire a pour but principal le
développement de l'intelligence, tandis que
l'école du dimanche s'adresse à la
conscience, au coeur.
Les instituteurs les plus capables peuvent vous
dire que le temps qu'ils consacrent à la
partie religieuse dans leurs écoles, est
fort peu de chose.
Et l'instruction donnée par les
pasteurs ?
Elle aussi est nécessaire et peut faire
beaucoup de bien ; mais, d'abord, tous les
enfants n'y sont pas admis, et de respectables
pasteurs assurent qu'elle ne peut suffire. Prenez
dix enfants qui ont fréquenté une
école du dimanche, depuis l'âge de
cinq ou six ans, et dix autres qui n'y auront
jamais été. Ces vingt enfants,
parvenus à l'âge de treize ou quatorze
ans, vont suivre l'instruction du pasteur.
Lesquels y seront le mieux
préparés ?
Lesquels auront acquis des notions
préliminaires, simples, saines, si
précieuses pour recevoir une instruction
plus développée ?
Et que sera-ce encore, si, comme on le voit dans
tant de familles, ces pauvres enfants ne respirent,
sous le toit paternel, qu'une atmosphère
irréligieuse ?
Quel travail aride, souvent infructueux, pour un
pasteur chargé d'amener de tels
élèves à
Jésus-Christ ! Quel sol ingrat,
déjà tout couvert des ronces de
l'incrédulité et du vice !
Comment la bonne semence y prendra-t-elle
racine ?
« Les dix autres, au contraire,
élèves assidus de l'école du
dimanche, passeront sous les soins du pasteur avec
un fond de connaissances, peut-être de
salutaires impressions qui, avec la grâce de
Dieu, produiront d'excellents fruits.
Depuis l'âge de cinq ou six ans et chaque
dimanche, ils auront entendu une voix
céleste, celle de Dieu, qui nous parle dans
son Évangile ; les premiers germes de
la foi, de l'amour du Seigneur, auront pu
éclore dans ces jeunes âmes. Quelle
bonne école préparatoire pour ces
chers enfants qui sont appelés à
devenir membres de l'Église de Christ !
Comme elle facilitera l'oeuvre du
pasteur !
« Il en est ici exactement de même
que pour l'entrée dans nos écoles
primaires. Un enfant qui a appris à
l'école enfantine ou auprès de ses
parents, les lettres, les syllabes, les mots, les
chiffres et surtout l'obéissance, la
ponctualité, ne donne-t-il pas infiniment
moins de peine à l'instituteur primaire
qu'un enfant de sept ans qui ne sait ni a ni
b ?
Demandez-le à nos maîtres
d'école. Il y a donc une différence
énorme entre les enfants de quatorze ans,
élèves de l'école du dimanche,
et ceux du même âge qui ne la
fréquentent pas. Comme je vous le
disais : les pasteurs le sentent et
reconnaissent que, pour agir sur le coeur des
enfants, pour les conduire au Sauveur, il faut s'y
prendre de fort bonne heure, et qu'un moyen direct,
facile, à la portée de tous], c'est
l'école du dimanche.
« En effet, ne pensez-vous pas,
pères et mères, que la
première chose dont vos enfants aient
besoin, c'est de connaître leur propre
coeur ? Aussi longtemps qu'ils ne verront pas
que le mal habite en eux et qu'il leur faut un
Sauveur, ils resteront dans la voie de la
perdition. Or, dans une réunion telle que
celle-ci, on les met en présence de Dieu, de
sa Parole ; par des entretiens familiers avec
eux, des applications de cette divine Parole, on
fait vibrer une corde qui, peut-être, ne
rendait aucun son distinct, celle de la conscience,
de cette conscience qu'il s'agit de convaincre de
péché.
C'est le premier pas à faire dans la route
conduisant au salut. Pour cela, il faut que la
lumière soit mise à leur
portée et qu'on leur tienne un langage en
rapport avec leur âge. Rien de plus
précieux pour cela qu'une école du
dimanche.
« Ne faut-il pas aussi, chers enfants,
que vous appreniez de bonne heure quel est Celui
qui est venu chercher et sauver ce qui était
perdu ? Dites-moi, mes amis, pourriez-vous me
dire ce que le Seigneur enseignait un jour à
une femme nommée Marthe ?
« Un Enfant. On le lit dans saint Luc,
chapitre dix.
« M. Charles. Lisez-le nous.
« Un Enfant. Marthe, Marthe, une
seule chose est nécessaire.
« M. Charles. Qu'entendait-il par
là ?
« Un Autre Enfant. C'est
d'être racheté par Lui, de recevoir et
de pratiquer sa Parole.
« M. Charles. Très
bien ! De deux choses l'une : ou bien les
parents s'appliquent chez eux à amener leurs
enfants à cette foi vivante et pratique, ou
bien ils n'y songent pas.
Dans le premier cas, qu'ils doivent s'estimer
heureux d'avoir pour fidèle auxiliaire une
école du dimanche ! Dans le second cas,
leurs enfants n'ont-ils pas le plus pressant besoin
de ce moyen-là, puisque, sous le toit
paternel, on ne leur parle pas de
Jésus-Christ ?
« L'école du dimanche n'est-elle
pas indispensable pour que vous compreniez,
déjà à votre âge, que le
dimanche est bien le jour du Seigneur ? Ici,
est le culte pour les enfants ; vous priez,
vous adorez Dieu, vous entendez sa Parole ;
vous apprenez à mettre à part, selon
la volonté du Créateur, un jour sur
sept, et à le sanctifier. Y aurait-il tant
de gens qui foulent aux pieds le dimanche, en
l'employant au travail ou à de criminels, ou
à de frivoles plaisirs, s'ils avaient eu,
dès leur enfance, un culte selon leur
âge, une réunion du genre de
celle-ci ?
« N'est-elle pas aussi nécessaire
pour inculquer dans vos jeunes coeurs cette greffe
divine qui les renouvellera ? L'Esprit Saint
peut seul opérer cette oeuvre, et, en
l'opérant, il vous donnera d'aimer Celui qui
vous a tant aimés, et de remplir vos devoirs
d'enfants, puis, plus tard, ceux de l'âge
mûr.
« Sous tous ces rapports, l'école
du dimanche nous parait d'une incontestable
nécessité. Reconnaissez-le, parents
de ces enfants, et vous ne tarderez pas à en
voir les bienfaits.
Il y avait, dans un village de notre pays, un homme
qui ne voulait pas qu'on lui parlât de
l'Évangile. Deux de ses fils marchaient sur
ses traces ; ils devinrent bientôt,
comme lui, blasphémateurs, joueurs,
ivrognes. Ce malheureux, dont la femme était
morte par suite des mauvais traitements qu'elle en
avait reçus, ne vivait que des débris
d'un patrimoine bientôt épuisé
par ses excès.
Un jour, il tombe malade, et sa misère est
à son comble. Ses deux aînés,
élevés à son image,
l'abandonnent dans son triste état. Le
cadet, avait eu l'avantage d'entrer assez jeune,
comme petit valet de ferme, dans une maison
chrétienne d'une ville voisine. D'abord
paresseux, menteur, il ne causait que du chagrin
à ses maîtres. Mais ceux-ci,
comprenant qu'ils avaient un important devoir
à remplir envers l'âme de cet enfant,
l'envoyèrent à l'école du
dimanche de cet endroit. Il la suivit pendant deux
ou trois ans ; les mauvais plis
s'effacèrent, et peu à peu, il devint
un être nouveau.
À seize ans il avait quelques
épargnes. Ce fut alors que son père
tomba malade. Avec la permission de ses
maîtres, il court auprès de lui, le
trouve seul, dans un pauvre grabat. À cette
vue, le jeune homme fond en larmes, remet le
précieux pécule à son
père et le soigne avec toute la tendresse
qu'un enfant chrétien doit à l'auteur
de ses jours.
On rapporte que ses prières, ses paroles
brûlantes d'amour opérèrent un
changement complet dans le coeur du malade, et que
celui-ci, ayant reconnu avec larmes, son
inconduite, mourut en invoquant le nom de
Jésus-Christ. Qu'étaient devenus les
deux aînés ? L'un était
mort par suite de son ivrognerie, et l'autre
était en prison pour vol.
« Je sais bien que tous les
élèves des écoles du dimanche
n'en retirent pas toujours de salutaires effets.
Vous-mêmes vous savez que toute la graine que
vous jetez en terre, que tous les ceps que vous
cultivez ne produisent pas tous les fruits que vous
en attendez. Cela ne vous empêche pas
d'ensemencer vos champs et de cultiver vos
vignes.
N'y a-t-il pas plus d'espoir d'une bonne
récolte en une terre bien
préparée, qu'en celle où vous
ne sèmeriez rien du tout et où vous
laisseriez croître des épines et des
chardons ? C'est évident.
Eh bien ! le coeur de vos enfants est comme un
sol plein de mauvais germes qu'il s'agit d'arracher
et où il importe hautement, sous peine de
perdition, et pour vous et pour eux, de
répandre la pure semence de la Parole de
Dieu. Plusieurs grains seront perdus ; mais
d'autres lèveront, et quels bons fruits que
ceux qui en sortiront ! Quelle admirable
récolte ! Le trait que je viens de vous
raconter le prouve. Le père coupable
récolta ce qu'il avait semé dans deux
de ses fils. Si d'autres n'eussent pas fait envers
le cadet, ce qu'il était lui-même
incapable de faire, l'aurait-il eu près de
son chevet au moment suprême, et aurait-il
pu, comme le brigand converti, jeter les yeux sur
le Sauveur de nos âmes ?
L'école du dimanche enseigne donc aux
enfants à respecter, aimer, soutenir leurs
parents, parce qu'elle puise toutes ces
règles de la vie dans la Bible, qui nous
révèle la volonté de Dieu.
Quel bienfait !
« L'école du dimanche met les
enfants sur la voie du salut, non seulement d'un
salut, d'un pardon pour la vie à venir, mais
encore du salut dans la vie actuelle. En les
instruisant selon le Seigneur, et s'ils en
profitent, elle leur fera faire l'expérience
de cette belle parole : « La
piété a la promesse de la vie
présente, aussi bien que de celle qui est
à venir. » (1, Tim. IV,
8.)
Et comment cela ? C'est bien simple : vos
enfants grandissent et avec eux les tentations, les
pièges. Si Dieu vous les conserve, les
voilà bientôt lancés sur
l'Océan de la vie. tout parsemé
d'écueils. Sans une foi réelle au
Seigneur, ils seront comme une nacelle
privée de gouvernail et à la merci
des flots. Au contraire, avec un coeur
régénéré, plein de
soumission, de confiance en Jésus-Christ,
ils vogueront en paix et arriveront au port.
L'école du dimanche leur montre la route
à suivre. Quel bienfait !
« Mais le plus grand de tous, c'est que
le bonheur, la gloire à venir peuvent
être leur partage. Nous touchons tous aux
portes de l'éternité : parents,
enfants, maîtres, disciples, jeunes et vieux,
encore un moment et nous sommes lancés dans
ce monde futur. Quelle sera la part de vos
enfants ? l'enfer ou le ciel ?
L'enfer, s'ils ne sont pas à Christ, en
Christ. Le ciel, s'ils sont à Christ, en
Christ. Point d'autre alternative.
Laquelle voulez-vous pour vous, pour vos enfants,
si tendrement aimés ?
Si c'est le ciel, ne les en détournez pas,
en les détournant de ce qui peut les y
préparer. L'école du dimanche, pour
ceux qui en retirent du fruit, les fait entrer dans
ce chemin. Quel bienfait !
« Considérez encore, parents, que,
si vos enfants se perdaient par votre
négligence, vous vous perdriez avec eux,
vous vous perdriez sans retour ; vous
deviendriez les auteurs ou les complices de cet
épouvantable malheur.
« Vous le voyez, l'école du
dimanche peut être riche en bons
résultats pour vos enfants, pour
vous-mêmes ; nous devons ajouter, pour
le pays, pour l'église. Que, dans un pays,
l'enfance, la jeunesse, soient livrées
à l'empire du mal ; qu'aucune digue ne
soit opposée au torrent dévastateur
du péché ; ce pays-là,
quelles que soient la fertilité de son sol,
la prospérité de son commerce,
l'abondance de ses récoltes, est un pays
où l'immoralité, les vices iront en
grandissant. Et l'église que devient-elle,
si on ne lui prépare pas de bonnes
recrues ? un corps sans vie, un cadavre.
« C'est ce qu'ont bien compris les pays,
les églises les plus prospères.
Savez-vous ce qui place au premier rang des peuples
civilisés et chrétiens :
l'Écosse, l'Angleterre, plusieurs des
États-Unis d'Amérique, quelques
portions de la France, de la Suisse et d'autres
nations de la terre ?
Ce ne sont pas les forces de leurs armées,
l'étendue de leur commerce ou de leur
industrie ; c'est la base solide sur laquelle
reposent les moeurs d'une bonne partie de ces
populations.
Les écoles du dimanche ont une large part
dans cette oeuvre
régénératrice, et plus
celle-ci progresse, plus aussi s'accroît le
nombre de ces bienfaisantes institutions.
On compte aux États-Unis des milliers
d'écoles du dimanche pour les enfants de
toute classe ; la Grande-Bretagne en
possède aussi un nombre fort
considérable. En France, dans plusieurs
cantons de la Suisse, et dans d'autres pays, le
chiffre va chaque année en augmentant. Ici,
dans cette ville, vous voilà à
l'oeuvre ; j'en bénis le
Seigneur ; si vous n'y étiez pas, je
vous conjurerais de vous y mettre. Voilà une
soixantaine d'enfants. Voyons, mes amis, nous
voudrions savoir si vous êtes contents de
venir à l'école du dimanche. Nous
pourrions, comme cela s'est fait ailleurs, vous
demander de manifester. votre pensée en
levant la main ; mais quelques-uns n'oseraient
peut-être pas dire : « Non, je
ne suis pas bien aise d'être venu
ici. » Vous vous y prendrez donc
autrement.
Voici de petits morceaux de papier ; vos chefs
de groupe voudront bien en remettre un à
chacun des élèves qui savent
écrire le mot oui ou le mot non. Ils vous remettront
aussi des crayons. Ceux
d'entre vous qui n'aiment pas l'école du
dimanche écriront sur leur petit bulletin le
mot : non. Ceux qui viennent ici avec
plaisir, écriront le mot : oui. Vous ne mettrez que l'un
ou l'autre de ces
mots ; pas de signature.
(Les moniteurs distribuent, par groupe, papiers et
crayons ; chaque enfant écrit, sauf
deux ou trois des plus petits ; les bulletins
sont recueillis. Le tout n'a pas pris plus de deux
minutes).
« Deux de ces pères de famille,
dit M. Charles, voudront bien, avec le directeur de
l'école, dépouiller ce scrutin.
Pendant ce temps-là, l'école va
chanter ce beau cantique de votre recueil (Cantique 29 du
Recueil à l'usage des
écoles du dimanche -
Paris) ; j'aime
à penser que vous pouvez tous
dire :
Voici revenir le beau jour
Qu'au travail on retranche ;
Pour le Ciel travaille à son tour
L'école du dimanche.
En ce saint lieu,
Près de mon Dieu,
Nourri de sa Parole,
De quel bonheur
Jouit mon coeur,
Que j'aime mon école !
Ici, surmontant la frayeur
Du danger qui me presse.
Je vois éclater du Sauveur
La force en ma faiblesse.
En ce saint lieu, etc.
Ici les moments sont trop courts,
Pleins de paix et de joie ;
Puissent couler ainsi mes jours
Dans cette heureuse voie t
En ce saint lieu, etc.
Sois béni, mon Dieu, pour ce jour
Qu'au travail on retranche ;
Pour ce présent de ton amour,
L'école du dimanche.
Dans ce saint lieu,
Près de mon Dieu,
Nourri de sa Parole,
De quelle ardeur
Brûle mon coeur,
Que j'aime mon école !
Après ce chant, un des scrutateurs
communique à M. Charles le résultat
de la votation : sur soixante-deux
présents, il y a cinquante-neuf oui. Trois enfants ont dit
qu'ils ne savent pas
encore écrire.
« Eh bien ! mes amis, en
écrivant le mot oui, vous avez dit
que vous êtes heureux de pouvoir
fréquenter cette bonne réunion ;
vous montrerez dans la suite que ce oui est
bien sincère, et en y venant
assidûment, vous demanderez à notre
Père céleste de graver dans vos
coeurs sa divine Parole.
« Maintenant, je m'adresse à vous,
pères et mères de ces enfants :
permettez-moi de vous faire part de quelques
conseils dictés par une expérience
déjà longue et par le vif
intérêt que je porte à leur
véritable bien et au vôtre. Vous voyez
ce qu'est une école du dimanche, le prix
qu'y mettent vos enfants, le besoin qu'ils ont
d'une institution pareille ; je vous ai
montré quels bienfaits elle peut
produire.
« Mon premier conseil est donc
celui-ci : Pénétrez-vous de
l'incontestable nécessité de
l'école du dimanche. Plus vous
l'apprécierez, plus vous serez dans le
vrai !
Considérez-la comme un indispensable
auxiliaire de l'éducation domestique, de
l'instruction offerte dans les écoles
hebdomadaires et auprès du pasteur. Pour
plusieurs enfants, c'est peut-être la seule
source mise à leur portée, à
laquelle ils puisent l'eau de \a vie.
Vous êtes, avec raison, très soigneux
à donner aux vôtres des directions
pour les préserver d'accidents
nuisibles ; dans leurs maladies, quelle n'est
pas votre sollicitude !
Et vous n'en auriez pas pour le moins autant en
présence de l'affreuse maladie dont ils sont
tous atteints, la maladie du péché et
ses terribles suites ! Non ; impossible.
Maintenant que vous savez quels sont les avantages
que présente une école du dimanche,
vous ne les dédaignerez pas ; c'est mon
premier conseil.
« Voici le second : Envoyez
régulièrement vos enfants à
l'école du dimanche et, si vous le pouvez,
accompagnez-les-y. La régularité dans
la fréquentation est aussi nécessaire
que l'école elle-même ; si un
enfant ne s'y rend pas, ou seulement s'il s'y rend
de temps en temps ou trop tard, c'est ordinairement
la faute des parents.
Au contraire, l'enfant qui sait que son père
ou sa mère met une sérieuse
importance à l'assiduité, se sent
soutenu contre la négligence, la
légèreté si commune à
cet âge. Une école manquée sans
raison plausible, c'est un morceau du pain
spirituel dont il se prive ; c'est une
infraction au devoir.
« Mon troisième conseil est
celui-ci : Veillez à ce qu'ils s'y
rendent bien préparés. Vous
coûterait-il beaucoup de vous assurer par
vous-mêmes s'ils ont appris les passages
qu'on leur indique, et s'ils ont lu les bons livres
qu'on leur remet ?
« Je connais quelques pères et
mères de famille qui ont la bonne coutume de
demander à leurs enfants, chaque fois que
ceux-ci reviennent de l'école du
dimanche : Voyons, qu'avez-vous à
apprendre pour dimanche prochain ? Puis ils se
mettent, ce même jour, à lire
avec eux cette portion des Écritures ;
dans le courant de la semaine, ils la
répètent encore :
traités, livres religieux remis aux enfants,
rien ne leur échappe.
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