« Celui qui doute, est condamné s'il mange parce que cela ne vient pas de la foi. Or, tout ce qui ne vient pas de la foi, est péché. » Rom. XIV : 23.
C'était une coutume parmi les païens idolâtres d'immoler des
animaux et d'en offrir la chair en sacrifice à leurs dieux. Le prêtre
recevait sa part de chaque victime et envoyait ordinairement cette
part au marché où elle était vendue comme toute autre viande. Les
Juifs chrétiens qui étaient répandus partout, étaient fort difficiles
quant à la viande qu'on leur présentait ; ils avaient peur de
violer en quoi que ce fût la loi de Moïse, aussi élevaient-ils des
doutes et soulevaient-ils des discussions et toutes sortes de
difficultés parmi les églises.
Ce sujet, entre autres, divisait et agitait l'Église de Corinthe
tellement qu'enfin on écrivit à l'apôtre Paul pour requérir ses
directions. Il répondit dans sa première épître aux Corinthiens. Il
semble, d'après ce qu'il dit dans cette épître, que quelques-uns
poussaient leurs scrupules si loin qu'ils pensaient ne devoir manger
d'aucune viande, vu qu'au marché ils ne pouvaient jamais être sûrs de
ne point acheter ce qui avait été consacré aux idoles. D'autres ne
faisaient aucune différence entre ce qui était consacré aux idoles et
ce qui ne l'était pas ; sachant avoir le droit de manger de la
viande, ils achetaient au marché celle qu'ils y trouvaient, sans se
mettre en peine de sa provenance. Pour terminer leur dispute, ils
écrivirent donc à l'apôtre Paul, et dans le chapitre
VIII de la 1e aux Corinthiens, nous avons la discussion
approfondie qu'il fit de ce sujet.
« Quant aux choses sacrifiées aux idoles, nous savons que nous
avons tous de la connaissance : la connaissance enfle, mais
l'amour édifie. Et si quelqu'un pense savoir quelque chose, il n'a
encore rien connu comme il faut connaître. Mais si quelqu'un aime
Dieu, il est connu de lui. Or, quant à l'action de manger des choses
sacrifiées aux idoles, nous savons qu'une idole n'est rien dans le
monde, et qu'il n'y a point d'autre Dieu qu'un seul. Car quoi qu'il y
en ait qui sont appelés dieux, soit dans le ciel, soit sur la terre
(comme il y a beaucoup de dieux et beaucoup de seigneurs) toutefois,
pour nous, il y a un seul Dieu, le Père, duquel sont toutes, choses,
et nous pour lui ; et un seul Seigneur, Jésus-Christ, par le
moyen duquel sont toutes choses, et nous par lui. Mais la connaissance
n'est pas en tous ; et quelques-uns se faisant encore à présent
conscience de l'idole, mangent une chose comme sacrifiée aux idoles,
et leur conscience qui est faible en est souillée. »
« Leur conscience est souillée » c'est-à-dire qu'ils
regardent cet aliment comme une viande consacrée à une idole et qu'ils
font réellement acte d'idolâtrie. Manger de la viande est en soi chose
totalement indifférente. « Mais ce n'est pas un aliment qui nous
recommande à Dieu ; car si nous mangeons nous n'en avons rien de
plus ; et si nous ne mangeons, pas, nous n'en avons rien de
moins. Mais prenez garde que ce droit même que vous avez, ne devienne
une occasion. d'achoppement pour les faibles. Car si quelqu'un te
voit, toi qui as de la connaissance, assis à table dans un lieu
consacré aux idoles, la conscience de celui qui est faible ne se
fondera-t-elle pas là-dessus pour manger les choses sacrifiées aux
idoles ; et le frère qui est faible, à cause duquel Christ
mourut, ne périra-t-il pas par suite de ta connaissance ? »
En d'autres termes : si tu as une connaissance suffisante du
sujet pour savoir qu'une idole n'est rien, et pour ne faire
aucune différence entre les viandes, il n'en résulte pas que tu fasses
bien d'user de cette liberté. Car si l'on te voit manger d'une viande
reconnue pour avoir été consacrée aux idoles, celui qui est faible et
moins éclairé que toi, pourra être entraîné par ton exemple à mander
des viandes consacrées aux idoles, en les considérant comme
telles ; et par là il fera, selon sa manière de voir, acte
d'adoration à l'égard de l'idole.
Or si vous péchez ainsi contre vos frères et portez atteinte à leur
conscience qui est faible, vous péchez contre Christ. « C'est
pourquoi, si un aliment scandalise mon frère, je ne mangerai plus
jamais de viande, afin de ne pas scandaliser mon frère. »
Paul arrive donc à cette charitable conclusion qu'il vaudrait mieux
renoncer absolument à l'usage de la viande que d'être une occasion de
chute pour un frère plus faible ; car, en fait, pécher ainsi
contre un frère faible, c'est pécher contre Christ.
En écrivant aux Romains, il traite le même sujet (car la même
discussion existait parmi eux). Après avoir posé quelques principes
généraux, il leur donne cette règle.
« Quant à celui qui est faible dans la foi, recevez-le, mais non
pour des disputes d'opinions. L'un croit qu'il peut manger de
tout ; l'autre qui est faible, mange des légumes. »
Il y avait à Rome des chrétiens qui préféraient ne vivre que de
nourriture végétale, plutôt que de courir le risquer d'acheter de
la viande qui eût été consacrée aux idoles. D'autres achetaient et
mangeaient indistinctement toute viande offerte au marché, sans
s'informer de rien par scrupule de conscience. Ceux qui vivaient de
nourriture végétale accusaient les autres d'idolâtrie ; et ceux
qui mangeaient de la viande accusaient les autres de superstition et
de faiblesse. C'était un mal.
« Que celui qui mange, ne méprise point celui qui ne mange
pas ; et que celui qui ne mange pas, ne juge point celui qui
mange, car Dieu l'a reçu. Toi, qui es-tu pour juger le domestique
d'autrui ? S'il se tient debout ou s'il tombe, cela regarde son
maître. Or, il sera affermi ; car Dieu est puissant pour
l'affermir. »
Il y avait aussi une controverse touchant les fêtes juives. Les uns
supposaient que Dieu en exigeait l'observation, aussi les
observaient-ils ; les autres pensaient que Dieu ne l'exigeait
pas, aussi les négligeaient-ils.
« L'un juge un jour au-dessus d'un autre jour ; l'autre juge
que tous les jours sont égaux : que chacun ait en son esprit une
pleine conviction. Celui qui pense au jour, c'est pour le Seigneur
qu'il y pense ; et celui qui ne pense pas au jour, c'est pour le
Seigneur qu'il n'y pense pas. Celui qui mange, c'est pour le Seigneur
qu'il mange, car il rend grâce à Dieu ; et celui qui ne mange
pas, c'est pour le Seigneur qu'il ne mange pas, et il rend grâce à
Dieu. Car nul de nous ne vit pour soi-même ; et nul ne meurt pour
soi-même. Car, soit que nous vivions, c'est pour le Seigneur que nous
vivons ; soit que nous mourions, c'est pour le Seigneur que nous
mourons ; soit que nous vivions, soit que nous mourions, nous
sommes au Seigneur. C'est pour cela que Christ mourut, et qu'il
se releva, et qu'il reprit la vie ; afin de dominer et sur les
morts et sur les vivants. Mais toi, pourquoi juges-tu ton frère ?
ou toi aussi, pourquoi méprises-tu ton frère ? car nous serons
tous placés devant le tribunal du Christ. Car il est écrit :
« Je suis vivant, dit le Seigneur, que tout genou fléchira devant
moi, et que toute langue confessera Dieu hautement. » (Esa
XLV : 23.) Ainsi donc, chacun de nous rendra compte à Dieu
pour ce qui le concerne. »
« Ne nous jugeons donc plus les uns les autres ; mais jugez
plutôt ceci, que vous ne devez point mettre d'achoppement ou de
scandale devant votre frère. »
Maintenant remarquez ce qui suit :
« Si ton frère est contristé à cause d'un aliment, tu ne marches
plus selon l'amour. Ne fais pas périr par ton aliment celui pour
lequel Christ mourut. »
C'est-à-dire : je sais que la distinction entre viandes pures et
viandes impures ne nous lie plus, sous la dispensation de
Christ ; mais pour celui qui croit à cette distinction, c'est un
crime que de manger indistinctement les diverses viandes qu'on lui
présente, car il fait ce qu'il croit être contraire aux commandements
de Dieu. « Toutes choses, il est vrai, sont pures, mais il y a du
mal pour l'homme qui mange avec scrupule. » Tout homme doit être
persuadé que ce qu'il fait est bien. Si un homme mange des viandes
réputées impures sans être convaincu qu'il fait bien, il offense Dieu.
« Il est bien de ne pas manger de viande, de ne pas boire de
vin, et de ne manger ou boire quoi que ce soit qui puisse être pour
ton frère une occasion de chute, de scandale ou de faiblesse. ».
« Pour toi, conserve en toi-même devant Dieu la persuasion que tu
as ; heureux celui qui ne se juge pas lui-même dans le parti
qu'il adopte ! Mais celui qui hésite s'il doit ou non manger est
condamné s'il mange, parce qu'il n'agit pas par persuasion ; or
tout ce qui ne se fait pas par persuasion est un péché. »
Condamné signifie : reconnu coupable d'avoir violé la loi de
Dieu.
Si un homme fait une chose, bien qu'il doute que cela soit permis, il
offense Dieu ; il viole la loi et il est condamné, que son action
soit en elle-même légitime ou non. J'ai été très explicite en
expliquant mon texte dans sa connexion avec le contexte, parce que je
désirais vous convaincre entièrement de la justesse du principe posé
ici, à savoir que si un homme agit tout en doutant de la légitimité de
son action, il pèche et il est condamné. devant Dieu. Que son action
soit légitime ou non en elle-même, là n'est pas la question. Il doute
de cette légitimité et il agit quand même ; c'est assez pour
qu'il soit coupable.
Il y a ici une exception à noter. C'est le cas où l'on doute autant de
la légitimité de l'abstention que de celle de l'action ; où l'on
doute aussi honnêtement et aussi complètement dans un sens que dans
l'autre. C'est précisément ce cas-là que le président Edwards a en vue
dans sa 39e résolution :
« Résolu de ne jamais faire une chose dont la légitimité me
paraîtrait douteuse (légitimité que j'examinerais ensuite) ;
excepté le cas où la légitimité de l'abstention m'apparaîtrait tout
aussi douteuse. »
En effet, dans tel cas donné, un homme peut éprouver autant de
scrupule à s'abstenir qu'à agir. Tout ce que l'on peut dire alors,
c'est qu'il doit agir selon la plus grande somme de lumière qu'il
pourra obtenir. Mais s'il doute de la légitimité de l'action, sans
avoir de doute quant à la légitimité de l'abstention, et que malgré
cela il agisse, il pèche et il est condamné devant Dieu ; il faut
qu'il se repente ou qu'il soit condamné. Pour examiner ce sujet de
plus prés, je me propose :
1. D'indiquer quelques-unes. des raisons pour lesquelles il est
criminel de taire des choses de la légitimité desquelles on doute.
2. De montrer l'application de ce principe à plusieurs cas
particuliers.
3. De tirer quelques conclusions et de faire. quelques remarques,
selon que le temps me le permettra.
Je vais donc donner quelques raisons qui démontrent
l'exactitude du principe posé dans notre texte, — à savoir
que si un homme fait une chose de la légitimité de laquelle il doute,
il est condamné.
1. Il est condamné parce que si Dieu éclaire son
esprit de manière à lui faire mettre en doute la légitimité d'un
acte, il est tenu de s'arrêter, d'examiner cette question de
légitimité et de la résoudre à sa complète satisfaction.
Supposez que votre enfant ait envie de faire une chose ou qu'il soit
invité par ses compagnons à aller en quelque lieu,
et qu'il doute de votre consentement, ne penserez-vous pas que son
devoir est de vous consulter avant d'agir ? Si l'un de ses
camarades l'invite à venir chez lui et qu'il doute que cela vous fasse
plaisir et que cependant il y aille, ne sera-ce pas évidemment mal de
sa part
Ou supposez un homme jeté au loin sur une île désolée, chu il ne
rencontre aucun être humain. Cet homme fait sa demeure dans une
caverne solitaire, se considérant comme entièrement seul, privé
d'amis, de tout secours et de toute espérance ; mais chaque matin
il trouve une provision de nourriture saine et fortifiante préparée
pour lui ; déposée à l'entrée de sa caverne et suffisante pour
tous les besoins du jour.
Quel est son devoir ? Direz-vous qu'il ne sait pas s'il y a dans
l'île quelqu'autre être que lui et que par conséquent il n'a
d'obligation envers personne ? La reconnaissance ne
demande-t-elle pas qu'il recherche, qu'il découvre son ami invisible
et qu'il le remercie de sa bonté ? Il ne peut pas dire :
« Je doute qu'il y ait quelqu'autre être que moi ici, je ne veux
par conséquent rien faire d'autre que de manger les provisions qui me
sont allouées, prenant mes aises et ne me mettant en peine de
rien. » Le fait qu'il ne s'occuperait pas de rechercher son
bienfaiteur suffirait à lui seul à le convaincre d'une méchanceté de
coeur aussi grande que celle dont il ferait preuve si, connaissant ce
bienfaiteur, il refusait de lui témoigner de la reconnaissance.
Maintenant, voyez l'athée, il ouvre ses yeux à cette lumière bénie qui
nous vient du ciel et respire cet air qui. envoie la santé et la
vigueur dans nos membres ; il y a là assez d'évidence en faveur
de l'existence de Dieu, pour le pousser à faire des recherches au
sujet de cet Être Suprême qui nous dispense tous ces moyens de vie et
de bonheur. Et s'il ne fait pas de recherches pour acquérir plus de
lumière, s'il ne s'en soucie pas, s'il se tourne au contraire contre
Dieu, il montre qu'il a non seulement l'intelligence mais encore le
coeur d'un athée.
Il a, pour dire le moins, la preuve qu'il peut y avoir un Dieu.
Qu'a-t-il donc à faire ? Il a évidemment à faire des recherches,
honnêtement, avec respect, et d'un coeur semblable à celui du petit
enfant, pour acquérir toute la connaissance que l'on peut avoir de ce
Dieu, et parvenir enfin à lui payer le tribut de sa reconnaissance et
de son adoration. Si, au contraire, quand il a assez de lumière pour
concevoir des doutes au sujet de l'athéisme, il continue à faire comme
s'il n'en avait pas, ne recherchant point la vérité pour lui obéir, il
montre que le mal est dans son coeur, et qu'il ne veut pas entendre
parler de l'existence de Dieu.
Voici maintenant un déiste, et voici un livre qui prétend être une
révélation de Dieu. Beaucoup d'hommes excellents l'ont admis comme
tel. Les preuves à l'appui sont telles que les esprits les plus
pénétrants et les plus droits ont été parfaitement convaincus de la
vérité de ce livre. Ces preuves, soit externes, soit internes, sont
d'un grand poids ; celui qui nierait, l'existence de ces preuves
nous obligerait à douter ou de la rectitude de son esprit ou de son
honnêteté. Pour dire le moins, il y a, en faveur de ce livre, assez
d'évidence pour faire douter de la thèse déiste qui en fait une fable
ou une imposture. En être arrivé à ce doute n'est encore que bien peu
de chose, mais cela nous suffit comme point de départ. À partir de là,
que fera-t-on ? A-t-on le droit de rejeter le livre ?
Aucun déiste n'osera prétendre qu'il est si parfaitement persuadé en
son esprit, qu'aucun doute n'existe pour lui. Tout ce qu'il pourra
faire, sera de soulever des difficultés et des doutes quant à
l'affirmation contraire. Son devoir est donc de s'arrêter et de cesser
toute opposition à la Bible, jusqu'à ce qu'il puisse démontrer d'une
façon absolument concluante qu'elle n'est pas de Dieu.
De même pour l'unitaire. Étant admis, ce qui n'est nullement vrai, que
la divinité de Jésus-Christ ne soit pas proclamée dans la Bible avec
une évidence suffisante pour exclure tout doute, il est cependant
évident que la Bible présente assez de clarté pour faire douter de la
doctrine unitaire qui veut que Jésus-Christ ne soit pas Dieu. Personne
n'a donc le droit de rejeter la divinité de Jésus-Christ ; au
contraire, chacun est tenu de sonder humblement les Écritures jusqu'à
ce qu'il soit convaincu sur ce point.
Aucun homme intelligent et honnête ne peut dire que les Écritures ne
présentent aucune preuve de la divinité de Jésus-Christ. Elles
présentent au contraire des preuves qui ont convaincu et pleinement
satisfait des milliers d'esprits des plus pénétrants, esprits
précédemment opposés à cette doctrine de la divinité du Sauveur.
Personne ne peut rejeter cette doctrine sans avoir de doute, parce
qu'il y a ici de fortes raisons de penser qu'elle peut être vraie. Et
si elle peut être vraie, celui qui la rejette, la rejette à ses
risques et périls.
Voyez enfin l'universaliste. Qui peut dire qu'il croit, sans avoir
aucun doute, qu'il n'y a point d'enfer où les pécheurs vont après la
mort dans les tourments éternels ? Celui qui a quelque doute à ce
sujet est tenu de s'arrêter, de faire des recherches, de sonder les
Écritures. Il ne lui suffit pas de dire qu'il ne croit pas à l'enfer.
Il se peut qu'il y en ait un, et s'il ne veut point l'admettre et
qu'il continue à vivre en ne se souciant pas de connaître la vérité à
cet égard, il se constitue ainsi rebelle envers Dieu. Il n'a pas
la certitude. qu'il n'y ait point d'enfer à éviter et cependant il
agit comme s'il avait cette certitude. Il est condamné. J'ai connu un
médecin qui était universaliste et qui est allé dans l'éternité
éprouver la valeur de ses spéculations. Ce médecin me dit un jour
qu'il avait beaucoup de doutes sur la vérité de l'universalisme et
qu'il avait exprimé ses doutes à un ministre universaliste qui, lui
aussi, lui avait confessé ses doutes sur le même sujet. Ce Ministre ne
pensait pas qu'il y eût un universaliste au monde qui n'eût pas les
mêmes doutes.
2. Si un homme fait une chose en doutant de sa légitimité,
il montre qu'il est égoïste, et qu'il a d'autres objets en vue que
de faire la volonté de Dieu.
Il est évident qu'en faisant cette chose, c'est sa propre satisfaction
qu'il cherche. Il doute que Dieu l'approuve et il la fait quand même.
N'est-ce pas être un rebelle ? Quand il est ainsi dans le doute,
s'il désirait sincèrement servir Dieu, il s'arrêterait, il ferait des
recherches, il examinerait jusqu'à ce qu'il fût pleinement persuadé.
Mais, passer outre tout en étant dans le doute, montre qu'il est
égoïste et méchant, et qu'il a la volonté de faire la chose qu'elle
plaise à Dieu ou qu'elle ne lui plaise pas, qu'elle soit juste ou
qu'elle soit injuste. Il agit donc non parce que la chose est bonne,
mais parce qu'il lui plaît d'agir ainsi.
3. Se conduire de la sorte, c'est accuser la bonté de Dieu.
C'est admettre en effet que Dieu n'a pas manifesté sa volonté assez
clairement pour que chacun puisse connaître son devoir quand il le
veut. C'est dire implicitement que le sentier du devoir a été laissé
dans une telle obscurité que l'on est obligé de marcher à l'aventure.
4. Cela dénote de la paresse et de la stupidité.
Celui qui se conduit ainsi montre qu'il aime mieux agir mal que de
prendre la peine et le soin nécessaires pour apprendre à connaître le
sentier du devoir. Il montre qu'il est ou négligent ou malhonnête dans
ses recherches.
5. Cela montre un esprit insouciant.
C'est la preuve, en effet, d'un manque de conscience ; cela
dénote de l'indifférence pour le droit et la justice ; cela
montre une disposition à mettre de côté l'autorité de Dieu, ne point
faire sa volonté et à ne point se soucier de savoir ce qui lui plaît
et ce qui ne lui plan pas ; c'est la preuve d'une profonde
insouciance et d'un caractère léger. C'est une véritable perversité.
Ce principe qui est si nettement posé dans notre texte et dans son
contexte, ainsi que dans le chapitre des Corinthiens que j'ai lu, ce
principe si clairement exprimé est donc pleinement confirmé par
l'examen. Il établit que quiconque fait une chose tout en doutant de
sa légitimité, pèche, attire sur lui la condamnation. de Dieu, et
doit, ou se repentir ou être condamné.
Je dois maintenant montrer l'application de ce principe à
différents cas particuliers.
Premièrement je mentionnerai quelques cas où un chrétien peut
réellement être dans le doute, la légitimité de l'abstention étant à
ses yeux tout aussi incertaine que celle de l'action.
Prenons le sujet du vin dans la Sainte Cène.
Depuis que les promoteurs de l'oeuvre de la tempérance ont soulevé la
question de l'usage du vin et que l'on a reconnu la difficulté qu'il y
a en ce pays d'avoir des vins autres que des vins très fortement
alcooliques ; la légitimité de l'emploi du vin dans la Sainte
Cène est devenu un sujet de doute et de controverse. Les uns ont douté
sérieusement qu'il fût, bien de prendre pour la cène des vins aussi
alcooliques que les nôtres.
D'autres au contraire estiment que le vin est un élément essentiel
dans l'ordonnance du Seigneur et que nous devons user du meilleur vin
que nous puissions. obtenir, sans nous préoccuper d'autre chose.
D'autres encore disent que nous ne devons pas user du tout de vin
alcoolique ou enivrant, et connue, selon leurs vues, le vin n'est pas
essentiel dans l'ordonnance du Seigneur, ils affirment qu'il est mieux
de se servir d'une autre boisson. Indubitablement, les uns et les
autres sont également consciencieux et désireux de faire de qui est le
plus agréable à Dieu.
Je conçois facilement que des personnes consciencieuses puissent être
très sérieusement dans le doute quant au chemin à prendre ; elles
doutent soit bien d'user de vin alcoolique et elles doutent qu'il soit
bien d'user d'une autre boisson dans le sacrement. C'est le cas prévu
par la règle déjà rappelée du Président Edwards, celui on là
légitimité de l'action et celle de l'abstention sont également
douteuses. Dans ces circonstances chacun doit se décider selon la plus
grande lumière qu'il aura pu acquérir, après l'avoir recherchée
loyalement, dans le simple désir de connaître ce qui est le plus
agréable à Dieu, afin de le faire.
Je n'ai pas l'intention de discuter cette question de l'usage du vin
dans la communion, ce n'est point ici le lieu ; je ne vous l'ai
présentée que comme exemple, mais maintenant qu'elle est devant vous,
je ferai deux ou trois remarques.
1. Je n'ai jamais craint que l'usage du vin ordinaire dans la
communion fît autant de mal que quelques-uns le craignent. Je n'ai
jamais été alarmé à la pensée du danger ou du mal qu'il pourrait y
avoir à prendre quelques gouttes de vin, environ une cuillerée à café,
une fois par mois ou une fois tous les deux ou trois mois. Je ne crois
pas que la maladie de l'intempérance (car l'intempérance, vous le
savez, est en réalité une maladie du corps ) puisse être ni engendrée,
ni perpétuée par une cause aussi insignifiante. Je ne crois pas non
plus qu'il y ait là de quoi porter atteinte à la cause de la
tempérance, autant que quelques-uns l'ont supposé. Je crois par
conséquent que si l'on use ici du vin ainsi que nous avons été
accoutumés à le faire, et que l'on soit pleinement persuadé en son
esprit, l'on ne pèche point.
2. D'un autre côté, je ne pense pas que l'usage du vin soit
essentiel dans l'ordonnance du Seigneur. Sur ce sujet, l'on a dit et
écrit beaucoup de choses, de sorte que le conseil du Seigneur a été
obscurci par des paroles sans connaissance. Il y a des raisons qui
sont pour moi plus fortes que toutes celles que j'ai entendu donner et
qui me. conduisent à croire que le vin ne fait pas nécessairement
partie de l'ordonnance du Seigneur. On a pris beaucoup de peine pour
établir que notre Sauveur s'était servi de vin non fermenté quand il
institua la Sainte Cène, vin qui par conséquent n'aurait pas contenu
d'alcool. Tel a été, en effet, jusqu'à ce jour, le point principal du
débat Mais cela me semble aussi déplacé que si l'on avait discuté la
question de savoir s'il a employé du pain de froment ou du pain
d'avoine, ou si ce pain était levé ou non. Pourquoi n'a-t-on pas
discuté cette dernière question avec véhémence ? parce que tous
la regardaient comme non essentielle.
Pour résoudre cette question du vin, il faudrait se demander quel est
le sens de l'institution de la Sainte Cène ; qu'est-ce que le
Sauveur se proposait de faire ?
Il se proposait de prendre les deux substances qui contribuent le plus
à l'alimentation de l'homme, nourriture et breuvage, et de s'en servir
pour exprimer la vertu aussi bien que la nécessité de l'expiation.
Il est évident que Jésus-Christ avait cette pensée, car elle
correspond à ce qu'il dit : « Ma chair est véritablement une
nourriture, et mon sang est véritablement un breuvage. » De même,
dans le temple, il s'écriait : « Si quelqu'un a soif, qu'il
vienne à moi et qu'il boive. »
Il est appelé le « pain de vie ». Ces images n'ont d'autre
but que celui d'exprimer la valeur des souffrances de Christ. Pourquoi
Christ prend-il ici le pain plutôt que tout autre aliment ? Ceux
qui connaissent l'histoire et les usages du Pays où il vivait
comprendront qu'il choisit l'aliment dont l'usage était le plus
commun. Quand j'étais à Malte, le pain semblait être l'unique
nourriture d'une grande partie du peuple ; les gens se rendaient
en foule au marché, achetaient un morceau de grossier pain et le
mangeaient sur place. Ainsi, Christ choisit pour représenter sa chair,
le plus commun, le plus universel des aliments.
Maintenant pourquoi choisit-il le vin ? Par la même raison. Dans
toutes ces contrées, le vin est la boisson commune du peuple, surtout
aux repas. Il coûte là environ un sou la bouteille ; moins que la
petite bière ne coûte ici. En Sicile, on me dit que le vin coûtait
cinq sous le gallon et je ne sais pas s'il n'était pas aussi bon
marché que l'eau. Et vous observerez que la cène fut prise, la
première fois, à la fin du repas pascal, moment où les Juifs usaient
toujours de vin. La pensée du Seigneur dans l'institution de la Sainte
Cène est donc celle-ci : comme la nourriture et le breuvage sont
essentiels à la vie du corps, de même son corps et son sang, — ou son
expiation. — sont nécessaires à la vie de l'âme. Quant à moi, je suis
pleinement, convaincu que le vin n'est pas essentiel à la communion et
je n'hésiterais pas à me servir d'eau avec quiconque la préférerait
consciencieusement. Qu'un aliment et qu'une boisson soient l'aliment
le plus commun et la boisson la plus commune d'un pays, qu'ils
constituent le fond de l'alimentation des gens de ce pays, et j'estime
que cet aliment et cette boisson, quels qu'ils soient, pris comme
espèces de la Sainte Cène, répondront entièrement à la pensée du
Seigneur. Si j'étais missionnaire parmi les Indiens Esquimaux qui
vivent de viande de phoque séchée et de neige fondue, j'administrerais
la cène avec ces substances-là ; ce qui leur enseignerait qu'ils
ne peuvent pas vivre sans Christ.
J'estime donc que si quelqu'un est « pleinement persuadé en son
esprit, » il ne pèche point en abandonnant l'usage du vin. Qu'une
église agisse avec pleine persuasion et je n'aurai aucun scrupule à
suivre avec elle l'une ou l'autre voie, soit qu'elle veuille
substituer au vin quelque boisson saine et d'un commun usage, soit
qu'elle veuille suivre l'ancienne manière de faire. Mais ne perdez pas
de vue le grand principe que nous examinons. Si un homme doute
sincèrement, qu'il soit légitime de faire une chose et qu'il doute
également qu'il soit légitime de ne point la faire, il doit prier à ce
sujet, sonder les Écritures, s'éclairer de son mieux, et agir ensuite
selon ses lumières. Agissant ainsi, il ne doit ni être jugé, ni être
blâmé par ses frères : « Qui es-tu toi qui juges le
serviteur d'autrui ? » Personne n'est autorisé à faire de sa
propre conscience la règle de la conduite de son voisin.
Un cas semblable est celui où un ministre est dans la nécessité
d'aller prêcher au loin, le dimanche ; comme c'est le cas
lorsqu'il a deux églises. S'il voyage, il peut paraître n'avoir point
égard au jour du repos ; et s'il ne voyage pas, une de ses
églises sera privée de sa prédication. Il peut douter sincèrement de
son devoir. Ce qu'il doit taire, c'est d'en faire un sujet de prières,
de sonder les Écritures, de s'éclairer le mieux possible, examinant la
chose à fond, puis d'agir en conséquence.
Il en est de même pour un directeur d'école du dimanche qui est obligé
de voyager le dimanche pour se rendre à son école, sans quoi les
enfants n'auraient pas d'école. Il peut être sincèrement dans le doute
quant à son devoir : ou rester dans sa propre église le dimanche,
ou faire un voyage de cinq, huit ou dix milles pour aller tenir son
école dans quelque localité dénuée de ressources spirituelles. Que cet
homme s'éclaire de son mieux et juge lui-même du parti qu'il doit
prendre ; et qu'aucun homme ne se lève pour le juger, lui, humble
et consciencieux serviteur de Jésus-Christ !
Vous le voyez, il est bien entendu et il est évident que, dans tous
ces cas, le but est d'honorer Dieu, et que le doute ne porte que sur
la voie à suivre pour l'honorer réellement. Paul dit à ce sujet :
« Celui qui distingue entre les jours agit ainsi pour le
Seigneur ; et celui qui ne distingue pas entre les jours agit
aussi pour le Seigneur. » Le but est de bien faire, le doute ne
peut porter que sur le moyen.
Secondement, je mentionnerai quelques cas où le but est
mauvais, c'est-à-dire où il n'est autre que la satisfaction d'un désir
personnel et où l'on doute s'il est permis ou non de s'accorder cette
satisfaction. Je mentionnerai plusieurs choses sur lesquelles on
diffère d'opinion, et de la légitimité desquelles, pour dire le moins,
on ne peut s'empêcher de douter.
1. Telle est, par exemple, la fabrication ou la vente des
liqueurs.
Après tout ce qui a été dit sur ce sujet et toute la lumière dont il a
été éclairé, y a-t-il un homme, en ce pays, qui puisse dire qu'il n'a
aucune raison de douter de la légitimité de ce genre
d'affaires ? Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'aucun homme
droit ne peut faire autrement que d'en douter ; nous croyons même
qu'il n'y a pas d'honnête homme qui ne reconnaisse que ces affaires-là
sont illégitimes et criminelles. Mais faisons la supposition la plus
charitable que l'on puisse faire à l'égard du distillateur et du
vendeur ; supposons qu'ils ne soient pas entièrement convaincus
du caractère illégitime de leur commerce. Ils doivent au moins douter
qu'il ne soit légitime.
Que doivent-ils faire alors ? doivent-ils fermer les yeux à la
lumière, et continuer leur chemin insouciants de la vérité, aussi
longtemps du moins qu'ils ne sont pas forcés de la regarder en
face ? Non ! Ils peuvent contester et élever autant
d'objections qu'il leur plaira, toujours est-il qu'ils savent qu'ils
ont des doutes au sujet de la légitimité de leurs affaires ; si,
après cela ils les continuent, sans prendre la peine d'examiner
et de voir ce qui est bien, ils peuvent être précisément aussi
certains d'être condamnés que s'ils péchaient avec pleine connaissance
de cause. Vous entendrez cependant ces hommes dire : « Mais
je ne suis pas entièrement convaincu que la Bible défende de fabriquer
ou de vendre des liqueurs alcooliques ! » Bien !
supposons en effet que vous n'en soyez pas pleinement convaincu et que
l'on n'ait pu répondre à toutes vos objections, qu'est-ce à
dire ? Vous savez que vous avez des doutes relativement à la
légitimité de vos affaires et vous les continuez. Ce fait à lui seul
le montre : vous êtes sur le chemin de l'enfer.
2. J'appliquerai la même règle à la violation du jour
du repos.
Comme c'est le cas, par exemple, pour les employés de la poste, pour
ceux des péages, des octrois, des bateaux à vapeur, des chemins de
fer, et pour quiconque est employé le dimanche à toute oeuvre qui
n'est pas absolument nécessaire. Il y aura toujours des oeuvres qui
devront être faites ce jour-là : telles sont les oeuvres de
miséricorde et les oeuvres d'absolue nécessité. Mais lorsqu'il s'agit
d'un travail qui n'a pas ce caractère, le moins qu'on puisse dire au
sujet de ceux qui s'y livrent, c'est qu'à leurs yeux la légitimité de
ce travail du dimanche est douteuse. Or c'est assez pour les
condamner.
3. Je tiens pour blâmables, d'après le même principe, les
loteries, jeux à la bourse, etc. (1)
4. Même objection relativement à l'usage du tabac.
Y a-t-il un homme qui puisse prétendre qu'il n'a aucun doute que son
habitude de fumer ne soit agréable à Dieu ? D'autre part,
personne ne doute qu'il soit parfaitement légitime de ne pas fumer.
Or, le fumeur qui doute de la légitimité de son habitude, et qui la
garde, est condamné.
5. Appliquons ce principe à divers amusements.
(1.) Le théâtre. Il y a beaucoup de gens qui font profession d'être
chrétiens et qui vont au théâtre. Ils prétendent que la Bible ne le
défend nulle part Mais pensez-y, quel chrétien de profession a jamais
été au théâtre sans avoir de doutes au sujet de la légitimité de
son action ? Je n’admets nullement qu'il s'agisse là d'une
action qui ne serait que douteuse ; je crois au contraire que la
question est ici fort claire et qu'il est facile de montrer combien un
tel acte est mauvais. Mais ce que j'ai dit suffit pour ceux d'entre
vous, s'il y en a, qui iraient au théâtre et qui essayeraient de
s'excuser en disant que nulle part la Bible ne le défend expressément.
(2.) Parties de plaisir où l'on mange et boit à l'excès. N'y aucune
raison de douter que ce soit bien là l'usage que Dieu veut qu'on fasse
de son temps et de son argent ? Considérez les pauvres qui
souffrent de la faim et rendez-vous compte de l'effet que produisent
votre gaieté et vos extravagances, puis voyez si vous pourrez jamais
retourner à de tels amusements sans avoir de doutes sur leur
légitimité. Où trouverez-vous un homme ou une femme qui, dans ce cas,
irait jusqu'à dire qu'il n'a aucun doute ? Y a-t-il ici un seul
homme droit qui le pourrait ? Or, si vous avez de tels doutes et
que vous persistiez néanmoins à prendre part à de telles parties de
plaisir, vous êtes condamné.
Vous voyez que ce principe touche à toute une catégorie de questions
controversées ayant trait à des actions que l'on a coutume d'excuser
en disant qu'elles ne sont pas plus. mauvaises que d'autres.
(3.) J'en dirais autant des bals, de la lecture des romans et de
tant d'autres choses où l'on a coutume de perdre son temps. Est-ce de
cette façon-là que Dieu vous appelle à dépenser votre vie ?
Pouvez-vous dire que vous n'avez aucun doute à cet égard ?
(4.) Visites faites le dimanche. On veut faire une visite ce
jour-là et l'on se justifie en disant : « Je ne sais pas si
cela est bien, mais je m'en vais toujours le tenter. » Qu'en
elle-même cette visite soit bonne ou mauvaise, celui qui parle ainsi
est, au fond de son coeur, un violateur du dimanche, car il agit
malgré ses doutes.
(5.) Se conformer aux coutumes mondaines du jour de l'an (2).
Ce jour-là les dames restent à la maison et les
messieurs courent toute la ville pour leur rendre visite. Les dames
font leurs grands préparatifs ; elles reçoivent leurs visiteurs
avec gâteaux, vins, punch, etc., assez pour les empoisonner presque
complètement ; et tous ensemble s’inclinent jusqu'en terre devant
la déesse de la fashion. Y a-t-il ici une dame qui ne concevrait aucun
doute sur la légitimité de tout ceci ? On peut démontrer que
c'est mauvais, mais je me borne à poser cette question aux dames de
cette ville : n'est-il pas DOUTEUX que cela soit bien ? L'on
pourrait avoir des craintes au sujet de l'état mental de tout homme ou
de toute femme qui ne concevrait aucun doute sur la légitimité d'une
telle coutume, au milieu d'une intempérance pareille à celle qui règne
en cette ville. Qui parmi. vous. pratiquera encore de telles
choses ? - Pratiquez-les, si vous l'osez, — au péril de votre
âme ! Si vous faites ce qui est simplement douteux, Dieu réprouve
et condamne ; et SA voix doit être respectée.
Je sais que l'on cherche à excuser la coutume dont je viens de parler
en disant qu'il est bon d'avoir un jour exprès pour de telles visites,
un jour où les dames sont à la maison et où les messieurs sont libres
de toute affaire ; et que tout cela est très bien. Mais quand on
voit tous les abus et tout le mal dont ces visites sont l'occasion, je
le demande à chacun ici, un chrétien peut-il se défendre
d'avoir quelque doute sur la légitimité d'une pareille
coutume ? Et si cette coutume est d'une légitimité douteuse, elle
tombe sous la règle : « Il est bien de ne pas manger de
viande, de ne pas boire de vin, et de s'abstenir de ce qui peut être
pour ton frère Une occasion de chute, de scandale ou de
faiblesse. »
(6.) Suivre toujours la dernière mode, la mode du jour, la
fashion extravagante. Dames chrétiennes, n'avez-vous jamais douté, ne
doutez-vous point maintenant qu'il soit bien de copier ces modes
venues de lieux que l'on n'oserait pas seulement nommer dans une
assemblée comme celle-ci ? N'avez-vous vraiment aucun doute à cet
égard ? Si vous en avez et que vous persistiez dans votre manière
de vous vêtir, vous péchez ; vous devez vous repentir de votre
péché ou subir la condamnation.
(7.) Mariages entre chrétiens et pécheurs inconvertis.
Voici la réponse qu'on nous fait toujours : « Après tout,
vous savez, il n'est pas certain que ces mariages ne soient pas
permis. » Supposons qu'il en soit ainsi, la Bible et la nature du
cas ne nous feront-elles pas au moins douter que ces mariages ne
soient selon la volonté du Seigneur ? L'on peut parfaitement
démontrer qu'ils sont contraires à la loi de Dieu ; mais
supposons que l'on ne puisse pas le faire, je demande alors si jamais
un chrétien a pu se marier avec une personne inconvertie sans avoir de
doutes sur la légitimité d'un tel mariage. Or, « celui qui doute
est condamné. »
Voyez ce chrétien, homme ou femme, qui est sur le point de s'unir avec
un inconverti ; il doute continuellement que ce soit là le chemin
que Dieu l'appelle à suivre ; il essaie de prier contre sa
conscience sous prétexte de prier pour être éclairé ; il prie
tournant tout autour de son devoir ; et cependant il continue à
marcher dans la voie a prise. PRENEZ GARDE ! Vous savez que vous
avez des doutes au sujet de la légitimité de la voie que vous
suivez ; souvenez-vous « que celui qui doute est
condamné. »
Vous voyez, mes chers auditeurs, qu'il y a ici un principe qui viendra
à votre aide quand vous reprendrez le péché, et que l'on essayera de
vous réduire au silence ou de vous embarrasser en vous demandant des
preuves absolument probantes de l'iniquité de certaines pratiques
auxquelles l'on ne veut point renoncer. Rappelez-vous alors que vous
n'êtes point tenus de prouver jusqu'à évidence entière l'illégitimité
de ces pratiques. Si vous pouvez indiquer des raisons suffisantes pour
douter de leur légitimité, si vous pouvez ainsi faire naître des
doutes sérieux sur leur accord avec la volonté de Dieu, vous rejetez
sur la partie adverse cette obligation de donner des preuves dont on
voulait vous charger. Et, à moins que l'on ne puisse dissiper ces
doutes et établir avec certitude la légitimité de la pratique
contestée, l'on n'a aucun droit d'y persister ; si on le fait, on
pèche contre Dieu.
1. La connaissance du devoir n'est pas indispensable.
pour que nous soyons responsables, il suffit que les moyens d'arriver
à cette connaissance soient à notre disposition.
Si quelqu'un a les moyens de connaître si ce qu'il veut faire est bien
ou mal, il est tenu d'user de ces moyens ; il est tenu de faire
des recherches à ses risques et périls et d'arriver à la certitude
quant à la conduite qu'il doit tenir.
2. Si ceux-là sont condamnés qui font des choses de la
légitimité desquelles ils doutent, que dire de la multitude de ceux
qui font continuellement ce qu'ils savent et confessent être
mal ?
Malheur à celui qui pratique ce qu'il condamne. « Heureux celui
qui ne se condamne pas lui-même dans le parti qu'il
adopte ! »
3. Les hypocrites essaient souvent de se retrancher derrière
leurs doutes pour se soustraire à leur devoir.
L'hypocrite ne tient pas à s'éclairer, il ne désire pas connaître la
vérité, parce qu'il ne désire pas obéir au Seigneur ; c'est pour
cela qu'il se retranche derrière ses doutes, détourne ses yeux de la
lumière et ne veut point examiner ni faire des recherches pour voir
quel est son devoir ; c'est ainsi qu'il cherche à se débarrasser
de toute responsabilité ; mais Dieu l'arrache de ses cachettes de
mensonge par le principe qu'expose notre texte : il doute, ses
doutes le condamnent
L'on ne veut point être éclairé au sujet de la tempérance et l'on
persiste à boire ou à vendre de l'absinthe, sous prétexte que l'on
n'est pas pleinement convaincu que cela soit mal. On ne veut lire ni
traité, ni journaux combattant ces pratiques, on ne veut assister à
aucune réunion de tempérance, de peur d'être convaincu.
Cela montre que l'on est décidé à excuser le péché et que l'on
espère pouvoir cacher sa perversité derrière son doute. Quelle
démonstration plus complète pourrait-on donner de son
hypocrisie ?
Quel est l'homme, dans tous les États-Unis, qui pourrait dire qu'il
n'a aucun doute sur la légitimité de l'esclavage ? (3)
Cependant la grande majorité de la nation ne veut rien entendre sur ce
sujet ; il suffit de le nommer pour que l'on s'emporte
aussitôt ; et l'on a même proposé sérieusement, dans le nord et
dans le sud, d'édicter des lois défendant de l'examiner et de le
discuter. Supposons maintenant qu'elles passent, ces lois qui ont pour
but de permettre à la nation de se retrancher derrière ses doutes.
Qu'y gagnera-t-on ?
Si nos compatriotes continuent à faire de leur prochain leur
propriété, le tenant dans l'esclavage, tout en doutant que
cela soit juste, ils sont condamnés devant Dieu ; et nous.
pouvons être sûrs que leur péché les trouvera et que Dieu leur
montrera de quel oeil il regarde leur conduite. Il est étonnant de
voir la folie des gens à cet égard ; ils pensent donc qu'en
refusant de se débarrasser de leurs doutes, ils se débarrassent de
leur péché ! Pensez un peu : dans le sud, des chrétiens et
même des ministres refusant de lire un écrit concernant la question de
l'esclavage et le renvoyant avec insultes et menaces ! — Des
menaces ! et pourquoi ? Parce qu'on a osé les entretenir de
leur devoir.
On peut démontrer absolument que l'esclavage est inique, qu'il faut
s'en repentir, et l'abandonner comme tout autre péché ; mais
supposons que tout ce qu'on puisse dire de ceux qui le soutiennent,
c'est qu'ils doutent de sa légitimité et qu'ils n'entendent point être
éclairés ; cela suffit ; ils sont condamnés devant Dieu. Il
ne pourront jamais sortir de là. Aussi longtemps qu'ils douteront s'il
est juste ou non de tenir son prochain dans l'esclavage, ils ne
pourront avoir des esclaves sans pécher ; et qu'ils aient des
doutes sur la légitimité de l'esclavage, c'est ce que démontre leur
refus d'examiner la question.
Nous pouvons supposer ce cas-ci, — et peut-être qu'il
se rencontre dans le sud ; — un homme doute de la légitimité
de l'esclavage et doute également de la légitimité de
l'émancipation des esclaves en leur présent état d'ignorance et de
dépendance. C'est le cas prévu par la règle d'Edwards. Le devoir sera,
pour un tel homme, non pas de se mettre en colère contre ceux qui
attireront son attention sur ce sujet, ni de renvoyer, sans les lire,
les écrits qu'on pourra lui faire. parvenir ; mais au contraire
de chercher à s'éclairer, examinant la question loyalement à la
lumière de la Parole de. Dieu, jusqu'à ce que tout doute ait disparu.
Le moins qu'il pourra faire pendant ce temps, ce sera de s'appliquer
de tout son pouvoir à faire l'éducation de ses esclaves, en sorte
qu'ils soient le plus tôt possible en état de se suffire à eux-mêmes
et de recevoir la liberté.
4. Il est manifeste qu'il n'y a que très peu de conscience,
dans l'église.
Qu'ils sont nombreux en effet ceux qui persistent à faire une chose
sans cependant être certains qu'elle soit bonne !
5. Il y a encore moins d'amour pour Dieu que de conscience.
Vous ne pouvez pas prétendre que l'amour pour Dieu soit le mobile qui
vous pousse à suivre les modes du jour, à vous livrer à des plaisirs,
à des amusements et à tant d'autres choses de la légitimité desquelles
vous doutez. Vous ne persistez pas dans toutes ces choses parce que
vous aimez Dieu. Non, non, vous y persistez parce que vous y trouvez.
votre agrément, votre convenance ; et vous préférez courir le
risque de faire mal plutôt que de voir vos doutes dissipés : tout
cela vient de ce que vous avez si peu d'amour pour Dieu, et de ce que
vous prenez si peu de souci de sa gloire.
6. Ne dites pas dans vos prières : « O Seigneur, si
j'ai péché en cette chose, pardonne-moi. »
Si vous avez fait la chose en doutant qu'elle fût bien, vous avez
péché ; que la chose en elle-même soit bonne ou qu'elle soit
mauvaise. Dans un cas comme dans l'autre, vous devez vous repentir et
demander pardon.
Et maintenant, laissez-moi vous le demander, à vous tous qui êtes ici
présents : êtes-vous convaincus que faire une chose dont la
légitimité vous parait douteuse, soit un péché ? Si vous l'êtes,
je n'ai plus qu'une question à vous faire. Êtes-vous décidés à
abandonner dès ce moment-ci toute chose dont la légitimité ne vous
paraît pas certaine, tout amusement, toute complaisance pour
vous-même, toute pratique, toute occupation, qui seraient dans ce
cas ? Voulez-vous le faire ? ou préférez-vous être condamné
au dernier jour devant le tribunal de Christ, on nous devons tous
comparaître ? — Si vous ne voulez pas délaisser ces choses
douteuses, vous montrez que vous êtes un pécheur impénitent qui n'a
point l'intention d'obéir à Dieu ; et si vous ne vous repentez
pas, vous attirez sur votre tête la condamnation et la colère de Dieu
pour l'éternité.
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |