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La Parole de Dieu et notre présent

 

«Me voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu'un entend ma voix et m'ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi. » Apoc. 3. 21

« Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs. » Héb. 3. 7

 

Nous ne reviendrons pas sur la définition de la Parole de Dieu. Nous considérons comme acquis le fait qu'elle retentit pour nous exclusivement à travers l'Ecriture, c'est-à-dire à travers le témoignage que les hommes de la Bible rendent à Jésus-Christ; et qu'il n'y aura jamais, dans le présent ni dans l'avenir, d'autre Parole de Dieu pour nous que Jésus-Christ.

Quand nous prononçons ces deux expressions Parole de Dieu et notre présent, nous pensons aussitôt à deux réalités entre lesquelles il s'agira d'établir de bons rapports, deux réalités indépendantes et qui, chacune, subsistent par elles-mêmes: si même nous en sommes là, si même la Parole dont il est question est vraiment pour nous une réalité. Mais la plupart d'entre nous n'accordent pas une même valeur à ces deux expressions : Notre présent, c'est la grande réalité, c'est tout ce dont nous sommes sûrs, c'est notre certitude première. Nous sommes moins certains de la Parole de Dieu. Elle est une possibilité, elle est un problème, un idéal, un rêve. Elle est à tout le moins discutable. Mais notre présent à nous, il est bien là, indiscutablement. Tu es présent, ô lecteur! devant la Bible. Tu es quelqu'un, c'est sûr. Quant à cette Parole, est-elle présente, c'est possible. Vas-tu en tirer quelque chose, c'est possible. Tu as ouvert, dans ton présent, ces pages avec l'idée de recevoir quelque chose de cette Parole, soit que tu cherches curieusement à la connaître, soit que tu aies vraiment besoin de son secours et soif de sa présence. Mais, n'est-ce pas, tu es là d'abord, et la Parole de Dieu est là ensuite. Tu penses être présent avant qu'Elle soit présente.

Or c'est là déjà une position fausse et une inconsciente outrecuidance dont nous avons tous à être guéris.

C'est un renversement de la situation réelle. C'est la grande illusion païenne dont nous avons tant de peine à nous défaire. Il n'est pas vrai que nous soyons présents, il n'est pas vrai que nous ayons un présent sans que la Parole de Dieu nous soit présente, sans que nous recevions d'elle notre présence. C'est elle qui est là d'abord, c'est elle qui existe d'abord, et nous ne sommes là qu'ensuite, nous n'existons que parce qu'elle existe, et non l'inverse. Nous ne sommes présents que si elle est présente. Tout commence par elle et non point par nous, et notre présent n'est pas autre chose que la présence pour nous de cette Parole. Ce n'est pas elle qui est problématique, c'est nous. Ce n'est pas elle qui est en question, c'est nous. Notre titre ne signifie point deux réalités qu'il faille joindre et combiner, comme on examine par exemple les rapports de l'économie et de la politique, de la religion et de la science, de l'hygiène et de la moralité, etc. Non, car il s'agit tout d'abord de recevoir de la Parole notre présent, une vie que présentement nous n'avons pas sans elle. Et ensuite nous pourrons chercher quel est ce présent que la Parole nous donne, autrement dit, la vie que Jésus vit pour nous aujourd'hui sur la terre.

«Me voici! Je me tiens à la porte et je frappe - dit Jésus - si quelqu'un entend ma voix et m'ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je souperai avec lui et lui avec moi.» Ainsi, la Parole de Dieu, qui s'est incarnée et qui a pris le nom de Jésus-Christ, est à la porte de notre monde, à la porte de chacune de nos vies. Elle y est parce que nous l'avons mise à la porte, mais, à l'origine, elle était dans notre vie, elle était notre vie et notre lumière et notre joie de tous les instants. Elle était au milieu de tout et la source de tout, mais depuis que nous l'avons chassée, depuis que nous lui avons fermé la porte, depuis que nous l'avons mise dehors avec les clous de nos mauvaises pensées et de notre hypocrisie, depuis le commencement du monde qu'elle est pendue au bois, la Parole de notre Dieu, nous avons perdu notre vie, nous avons perdu notre présence en perdant sa présence. Nous sommes derrière cette porte fermée, nous sommes dans le monde à la porte duquel se tient Jésus-Christ, et aussi longtemps que la porte n'est pas ouverte, ce que nous appelons notre présent n'est qu'un épouvantable vide, une immense absence, car l'absence de la Parole de Dieu entraîne aussitôt notre absence. Toute l'horreur du champ de bataille et l'horreur, pire encore, de la propagande qui nous enveloppe, du mensonge et de l'injustice, c'est l'horreur d'un monde à la porte duquel nous avons mis la Parole de Dieu. Toute la tristesse, tout le désespoir de notre vie, l'ennui qui couve sous le plaisir comme sous le travail, c'est le désespoir d'une vie à la porte de laquelle nous avons mis la Parole de Dieu. A vrai dire, aussi longtemps que cette porte est fermée, nous sommes absents, absents de notre vraie vie, absents du monde, absents de Dieu et de notre prochain, en un mot, absents de notre vocation. Un présent qui serait autre chose que notre réponse à l'appel du Christ, autre chose que l'ouverture de cette porte derrière laquelle il frappe, un tel présent n'est pas un présent, c'est une absence. Malgré toutes les apparences, nous ne sommes pas là quand la porte est fermée, quand la Parole n'est pas entrée. Nous sommes absents comme le lévite et comme le prêtre dans la Parabole du Bon Samaritain, absents comme les vierges folles quand l'Epoux s'approche. Notre présent n'est qu'une suite d'absences, de rendez-vous manqués, d'occasions perdues.

Pourtant retentit l'étonnante nouvelle. Avant que nous disions Me voici, Jésus déclare: « Me voici, je me tiens à la porte et je frappe ». Celui que nous avons mis à la porte, au lieu de nous tourner le dos, demande à entrer. Et avec lui c'est notre présent, oui, notre vraie vie présente qui frappe à notre porte. Avec lui c'est tout ce que nous avons à être dans le monde présent qui veut entrer.

 

Mais, entre lui et nous, il y a cette porte dont la Bible parle fréquemment et diversement. Il faut en dire quelques mots. Elle désigne toujours ce qui nous sépare de l'éternité, cette infranchissable frontière entre le Royaume de Dieu et nous, cette différence entre notre vie sans Dieu et notre vie avec Dieu. Elle désigne donc cette décision à prendre, cet acte de foi qu'il faut faire par lequel nous devenons présents à la Parole. Il y a une porte, cela signifie qu'il y a un seuil à franchir, un pas à faire à un moment donné, à ce moment qui nous est aujourd'hui donné. Il y a une possibilité d'entrer qui peut tout d'un coup se changer en impossibilité. Une porte qui jamais ne se fermerait ne serait pas une porte; ce ne serait pas la peine d'en parler. Or nous voyous paraître cette porte dans l'Ecriture à deux reprises qui sont la clef de notre présent et de notre avenir. Car c'est à la fois notre présent et notre avenir qui se jouent devant elle.

C'est en effet pour désigner le jugement dernier que l'image de la porte est le plus fréquemment employée. Et l'on sait combien de paraboles se terminent par l'appel désespéré des hommes: Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! mais la porte est à jamais fermée. Et tous ceux qui ne l'ont pas franchie auparavant demeurent dans les ténèbres du dehors. Ainsi donc: Notre bonheur ou notre malheur éternels, notre présence ou notre absence dans le Royaume de Dieu, dépendent de cette porte qui sera ouverte ou fermée. Et vraiment, il n'est pas de question plus grave pour chacun de nous que de savoir si, au dernier jour, nous n'aurons pas accès, ou si nous entrerons dans la joie de notre Maître. Mais voyons bien comment notre avenir et notre présent se réunissent ici même devant cette porte, dont la Bible parle aussi d'une tout autre manière, pour dire non qu'elle sera fermée plus tard, mais qu'elle l'est aujourd'hui, et c'est cette porte justement dont il est question dans notre texte, à laquelle Jésus-Christ frappe. Un jour donc nous frapperons à une porte fermée qui ne s'ouvrira plus, cependant qu'aujourd'hui Jésus frappe à une porte fermée et qui ne s'ouvre pas. Le grand secret de la foi chrétienne est peut-être de comprendre tout simplement que ces deux portes n'en font qu'une, que cette porte, de notre avenir, c'est celle de notre présent, que cette porte où nous frapperons plus tard en vain, c'est celle où frappe aujourd'hui notre Seigneur en vain. Il n'y a pas deux portes différentes, celle de notre présent et celle de notre avenir, il n'y en a qu'une seule et il est à jamais impossible que notre présent n'engage pas notre avenir, et que notre avenir n'engage pas notre présent. Cette porte qui sera éternellement fermée, c'est celle-là même qu'aujourd'hui nous refusons d'ouvrir à la Parole de Dieu. Inversement, la porte qu'aujourd'hui nous ouvrons à Jésus-Christ, c'est celle qu'il nous ouvre à jamais dans l'éternité, c'est celle qui nous sera ouverte au jour du jugement.

Tous ceux qui entreront, c'est ceux-là chez lesquels la Parole de Dieu est entrée maintenant. Il n'y a qu'un moyen pour trouver plus tard la porte ouverte, c'est de l'ouvrir à celui qui frappe aujourd'hui. Et tous ceux qui supplieront : « Seigneur! ouvre-nous ! » tous ceux qui frapperont désespérément, on leur dira: «Mais vous avez vous-même fermé cette porte. Vous l'avez vous-même tenue fermée durant quarante ans, vous m'avez laissé à la porte quand je vous suppliais d'ouvrir votre coeur ! Comment puis-je faire entrer dans ma maison ceux qui n'ont pas voulu que j'entre dans leur maison ? Je ne puis pas ouvrir la porte que vous ne m'avez pas ouverte. C'était pour vous que je frappais. C'était pour que vous puissiez entrer chez moi que je voulais entrer chez vous. C'était pour vous donner un avenir éternel dans mon Royaume de gloire que je voulais vous donner un présent par ma présence sur la terre. C'était pour vous avoir pour toujours à ma table que je venais m'asseoir à votre table. »

 

Ainsi: la Parole de Dieu ne sera jamais notre avenir si elle n'est pas aujourd'hui notre présent. Nous n'avons rien à espérer, rien à attendre de Jésus-Christ, pour plus tard, si maintenant nous endurcissons notre coeur à sa voix. La porte derrière laquelle nous le laissons, c'est la porte derrière laquelle il nous laissera pour l'éternité. Voilà l'urgence, voilà la nécessité présente de la Parole de Dieu. Maintenant, ou jamais. C'est maintenant qu'il faut entendre sa voix et ouvrir, ou jamais. C'est maintenant qu'il faut croire et obéir, ou jamais. Car la porte qui aujourd'hui s'ouvre à la Parole de Dieu sera toujours ouverte. Et celle qui se ferme à la Parole de Dieu sera toujours fermée. L'éternité est pour aujourd'hui. L'éternité est présente. L'éternité frappe à la porte, elle est la voix que nous entendons, la voix qui appelle les morts. C'est la Parole qui demeure éternellement. C'est elle qui veut devenir notre présent, nous donner un présent qui demeure éternellement, nous donner une attitude, nous donner un visage, nous donner une liberté et un amour qui demeurent éternellement, et sur quoi le mal ni la mort, ni aucun des vainqueurs de ce monde, ni aucune puissance de mensonge n'ait la moindre prise. Il faut seulement que la porte s'ouvre, que nos oreilles s'ouvrent et qu'il entre aujourd'hui, notre Roi éternel, autrement, d'où nous viendra l'attitude juste et cette présence au monde perdu, et cette assurance au milieu de l'abîme et cet honneur au milieu de la honte ? jamais rien ne pourra commencer sans qu'il entre. C'est pourquoi il n'y a rien à attendre, vraiment rien à faire que de lui ouvrir la porte. Comment voulez-vous améliorer notre présent, puisque le drame est que nous n'avons pas de présent et que ces lamentables troupeaux d'hommes qui sont la proie des idoles et des mauvais bergers, ce sont des hommes absents, des hommes loin de leur vocation et de leur vie réelle, des êtres sans présence parce que la Parole n'est pas entrée dans leur vie.

«Me voici, je me tiens à la porte et je frappe.» Ne peut-on le faire attendre cinq minutes, juste le temps de mettre un peu d'ordre dans la chambre. Qu'il nous laisse encore un petit moment ! Est-ce que cela presse tellement qu'il entre ? On pourrait bien le recevoir demain. - Sérieusement, pensons-nous que ces minutes nous les passerons à mettre en ordre la maison et le pays ? Et croyons-nous que demain nous entendrons mieux ces coups que la Parole frappe à notre coeur, et que nous ouvrirons mieux la porte ? C'est le démon qui réclame ces délais et qui nous fait croire qu'il sera plus facile de croire dans quelque temps et de recevoir la Parole après-demain. C'est le démon qui subtilise notre présent, qui nous empêche d'être présents à l'appel de celui qui frappe. Et ces cinq minutes qu'il nous fait gagner sur la Parole de Dieu, cette vie qu'il s'efforce de prolonger sans elle, sous les meilleurs prétextes, ce ne sera jamais que le moyen de mieux fermer la porte et d'être toujours plus absent.

Chaque minute que nous gagnons sur la Parole est une minute perdue, une heure qui ne mène à rien. Ce temps qui passe sans que nous ouvrions, ce temps de notre absence à l'appel de Dieu, voilà le temps perdu, le présent perdu, déjà dissous dans le passé et la mort. Il faut bien se dire cela très pratiquement : la vie que je vis ce soir sans que la Parole soit entrée dans ma vie, c'est une vie perdue, c'est l'éternité de cette journée perdue. «Lui qui est si bon - disons-nous - il attendra bien encore un peu. » Mais pourquoi, voudrions-nous plus tard d'une bonté dont nous ne voulons pas aujourd'hui? Nous nous trompons affreusement sur la bonté de Dieu. Sa bonté consiste justement, à frapper et à nous donner ainsi maintenant la possibilité d'ouvrir, mais nous, nous estimons qu'au contraire sa bonté doit être de ne pas entrer tout de suite et de nous laisser respirer encore un moment sans lui! Ce que nous appelons le bon Dieu, c'est précisément le Dieu auquel il n'y a pas besoin d'ouvrir la porte, le Dieu dont on peut faire éternellement l'économie, un Dieu qui n'est jamais présent; un Dieu dont la bonté ne nous est pas réellement nécessaire, un Dieu dont la bonté n'est qu'une excuse à nous passer de sa bonté. Nous avons beau nous rassurer avec la bonté de Dieu, si nous n'ouvrons pas la porte, nous ne voulons pas de cette bonté, et nous n'en voudrons jamais. Jamais nous ne ferons ce que la Parole ne nous fait pas faire aujourd'hui, quand elle nous appelle. Il faut à tout prix que nous cessions d'être absents et de nous enfuir dans l'avenir ou le passé. Il faut que la Parole entendue, il faut que ces coups frappés à la porte nous fixent à notre présent. «Voici maintenant le temps favorable. Voici maintenant le jour du salut » (2 Cor. 6. 2).

 

On peut lire dans le journal de Dostoïevski une nouvelle qui s'intitule «Bobok». L'auteur se promène dans un cimetière où les morts jouissent durant trois semaines d'une certaine conscience, d'une sorte de vie immobile, avant de s'éteindre tout à fait. Donc un dernier délai, un délai de trois semaines accordé à ceux qui sont morts, trois semaines encore durant lesquelles Jésus-Christ frappe à leur porte. Que vont-ils en faire ? Ouvrir enfin. Accueillir la Parole, se repentir, invoquer le Seigneur, lui rendre gloire. Ne plus le faire attendre, mais vivre en sa présence dans la foi, l'espérance et l'amour, ces dernières journées? Hélas! Dostoïevski les entend parler de tombe à tombe. Il y a un employé de bureau, une jeune femme, un vieux général, un ouvrier, et que sais-je encore. Ces gens savent qu'ils sont morts et qu'on ne peut plus rien leur faire, qu'ils n'ont plus rien à craindre des gendarmes ni de l'opinion publique, qu'ils sont définitivement abrités par leur cercueil et peuvent, en conséquence,' dire et penser tout ce qu'ils veulent. Alors c'est un beau déchaînement! Tout ce que le coeur humain peut receler de plus mesquin, de plus immonde, de plus lâche, s'étale dans ces conversations de cercueil à cercueil. Le délai qui leur est accordé une dernière fois pour qu'ils ouvrent la porte à leur Seigneur, ils en profitent pour la mieux fermer et se vautrer comme jamais dans leur ordure, leur avarice, leurs calomnies, leur vanité. De ce dernier délai, de cette dernière possibilité de présence à la Parole de Dieu, ils ont déjà fait l'enfer, ils en ont fait leur définitive absence.

N'est-ce pas la vérité ? Oui, c'est la vérité. L'homme est ainsi et sera toujours ainsi. «Que celui qui est injuste, soit encore injuste», dit l'Apocalypse (22, 2), et que celui qui est juste pratique encore la justice. Il n'est aucune, à jamais aucune, bifurcation sur la route où nous nous engageons aujourd'hui en ouvrant nos oreilles à la Parole de Dieu ou en la laissant à la porte. Si nos coeurs maintenant ne s'ouvrent pas à la Parole qui justifie et purifie, nous ne pouvons que devenir de plus en plus nous-mêmes, de plus en plus fermés, et utiliser tous les délais qui nous seront accordés pour nous perdre et nous absenter toujours davantage jusqu'au jour où celui qui est derrière la porte se lassera d'attendre et cessera d'appeler, et où le silence de la mort s'installera tout autour de nous.

Mais voici qu'aujourd'hui nous avons entendu sa voix et ouvert la porte, ou pour mieux dire: voici qu'il s'est fait entendre et qu'il s'est fait ouvrir par la puissance de son Esprit. Il est entré, le Roi des rois, notre Seigneur, le témoin fidèle et véritable, et il s'est assis à notre table. Il est devenu notre présent. Il est devenu notre vie. Il partage notre repas, il partage notre indigence, notre repos et notre lutte, notre compagnie et notre solitude. Et lorsqu'il est là, à côté de nous, nous comprenons que notre présent c'est ce que Jésus-Christ est venu partager avec nous, vivre avec nous. Et nous ne sommes que ce qu'il est avec nous. Nous n'avons que ce qu'il partage avec nous. Car la Parole a été faite chair et elle a habité parmi nous. A cette heure où nous avons tant de justes raisons de nous plaindre, ne faudrait-il pas essayer d'y prendre garde un peu plus ? N'est-ce pas le moment ou jamais de bien savoir qu'une abondance qu'il ne partage pas n'est qu'une indigence, une victoire qu'il n'a pas remportée avec nous n'est qu'une défaite éternelle, une joie dont il n'est pas la cause première et dernière n'est que le masque du désespoir. C'est cela, d'une façon très concrète, entendre sa voix et lui ouvrir, c'est ne plus posséder que ce qu'il peut posséder avec nous, et ne faire que ce qu'il peut faire avec nous. Mieux vaut toute la peine que nous avons à vivre aujourd'hui et le deuil dans lequel nous sommes, s'il est avec nous dans cette peine et dans ce deuil; mieux vaut l'indigence de notre table, s'il est assis à notre table, mieux vaut la défaite, s'il nous accompagne dans la défaite, mieux vaut la famine, s'il a faim avec nous. C'est une chose bien élémentaire, mais que nous oublions chaque jour: qu'en dernier ressort, il n'y a que sa présence qui compte et que toute la souffrance du monde est moins à craindre qu'un mensonge, et que toute la paix du monde ne vaut pas une injustice. Nous disons: «oui, bien sûr! » et nous avons pourtant la plus grande peine à le réaliser, parce que nous avons une peur effrayante de souffrir. Il semble que toute la pensée de notre génération soit dominée par cette peur, et que précisément tout son malheur vienne de là, que sa défection vienne de là. Il s'agit ici de n'accuser que soi-même, car nous avons tous, durant les années d'avant-guerre et depuis, été dominés par cette peur, y compris les chrétiens, comme si la Parole de Dieu et la souffrance s'excluaient, comme si Jésus-Christ allait nous tourner le dos quand nous commencerions à souffrir, comme si sa présence devait nous épargner la souffrance. Pour être juste, il faut noter quand même une exception. Il y a eu quelques jours durant lesquels il semble que le peuple de France ait eu sa peur de souffrir dominée par une autre crainte, la nécessaire crainte de perdre son âme et de renoncer à jamais à la volonté de Dieu; pendant quelques jours du début de la guerre, il semble que la crainte du parjure l'ait emporté sur la crainte de la souffrance. Ces quelques jours sont peut-être parmi les plus grands de l'histoire de France. Car peut-être jamais un peuple n'a-t-il eu aussi peu le désir de faire la guerre, et pourtant mieux senti qu'il était impossible de ne pas la faire, autrement dit senti qu'il y avait quelque chose de plus que la vie, il ne savait pas quoi, mais nous savons ce que c'était: la présence de Jésus-Christ, la souveraineté réelle bien que non reconnue du Ressuscité. Si misérables et si pécheurs que nous fussions, il s'était assis à notre table et nous étions pris dans la souveraineté de ce maître inconnu. Il y a, comme cela, chez certains peuples, tout à coup, d'incompréhensibles accès d'obéissance... Mais ce fut de courte durée. Et bien vite la peur de souffrir a repris le dessus et nous savons la suite de l'histoire...

 

Et maintenant, dans la situation où nous sommes, au milieu de cette nécessité que chacun sent de reconstruire le pays de fond en comble, une question prime absolument toutes les autres : La peur de souffrir dominera-t-elle la crainte de déplaire à Dieu, ou bien la présence nécessaire à notre table du Roi de justice, du témoin fidèle et véritable, dominera-t-elle toute autre considération ?

 

J'insiste sur ce point parce qu'il est le centre de cette présence de Jésus-Christ, le centre du présent que nous avons en Christ. C'est le présent d'un homme qui finit sur une croix, c'est la Parole que le monde rejette. C'est un présent de souffrance et de lutte. Comment pouvons-nous avoir le crucifié auprès de nous, si la paix constitue le but suprême de notre vie et si la souffrance nous fait peur plus que tout au monde ? Il ne s'agit pas de la rechercher tant soit peu, mais de savoir que Jésus nous garde de tout mal, mais non de toute souffrance, et qu'il faut seulement le suivre quoi qu'il en coûte, pour être avec lui, qui s'est rendu obéissant jusqu'à la mort de la croix., Aucune douleur ne nous séparera de lui, mais la moindre pensée d'orgueil, la plus petite trace de mensonge et d'avarice l'a déjà mis à la porte. Si donc on peut appeler courage l'état d'un homme dont la peur de souffrir est surmontée, le courage est aujourd'hui le don de la présence du Christ et le miracle de la Parole de Dieu au milieu de notre temps, le courage qui ne nous rend pas insensibles, au contraire, mais qui fait simplement que dans les moindres détails comme dans les plus grandes décisions de notre vie, nous savons que mieux vaut tout souffrir que d'être séparés de Jésus-Christ. Nous sommes peut-être parfaitement lâches de nature, mais ce courage est le don de la présence de Jésus à notre table, ce courage est le caractère propre de notre présent sous la Parole de Dieu. Le courage de ne fléchir sous aucune pression des circonstances, de n'être entamé par aucune victoire de ce monde, le courage de demeurer fidèle inébranlablement à ce que l'on a reconnu conforme à sa volonté. Voit-on le sel que cela peut être dans un pays, au milieu d'hommes qui prennent le vent, qu'un peu de courage ? C'est ce sel que nous sommes, que nous ne pouvons pas ne pas être si la Parole de Dieu est notre vie. C'est ce courage que nous ne pouvons pas ne pas avoir quand nous sommes dans la communion des souffrances du Seigneur.

Ce n'est pas un courage résigné ou dont on puisse se prévaloir, ce n'est pas de l'héroïsme. C'est seulement que Jésus-Christ est là, qu'il nous charge de sa croix et que nous ne pouvons lui échapper. Notre présent n'est que le courage de craindre le péché plus que la souffrance, de craindre plus de consentir à l'injustice que de subir l'injustice.

Avec ce courage, avec cette patience, en Jésus-Christ, nous avons la possibilité d'une telle fidélité, d'une telle préférence. Nous avons en lui la liberté d'obéir; une liberté inouïe et inaliénable, une véritable royauté - « Compagnons de royauté et de patience » -. Car si Jésus-Christ est présent, on peut nous faire souffrir, on peut tout nous enlever, on peut nous faire mourir, on peut aussi nous faire vivre et nous combler, mais on ne peut pas nous faire désobéir. Avons-nous seulement essayé de mesurer notre liberté en Christ ? Est-ce que cela nous a déjà fait sauter de joie, comme David devant l'arche ? Est-ce que nous savons que toutes les escadrilles du monde, toutes les polices et toutes les propagandes de l'univers ne peuvent pas nous contraindre à désobéir, et que si le crucifié est à notre table, si la Parole de Dieu est devenue notre présent, nous sommes libres et que rien ne peut nous empêcher de lui appartenir ? Dans tout ce que nous pouvons avoir à souffrir, nous sommes rois, et la couronne d'épines de notre maître, c'est la couronne de gloire qui nous sera remise au dernier jour. Dans toute notre faiblesse nous sommes souverains, car celui qui est entré dans notre maison pour y souffrir, c'est le maître du ciel et de la terre, ce Seigneur souverainement élevé. Ni le Prince de ce monde, ni aucun pouvoir de ce monde ne peuvent rien sur nous; la porte ouverte à celui qui frappe, c'est la porte fermée à tous les autres maîtres. Nous sommes libres. «Voici, dit Jésus, je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds les serpents, les scorpions et toute la puissance de l'ennemi; et rien ne pourra vous nuire. » Le mensonge n'a plus de prise, la violence n'a plus de prise, la haine n'a plus de prise. Nous ne pouvons rien contre la vérité, dit saint Paul. Nous ne pouvons rien contre celui qui soupe avec nous. Telle est notre liberté, quand la Parole est avec nous, quand nous lui sommes absolument soumis. Tels sont le courage et la liberté dont notre présent est constitué par la Parole de Dieu. «Il nous a faits rois et sacrificateurs pour Dieu, son Père. »

On pourrait parler d'autres choses encore, bien entendu, on pourrait parler de la douceur et de la joie d'une telle présence. On pourrait noter aussi que cette présence constitue, jour après jour, le pardon de nos absences renouvelées, le temps retrouvé que nous avions perdu. Mais on ne peut tout dire. J'ai choisi le courage et la liberté qui me semblent aujourd'hui les dons les plus urgents que nous accorde la Parole de Dieu et les caractéristiques les plus nécessaires du miracle de sa présence.

Mais il faudrait préciser que ce courage et cette liberté ne sont pas des vertus individuelles. La présence que donne Jésus-Christ n'est pas une présence isolée, c'est notre présence dans l'Eglise, c'est notre présence les uns devant les autres. La table à laquelle Jésus s'assied, c'est la table où les convives se reconnaissent, où les hommes pour la première fois sont ensemble, sont là les uns pour les autres. Notre présent, le présent de la Parole de Dieu, c'est notre vie dans l'Eglise. Autour de la table où s'est assis notre Seigneur, les hommes se rencontrent, au lieu de se manquer. La présence de Jésus-Christ les enveloppe, la Parole de Dieu les lie; chacun à sa place, ils ont un présent commun, ils vivent ensemble ce temps que leur donne Jésus-Christ. Cette porte qu'ils ont ouverte à la Parole de Dieu, elle est ouverte maintenant de l'un à l'autre. En venant s'asseoir à leur table, en leur donnant son corps, Jésus a fait d'eux un corps nouveau, son propre corps qui est l'Eglise, la communion des Saints. A chaque contour de leur existence, ils se retrouvent dans le courage et la liberté du Christ. Ils ont toujours entre eux cette même présence, cette même obéissance. Ils se reconnaissent à cette liberté qu'ils ont.

Telle est notre présence dans l'Eglise autour de la Table du Seigneur. Mais jamais non plus elle ne peut être là pour elle-même et se suffire à elle-même. Notre présence dans l'Eglise, c'est notre présence au monde, c'est notre ouverture sur le monde. Quelle calamité qu'une Eglise qui n'est qu'un cercle de gens pieux se sentant bien ensemble, une Eglise repliée sur elle-même et qui se suffit à elle-même! Le présent que nous avons en tant que membres du corps du Christ, c'est notre présence d'homme total auprès de toutes les entreprises humaines, auprès de toutes les espérances humaines. La Parole de Dieu n'est pas un refuge, mais un glaive pour combattre. Elle ne nous retire pas du monde, mais nous jette en plein coeur du monde présent. La Parole est venue s'asseoir à notre table de péager et de pécheur. Jésus précisément n'est pas entré dans le cercle des gens religieux; il est venu dans le monde et il a été avec le monde jusqu'au bout, - bien que sans l'ombre de complicité. Ce qu'il y a de paradoxal dans la Parole de Dieu, c'est qu'elle est la présence du Dieu vraiment saint à notre table d'homme pécheur. Sans Jésus, nous sommes ou bien des pharisiens, c'est-à-dire des hommes pieux séparés des autres, à l'écart du monde et dont la vie chrétienne est en quelque sorte une spécialité, en un mot, des hommes rigoureusement absents du monde; - ou bien notre présence dans le monde, notre main tendue - aux pécheurs est une complicité. Nous ne sortons pas de cette alternative. Seule la présence absolument particulière de Jésus peut nous permettre d'être absolument solidaires du plus misérable sans être le moins du monde complices. Etant pleinement sanctifiés par la présence de Jésus, nous pouvons sans risques nous approcher des hommes, nous sommes libres d'être vraiment avec eux, et de partager leur travail. Tout risque de complicité est éloigné. C'est ainsi qu'en nous sanctifiant Jésus nous rend présents au monde. En nous arrachant au pouvoir du Malin, il nous envoie vers tous ceux qui sont en son pouvoir. C'est une des formes de cette liberté que nous avons. Nous pouvons travailler partout et avec tous. Nous pouvons être partout où Jésus a été, et encore une fois, ce n'est point dans les chapelles que la Parole de Dieu s'est cantonnée.

Aussi, dans la mesure même où la Parole nous sépare de toute idolâtrie, de tout péché, elle nous lie aux hommes pécheurs. Dans la mesure où elle nous rend absents à l'appel des idoles, elle nous rend présents au malheur des idolâtres. Dans la mesure où aucune complicité ne nous est plus possible, toute présence nous est possible, et non seulement possible, mais nécessaire.

Car notre présence à la porte de tous les domaines de la vie, et de toutes les existences humaines, c'est la présence de Jésus non plus à notre porte, mais à la porte de toutes les vies. Nous sommes pour le monde la main du Christ qui frappe; nous sommes sa voix qui appelle; nous sommes la présence de Jésus-Christ pour tous les hommes, à la porte de toutes les maisons. Comment autrement Jésus-Christ entrerait-il dans ces maisons ? Il est à la droite de Dieu, élevé souverainement par-dessus toute autorité. Sa présence sur la terre, c'est celle de son Eglise jusqu'à ce qu'il revienne. C'est la Parole qu'il met dans notre bouche et c'est le courage et la liberté, la force et la douceur avec lesquels nous apportons cette Parole.

C'est bien pourquoi notre présent ne saurait être constitué par la Parole que nous entendons, s'il ne l'est pas aussi par la Parole que nous prononçons. La présence de Jésus-Christ n'est jamais immobile, mais elle va d'un homme à l'autre. Elle est un trésor que l'on garde dans la stricte mesure où on le partage. Nul ne peut être appelé par lui sans être envoyé par lui. Nul ne peut entendre sa voix sans la faire entendre autour de lui. Notre présent, c'est le présent du témoignage.

Pour terminer, ajoutons un mot sur la portée de ce témoignage, de son champ d'action. Ajoutons immédiatement qu'il n'y a aucune limite à cette portée. Jésus n'est pas seulement le maître de l'Eglise, il est aussi le maître des nations. Celui dont le trône a pour base le droit et la justice frappe aujourd'hui à la porte des magistrats comme à celle des membres de l'Eglise, parce que les nations lui appartiennent et vivent uniquement parce qu'il frappe à leur porte et meurent de ne pas entendre sa voix. Il faut donc que notre témoignage présent ait cette portée nationale et pas seulement ecclésiastique. Il faut que la nation obéisse. Il faut que nous frappions à la porte des fonctionnaires pour leur rappeler qu'ils sont, bon gré mal gré, les ministres de Jésus-Christ, et qu'ils ont à faire sa volonté. Nous avons de la peine à nous faire à cela, parce que nous sortons d'un monde imprégné de christianisme, où l'égalité des hommes devant la loi, le respect de la dignité humaine, l'indépendance du pouvoir judiciaire allaient tellement de soi qu'on pensait qu'il n'y aurait rien à en dire, et que cela ne regardait point l'Eglise. On avait oublié qu'il s'agissait là, non pas d'un ordre naturel basé sur un reste de bonté de la nature humaine, mais bien d'un ordre de la grâce et faisant partie déjà du Royaume de Jésus-Christ. On s'était si bien accoutumé à cet ordre qu'il nous semblait inaliénable et impossible à mettre en question, il paraissait n'appeler les chrétiens à aucun témoignage particulier. Mais aujourd'hui que cet ordre chancelle, aujourd'hui où à travers la guerre civile internationale à laquelle nous assistons - guerre entre partisans de l'Etat soumis au droit et partisans du droit soumis à l'Etat - nous entrevoyons la possibilité d'une société où le bon plaisir des magistrats, ou du peuple ou du chef, ferait la loi, nous constatons que, déjà, certains qu'on a coutume d'appeler des «honnêtes gens » et même des chrétiens, sont prêts à accepter cette décomposition du fondement de toute vie en commun que constitue la possibilité pour chaque citoyen de se faire rendre justice et de posséder les biens qu'il a légitimement acquis, et d'être à l'abri de toute délation. Devant cet abîme qui s'ouvre, l'Eglise ne peut pas se taire. Pas un d'entre nous ne peut se taire si le Roi de Justice est à notre table. Pas un d'entre nous n'est dispensé d'annoncer Jésus-Christ au pouvoir civil et de lui dire inlassablement de sa part: « Tu n'auras pas deux poids et deux mesures! Tu es ministre de Dieu pour exercer la justice! » Il faut bien que nous frappions à cette porte si nous ne voulons pas que la Parole soit absente de l'ordre du monde et nous-mêmes absents de cet ordre.

Ainsi nous avons une responsabilité toute particulière dans l'obéissance de la nation. Car l'Eglise seule, dans la mesure où elle est suspendue à la Révélation biblique, peut se rendre compte de ce qu'implique la présence et l'exigence bienheureuse de celui qui frappe, pour le magistrat et pour le citoyen autant que pour le membre de l'Eglise. Nous sommes les seuls à avoir pleine conscience de ce que peut être une véritable présence de citoyens dans le corps de l'Etat, comme une véritable présence de croyant dans le corps de l'Eglise, parce que nous sommes les premiers à savoir ce que c'est que de vivre en Sa présence. C'est là notre immense responsabilité, et la portée de notre témoignage, sa portée limite, si je puis dire. Mais sa portée centrale, sa portée première, demeure, bien entendu, la proclamation à tout homme du pardon que Dieu lui accorde, sur la croix et la liberté qui lui est rendue en Jésus-Christ d'aimer Dieu et son prochain.

Ainsi nous avons noté en quelques mots le mouvement de la Parole à travers notre vie, Parole qui frappe, qui entre et qui demeure, Parole qui appelle et qui envoie, Parole qui seule peut faire de nous des hommes présents et donner une éternité à notre présent.

Car, dans ce présent de la Parole, dans ce présent qu'elle nous donne, l'éternité est cachée, notre avenir éternel est caché comme une graine dans la terre. Au jour du jugement dernier et de l'avènement de Jésus-Christ les choses qui seront manifestées ne seront pas autres que celles qui sont proposées ici et maintenant à notre foi. Car le Fils doit venir dans la gloire. Le jour vient où l'incognito sera levé et où Il apparaîtra dans toute sa royauté. Mais ce jour-là il n'y aura plus pour nous de décision possible, plus de réponse possible. Ce sera l'heure du jugement et tout homme sera jugé selon ses oeuvres, c'est-à-dire selon la décision qu'il aura prise devant le Christ abaissé, selon l'accueil qu'il aura fait au Seigneur misérable, selon la réponse qu'il aura donnée à la question que Jésus lui posait sur la croix: Qui dis-tu que je suis ? Aucune oeuvre ne pourra remplacer celle-là et nous sauver devant le jugement; aucune ne témoignera de notre foi et de notre amour sinon celle que nous avons faite pour accueillir, confesser et suivre le Christ crucifié.

Le jugement dernier a donc pour nous cette portée présente et cette urgence : Nous ne pouvons pas répondre à Jésus dans la gloire autre chose que ce que nous lui répondons aujourd'hui dans l'ignominie. Il ne pourra pas être pour nous devant l'éternité quelqu'un d'autre que celui qu'il aura été pour nous sur la terre. Nous ne pourrons pas avoir devant sa toute-puissance et sa richesse une autre attitude que devant sa faiblesse et sa pauvreté. Echanger la souffrance du Seigneur, c'est donc échanger sa place. Mais souffrir avec lui, c'est régner avec lui.


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