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 LE TÉMOIGNAGE D'UN VETERAN.

 

Monsieur le pasteur Henriquet, un des plus actifs et des plus bénis parmi les ouvriers du premier réveil, a bien voulu nous adresser la lettre que voici :

 

Cher et honoré frère en notre Seigneur Jésus-Christ,

Vous m'avez demandé d'exprimer dans le Libérateur, comme je l'ai fait de vive voix dans une réunion à Lausanne, mes impressions et mes expériences personnelles, au sujet du mouvement religieux qui se propage depuis quelque temps en France et en Suisse, par les assemblées dites de consécration.

C'est avec empressement que je réponds à votre désir, car plus j'y réfléchis et moins je puis comprendre que les chrétiens évangéliques de toute dénomination ne soient pas unanimes pour se réjouir de ce mouvement, avec actions de grâces à notre Dieu.

C'est une doctrine nouvelle et dangereuse, a-t-on dit d'abord; puis, mieux renseigné, et ne pouvant y méconnaître la vieille et toujours neuve doctrine de la grâce de Dieu en Jésus-Christ, on n'a voulu voir dans ce qui se passait qu'une agitation factice et vaine. Toutefois, il me paraît impossible que les amis de la vérité se méprennent longtemps encore sur le vrai caractère d'un réveil qui n'a point d'autre objet que la sanctification des croyants,, qui ne s'attache exclusivement à aucune forme particulière d'église, et qui certainement produit en bien des lieux des fruits de vie et de paix. Plusieurs frères en ont déjà rendu témoignage.

Dans une des assemblées de ce genre dont nous avons été favorisés à Lausanne, j'ai cru devoir prendre la parole dans ce sens. Enfant et témoin du premier réveil, d'abord dans le canton de Vaud, mon pays natal, de 1824 à 1826, et en France depuis 1827, j'ai toujours confessé et prêché le même Évangile de la grâce de Dieu auquel je crois encore, n'ayant jamais eu d'autre règle de ma foi et de ma doctrine que les Écritures divinement inspirées de l'Ancien et du Nouveau Testament. Je n'ai donc jamais cessé de recevoir et d'annoncer Jésus-Christ, Fils de Dieu, comme unique et parfait Sauveur de quiconque croit en lui.

Aussi a-t-il daigné bénir mon faible ministère, en amenant bien des âmes à sa connaissance partout où j'ai été appelé à parler en son nom. Et cependant, je dois reconnaître aujourd'hui qu'il me manquait quelque chose, pour moi-même d'abord, et aussi pour l'accomplissement de l'oeuvre que le Seigneur m'avait confiée. Je croyais, mais je ne jouissais que très-imparfaitement des privilèges de ma foi; je ne possédais que par intervalles l'assurance et la joie de mon salut; aussi je n'étais pas habituellement heureux en Christ, et il y avait certaines tentations dont je n'étais pas victorieux.

 

Maintenant je vois ce qui manquait à ma foi. Je croyais bien que « rachetés à grand prix » et pleinement justifiés par le sang de Jésus-Christ, « nous ne sommes plus à nous-mêmes, » et que notre vocation comme chrétiens c'est de « le glorifier en nos corps et en nos esprits qui lui appartiennent. » Mais je ne comprenais qu'imparfaitement que cette sanctification, qui nous est Prescrite comme un devoir de reconnaissance et d'amour, est aussi une grâce de notre Dieu, et que, pour la recevoir de jour en jour, il est nécessaire que nous nous assurions pleinement en notre puissant et fidèle Sauveur Jésus-Christ; - mais que ce moyen-là est sûr et parfaitement infaillible, selon cette parole de saint Jean : « Tout ce qui est né de Dieu surmonte le monde, et ce qui nous rend victorieux du monde, c'est notre foi (1). » Je n'ignorais pourtant pas que « Christ s'est donné pour son Église, afin de la sanctifier ; » je savais qu'il est lui-même «notre sanctification » et que son Esprit nous a été donné pour la réaliser en nous. Oui, je le croyais ; mais j'avais besoin de le croire mieux, et c'est ce complément de foi que j'ai reçu d'en haut, par le moyen des frères que j'ai entendus, ou plutôt par le témoignage des Écritures divines auxquelles j'ai été rendu attentif et dont le sens m'a été révélé d'une manière plus complète. Je citerai en particulier : Matth. 1 : 21 ; Luc 1 : 68-75; Jean 15 : 11 ; Rom. 6 : 1-11, 22; 7; 8; Esaïe 40: 29-31.

 

J'ai donc compris que la mort et la résurrection de Jésus-Christ sont aussi efficaces pour nous affranchir du péché que pour nous arracher à la mort éternelle, et que, par conséquent, nous devons attendre de lui, par la foi et de jour en jour, la victoire sur le péché et la sanctification de l'Esprit, avec autant d'assurance que notre justification ; car « il est puissant, » lui, le Roi de gloire, « pour sauver entièrement ceux qui s'approchent de Dieu par lui. »

Je conclus par deux paroles apostoliques; l'une de saint Pierre:

Croissez dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur, Jésus-Christ (2).

L'autre de saint Paul

Si quelqu'un croit savoir quelque chose, il n'a encore rien connu comme il faut connaître; mais si quelqu'un aime Dieu, il est connu de lui (3).

Agréez les salutations très cordiales de votre dévoué frère en Jésus-Christ.

A. HENRIQUET,

ancien pasteur. Lausanne, novembre 1875.

 

 

« ... Voici ce que j'éprouve depuis nos réunions de l'été dernier:

« Un plaisir tout nouveau à lire la Bible. L'aveugle n'est rien sans son bâton, Je ne suis rien sans ma Bible.

« Ensuite, je sens plus profondément mon indignité et mon impuissance. C'est depuis les réunions que je sais ce qu'est la repentance. On ne le sait que lorsqu'on est revenu à la maison du Père. J'imagine que l'enfant prodigue dut beaucoup pleurer le soir ou le lendemain de la fête.

« Enfin, loin que la pensée que Jésus-Christ est notre sanctification ait produit en moi le relâchement, je m'applique davantage à remplir mes devoirs. C'est tout autre chose. Dieu m'a donné une conscience plus scrupuleuse, et il est une foule de petits devoirs négligés autrefois auxquels j'ai été rendu attentif, par exemple le devoir de racheter le temps, de tenir la langue en bride, d'avoir la pensée toujours occupée de bonnes choses, etc.

« Je dois ajouter que, d'après mon expérience, il faut veiller et prier constamment! Si nous ne demeurons pas en Jésus-Christ, nous péchons; si nous dépouillons un seul moment l'armure de Dieu, ou même une seule pièce de cette armure, l'ennemi nous attaque et nous terrasse. »

(Extrait d'une lettre.)

La grâce de Dieu. est comme la pluie du ciel, qui glisse sur les endroits élevés et ne remplit que les places vides.

AD. MONOD.

Avec de la foi et de la droiture de coeur, on peut tout soutenir, parce qu'on peut tout espérer, et l'on peut tout espérer, parce que Dieu a tout promis.

ROCHAT.


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(1)1 Jean 5: 3-5.

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(2) 2 Pierre 3; 18.

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(3) 1 Cor. 8: 2, 3.


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