Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XVI

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Nous arrivons maintenant à l'une des parties les plus profondes et les plus étendues du livre du Deutéronome. L'écrivain inspiré nous y présente ce qu'on peut appeler les trois grandes fêtes principales de l'année juive, savoir : la Pâque, la Pentecôte et la fête des Tabernacles, ou la Rédemption, le Saint-Esprit et la gloire. Nous avons ici une vue plus restreinte de ces belles institutions que celle qui est donnée dans le Lévitique (chap. 23), où l'on compte avec le sabbat, huit fêtes ; mais si nous considérons le sabbat à part, comme étant le type du repos éternel de Dieu, il y a sept fêtes, savoir : la Pâque, la fête des pains sans levain, la fête des premiers fruits, la Pentecôte, la fête des trompettes, le jour des propitiations, et la fête des Tabernacles.

Tel est l'ordre des fêtes dans le livre du Lévitique qui, comme nous l'avons remarqué dans nos études sur ce Livre, peut être appelé « le guide du sacrificateur». Mais dans le Deutéronome, qui est surtout le Livre du peuple, nous avons moins de détails rituels, et le législateur se borne à ces grands traits moraux et nationaux, qui s'adaptent au peuple et présentent de la manière la plus simple le passé, le présent et l'avenir.

« Garde le mois d'Abib, et fais la pâque à l'Eternel, ton Dieu ; car au mois d'Abib, l'Éternel, ton Dieu, t'a fait sortir, de nuit, hors d'Egypte. Et sacrifie la pâque à l'Éternel, ton Dieu, du menu et du gros bétail, au lieu que l'Éternel aura choisi pour y faire habiter son nom. Tu ne mangeras pas avec elle de pain levé pendant sept jours tu mangeras avec elle des pains sans levain, pains d'affliction, parce que tu es sorti en hâte du pays d'Égypte, afin que, tous les jours de ta vie, tu te souviennes du jour de ta sortie du pays d'Égypte. Et il ne se verra pas de levain chez toi, dans toutes tes limites, pendant sept jours ; et de la chair que tu sacrifieras le soir du premier jour, rien ne passera la nuit jusqu'au matin. - Tu ne pourrais pas sacrifier la pâque dans l'une de tes portes que l'Éternel, ton Dieu, te donne ; mais au lieu que l'Éternel, ton Dieu, aura choisi pour y faire habiter son nom, là tu sacrifieras la pâque, le soir, au coucher du soleil, au temps où tu sortis d'Egypte ; et tu la cuiras et la mangeras au lieu que l'Éternel, ton Dieu, aura choisi ; et le matin tu t'en retourneras, et tu t'en iras dans tes tentes. Pendant six jours tu mangeras des pains sans levain ; et, le septième jour, il y aura une fête solennelle à l'Eternel, ton Dieu : tu ne feras aucune oeuvre » (vers. 1-8).

 

Ayant donné beaucoup de détails sur les grands principes de cette fête fondamentale, dans nos « Notes sur l'Exode », nous devons y renvoyer le lecteur s'il désire étudier le sujet. Mais il y a certains traits particuliers au Deutéronome sur lesquels nous sentons de notre devoir d'attirer l'attention. Et d'abord, remarquons le soin mis ici à spécifier le « lieu » où la fête devait se célébrer. L'importance pratique en est grande. Le peuple ne devait pas choisir le lieu lui-même. Au point de vue humain, il pouvait sembler assez peu important de savoir où et comment la fête devait être célébrée, pourvu qu'elle le fût. Mais que le lecteur réfléchisse sérieusement et pèse mûrement la chose, et il se convaincra qu'un jugement d'homme n'était d'aucun poids dans l'affaire ; il s'agissait de pensée et d'autorité divines. Dieu avait le droit de prescrire et de décider où il voulait rencontrer son peuple, et c'est ce qui nous est démontré dans le passage cité plus haut, où trois fois il répète ces mots : « Au lieu que l'Eternel, ton Dieu, aura choisi ».

Est-ce une vaine répétition ? Que personne ne soit assez téméraire pour le penser, encore moins pour l'affirmer. La chose est tout à fait nécessaire. Et pourquoi ? A cause de notre ignorance, de notre indifférence et de notre volonté propre. Dieu, dans sa bonté infinie, prend un soin spécial à graver sur le coeur, la conscience et l'intelligence de son peuple, qu'il voulait avoir un lieu particulier où la mémorable et importante fête de la pâque devait être célébrée.

Remarquons que c'est seulement dans le Deutéronome qu'il est insisté sur le lieu de la célébration. Nous n'avons rien de cela dans l'Exode, parce que là on la célébrait en Égypte ; il n'en est pas fait mention dans les Nombres, parce que là elle était célébrée dans le désert. Mais, dans le Deutéronome, tout est établi avec autorité et d'une manière définie, parce que ce livre renferme les instructions qui convenaient au peuple fixé dans le pays. C'est une autre preuve frappante que le Deutéronome est très loin de n'être qu'une répétition stérile des livres précédents.

La raison capitale pour laquelle il est si fortement insisté sur « le lieu », dans les trois grandes solennités rapportées dans notre chapitre, est celle-ci, que Dieu voulait rassembler autour de Lui-même le peuple qu'il aimait, afin qu'ils pussent faire la fête ensemble en sa présence, que Lui pût se réjouir en eux, et eux en Lui, et les uns dans les autres, ce qui ne pouvait se faire qu'au lieu désigné de Dieu. Tous ceux qui désiraient s'approcher de l'Eternel et rencontrer son peuple, tous ceux qui désiraient un culte et une communion selon Dieu, se rendaient avec reconnaissance au centre choisi de Dieu. Quelqu'un aurait pu dire : « Ne puis-je pas faire la fête au sein de ma famille ? Quelle est la nécessité de ce long voyage ? Lorsqu'il y a sincérité de coeur, le lieu importe peu. » La seule réponse est que la preuve la meilleure et la plus claire de droiture de coeur sera le désir simple et sérieux de faire la volonté de Dieu. Il suffisait à celui qui aimait et craignait Dieu de savoir que Dieu avait désigné un lieu où il se trouverait avec son peuple ; c'est là que toute âme droite voulait se rendre. Sa présence seule pouvait procurer joie, force et bénédiction, à toutes les grandes réunions nationales. Ce n'était pas le simple fait de se réunir en très grand nombre, trois fois l'an, pour faire la fête et se réjouir ensemble, ce qui aurait pu favoriser l'orgueil humain, la satisfaction propre et l'excitation. Non, mais se réunir pour rencontrer l'Éternel, s'assembler devant Lui, au lieu qu'il avait choisi pour faire habiter son Nom, était une joie profonde pour tout. coeur vrai et loyal dans les douze tribus d'Israël. Celui qui volontairement serait resté à la maison, ou serait allé ailleurs qu'à l'endroit désigné par l'Éternel, n'aurait pas seulement négligé et insulté son Nom, mais aurait fait acte de rébellion contre son autorité suprême.

Après avoir parlé brièvement du lieu de la fête, jetons un coup d'oeil sur la manière de la célébrer. Là aussi, comme on pouvait s'y attendre, nous trouverons ce qui caractérise notre Livre. Le trait principal ici est « les pains sans levain » ; mais le lecteur remarquera le fait intéressant que ce pain est appelé « le pain d'affliction ». Pourquoi cette désignation ? Nous comprenons tous que le pain sans levain est le type de cette sainteté de coeur et de vie si absolument essentiels à la jouissance d'une vraie communion avec Dieu. Nous ne sommes pas sauvés par une sainteté personnelle ; mais, grâces à Dieu, nous sommes sauvés pour la sainteté. Elle n'est pas le fondement de notre salut, mais un élément essentiel à notre communion. Le levain toléré est le coup de mort de la communion et du culte.

Nous ne devons jamais, un seul moment, perdre de vue ce grand principe, dans la vie de sainteté personnelle et de piété pratique que nous sommes tenus et qu'il est notre privilège, comme rachetés par le sang de l'Agneau, de mener de jour en jour, au milieu de la scène et des circonstances que nous traversons dans notre pèlerinage vers le ciel, notre repos éternel. Parler de communion et de culte, tandis qu'on vit dans un péché connu, est la triste preuve que nous ne connaissons rien de ces deux choses. Pour jouir de la communion avec Dieu, ou de la communion des saints, pour adorer Dieu en esprit et en vérité, il faut vivre d'une vie de sainteté personnelle, d'une vie de séparation d'avec tout mal connu. Prendre notre place dans l'assemblée du peuple de Dieu, et avoir l'air de participer à la communion et au culte qui lui appartiennent, tout en vivant dans un péché secret, ou en tolérant le mal chez les autres, c'est souiller l'assemblée, contrister le Saint-Esprit, pécher contre Christ, et attirer sur soi le jugement de Dieu, qui juge maintenant sa maison et châtie ses enfants, afin qu'ils ne soient pas condamnés avec le monde.

Cela est bien solennel et appelle la sérieuse attention de tous ceux qui désirent réellement marcher avec Dieu, et le servir avec révérence et avec crainte. Autre chose est d'avoir saisi, par l'intelligence, la doctrine qu'enseigne le type, ou d'avoir sa grande leçon morale gravée dans le coeur et pratiquée dans la vie. Puissent tous ceux qui professent avoir leur conscience purifiée par le sang de l'Agneau, chercher à observer la fête des pains sans levain. « Ne savez-vous pas qu'un peu de levain fait lever la pâte tout entière ? Otez le vieux levain, afin que vous soyez une nouvelle pâte, comme vous êtes sans levain. Car aussi notre pâque, Christ, a été sacrifiée ; c'est pourquoi célébrons la fête, non avec du vieux levain, ni avec un levain de malice et de méchanceté, mais avec des pains sans levain de sincérité et de vérité » (1 Cor. 5, 6-8).

 

Mais que devons-nous comprendre par cette expression : « les pains d'affliction ? » Ne penserions-nous pas que les chants de joie, de louange, et de triomphe, seraient mieux en rapport avec une fête commémorative de la délivrance de l'esclavage et du joug des Égyptiens ? Sans doute, et il y a, en effet, un sujet de profonde et réelle joie, de reconnaissance et de louange, lorsque nous réalisons la vérité bénie d'une pleine délivrance de notre condition première avec toutes ses conséquences. Mais on voit très clairement que tels n'étaient pas les traits dominants de la fête pascale, puisqu'ils ne sont pas même nommés. Nous avons « les pains d'affliction », mais pas un mot de joie, de louange, ou de triomphe.

Pourquoi donc ? Quelle est la grande leçon morale donnée à nos coeurs par ces « pains d'affliction ? » Nous croyons qu'il y a là une figure de ces profonds exercices de coeur que le Saint-Esprit produit, en nous représentant avec puissance ce qu'il en a coûté à notre adorable Seigneur et Sauveur pour nous délivrer de nos péchés et du jugement que ces péchés méritaient Nous avons aussi un type de ces exercices d'âme, dans « les herbes amères » d'Exode 12, et on en voit de nombreux exemples dans l'histoire des enfants d'Israël qui étaient amenés, par l'action puissante de la Parole et de l'Esprit de Dieu, à se châtier eux-mêmes et à « affliger leurs âmes » en présence de Dieu.

Qu'il nous souvienne aussi que dans ces saints exercices, il n'y a pas vestige d'élément légal, ou d'incrédulité ; loin de là. Quand un Israélite mangeait des pains d'affliction avec la chair rôtie de l'agneau de pâque, cela exprimait-il le moindre doute ou la moindre crainte quant à son entière délivrance ? Assurément non. Il était dans le pays ; il se réunissait avec ses frères au lieu même désigné par Dieu, en sa propre présence ; comment aurait-il pu douter de son entière délivrance du pays d'Égypte ?

Mais bien qu'il n'eût ni doute, ni crainte quant à sa délivrance, il devait manger les pains d'affliction ; c'était l'élément, essentiel de la fête pascale : « Parce que tu es sorti en hâte du pays d'Egypte, afin que, tous les jours de ta vie, tu te souviennes du jour de ta sortie du pays d'Egypte » (vers. 3).

C'était une oeuvre très profonde et très réelle. Les Israélites ne devaient jamais oublier leur sortie du pays d'Egypte, mais en garder le souvenir, dans la terre promise, à travers toutes les générations. Ils devaient faire la commémoration de leur délivrance par une fête, emblème de ces saints exercices qui caractérisent toujours la vraie piété chrétienne.

Nous désirons appeler la sérieuse attention du lecteur chrétien sur l'ensemble de la vérité indiquée par « les pains d'affliction ». Cela est très nécessaire pour ceux qui professent être versés dans ce qu'on appelle la doctrine de la grâce. Les jeunes chrétiens surtout courent grand risque, en cherchant à éviter le légalisme et l'esprit de servitude, de se jeter dans l'extrême opposé, le relâchement - ce piège terrible. Les chrétiens âgés et expérimentés ne sont pas si exposés à tomber dans ce triste mal ; ce sont les jeunes gens qui, parmi nous, ont un si grand besoin d'être solennellement avertis.

Ils entendent beaucoup parler du salut par grâce, de justification par la foi, d'affranchissement de la loi, et de tous les privilèges particuliers à la position chrétienne. Il est à peine nécessaire de dire que toutes ces choses sont d'une importance capitale, et qu'il est impossible d'en entendre trop parler. Des milliers de chers enfants de Dieu restent jour après jour dans les ténèbres, le doute et une servitude légale, par ignorance de ces grandes vérités fondamentales.

Mais, d'un autre côté, combien y en a-t-il qui ont saisi par l'intelligence les principes de la grâce et qui, à en juger par leurs habitudes, leurs manières, leur genre de vie, connaissent bien peu la puissance sanctifiante de ces grands principes, leur influence dans le coeur et dans la vie !

Pour en revenir à la doctrine de la fête pascale, il n'eût pas été selon la pensée de Dieu que quelqu'un essayât de célébrer la fête sans les pains sans levain, « les pains d'affliction ». Une telle chose n'aurait pas été tolérée en Israël. C'était un ingrédient absolument essentiel. Soyons donc assurés que, pour nous aussi, chrétiens, une partie intégrale de la fête que nous sommes appelés à célébrer, est de cultiver la sainteté personnelle et cette condition d'âme si bien exprimée par « les herbes amères » d'Exode 12, ou par « les pains d'affliction » du Deutéronome, et dont ces derniers paraissent être la figure permanente pour le pays. Nous avons grand besoin de ces sentiments, de ces affections spirituelles, de ces profonds exercices d'âme que le Saint-Esprit produit en révélant à nos coeurs les souffrances de Christ, - ce qu'il Lui en a coûté pour effacer nos péchés, ce qu'il a enduré pour nous, lorsque les flots et les vagues de la juste colère de Dieu contre nos péchés, ont passé sur Lui. Nous manquons malheureusement beaucoup (s'il est permis de parler pour d'autres) de cette profonde contrition qui provient d'un coeur occupé spirituellement des souffrances et de la mort de notre précieux Sauveur. Autre chose est d'avoir la conscience purifiée par le sang de Christ, autre chose d'avoir la mort de Christ appliquée spirituellement au coeur, et la croix de Christ appliquée d'une manière pratique à tout le cours et le caractère de notre vie.

Comment se fait-il que nous puissions si légèrement commettre des péchés en pensées, en paroles et en actes ? Comment peut-il y avoir tant de légèreté, d'insoumission, d'indulgence pour soi-même, tant d'aises charnelles, tant de ce qui est superficiel et frivole ? N'est-ce pas parce que la chose dont « les pains d'affliction » sont le type, manque dans nos fêtes ? Nous n'en saurions douter. Nous craignons qu'il n'y ait un manque déplorable de profondeur et de sérieux dans notre christianisme. On parle et l'on discute trop sur les profonds mystères de la foi chrétienne ; il y a trop de connaissance intellectuelle sans puissance intérieure.

Nous devons apporter à cela la plus sérieuse attention. Nous ne pouvons nous empêcher de penser qu'une des causes de ce triste état de choses ne soit une certaine manière de prêcher l'évangile, suivie, sans doute, avec les meilleures intentions, mais qui n'en est pas moins pernicieuse dans son effet moral. C'est très bien de prêcher le simple évangile ; il ne peut être plus simplement proposé que Dieu ne l'a fait par son Saint-Esprit dans l'Ecriture. Mais nous sommes persuadés qu'il y a une défectuosité très grave dans le genre de prédication dont nous parlons. Elle manque de profondeur spirituelle, de sainte gravité. Dans l'effort fait pour combattre le légalisme, il y a une tendance au relâchement. Or si le légalisme est un grand mal, le relâchement en est un encore plus grand. Il importe de se tenir en garde contre ces deux formes de mal. La grâce est le remède contre le premier, et la vérité contre le dernier ; mais la sagesse et l'intelligence spirituelles sont nécessaires pour nous rendre capables de maintenir les deux à leur place et les appliquer convenablement. Si, par exemple, nous rencontrons une âme profondément exercée sous l'action puissante de la vérité, travaillée par le ministère du Saint-Esprit, il s'agit dans ce cas de verser les consolations de la pure et précieuse grâce de Dieu, telle qu'elle est déployée dans le sacrifice divinement efficace de Christ. Voilà le remède divin pour un coeur brisé, un esprit contrit, une conscience convaincue de péché. Lorsqu'un sillon profond a été creusé par le soc spirituel, il ne nous reste qu'à y jeter la semence incorruptible de l'évangile de Dieu, avec l'assurance qu'elle y germera et portera du fruit en sa saison.

Mais, d'un autre côté, si nous voyons une personne sans sérieux et n'annonçant en rien un coeur brisé, parler avec emphase de la grâce, en s'élevant hautement contre le légalisme, et en cherchant d'une manière tout humaine à montrer un moyen facile d'être sauvé ; c'est le cas d'appliquer solennellement la vérité au coeur et à la conscience.

Nous craignons qu'il n'y ait beaucoup de ce dernier élément dans l'église professante. Pour parler le langage de notre type, il y a une tendance à séparer la pâque de la fête des pains sans levain, c'est-à-dire à se reposer sur le fait qu'on est délivré du jugement, et à oublier l'agneau rôti, les pains de sainteté, et les pains d'affliction. En réalité, ces choses ne peuvent être séparées, puisque Dieu les a réunies ; c'est pourquoi nous ne pouvons croire qu'une âme puisse réellement jouir de la précieuse vérité que « notre pâque, Christ, a été sacrifiée », et ne pas chercher à célébrer « la. fête avec des pains sans levain de sincérité et de vérité ». Quand le Saint Esprit déploie devant nos coeurs quelque chose de la profonde bénédiction, du prix et de l'efficace de la mort de notre Seigneur Jésus Christ, il nous amène à méditer sur le mystère de ses souffrances, à repasser dans nos coeurs tout ce par quoi il a dû passer pour nous, tout ce qu'Il Lui en a coûté pour nous sauver des conséquences éternelles du péché auquel, hélas ! nous nous laissons aller si souvent avec légèreté. Or c'est là un travail très profond et saint, qui conduit l'âme à ces exercices dont « les pains d'affliction », dans la fête des pains sans levain, étaient l'image. Il y a une grande différence entre les sentiments que nous éprouvons en nous occupant de nos péchés, et ceux qui proviennent de la vue des souffrances de Christ pour ôter ces péchés.

Nous ne pouvons, il est vrai, jamais oublier nos péchés, et la profondeur de l'abîme d'où nous avons été tirés ; mais c'est une chose de considérer l'abîme, et une autre bien différente et plus profonde de penser à la grâce qui nous en a retirés, et à tout ce qu'il en a coûté à notre précieux Sauveur. C'est de cela surtout qu'il nous est si nécessaire de garder continuellement le souvenir dans nos coeurs. Nous sommes si légers, si prompts à oublier!

Nous avons bien besoin de regarder à Dieu, et de lui demander instamment de nous rendre capables d'entrer plus profondément et d'une manière plus pratique dans les souffrances de Christ, et d'appliquer la croix à tout ce qui en nous Lui est contraire. C'est ce qui donnera plus de profondeur à notre piété, plus de délicatesse à nos consciences, ce qui produira une aspiration intense vers la sainteté de coeur et de vie, une séparation pratique d'avec le monde, en toutes choses, une sainte soumission, une vigilance jalouse sur nous-mêmes, nos pensées, nos paroles, nos voies, en un mot sur toute notre conduite dans la vie journalière. Combien cela donnerait au christianisme un caractère différent de celui que nous voyons autour de nous, et qu'hélas ! nous montrons dans notre propre histoire personnelle ! Puisse l'Esprit de Dieu, par son ministère direct et puissant, nous faire toujours mieux comprendre ce que signifient « l'agneau rôti », « les pains sans levain », et « les pains d'affliction » (1).


1) Le lecteur trouvera des remarques plus détaillées sur la pâque et la fête des pains sans levain, dans les Notes sur l'Exode 12 et Nombres 9. Dans ce dernier chapitre particulièrement, il verra le rapport qui existe entre la pâque et la cène, sujet du plus profond intérêt et d'une immense importance pratique. La pâque anticipait la mort de Christ; la cène la rappelle. Ce que la pâque était pour l'Israélite fidèle, la cène l'est pour l'Église. Si ces vérités étaient mieux comprises, cela aiderait à combattre le relâchement, l'indifférence et l'erreur, qui dominent maintenant quant à la table et à la cène du Seigneur.

Il doit paraître étrange à celui qui vit habituellement dans la sainte atmosphère des Écritures, de voir la confusion de pensées et la diversité de pratique à l'égard de ce sujet si important, présenté d'une manière si claire et si simple dans la parole de Dieu.

Il ne peut être mis en question par quiconque s'incline devant l'Écriture, que les apôtres et l'Église primitive se réunissaient le premier jour de la semaine pour rompre le pain. Il n'y a pas même une ombre de fondement dans le Nouveau Testament à vouloir limiter cette ordonnance si précieuse à être célébrée une fois par mois, ou tous les trois ou six mois. On ne peut considérer cela que comme une intervention humaine dans une institution divine. Nous savons qu'on cherche à se prévaloir de ces paroles : « Faites ceci, toutes les fois, etc. » (1 Cor. 11, 26) ; mais nous ne voyons pas comment elles peuvent servir de base à un argument quelconque, devant ce que nous lisons dans les Actes des Apôtres, chap. 20, 7. Le premier jour de la semaine est, incontestablement, le jour où l'Église doit célébrer la cène.

Le lecteur chrétien admet-il cela ? Et s'il l'admet, agit-il en conséquence? C'est une chose sérieuse de négliger une ordonnance spéciale de Christ, établie par Lui dans des circonstances si touchantes, la nuit même où il fut trahi. Tous ceux qui aiment le Seigneur Jésus Christ en sincérité, désirent assurément se souvenir de Lui, de cette manière spéciale, selon ses propres paroles : « Faites ceci en mémoire de moi » (l Cor. 11, 24). Pouvons-nous comprendre que quelqu'un, aimant réellement Christ, puisse vivre dans une négligence habituelle de ce précieux mémorial ? Si un Israélite avait négligé de célébrer la pâque, il aurait été « retranché ». Mais c'était la loi et nous sommes sous la grâce, dira-t-on. C'est vrai, mais est-ce une raison pour négliger le commandement de notre Seigneur?

Nous recommandons ce sujet à l'attention sérieuse du lecteur. Il embrasse bien plus que la plupart d'entre nous ne le pensent. L'histoire entière de la cène dans ces dix-huit derniers siècles est remplie d'intérêt et d'instruction. La manière dont on a traité la table du Seigneur est un index moral de la vraie condition de l'Église. Dans la mesure où l'Église s'est éloignée de Christ et de sa Parole, elle a négligé et perverti la précieuse institution de la cène. D'un autre côté, toutes les fois que l'Esprit de Dieu a agi avec puissance dans l'Église, la cène a trouvé sa vraie place dans le coeur des siens.

Nous ne pouvons nous étendre davantage sur ce sujet dans une simple note ; nous avons désiré seulement le présenter au lecteur, et nous espérons qu'il sera conduit à l'étudier pour lui-même. Nous ne doutons pas qu'il n'y trouve intérêt et profit.

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