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  3. Courants contemporains

 

Du haut de son paisible observatoire, l'inspecteur Rappard suivait avec un vif intérêt tous les mouvements et courants divers qui surgissaient dans le Royaume de Dieu, ne manquant pas de donner son avis à l'occasion dans des conférences ou dans le Glaubensbote. Donnons-en ici quelques échantillons.

On a déjà pu voir ce qu'il pensait de la critique biblique. Voici sur ce sujet brûlant encore quelques extraits du Glaubensbote.

Nous prenons l'Écriture sainte telle qu'elle est. N'y trouvant point de doctrine de l'inspiration, nous n'en formulons point non plus. Avec tout le corps des croyants, nous persistons à croire que le Dieu tout puissant, tout sage et partout présent, a veillé sur le contenu de Son saint livre et a pris soin que la Bible fût et restât telle qu'elle est. « C'est poussés par le Saint-Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu. » (II Pierre 1, 21). Nous ne faisons pas de critique biblique, et nous avons de bonnes raisons pour cela. Notre divin Maître, notre parfait modèle aussi quant à la façon de manier les Écritures, les a toujours acceptées telles qu'elles étaient, sans aucune réserve, toutes les fois qu'il a eu l'occasion d'en parler.

Ce n'est pas pour la Bible que nous avons peur, d'ailleurs, pas plus que nous ne tremblerions pour un des géants de nos Alpes si des hommes, grands ou petits, n'importe, l'entouraient et se mettaient à le tailler pour en faire disparaître je ne sais quelles formations rocheuses qui leur déplairaient.

(Glaubensbote, 1895.)

 

Nous sommes tout disposés à admettre que les représentants de la critique affirmative n'ont pas mesuré toute la portée de ce qu'ils font, précisément peut-être parce qu'ils mettent de la mesure dans leur critique. La recommandation du Seigneur: « Ne jugez point! » doit constamment retentir au fond de notre âme, et jamais l'amertume ne doit y prendre la place de l'amour. Nous ne jugeons donc point le serviteur d'autrui. « S'il se tient debout ou s'il tombe, cela regarde son Maître. Or il peut fort bien être maintenu debout, car Dieu a le pouvoir de l'affermir (1). »

Mais la chose elle-même qui s'appelle la critique biblique, nous avons le droit de l'éprouver, conformément à la parole : « Éprouvez toutes choses, et retenez ce qui est bon ! » C'est à la clarté de la Bible elle-même que nous l'éprouvons ; c'est elle qui enseigne ce qui la concerne. Elle est et reste notre livre de théologie et de science. (Ibidem.)

Aux premières nouvelles du RÉVEIL DU PAYS DE GALLES, le coeur de Rappard s'emplit d'une joie profonde. Comment eût-il pu en être autrement, lorsqu'il fut certain qu'au témoignage de chrétiens expérimentés, il s'agissait bien d'une oeuvre de l'Esprit de Dieu ? Voici les réflexions que lui suggèrent les récits apportés du Pays de Galles.

Il nous est bien permis de nous demander sérieusement en quoi nous sommes en défaut, nous qui souffrons de la sécheresse de nos réunions ; c'est toujours par la maison de Dieu que commence le jugement. Que les enfants de Dieu soient vivants, que nous nous repentions sincèrement, que nous nous laissions purifier et que l'esprit de prière s'éveille en nous, et Dieu exaucera. Pourquoi la promesse de Jésus ne s'accomplirait-elle pas : Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront de son sein ? (Glaubensbote, 1905.)

Lorsque plus tard il apprit qu'on cherchait ici et là, plus ou moins consciemment, à produire artificiellement un réveil et à imiter le Pays de Galles, il en fut peiné et troublé.

Ce qu'il faut, écrit-il alors, ce ne sont pas des méthodes nouvelles ou des expressions neuves, ce sont des hommes remplis de l'Esprit, en qui brûle la flamme divine, de sorte qu'ils n'ont qu'à aller n'importe où pour l'y allumer aussi.

Et un an plus tard :

Nous aimons à relever le fait que l'oeuvre accomplie au Pays de Galles a fait ses preuves. Les fruits en demeurent, et des centaines d'hommes renouvelés sont des attestations vivantes de la puissance de l'Évangile. (Glaubensbote, 1906)

A Liverpool, un étranger demande à un agent de police où se trouve le réveil :

« Sous les boutons de ma veste, Monsieur! »

Le réveil, en effet, était bien au fond des coeurs.

L'inspecteur ne vit pas sans anxiété pénétrer dans les « Gemeinschaften » la doctrine dite des COEURS PURS ou de la suppression totale du péché. La chose lui paraît assez grave pour lui faire accepter d'aller en 1905 assister, à Brieg, en Silésie, à une conférence publique des principaux champions de cette doctrine. Après qu'ils eurent exposé leurs idées, Rappard prit le premier la parole, comme étant le doyen des opposants, et, à ce que nous a dit récemment un témoin oculaire, parlant avec une vraie humilité, mais avec un grand sérieux et une entière décision, il fit ressortir ce que ces vues avaient de contraire à la Bible et de dangereux. Appuyée par M. 0. Stockmayer et d'autres, sa protestation ne manqua pas de susciter une grande irritation chez quelques partisans de cette doctrine, et on lui envoya des écrits qui ne purent que le confirmer dans sa conviction.

I répondait à un prédicateur qui se disait entièrement débarrassé du péché : « Mon frère, c'est une illusion. Sur ce point-là aussi la Bible est notre meilleur guide, et elle appelle les choses par leur nom quand elle affirme : Si nous disons que nous n'avons pas de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n'est point en nous. » « je ne puis comprendre, a-t-il dit plus d'une fois, comment un homme peut prétendre qu'il n'a plus besoin d'être purifié. Ah ! où en serais-je si je ne pouvais plus demander cette grâce »

Il a, écrit un évangéliste, exprimé deux pensées, qui pour moi sont essentielles sur ce point débattu de la sanctification :

1° Ne prenons jamais notre expérience pour un commentaire explicatif de la Bible ; dès que nous le faisons, nous tombons dans l'erreur;

2° Ce que la Bible nous propose, ce n'est pas une vie sans péché, c'est une vie de victoire.

 

Il fut fort heureux de n'avoir jamais affaire directement avec le singulier mouvement dit du PARLER EN LANGUES. Il ne l'en suivit pas moins avec intérêt, l'examinant à la lumière de la Parole de Dieu. Mais les égarements manifestes qui se produisirent bientôt ne tardèrent pas à fixer sa conviction. Voici quelques extraits d'un article du Glaubensbote (1908) intitulé Jannès et Jambrès. (Ex. 7, 11 et suiv.; Il Tim, 3, 7, 8.)

Dans l'histoire de l'Église se retrouvent constamment de ces cas où, Dieu ayant agi, Jannès et Jambrès interviennent pour détruire son oeuvre. Il s'agit de savoir qui aura le dessus. Si ce sont les esprits de mensonge, le désordre éclate dans les réunions des enfants de Dieu, comme on a pu le voir tout récemment. Les désordres occasionnés par des démoniaques ou par d'autres n'ont pu se produire que parce que ceux qui dirigeaient les réunions n'étaient pas capables d'éprouver les esprits à la lumière divine. Partout où la puissance du Saint-Esprit, qui conduit dans toute la vérité et qui est un Esprit d'ordre a le champ libre, le bras puissant de l'Éternel est révélé et le peuple de Dieu est délivré de la maison de servitude.

Ainsi, chers et vénérés frères, appelés à redire sous la nouvelle alliance : « Laisse aller mon peuple afin qu'il me serve! » veillez, pour que Jannès et Jambrès et les esprits qui leur sont apparentés et qui cherchent à pénétrer partout, soient contraints par la puissance du nom de Jésus à redire comme jadis en Égypte, il y a trois mille cinq cents ans : « C'est le doigt de Dieu! »

Quant au mouvement dit de PENTECOTE, bornons-nous à quelques lignes. Rappard souffrait profondément des, progrès de ce dangereux courant, qui est en relation avec le parler en langues et la doctrine des coeurs purs. Quand il vit à quel point les partisans de ce mouvement manquaient des fruits caractéristiques de l'Esprit, qui sont un coeur brisé, l'humilité, la glorification du Seigneur Jésus : quand il constata qu'ils permettaient à quelques personnes d'agir comme des médiums se croyant chargés de transmettre à l'Église des messages de Christ, il ne put faire autrement que d'avertir solennellement ses frères et d'apporter au Seigneur la misère de l'Église.

Il n'a pas assisté aux scissions produites par le développement de cette erreur, mais il a pu de tout son coeur bénir Dieu de ce que ses chers évangélistes avaient été tenus à l'abri de ce piège.

Il aimait cette affirmation de son beau-père, l'évêque Gobat : « Quiconque nourrit son esprit de la Parole de Dieu et vit dans cette pure atmosphère acquiert un flair spirituel qui lui permet de discerner aussitôt l'erreur et de l'éviter. »

Et sa prière pour ses « frères », comme pour lui-même, était qu'ils eussent pour équipement la Parole de la vérité, la force de Dieu et les armes de la justice qu'on tient de la droite et de la gauche.


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1) Rom. 14, 4, d'après Luther.