DES JUIFS CÉLÈBRES

Jean-Marie Lustiger, archevêque et cardinal de Paris

 

Fils d'un commerçant juif polonais en textiles, Jean-Marie est né à Paris en 1926. Il est passé au catholicisme à l'âge de 14 ans. Devenu prêtre en 1954, il fut évêque d'Orléans en 1979, archevêque de Paris en 1981 et cardinal en 1983. Il affirma un jour: «Devenir chrétien ne signifie pas, selon moi, se dégager du judaïsme. Le Nouveau Testament serait incompréhensible, S'il ne s'appuyait pas sur la vocation des juifs, celle d'Israël et celle de Christ en rapport avec les païens.»

Enfant, pendant ses vacances scolaires, il séjourna deux fois en Allemagne: en 1936 à Ziegelhausen près de Heidelberg, et en 1937 à Fribourg-en-Brisgau. C'est ainsi que, de visu, il apprit à connaître l'antisémitisme nazi.

Arrêtée lors d'une rafle à Paris, sa mère fut emmenée à Auschwitz, où elle perdit la vie en 1943, ce qui toucha profondément le jeune homme alors âgé de 17 ans.

Certains arguments pour justifier l'antisémitisme furent tirés de la tradition chrétienne du Moyen Age. Même le luthérisme allemand se plaça sous cette mauvaise influence. Des écrits tardifs de Martin Luther, particulièrement ceux sur «Les juifs et leurs mensonges», procédèrent d'une étrange haine manifestement maladive de tout ce qui était juif, haine liée à celle à l'égard du pape. Il est facile d'accuser exclusivement l'Eglise. Dans ses livres, le cardinal Lustiger pose des questions: «Mais où étaient donc les professeurs d'université allemands de cette époque-là? Quels professeurs allemands ont protesté alors? Où se trouvaient soudain les libéraux, les démocrates? Qu'en fut-il des partis de gauche pendant les dernières années de la République de Weimar?»

Le cardinal Lustiger pense que l'attitude du pape Pie XII (1939-1958) à l'égard de la politique d'Hitler concernant les Juifs a été jugée d'une manière très ambiguë. A partir de 1942, Pie XII reçut des informations fort détaillées sur la mise à mort massive des Juifs dans les camps de concentration. Mais dans plusieurs de ses discours, il ne s'est jamais exprimé clairement sur ce qui arrivait aux déportés juifs.

Cependant, en 1943 à Rome, lorsque les autorités allemandes exigèrent de la communauté juive 50 kilos d'or, le Vatican intervint financièrement. De plus, des Juifs romains trouvèrent refuge dans des monastères et des institutions chrétiens; et pour certains d'entre eux, au Vatican même, quand les Juifs romains devaient être déportés dans les camps de la mort. Bon nombre de juifs eurent la vie sauve grâce à Angelo Giuseppe Roncalli (qui devait devenir plus tard le pape jean XXIII).

Pie XII se dressa véhémentement contre la fondation de l'Etat d'Israël, lequel ne fut jamais reconnu par le Vatican et avec lequel, dès lors, il n'entretint pas de relations diplomatiques.

Dans ce cadre, le cardinal Jean-Marie Lustiger a, un jour, cité la prière de contrition du pape jean XIII, qu'il avait adressée au Tout-Puissant peu de temps avant sa mort: «Nous confessons maintenant que de nombreux siècles d'aveuglement ont recouvert nos yeux de sorte que nous ne voyons plus la beauté de Ton peuple élu et, que dans son visage, nous ne reconnaissons plus les traits de notre frère premier-né. Nous confessons que le signe de Caïn est sur notre front. Des siècles durant, Abel s'est trouvé là gisant dans son sang et ses larmes, et cela parce que nous oubliions Ton amour. Pardonne-nous la malédiction que nous avons prononcée injustement sur le nom des juifs. Pardonne-nous de T'avoir crucifié une seconde fois dans leur chair. Nous ne savions pas ce que nous faisions... »

C'est par cette formule. «Juste parmi les peuples» que le mémorial de l'Holocauste, Yad Vashem, a honoré à titre posthume le cardinal français Jules Saliège. Durant la période nazie, il était venu en aide à de nombreux juifs et avait critiqué ouvertement la politique raciale des nazis et du régime de Vichy. Il aurait, entre autres, rendu possible la faite de devant les nazis de l'actuel cardinal parisien Jean-Marie Lustiger, alors âgé de 18 ans.

En faveur d'un programme de rapprochement entre chrétiens et juifs, le cardinal Lustiger a déclaré: «La mission du judaïsme est de veiller sur la justice. Pour cela, Dieu a donné les commandements au peuple juif. Le christianisme en a hérité, mais pas au sens propre du terme. Nous sommes aujourd'hui confrontés à un paganisme, qui conduit au rejet de l'être humain. Mais Dieu a créé le monde dont Il est le seul maître. Il a aussi fait l'homme à Son image et à Sa ressemblance.

De notre origine commune, nous avons appris à lutter contre le malheur. Dieu nous a donné les bénédictions, la foi sous la forme des béatitudes. Nous ne devrions jamais nous en contenter. Nous n'avons rien à perdre à continuer ensemble notre combat.»

LE PROFESSEUR MARK ZONIS

Nouvelles d'Israël Avril 2000

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