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Lewanika, roi du Zambèze.

 

Lewanika et Litia.

Lewanika fut le roi des Barotsis, dès 1878 ; les Barotsis habitent dans l'Afrique australe, sur les rives du grand fleuve du Zambèze que Livingstone a découvert en 1853. Aucun missionnaire ne s'y était établi depuis loirs, aussi le grand empire de Lewanika était-il dans le plus sombre paganisme, comme sous un linceul.

Coillard fut le premier missionnaire qui y entreprit une oeuvre suivie. Le Zambèze était séparé des avant-postes de la civilisation par des déserts et des forêts presque infranchissables. Il y avait 1700 kilomètres depuis le Lessouto, soit la distance de Zurich à Pétrograde. Le pays de Lewanika avait 600 kilomètres de long et 3 à 400 de large, trois ou quatre fois la superficie de la Suisse ; la population, très clairsemée, n'avait que 160 à 180.000 habitants, La capitale est Léalouyi.

Le premier ministre de Lewanika, le Nzambéla, dit au missionnaire Coillard à son arrivée : « Ce que nous te demandons, ce ne

sont nullement des présents, mais l'enseignement que tu apportes. Nous avons faim de la vérité qui rend les hommes meilleurs. Notre terre est assouvie de sang. » Ces mots disaient tout. Lewanika avait un pouvoir absolu. Ses sujets se présentaient devant lui à genoux : ils étaient tous ses esclaves; pour un oui ou pour un non, ils étaient égorgés. « Il serait difficile, écrit Coillard, d'imaginer un coupe-gorge plus affreux, où le vol, la brutalité et le meurtre se donnent pleine carrière. » Coillard fut pillé, et jusqu'au linge de toute la famille missionnaire.

Lewanika, qui était intelligent et avait des aspirations vers le bien, subit tout de suite l'ascendant de Coillard et une intimité touchante s'établit entre eux. « Le roi est aimable, écrit Coillard, causeur, communicatif. Mais il a une volonté qui ne souffre pas la moindre contradiction. »

Coillard, protégé miraculeusement, par une main invisible, n'écoutant que son courage et sa foi, se décida à frapper le paganisme à la racine. Il ne craignit pas de risquer sa vie. Il s'attaqua publiquement aux rites du roi et prit pour texte d'une de ses prédications : « Tu ne tueras point. » - « Tous les yeux, dit-il, étaient braqués sur moi. On aurait entendu voler une mouche. Je me suis senti soutenu. Quant à Lewanika, il s'écria : « Les paroles du missionnaire me sont entrées dans le coeur ! » Coillard écrit : « Je dis au roi que j'étais venu tout exprès pour lui parler de la manie qu'il a de tuer ses gens. Je lui parlai, je crois, avec fidélité et fermeté. » Le premier-ministre dit à Coillard : « Répète ces choses au roi; peut-être entendra-t-il. Ne te lasse pas. »

Un combat spirituel, dramatique, était engagé entre ce missionnaire qui était sans puissance matérielle aucune, et ce roi qui était entièrement indépendant et maître absolu dans son pays.

Voici un entretien, en tête à tête, que Coillard a noté : « Quand deviendras-tu croyant ? »

- Quand je saurai bien lire, car je pense que le « Livre » me dit tout ce qui est mal.

- Pourquoi attendre ? Est-ce que ta conscience ne t'a jamais dit que tu as fait beaucoup de mal ?

Il devint pensif, et baissa la tête :

- C'est une chose terrible, dit-il, en soupirant que d'être roi. En me faisant roi, on m'a poussé dans l'immoralité. Maintenant je suis un homme corrompu et souillé de sang.

Il se tut. Nous nous agenouillâmes et je priai pour lui.

Comme Hérode, comme le gouverneur Félix, Lewanika ne put jamais se convertir. Par contre, il apprit à s'habiller, même chez les meilleurs tailleurs ; en compagnie de Coillard, il apprit à se bien tenir à table ; il acquit une vraie distinction apparente. Une transformation profonde s'opéra en lui ; il renonça à ses razzias annuelles chez ses voisins, aux exécutions sommaires, aux boissons alcooliques, etc. Ayant accepté le protectorat anglais, il alla en Angleterre et surprit chacun par sa dignité, mais il ne voulut pas se donner à Jésus-Christ ; il resta païen, il resta polygame. A un moment donné, en 1895, lors d'un réveil religieux à Léalouyi. Lewanika fut sur le point de se décider ; tous les gens s'y attendaient, mais au dernier moment, il renvoya, et il mourut en païen, le 4 février 1916, après 38 ans de règne, au grand triomphe de tout le parti païen.

Cependant son pays était profondément modifié ; la lumière s'était levée dans les ténèbres : écoles, chapelles, scierie avaient été construites, de sorte que l'Evangile, apporté par la Mission de Paris, avait répandu ses bienfaits sur la population tout entière.

L'événement le plus important fut, en 1891, la conversion de Litia, le prince héritier. Après un séjour chez Khama, roi chrétien

des Bamangwatos, peuple voisin, et peu avant la mort de Mme Coillard, Litia déclara publiquement, dans un culte à Léalouyi, qu'il était converti. « La petite assemblée était sous l'empire d'une impression solennelle. Nokamba (jeune membre de la famille royale) éclata en sanglots. L'émotion nous gagna et nous bouleversa. »

Litia fut baptisé en 1891, Il retomba dans le paganisme, mais fut réadmis dans l'Eglise en 1914, deux ans avant la mort de son père.

Ainsi, de vrais miracles s'étaient produits sur les rives arides et sanglantes du Zambèze, au milieu d'un des peuples qui, de l'avis de tous les voyageurs, est un des plus dégradés de l'Afrique.

Quand Litia devint roi, tous les chrétiens furent préoccupés. Que ferait-il ? Le jour de son installation (je ne dis pas couronnement, puisqu'il n'y avait pas de couronne), il prononça un discours solennel, qui contenait ces paroles : « L'instruction et la prédication de l''Evangile, c'est le salut du pays. Moi, je crois en Dieu ; d'autres adressent leurs prières ailleurs. Eh bien, j'affirme que notre seule force est en Dieu... » Plus loin, il s'écria encore : « Je me lie par un serment ; je ne boirai pas de bière ; on me couchera dans ma tombe sans que j'en aie bu. »

M. le missionnaire Théophile Burnier écrivait après cette cérémonie : « Le nouveau règne commence. A la garde de Dieu ! A nous de soutenir Litia par nos prières. »

Les débuts furent émouvants ; Litia traitait sa femme comme une égale ; il était fidèle ; c'était un sujet de vive reconnaissance pour les missionnaires.

Malheureusement, après onze ans de règne, en 1927, Litia (ou Yéta, comme on l'appelle aussi) retomba dans les coutumes immorales de ses ancêtres païens. Lors de sa première chute, il est resté quatre ans en dehors de l'Eglise. Dieu veuille le ramener cette fois encore pour être un exemple à tout le peuple des Barotois !

Mais chez nous, combien de Lewanika qui ne se convertissent jamais, combien de Litia qui retombent dans l'incrédulité et l'inconduite ! Sois fidèle jusqu'à la mort et je te donnerai la couronne de vie !

G. Secrétan, pasteur.


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Jacob en Egypte.

(Genèse 45 : 25-28 ; 46 : 1-7 ; 47 : 1-12).

Jacob reçu par Joseph

 

Les cheveux blancs sont une couronne d'honneur ; c'est dans le chemin de la justice qu'on la trouve. (Prov. 16 : 31). Respectons Joseph de l'avoir compris en témoignant beaucoup d'égards à son vieux Père. Respectons aussi Jacob qui, malgré ses défaillances, a mérité ce témoignage. L'Ecriture Sainte recommande d'honorer la vieillesse. Souvenons-nous en. Un écrivain religieux l'à très bien dit: «Jeunesse irrespectueuse (de la vieillesse) n'est pas seulement synonyme de jeunesse vulgaire, mal élevée, mais de jeunesse affadie, dépravée, poltronne... Aux époques où les peuples se corrompent et perdent leur vitalité, les vieux baissent dans l'estime publique. La famille et la société leur font un sort effacé, les poussent dans les coins, les rudoient et méprisent leurs avis. » (Ch. Wagner).

Heureuses les familles où les anciens sont respectés, où l'on se souvient que des cheveux blancs ne sont pas un signe de décrépitude, mais une « couronne » ! Il n'y a rien de plus beau au monde que l'homme dans la force de l'âge qui, avec un respect filial, appelle un vieillard papa ou maman et vient solliciter un conseil... rien de plus beau que l'enfant qui s'ingénie à mettre un peu de bonheur dans l'existence, souvent monotone, de grand'mère ou de grand-père...

Cela dit, revenons à Jacob qui, sur l'invitation de son fils Joseph, s'est décidé, non sans peine, à se mettre en route. Les personnes âgées ne se déplacent pas volontiers : il faut pour cela un motif bien impérieux ! Le désir de revoir le cher enfant qu'il croyait perdu explique l'importante décision de Jacob. La caravane s'est mise en route, elle a maintenant gagné l'Egypte. Ce n'est pas un voyage de quelques personnes, on peut vraiment parler de l'émigration d'une tribu... Joseph, d'accord avec son souverain, a réservé aux nouveaux arrivants les belles campagnes de Gosen. Si l'attitude de Joseph lut remarquable, celle du Pharaon ne le fut pas moins. Quoi de plus touchant, en effet, que l'entrevue au cours de laquelle le vieux patriarche fut présenté au roi d'Egypte. La déférence de ce dernier, qui s'incline devant des cheveux blancs... bref, la noblesse du geste de ce puissant monarque, qui accepte d'être béni par le vieillard, est difficile à exprimer ! Les nouveaux venus ont accepté les propositions qui leur ont été faites. Voici maintenant les frères de Joseph installés, avec leur vieux père, dans les terres qui leur ont été assignées. Jacob, après un séjour de dix-sept ans dans cette nouvelle résidence, qui devait être la dernière, mourut entouré de ses fils auxquels il put faire encore ses dernières recommandations. Son voeu d'être enseveli « au pays de ses pères » fut respectueusement pris en considération par Joseph.

Jacob. Une grande figure des annales israélites, un homme qui eut ses faiblesses, mais un croyant. Si nous avons étudié son histoire, c'est pour être mieux persuadés que : Dieu lui-même a dit :

Je ne te laisserai point et je ne t'abandonnerai point. (Hébr. 13 : 5).


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Les deux soeurs.

 

- Soyez sages pendant, un moment, je vais vite chercher votre souper. La cuisinière doit sûrement l'avoir terminé, déclare nurse.

Marion aux deux petites soeurs qui jouent tranquillement sur l'épais tapis, en face de la cheminée éclairée d'un feu brillant. Les longues flammes d'or: rouge mettent de chauds reflets sur les délicats meubles d'enfants de la riche nursery, et parfois aussi, sur les petites robes de dentelle des jumelles. Elles se ressemblent d'une façon frappante, les deux petites soeurs : mêmes longues boucle-d'or, mêmes larges yeux bleus pétillants de malice.

Regards d'enfants heureuses,, choyées, très riches...

Pendant que Pammy brosse avec une vigueur un peu effrayante la chevelure bouclée de sa poupée préférée, Killy, appuyée sur les coussins de soie aux teintes vives qui se promènent sur le tapis, feuillette d'un air ennuyé un grand livre d'images.

- Pammy, veux-tu me donner ma poupée, elle est à côté de toi.

- Tiens, et la jeune demoiselle envoie voltiger, sans beaucoup d'égards, la malheureuse poupée.

Attention, tu as failli la casser.

Pardon, mais je suis tellement occupée. Toi, ma chère fille, je te prie de rester tranquille, et la trop facilement irritable maman administre une magistrale paire de claques à la jolie poupée qui garde son sourire stupide.

- Je trouve ma fille bien plus jolie que la tienne, déclare Killy d'un ton mielleux, car la façon cavalière dont sa chère fille vient d'être traitée par son indigne tante, la rend amère.

- La tienne ! Mais non, puisque nurse Marion elle-même trouve ma fille beaucoup plus belle. D'abord, je la coiffe au moins trois fois par jour, et jamais je ne lui tire !les cheveux, tandis que toi, et Pammy lève ses yeux au plafond d'un air excédé...

- Et toi qui lui donne des douzaines de gifles par jour...

- Cela me regarde. Dans tous les cas, ma fille ne louche pas.

- La mienne louche ! Elle louche ! Tu ne sais puis ce que cela veut dire, d'abord.

- Oui, je sais. Et puis, quel affreux manteau tu lui as fait faire par la couturière. Du velours bleu foncé, avec de la fourrure noire. C'est horrible...

- Alors, que fallait-il mettre ?

- De la fourrure grise, comme le manteau de maman.

- Et toi qui as fait garnir de rouge le chapeau vert de la fille. C'est superbe !

- Tu m'énerves ! Après tout, occupe-toi de tes affaires, c'est bien suffisant pour quelqu'un d'aussi peu intelligent que toi.

- Fais de même.

- Non...

- Oui...

Quelques mots brefs, une série d'invectives, et la discussion tourna au tragique.

Debout sur l'épais tapis d'Orient, les deux petites soeurs s'arrachent frénétiquement les cheveux.

- Aïe... au secours !... !

- Be hu... hu hu...

Pif ! Paf ! Pif ! Un bref échange de gifles retentissantes, des griffures innombrables, et enfin, une volée de coups de poings...

- Que signifie ?... -

Lord et lady Wainlow sont là, près de la porte, et derrière eux, nurse Marion.

Les deux adversaires ont cessé brusquement la bataille et restent immobiles, les cheveux en broussailles, les jolies robes de précieuses dentelles déchirées, les joues couvertes de larmes amères et de larges griffures.

- Vous irez immédiatement au lit, sans souper. Nurse Marion, vous voudrez bien leur donner cinq minutes de délai, pas une seconde de plus. D'autre part, privation de dessert pendant un mois.

Au même moment, Trudi, la petite bonne, apparaît, portant avec précaution un grand plateau.

- Foilà fodre zouber, dit-elle avec un large sourire à l'adresse des deux petites soeurs.

- Emportez cela. Les enfants ne prendront rien ce soir.

- Fraiment, oh ! gomme c'est tommache... et la jeune bonne repart en adressant un regard plein de compassion à Killy et Pammy qui s'éloignent avec honte et se réconcilient dans leur commune humiliation...

- Pammy, il y avait du poulet et de la salade si jolie, toute verte.

- J'ai aperçu aussi une tourte au chocolat...

- Tant pis...

- Allons dormir...

 

Les deux petites soeurs se dirigent mélancoliquement vers leur chambre à coucher, suivies de nurse Marion. Lord et lady Wainlow se sont déjà retirés.

Seules, deux jolies boucles blondes, victimes innocentes des petites mains rageuses, reposent sur le tapis.

S. C.


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Enfance de Moïse.

(Exode 1 : 1-22 ; 2: 1-15),

Moïse et la fille de pharaon

 

A part l'interruption concernant le souvenir de la Pentecôte, le 19 mai, nous allons nous entretenir de Moïse et de son oeuvre jusqu'au 28 juillet prochain, C'est dire l'importance capitale du plus illustre personnage de l'ancienne Alliance.

Jeunes lecteurs et lectrices de ce résumé, un peu de bonne volonté: prenons tous l'engagement de ne manquer l'Ecole du Dimanche qu'en cas d'absolue nécessité. Nous ne le regretterons pas !

Le début de la prodigieuse carrière de Moïse vous est familier.

(La suite, vous le verrez, est moins connue). On se souvient, en effet de l'histoire de cette princesse égyptienne, fille du roi, qui, descendue avec ses suivantes au bord du fleuve pour s'y baigner, découvrit, à sa grande surprise, un enfant déposé dans un minuscule canot grossièrement fabriqué. Le bébé, un magnifique garçon, pleurait...

Rien, n'est-ce pas, n'émeut davantage que les plaintes d'un tout petit être, incapable de se défendre, incapable aussi d'exprimer ce qu'il ressent. Le coeur de la princesse en fut si touché qu'elle décida de recueillir le pauvre enfant abandonné. La grande soeur du nourrisson, qui se cachait dans le voisinage, eut vite fait d'indiquer l'adresse d'une bonne nourrice, qui devait être, on l'a deviné, la propre mère du petit garçon ! La persécution sévissait alors contre Israël ; un ordre implacable, émanant de l'autorité royale, qui redoutait l'influence des « étrangers » si généreusement accueillis naguère, avait condamné à mort les garçons nouveaux nés des Hébreux. Hélas, Joseph avait disparu et le pharaon régnant était loin d'avoir les bienveillantes dispositions de son prédécesseur. Providentiellement épargné, l'enfant fut d'abord confié à sa mère par la royale bienfaitrice, qui donna le nom de Moïse, c'est-à-dire K sauvé des eaux » à son petit protégé. Moïse subit ainsi successivement une double influence, celle de sa mère et celle de la cour royale. En d'autres termes, le jeune hébreu bénéficia d'une bonne éducation et d'une institution hors pair. Le grand mérite de l'enfant, qu'une si prodigieuse destinée attendait, fut de savoir profiter et de l'une et de l'autre.

Avant de commander, le futur chef avait appris à obéir. Ouvre ton coeur à l'instruction et tes oreilles aux Paroles de la sagesse. (Prov. 23 :12). Une carrière utile est réservée à ceux qui prennent au sérieux ce précepte, Pour ceux là s'accomplit la promesse : l'Eternel te gardera. (Ps. 121 :7).

Moïse a grandi, il est devenu un homme. La situation misérable de son peuple, cruellement traité, remplit son coeur d'indignation. Un jour, il voit un Egyptien martyriser un Israélite, il frappe sans mesure, l'Egyptien tombe, mortellement atteint. Ce crime, qui va condamner son auteur à l'exil, est profondément regrettable, mais on ne peut s'empêcher d'admirer Moïse qui, par amour pour les siens, a renoncé aux avantages d'une existence agréable et facile et qui peut-être, s'il avait consenti à renier ses origines, aurait été, comme le fut la carrière de Joseph, brillante et glorieuse.


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Jeanne d'Arc.

 

Il y a cinq siècles, le pays que nous appelons la France était divisé en plusieurs provinces qui obéissaient à des princes rivaux, en conflits perpétuels. C'est alors que la guerre dite de Cent-Ans semait partout la désolation. Le roi d'Angleterre prétendait régner sur les meilleures terres françaises en vertu d'un droit d'héritage, et Charles VII, roi de France, n'avait plus autour de lui qu'un petit groupe de fidèles, les unes après les autres, les villes de son royaume tombaient aux mains des ennemis.

Il allait être sauvé et rétabli dans ses droits par une jeune fille : Jeanne d'Arc.

Elle était née à Domrémy, village de Lorraine, fille d'un modeste paysan. Comme elle gardait les moutons de son père, elle entendit des voix mystérieuses qui lui annonçaient la grande mission à laquelle elle était destinée. Après beaucoup de luttes, elle finit par convaincre le châtelain de Vaucouleurs de la vérité de cet appel. Il lui donna le moyen de rejoindre le roi qui tentait en vain de reprendre aux ennemis la ville d'Orléans.

Jeanne fut reçue par le roi, mais elle eut beaucoup de peine à faire accepter son intervention. Finalement, comme la situation de l'armée était désespérée et qu'il ne pouvait rien arriver de pire, on lui permit de prendre le commandement de l'armée.

Elle endossa une armure de chevalier et prit en mains un étendard sur lequel on avait brodé les mots : Jésus-Maria, avec les fleurs de Lys de la France.

Jeanne marchait à la tête de l'armée, s'avançant courageusement jusqu'au milieu des soldats ennemis. Jamais elle-même ne tira !'épée ; elle entraînait les soldats de son roi vers le but, et son étendard leur servait de signe de ralliement. C'est ainsi que le 29 avril 1429, elle entra victorieusement dans la ville d'Orléans où la population l'accueillît avec enthousiasme. Dès lors, pendant plusieurs semaines, les victoires se succèdent, si bien qu'à l'automne de la même année, le roi de France était solennellement sacré dans la cathédrale de Reims et son autorité restaurée dans son royaume.

Ramener le roi victorieux sur le trône de France, c'était la mission de Jeanne. Elle était accomplie, l'armée avait été transformée par sa présence, tout le pays renaissait à l'espoir. Il semble qu'après cette heure de gloire le merveilleux pouvoir de Jeanne s'évanouit.

Elle continua la guerre, mais subit des échecs. Un jour vint où, prisonnière du duc de Bourgogne, ce dernier la livra aux Anglais qui occupaient Rouen.

On fit le procès de Jeanne, comme si elle avait été au service des mauvais esprits, on lui reprocha d'avoir porté un vêtement de chevalier, on l'accusa d'avoir violé les lois de l'Eglise.

Après un jugement inique, elle fut condamnée à être brûlée vivante sur la place de Rouen.

Les générations suivantes ont réhabilité Jeanne et l'Eglise romaine l'a mise au rang des saintes.

C'est tout naturellement pour le peuple de France que le souvenir de Jeanne d'Arc est précieux, mais à cause de la piété, de sa foi victorieuse et de son martyr, l'histoire universelle reconnaît en elle une de ses plus pures gloires.

R. E. D.

 


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Le noyau.

 

La mère avait acheté des prunes et comptait en donner à ses enfants après le dîner. Elles étaient sur une assiette. Jeannot n'avait jamais mangé de prunes : il ne cessait de les porter à son nez pour les flairer. Elles lui plaisaient fort. Il avait grande envie d'en goûter. Il passait et repassait devant l'assiette. Quand il n'y eut plus personne dans la chambre, il ne put pas résister ; il saisit une prune et la mangea. La mère, avant le dîner, compta les prunes et vit qu'il en manquait une. Elle le dit au père.

Le dîner terminé, le père dit : « Voyons, mes enfants, l'un de vous n'a-t-il pas mangé une prune ?

Tous répondirent : « Non ». Jeannot devint rouge comme une écrevisse et dit comme les autres : « Non, je n'en ai pas mangé ».

Le père dit alors : « Que l'un de vous ait mangé une prune, ce n'est pas bien. Mais ce n'est pas ce qu'il y a de plus grave. Ce qui est grave, c'est que les prunes ont un noyau, et si, ne sachant pas comment on mange les prunes, quelqu'un avale le noyau, il en meurt le lendemain. Voilà ce que je redoute. »

Jeannot pâlit et, dit : « Je ne l'ai pas avalé, je l'ai jeté par la fenêtre ».

Tout le monde rit, sauf Jeannot qui pleura.

Léon Tolstoï.


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La vocation de Moïse

(Exode 2: 16-25 ; 3: 1-15).

 

On se souvient dans quelles conditions Moïse avait quitté l'Egypte. Il en était parti la mort dans l'âme, profondément affligé en pensant à ses compatriotes qui gémissaient sous le poids d'une oppression cruelle. Moïse sentait qu'il y avait quelque chose à faire pour son .malheureux peuple. La tâche était surhumaine réduit à ses seules forces, Moïse n'aurait jamais osé l'entreprendre C'est dans la solitude d'Horeb que le grand Israélite devait entendre l'appel de Dieu auquel il n'a pas résisté...

Le premier geste de Moïse, en arrivant près d'un endroit habité. avait été de prendre la défense de quelques jeunes filles, malmenées par des bergers, qui les empêchaient d'abreuver leurs troupeaux. Cet acte, qui nous renseigne sur la nature généreuse de Moïse, allait avoir un mariage pour conséquence. En effet, recueilli chez Jéthro, le père des jeunes Madianites, le fugitif ne tarda pas à épouser l'une d'elles, Séphora. L'exilé avait trouvé un foyer ; mais son bonheur n'était pas complet, il n'oubliait pas ses compatriotes dans la peine.

Il y avait longtemps déjà que le beau-fils de Jéthro remplissait les fonctions de berger quand ses pas le conduisirent, avec ses troupeaux, sur les contreforts du Sinaï, en Horeb. L'endroit était favorable au recueillement, C'est là que Moïse eut la vision d'un buisson en flammes, par laquelle Dieu se manifesta à lui pour l'appeler à son service. Cette apparition reste mystérieuse. Comme celui qui en fut le témoin, faisons preuve de respect. Le dialogue échangé entre Dieu et son serviteur est profondément émouvant. Dieu dit combien il souffre du malheur de son peuple, mais il n'agira que si Moïse accepte de faire le nécessaire pour conduire Israël à la délivrance. Devant la tâche formidable qui lui est offerte, Moïse recule effrayé. C'est trop pour lui ! Mais, sa résistance dure peu : on ne résiste pas ,quand l'Eternel ordonne... Moïse ira donc, il affrontera les périls et sa force sera dans la conviction qu'il est un instrument entre les mains du Tout-Puissant.

Il ne dira pas : moi ; il dira : l'Eternel. L'Eternel, le Dieu de nos pères, m'envoie... (Ex. 3 : 15). Une vocation ne mérite cet admirable nom (vocation signifie appel) que dans la mesure où Dieu a parlé ! Alors on est fort. On n'est, toutefois, digne de se présenter au nom de l'Eternel qu'à une seule condition et la voici. Le serviteur de Dieu, quelle que soit sa situation, qu'il soit connu ou ignoré, grand ou petit - car des enfants aussi sont appelés à servir ! - doit prouver sa « vocation » par le service des autres. Moïse est un magnifique exemple parce qu'il illustre cette vérité exprimée par le Sauveur :

 

Quiconque veut être grand au milieu de vous sera votre serviteur. (Marc 10 : 48).