Perspectives effarantes
Selon certains, l'homme serait devenu adulte, mais dans ce sens qu'il n'aurait plus besoin de Dieu. De plus en plus on cherche à résoudre tous les problèmes de la vie et de la mort par des moyens scientifiques et techniques et il en est qui mettent tout leur espoir dans ce que l'on appelle la révolution biologique. On pense pouvoir modifier les facteurs de l'hérédité et agir ainsi sur l'humeur et les sentiments, sur l'état moral et mental de l'individu. Tout cela devrait permettre de supprimer les tares, d'accroître la mémoire, d'élever le niveau intellectuel et de produire en quelque sorte un surhomme, sinon un monstre! Il y a là quelque chose de prodigieux et d'angoissant à la fois.
Par ailleurs, on s'interroge sur les raisons du vieillissement et les causes de la mort, et des savants espèrent découvrir bientôt le secret de la longévité et envisagent même l'immortalité, non celle que nous donnerait un Dieu en qui ils ne croient plus, mais que le génie humain parviendrait à produire.
Régression morale
Mais, phénomène alarmant, plus l'homme progresse sur le plan scientifique et technique, plus il régresse moralement et spirituellement. Des hommes intelligents, experts dans les affaires du monde, sont souvent incroyablement ignorants des choses de Dieu. Les hommes qui ne croient pas en Dieu parce qu'ils ne l'ont jamais vu, ne raisonnent pas aussi logiquement qu'ils se l'imaginent. Il y a bien des faits qu'on ne reconnaît qu'à leurs conséquences et dont l'évidence n'est pourtant pas mise en doute. «Les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité se voient comme à l'oeil, depuis la création du monde, quand on les considère dans ses ouvrages,» disait l'apôtre Paul (Romains 1:20). Quiconque nie tout simplement l'existence de Celui en qui nous avons la vie, le mouvement et l'être (Actes 17:28) ne fait pas particulièrement preuve de maturité. Le monde ne s'est pas créé lui-même, pas plus que les pièces d'une montre ne se sont fabriquées, ajustées et mises en mouvement toutes seules! Et l'homme et l'univers sont autrement compliqués que la plus perfectionnée des montres électroniques. Mais les hommes parlent de façon blasphématoire des choses qu'ils ignorent (II Pierre 2.12) et en cela ils ne se comportent assurément pas en adultes.
Et que dire de la drogue, de l'immoralité et de la violence, des injustices, des enlèvements, des tortures et des crimes qui nous feraient plutôt croire au déclin de notre civilisation qu'à son apogée?
Puérilité
Est-ce qu'au milieu de cette génération les chrétiens au moins se conduisent-ils en «adultes»? Qui oserait l'affirmer? Ne sont-ils pas comme dépassés par les événements et pour la plupart plus ou moins paralysés dans leur témoignage? Leur connaissance biblique est souvent très primaire et ils ne sont pas en état de faire spirituellement face aux problèmes qui se posent. Ceux qui depuis longtemps devraient être des maîtres ont encore besoin qu'on leur enseigne les premiers rudiments des oracles de Dieu (Hébreux 5:12), qu'on leur serve des bouillies au lieu de la nourriture solide. Paul reconnaît qu'il avait autrefois pensé, raisonné et parlé
comme un enfant, mais lorsqu'il était devenu homme, il fit disparaître ces «enfantillages» II Cor. 13:11). C'est à quoi nous devons aussi tendre. Ne soyons plus des «gamins», mais soyons des hommes II Cor. 1 6: 1 3). Abandonnons toute pensée vaine et tout raisonnement puéril, ne restons pas des enfants par rapport au jugement II Cor. 14:20), mais que nos facultés soient exercées au discernement du bien et du mal (Héb. 5:14).
Ne ressemblons pas aux disciples qui discutaient entre eux pour savoir qui était le plus grand (Marc 9:34), ou aux Galates qui s'entre-dévoraient et se détournaient facilement de l'Evangile pour retourner aux faibles et pauvres rudiments précédemment rejetés (Cal. 4:9; 5:15), ou aux Corinthiens au milieu desquels régnait une grande immoralité II Cor. 5:1) et des divisions II Cor. 1:12; 3: 1). On comprend que devant un tel état de choses l'apôtre craignit parfois d'avoir travaillé en vain (Cal. 4:11). Que donc l'orgueil et la susceptibilité, la vanité, la jalousie et toute espèce de méchanceté disparaissent du milieu de nous. Que nous réalisions la crucifixion de notre vieille nature pour que paraisse l'homme nouveau (Col. 3:9-10), l'adulte en Christ. Paul visait à l'état d'hommes «faits», à la,mesure de la stature parfaite de Christ (Eph. 4:13) et il disait aux Galates qu'il éprouvait les douleurs de l'enfantement, jusqu'à ce que Christ soit formé en chacun (Cal. 4:19). Ne nous contentons pas de moins, ne vivons pas une vie chrétienne au rabais. Vivre en adulte, c'est vivre en Christ, au point que l'on puisse dire: «Ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ qui vit en moi» (Cal 2:20).
Maturité spirituelle
Mais pour vivre cette vie d'adulte spirituel il faut aussi apprendre à mettre si confiance entièrement en Christ. Nous sommes non seulement sauvés par la foi en son sacrifice expiatoire, mais nous devons aussi marcher par la foi en nouveauté de vie. Or, notre foi est souvent si chancelante et si calculée! Mais quiconque doute est semblable au flot de la mer que le vent agite et soulève; c'est un homme irrésolu et inconstant (Jacq 1:6-8). Nous ne devrions pas être des enfants flottants et emportés à tout vent de doctrine (Eph. 4:14). Le monde a besoin de points de repère, de bouées bien ancrées, car il s'en va à la dérive au gré des vents, parce que son équipage s'est mutiné et a rejeté son capitaine. Il est dans le vent, mais dans quel vent? Il est conditionné et manipulé sans que les masses en soient conscientes. Il est vrai que certains réagissent avec passion et violence en s'attaquant à «notre» société de consommation, mais sans pouvoir offrir quelque chose de meilleur.
Tout cela nous montre clairement que l'homme n'a pas encore atteint la «majorité» à laquelle il aspire. On pourrait parfois plutôt croire qu'il est en train de retomber dans l'enfance. Cela n'a d'ailleurs rien d'étonnant, car celui qui croit pouvoir se passer de Dieu et qui met sa confiance en l'homme ne peut manquer de s'égarer, et il connaîtra désenchantements et désarrois jusqu'au jour où il prendra conscience des réalités spirituelles et où il retournera à Dieu.
Et c'est dans un tel monde que le chrétien est appelé à vivre et à témoigner. Il faut ici autre chose que d'aller régulièrement aux cultes et aux réunions, que de chanter des cantiques, que de prier pour les âmes perdues et d'assister à des campagnes d'évangélisation. Il faut autre chose que de donner un peu de son temps et de son argent, quoique toutes ces choses aient leur valeur et leur utilité. Mais il faudrait avant toute autre chose l'engagement, le don de sa personne. Chaque véritable enfant de Dieu devrait être d'une manière ou d'une autre un évangéliste, un pasteur ou un maître pour son prochain. Mais comment le deviendrait-il sinon en s'y préparant sérieusement au sein de son église, par la prière, la méditation et l'étude de la Parole de Dieu, et en s'y exerçant pratiquement à chaque occasion! Le chrétien accompli est un chrétien instruit dans les choses de Dieu, convaincu des vérités bibliques, engagé de tout coeur dans le bon combat, comprenant son temps, aimant son prochain, quel qu'il soit, et par-dessus tout son Seigneur. Voilà le genre d'hommes et de femmes qu'il faudrait de nos jours pour travailler au progrès de l'Evangile dans le monde. Qui se lèvera, qui voudra ainsi vivre en adulte sa vie chrétienne?
Jean Hoffmann
La Bonne Nouvelle 6/9 1
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