Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Archéologie

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Abraham dans l'histoire 

Depuis bientôt un siècle, les fouilles du Proche-Orient et les connaissances de tous ordres qu'elles ont apportées permettent d'éclairer de façon directe les données fournies par la Bible sur les patriarches. Ce que nous font ainsi connaître les monuments et les textes autres que bibliques permet de les bien situer dans leur milieu, donc de les mieux comprendre.



Les Villes. 

Avec les fouilles d'El-Muqayyer, près du golfe Persique, Ur patrie d'Abraham nous est fort bien connue: ses remparts et ses canaux, ses rues et ses maisons sont sous les yeux du visiteur de 1969: sa ziggurat (temple à étages) est l'une des mieux conservées. Cité marchande et industrielle. Ur accumulait les richesses venues des pays lointains.

De leur côté, les fouilles anglo-turques de 1951 nous ont révélé Haran, ce centre commercial important de la Mésopotamie du Nord-ouest, au croisement des routes caravanières allant de Babylone vers la Syrie, l'Asie Mineure et l'Égypte, fut, on le sait, la première étape dans la vie errante du grand patriarche.


Les peuples. 

Une question débattue depuis fort longtemps est celle de l'origine du nom même d'Hébreux. On connaît par les textes les Hapiru, et la tentation est forte de les identifier avec le clan d'Abraham. Mais il y a des inconnues qui empêchent de le faire sans nuance: les Hapiru, que l'on voit apparaître comme des «pionniers» dans l'Asie Mineure du XIXe siècle avant J.-C. comme des «mercenaires» en Mésopotamie aux XVllle et XVlle ou encore au XVlle, à Mari, comme des «brigands», sont-ils des esclaves au service de l'État ou composent-ils des bandes rebelles qui combattent celui-ci? Peut-être faut-il voir dans les Hébreux de la Bible une simple fraction de ces Hapiru des textes mésopotamiens.

Ceux-ci nous parlent également des «Benjaminites»: ils constituent un groupe assez turbulent dans la région de Haran. Ce sont des tribus moutonnières habituellement nomades, mais momentanément sédentaires. La migration d'Abraham se situerait assez bien dans ce contexte.

Les Amorrhéens ou Amorrites sont mentionnés en Palestine à l’époque des Patriarches: près de Jérusalem et dans le sud du pays. Textes mésopotamiens et égyptiens connaissent le pays d'Amurru qu'ils situent dans la région montagneuse de Syrie ou sur la côte syrienne, sans doute s'agissait-il, pour le rédacteur biblique, d'étrangers infiltrés en Canaan.

La Bible parle encore des Héthéens ou Hittites. C'est à eux qu'Abraham achète la grotte de Makpéla pour y enterrer Sara avant d'y prendre place lui-même: c'est parmi ces étrangers qu'Esaü choisit certaines de ses femmes. Leur empire ne nous est connu que depuis un siècle environ. Les 20.000 tablettes cunéiformes découvertes à l'emplacement de leur capitale Hattu, aujourd'hui Boghaz-Keuï, nous renseignent sur la première période de leur expansion qui correspond à l'époque patriarcale.


Les institutions.

Jadis on se référait au code d'Hammourabi. grand roi de Babylone, parce qu'on avait cru, d'après le texte gravé sur une stèle actuellement au Musée du Louvre, pouvoir identifier ce monarque à l'Amraphêl ravisseur de Loth et de sa famille (Genèse. chapitre 14) ; mais les progrès de l'étude des langues ont permis de constater que cette identification à travers les noms était insoutenable. Par contre, à Nuzi, localité mésopotamienne fouillée de 1925 à 1931. 

4 000 tablettes ont été retrouvées, qui nous renseignent sur la vie de la cité et nous expliquent bien des coutumes patriarcales très antérieures à la loi de Moïse.

Ainsi une personne sans enfant peut-elle adopter un étranger (Genèse. chapitre15). Le droit pour l'épouse stérile de donner à son mari l'une de ses servantes, sans que l'enfant de cette dernière puisse être expulsé, est codifié:

«Si Gilimninu enfante. Shennima son mari ne prendra pas une autre femme; mais si Gilimninu n'enfante pas, elle donnera en mariage à Shennima une femme du pays de Lullu (une esclave).» On comparera à ce que rapporte le chapitre 21 de la Genèse. Mais qu'on lise la suite: «Gilimninu ne chassera pas la descendance de l'esclave.» On voit que Sara agit illégalement: elle parle en femme jalouse et dépitée. L'intervention de Laban qui donne en mariage sa soeur Rébecca (Genèse, chapitre 24) trouve son pendant dans une déclaration d'un contrat de Nuzi: 

«Avec mon consentement, dit la jeune fille, mon frère m'a donné comme femme à untel.» Même remarque pour la possession des idoles familiales en relation avec le droit à l'héritage (Genèse.

chap. 31. vers. 19): il s'agit de petites statues, représentant de bons génies destinés à écarter de la famille les démons malfaisants; à Nuzi également elles passaient à l'héritier principal et constituaient un titre en faveur de l'héritage futur.

L'existence du droit d'aînesse n'est pas non plus ignorée: l'aîné a juridiquement droit à une double part, mais il peut s'en dessaisir, même en faveur d'un étranger (voir Genèse chap. 25, vers. 29 et suivants).

Il est vrai qu'à côté d'identifications certaines, il y a parfois de simples analogies; parlons donc plutôt d'un même «climat» sur le plan social et juridique. Mais cela suffit pour rattacher la vie des patriarches à un fond historique bien déterminé.

J. DHEILLY

© En ce temps-là, la Bible N° 2 page IV


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L'âge fabuleux des patriarches

D'après le chapitre 5 de la GENÈSE, Adam aurait eu un fils à l'âge de 130 ans, et il aurait encore vécu 800 ans.

La série des patriarches d'avant le déluge, qu'inaugure Adam, décidément nous étonne.

Celle des patriarches d'après, guère moins:

une série de cas semblables; Abraham lui-même est centenaire lorsqu'il devient père d'Isaac, et il meurt à 175 ans. Il y a donc un problème: ces hommes qui vécurent en des temps très reculés ont-ils joui d'une longévité exceptionnelle, nettement supérieure à la nôtre? C'est peu probable. Mais alors comment expliquer les affirmations de l'auteur biblique?

Au cours des âges, diverses explications ont été fournies.

Certains n'ont vu là qu'une confusion entre les années et les mois lunaires, ceux-ci ne comptant guère que 29 jours. Mathusalem n'aurait alors vécu que 78 de nos années. Malheureusement, cette solution commode amènerait à trouver tout naturel que de nombreux patriarches aient été pères avant l'âge de la puberté: ainsi Abraham par exemple aurait eu 8 ans à la naissance d'Isaac. Ce qui n'est pas très vraisemblable. De plus, le récit du déluge (chap. 8 de la Genèse, vers. 5 à 14) contredit ouvertement cette hypothèse: «Le 27e jour du second mois...»

Mois et jours sont nommés comme tels, et la seule lecture du texte permet de conclure que les années du récit sont des années lunaires, composées de mois de 27 jours au moins, et probablement analogues à celles des Chaldéens: douze mois de 29 ou 30 jours.

D'autres ont considéré qu'après la création comme après le déluge, Dieu avait fort bien pu faire bénéficier l'homme d'une durée d'existence supérieure à celle que nous connaissons afin que la terre se peuplât ou se repeuplât plus rapidement. On peut déceler une intention de cette nature dans les versets 1 à 3 du chapitre 6 de la Genèse: «Après que les hommes eurent commencé à se multiplier sur la terre... Yahvé dit:... le temps de l'homme ne sera plus que de cent vingt ans.» Certes, rien n'est impossible à la toute-puissance de Dieu, dès qu'on admet que Dieu est Dieu: le maître de tout.

D'autres enfin ont remarqué que pour nombre de patriarches postérieurs au déluge en tout cas, l'écart n'était pas si grand entre leur âge et celui de certains hommes de l'époque historique dont la vie simple et saine pouvait se comparer à la leur, les plus avisés signalent que dans la seule République du Daghestan en Union Soviétique, quelque 643 centenaires sont aujourd'hui recensés sur les 1266 000 habitants de ce territoire. La palme de la longévité revenant à Chirali Baba Mouslinov qui, à l'heure où nous écrivons, porte gaillardement ses 163 ans; ce n'est pas si loin en somme des 175 ans d'Abraham.


Les âges cités n'ont pas un caractère historique rigoureux

Nous avons cependant consulté à ce sujet un des meilleurs spécialistes de la Bible, l'Abbé J. Dheilly,

professeur à I'Institut catholique de Paris, et voici ce qu'il en pense: «Un certain nombre de remarques préliminaires s'imposent.

Tout d'abord le texte biblique du chapitre 5 de la Genèse qu'a suivi le traducteur de «En ce temps-là», le Journal de la Bible, celui d'ailleurs qu'avait retenu saint Jérôme pour sa traduction latine (Ve siècle), est le texte reconnu comme officiel par les juifs depuis le début de l'ère chrétienne.

Mais il en est d'autres. Or si l'on consulte le Pentateuque samaritain (exemplaire qui se trouve à Naplouse, et qui fournit la copie tardive d'un autre texte hébreu), ou la traduction grecque des Septante, qui suppose elle aussi un texte différent du nôtre, on se trouve en présence de données chronologiques variables. Ici Mathusalem aurait vécu 720 ans au lieu de969; là Hénok aurait eu, à la naissance de Mathusalem 165 ans au lieu de 65. Cela entraîne dès l'abord une certaine réserve sur le caractère historique rigoureux de ces données.

En outre on constate dans le texte grec que, d'Adam à Lamek, l'âge des Patriarches, à la naissance de leur fils, va régulièrement en diminuant, de même que la durée globale de leur existence à une ou deux exceptions près.On peut donc légitimement penser à un certain caractère conventionnel de la présentation. 


Dix générations pour 432.000 ans!!!

Ajoutons que la Bible n'est pas le seul document à présenter de telles généalogies étonnantes. Dans l'immense littérature babylonienne que les fouilles ont amenée à la lumière trois textes nous offrent des listes de rois d'avant le déluge avec des durées de règne extraordinaires: ainsi la liste de Bérose (prêtre et historien chaldéen, vers 300 av. 

J.-C.) comporte dix noms pour couvrir une durée de 432 000 ans! Si l'on songe que la littérature biblique plonge dans celle de Mésopotamie par ses racines les plus anciennes, l'impression s'affirme d'un procédé littéraire.

Dernière remarque: le texte du chapitre 5 de la Genèse a été rédigé à l'intérieur des cercles sacerdotaux de l'exil à Babylone.

Il présente donc, comme toutes les productions bibliques de l'époque, un souci très marqué d'enseignement religieux. 

Il est maintenant possible d'apporter une solution valable à ce problème.

Longue vie à ceux qui sont fidèles!

L'auteur biblique, au début de la Genèse, a présenté à son lecteur la fresque de la création (chap. l), où Dieu donne la vie à l'homme.

Après quoi il montre cette vie transmise de génération en génération. Mais le fait traditionnel du déluge l'amène à faire une distinction entre les hommes fidèles à Dieu et les pécheurs. En fonction des idées courantes, il envisage une longévité anormale comme un don de Dieu accordé à la fidélité de l'homme; mais en même temps il insinue que la vie humaine diminue avec les progrès du mal. 

Or la littérature mésopotamienne lui fournissait des listes de noms avec une durée de vie extraordinaire. Il les adopte donc, mais en les schématisant encore davantage et en les ordonnant à la leçon religieuse qu'il voulait dégager.

Dans la ligne du dépôt de la foi traditionnelle dont les cercles sacerdotaux de l'exil assuraient la garde assurément, chacun est libre de conclure à sa guise. Pour aucune des confessions qui se réclament de la Bible, l'âge des patriarches n'est un article de Foi.

© En ce temps-là, la Bible No 3 pages VII- VIII.


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L'armement des "vaillants" de jadis

Il est assurément difficile de se faire une idée exacte de l'armement de ceux que les textes bibliques appellent volontiers les «vaillants», les guerriers d'Israël. D'abord parce que les temps où les descendants d'Abraham durent prendre les armes contre leurs ennemis s'étendent sur plusieurs millénaires; ensuite parce que les indications fournies par les auteurs du Livre sont sommaires et qu'aucun monument israélite, en raison des interdits de la Loi, n'a jamais montré d'images de combattants pas plus que d'autres hommes, méritants ou non.

Si l'on découvre des Sémites qui pourraient être d'Israël dans les reliefs ou peintures des autres peuples, il s'agit généralement de simples visiteurs, de suppliants ou de captifs. Il faut donc recourir aux analogies avec ce qu'on connaît des voisins dans le temps ou l'espace, procédé qui n'est certes pas absolument sûr, mais pas non plus sans valeur; on «emprunte» volontiers ses armes quand on en a besoin; même, et surtout, à ses adversaires.

L'arme offensive par excellence pendant la plus grande partie de ce qu'il est convenu d'appeler «les temps bibliques» était la hèrèb, poignard ou courte épée (JUGES, chap. 3, vers. 16). Elle était portée dans un fourreau(1er SAMUEL, chap. 1 7, vers. 51; 1er CHRONIQUES, chap. 22, vers. 27) que l'on attachait à la ceinture (2e SAMUEL, chap. 20, vers. 8). 

Une autre arme est souvent mentionnée : la pique ou la lance (romah), de la taille d'un homme environ. À l'origine c'était une simple hampe pointue à laquelle on adapta une tête de métal maintenue par une sorte de douille. Elle figure dans l'arsenal que mentionne le 2e livre des CHRONIQUES (chap. 11, vers. 1 2; chap. 14, vers. 7; chap. 25, vers. 5) et celui de NÉHÉMIE (chap. 4, vers. 10). 

De cette arme de corps à corps, il faut distinguer la hanit, plus légère, qui pouvait servir d'arme de jet et dont l'extrémité inférieure était chaussée d'un talon de fer permettant de la ficher en terre. C'était l'arme favorite de Saül (1er SAMUEL, chap. 1 9, vers. 9; chap. 26, vers. 7). D'après le 2e livre des CHRONIQUES (chap.23, vers. 9) la garde du Temple était équipée de javelots de ce genre.

Dans toutes les civilisations, l'arc (qeset) est apparu très tôt, assorti ou non du carquois. D'abord arme de chasse, il fut hélas vite utilisé aussi pour la guerre. Jonathas, l'ami de David, le manie avec adresse (SAMUEL,chap. 20, vers. 20). Le premier livre des CHRONIQUES cite des archers benjaminites parmi les preux de David.

L'emploi de cet engin à longue portée s'est vraisemblablement généralisé après l'adoption des chars de combat dont l'emploi rendait le corps à corps plus difficile (1er SAMUEL, chap. 31, vers. 3; 1er ROIS, chap. 22, vers. 32-34; 2e ROIS, chap. 9, vers. 24).

Il faut naturellement mentionner la fronde (qèlà), bien connue sur les champs de bataille de l'Antiquité, et pas seulement entre les mains de David devant Goliath (1er SAMUEL, chap. 17, vers. 40; 2e ROIS, chap. 3, vers.25). Les projectiles qu'elle lançait étaient généralement des cailloux choisis ou spécialement préparés, de la taille de grosses olives (2e CHRONIQUES, chap. 26, vers. 14).


Les armes défensives

À ces armes offensives s'ajoute l'armement défensif essentiellement constitué par diverses sortes de boucliers, casques et cuirasses.

Le grand bouclier enveloppant (sinnah) est le plus souvent réservé aux porteurs de lance (1er CHRONIQUES, chap. 12, vers. 9) et un plus petit (mâgen) aux porteurs d'épée et d'arc (1er CHRONIQUES, chap. 5, vers. 18). Un texte du 2e livre des CHRONIQUES (chap. 14, vers. 8) est significatif à cet égard: les hommes de Juda sont, d'après le texte hébreu, dotés du sinnah et de la lance, et les hommes de Benjamin du mâgen et de l'arc.

On avait ainsi en quelque sorte une infanterie lourde et une infanterie légère.

Le petit bouclier était de forme ronde, d'où le nom de «rondache» qu'on lui donna, dans notre langue bien sûr. Les boucliers de parade étaient en bronze et souvent plaqués de métal précieux; mais au combat on utilisait plutôt des boucliers en cuir.

Le casque, de cuir lui aussi, ou de bronze, est d'origine étrangère. Cependant Ozias en équipe ses troupes (2e CHRONIQUES, chap. 24, vers. 14). Et la cuirasse enfin vient elle aussi de loin, introduite sans doute dans le Proche-Orient par les Hittites. Sous Néhémie, les défenseurs de Jérusalem sont pourvus de l'un et de l'autre (NÉHÉMIE, chap.4, vers.10).

Georges DAIX


© En ce temps-là, la Bible No 37 pages II- III.


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L'AU-DELA ET LE PRIX DE LA VIE

Longtemps Israël s'en est tenu aux antiques conceptions du «shéol» (mot d'origine inconnue, qui désigne le séjour des morts), puis, la réflexion des mystiques a suggéré qu'il y avait autre chose dans l'au-delà. La persécution sanglante, au temps des Maccabées, fut l'occasion d'un pas important vers la pleine lumière de la révélation.

Cette croyance est commune à tous les Sémites: dans un lieu souterrain, ténébreux et froid, vont tous les défunts, bons ou mauvais; les ombres, dépourvues de corps, ne peuvent plus avoir d'activité proprement humaine; toutes, au «shéol», mènent une vie au ralenti, sans joie, ni souffrance, sans intérêt ni connaissance.

Si les responsables d'Israël ont repoussé les spéculations égyptiennes sur une vie meilleure outre-tombe, c'est que ces doctrines étaient souvent matérialistes et engendraient des pratiques magiques, aussi bien que le danger de diviniser les morts.

Cependant, sous l'influence des, prophètes, la religion devient de plus en plus personnelle, et le problème de la rétribution se pose avec une acuité grandissante: où et quand s'exercera la justice de Dieu? On commence à soupçonner que, même au «shéol», les impies, les grands ennemis de Dieu et du bien, sont de quelque manière poursuivis par leurs crimes (Isaïe, chap. 14, vers. 9-10).

Parallèlement et par contraste, les fidèles pieux, qui voudraient jouir à jamais de l'intimité divine, se rappellent volontiers que deux grands saints pour le moins demeurent dans cette intimité, car Dieu les a «pris» tout entiers auprès de lui: Hénok et Élie (Genèse, chap. 5, vers. 24; 2e Rois, chap. 2, vers. 11), auxquels on joint volontiers Moïse (Épître de Jude, vers. 9). Dieu juste, aimant et tout-puissant, ne fera-t-il rien pour ceux qui l'aiment?

Des certitudes individuelles s'affirment au Ille siècle: il y a une rétribution dans l'autre monde. Deux psalmistes pour le moins espérant fermement être «pris» eux aussi dans la gloire: Psaume 48, vers. 16 et Psaume 72,vers. 24. Le Oohélèth, ou Ecclésiaste, en a entendu parler (chap. 3, vers, 1921); Ben-Sira de même, l'auteur de l'Ecclésiastique (chap, 11, vers. 28); Tobie (chap. 4, vers. 7-11) semble y faire allusion.

Ces premières certitudes sont encore bien sporadiques. Leurs tenants sont portés à interpréter au sens individuel ce que les prophètes annonçaient parfois du peuple (Ézéchiel, chap. 37) ou du Messie (Isaïe, chap. 53). Ces premières lumières vont se répandre sur presque tout Israël au temps de la persécution maccabéenne.


Les «vivants» d'outre-tombe près de Dieu

L'édit rendu par Antiochus IV en 167 a inauguré une persécution proprement religieuse, qui devait faire de nombreux martyrs et provoquer la guerre sainte conduite par les Maccabées (1er Maccabées, chap. 1 et 2e, chap.6 et 7).

À la faveur de ces événements se répand rapidement la certitude des sanctions d'outre-tombe: si Dieu reçoit de ses fidèles la plus grande prouve d'amour, celle du sacrifice de la vie (donnée par des vieillards comme Éléazar, par des jeunes gens comme les sept frères, par des bébés et leurs mères), ce ne peut être pour les rejeter dans un «shéol» sans bonheur et même sans connaissance de Dieu.

Parce qu'il est souverainement juste, Dieu doit récompenser les siens et châtier les impies. Mais on ne conçoit cet acte de justice que sous condition de la résurrection: c'est l'homme tout entier qui est intéressé à ces sanctions, puisque sans le corps on ne peut jouir, ni souffrir, ni prier.

Aussi bien croit-on logiquement d'abord à la résurrection pour asseoir cette certitude de la rétribution éternelle et du bonheur près de Dieu.

C'est ce qu'exprime, en 165 ou 164, le livre de Daniel (chap. 12, vers. 1-3).Les martyrs partageaient alors cette conviction, comme l'attestent les propos qu'ils tiennent (Maccabées, chap. 7, vers. 9-14 et la suite);il semble même, selon le verset 36 du chapitre 7 du 2e livre des Maccabées que le bonheur mérité par les martyrs leur soit accordé sans plus tarder. En conséquence, on perçoit mieux le sens de la souffrance (Maccabées, chap. 7, vers. 32-38): elle est une expiation, une purification pour la vie éternelle et même une rédemption au profit des autres. On peut donc et l'on doit prier pour les défunts; on juge possible d'intervenir pour leur bonheur, ce qui suggère la croyance en une sorte de purgatoire (Maccabées, chap. 12, vers. 39-46). Enfin les saints intercèdent pour leurs frères d'ici-bas, selon le songe que raconte à ses hommes Judas Maccabée: Jérémie et Onias défendent au ciel la cause d'Israël (Maccabées, chap. 15, vers. 11-16); même si ce songe n'est qu'une parabole, il en appelle du moins à une croyance généralement admise.

Ces révélations illuminant presque tout Israël, car il faut en excepter les Sadducéens, prêtres de haut lignage (Marc, chap. 12, vers. 1827; Actes, chap. 23, vers. 8). Elles seront complétées, au siècle suivent, quelque cinquante ans avant Noël, par le livre de la Sagesse, surtout dans ses chapitres 1 à 5.

R. TAMISIER p.s.s.

© En ce temps-là, la Bible No 38 page I.


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Babylone

Jadis, «l'orgueil des Chaldéens» et qui ne fut jamais rebâtie dans la suite des générations (Isaïe, chap. 13, vers. 19-20)

Au coeur de la plaine mésopotamienne, à quelque 160 kilomètres au sud-est de Bagdad, la capitale irakienne, les eaux sombres de l'Euphrate reflètent des ruines chaotiques et désolées que le sable et le vent disputent à la curiosité des touristes. Malgré la pauvreté de ces vestiges de briques qui peuvent décevoir le visiteur moderne, le site fut identifié dès le XIle siècle de notre ère: c'est bien celui de la grande Babylone qui fit l'admiration et la terreur du monde antique, au temps où le Dieu d'Israël châtiait par elle les infidélités de son peuple.


Aujourd'hui les ruines sont largement dégagées, mais seul le visiteur averti peut se faire, à partir de ce qu'il voit, une idée de la cité prestigieuse de Nabukodonosor, le grand bâtisseur (DANIEL, chap. 4, vers. 27). La ville s'élevait alors sur les deux rives de l'Euphrate, solidement défendue par deux lignes d'enceintes doubles pourvues de tours. Le rempart intérieur, long de 8 km, était constitué de deux murs, l'un large de 6,5 mètres, l'autre de 4 environ.


Tout autour courait un fossé de briques et de bitume empli des eaux du fleuve. Plus à l'extérieur se dressait une autre muraille, longue de 18 km: elle mettait à l'abri les paysans d'alentour, à la première alerte.


Les jardins suspendus une des «7 merveilles du monde»

Deux palais fortifiés, voisins l'un de l'autre, complétaient ce solide système de défense. Celui du sud, immense, reste impressionnant: de forme trapézoïdale, long de plus de 300 mètres et mesurant près de 200 mètres de largeur, il se composait de cinq blocs juxtaposés, dotés chacun d'une cour.

On y pénétrait par un vestibule permettant l'accès à la première de ces cours sur laquelle s'ouvraient les salles des gardes; sur une deuxième, les appartements des fonctionnaires; sur une troisième, la plus imposante, la salle du trône: là se tenait le roi, au fond d'une niche.

Des murs épais protégeaient la résidence privée et les appartements de réception qui donnaient sur la quatrième cour. C'est enfin dans le cinquième et dernier «quartier» que l'on situe le harem.


L'agencement de cet immense palais était ainsi entièrement conçu pour assurer la sécurité du monarque par une série de filtrages successifs. 

Il recelait aussi une des «sept merveilles» du monde antique: les jardins suspendus. Les archéologues ont en effet découvert, à l'angle nord-est du bâtiment, une curieuse structure architecturale formée d'un couloir et de sept pièces voûtées: très probablement les substructures des terrasses de maçonnerie où prospérait un véritable petit parc. C'est pour sa jeune épouse Amyitis, fille d'Astyage, en mai de ses montagnes natales, que Nabukodonosor aurait fait ainsi aménager – quelque 1 200mètres carrés de verdure, dominant les toits de la ville.

Immédiatement au nord de ce palais-forteresse, il fit construire une nouvelle citadelle où l'on devait entreposer les objets d'art ramenés des campagnes victorieuses. De fait, les archéologues y ont retrouvé toutes sortes de statues, de provenances très diverses.

À l'est de ce dispositif se trouvait la porte d'Ishtar dont les murs étaient ornés de reliefs en briques émaillées: taureaux et dragons. Par là pénétrait la célèbre «voie processionnelle» que le roi parcourait au Nouvel-An, flanqué des effigies des dieux Mardouk et Nabou (ou Nabu).


Dès les premiers pas, le cortège longeait un des plus célèbres parmi les innombrables sanctuaires que renfermait la ville: le temple de la déesse Ninmah; mesurant 53 m sur 35, il est construit selon un plan classique chez les Babyloniens: vestibule, cour, première salle précédant la cella, puis la cella elle-même où «habitait» l'image en métal précieux de la divinité. 

Toute l'avenue, longue de près d'un kilomètre et large de 10 à 20 mètres, était pavée de dalles de calcaire scellées au bitume.

Sur la tranche de chaque bloc, on lisait: «Nabukodonosor, roi de Babylone, fils de Nabopolassar, roi de Babylone, c'est moi. La rue de Babylone, je l'ai pavée avec des blocs de pierre amenés de la montagne pour la procession du grand seigneur Mardouk. Que Mardouk, mon seigneur, m'accorde une vie éternelle!»


Au sommet le «lit» d'Ishtar

On parvenait bientôt au quartier sacré. Deux grands édifices rectangulaires s'y côtoyaient: l'un de 85 mètres sur 79; l'autre de 116 mètres sur 89. «Palais du Ciel et de la Terre», il comportait plusieurs chapelles. Celle de Mardouk était la plus richement décorée: Nabukodonosor en avait recouvert les murs d'or, les plinthes étaient d'albâtre et delapis-lazuli, et les poutres de cèdre soutenaient un plafond décoré de feuilles d'or lui aussi. Au centre de la salle était placé le trône du dieu, haut de plus d'un mètre cinquante.

Tout près se dressait la célèbre tour, ziggourat à 7 étages, de 90 mètres de haut, supportant en son sommet un autre sanctuaire: «le lit» de la divinité. De cet édifice gigantesque, les archéologues n'ont rien retrouvé qu'un trou béant où s'infiltrent les eaux de l'Euphrate. Alexandre le Grand en effet avait conçu le téméraire projet de reconstruire entièrement la «Tour de Babel», mais il mourut tandis que s'achevaient à peine les travaux de déblaiement.

À l'est de la voie processionnelle s'étendait le quartier résidentiel dont les rues, sans être absolument rectilignes, ont un tracé qui marque une nette volonté de régularité et d'harmonie. Il bordait le temple d'Ishtar, la déesse de l'Amour, à laquelle on avait également dédié une porte et plus de 1 80 petits sanctuaires en plein air. C'est pour elle que se prostituaient les Babyloniennes, selon l'étrange coutume que rapporte Hérodote

«La plus honteuse des lois de Babylone est celle qui oblige toutes les femmes du pays à se rendre une fois dans leur vie au temple d'Aphrodite («l'Ishtar» des Grecs), pour s'y livrer à un inconnu... Des allées délimitées en tous sens par des cordes tendues permettent aux visiteurs de circuler au milieu d'elles et de faire leur choix... Quelle que soit la somme offerte, la femme ne refuse jamais... Elle suit le premier qui lui jette de l'argent et ne peut repousser personne. Mais, ceci fait, libérée de son devoir envers la déesse, elle retourne chez elle...

Celles qui sont belles et bien faites sont vite de retour, les laides attendent longtemps sans pouvoir satisfaire à la loi; certaines restent dans le temple pendant trois ou quatre ans.»

De telles moeurs ont largement contribué à établir la triste réputation de la grande «cité de la débauche». Ce n'était heureusement pas son seul visage. Ses ruines ont livré aux archéologues des milliers de textes cunéiformes où apparaît un peuple actif, cultivé, solidement organisé. Il s'agit de cylindres de fondation, de documents administratifs, législatifs ou commerciaux, d'oracles ou de présages, de lettres, de nombreuses oeuvres littéraires ou religieuses. Une de ces inscriptions porte témoignage de l'exil des Juifs à Babylone: elle mentionne une distribution de blé et d'huile à «Jehoiakin, fils du roi de Juda».


Les majestueux monuments qui faisaient la fierté de Nabukodonosor ne lui survécurent guère, intacts, qu'une centaine d'années. Sans doute Cyrus et ses successeurs achéménides se parèrent-ils encore du titre de «roi de Babylone» après avoir ravagé et conquis la cité jadis «glorieuse entre les royaumes». Mais jamais plus celle-ci ne redevint «la couronne de l'orgueil chaldéen» (ISAÏE, chap. 13, vers. 19). Et depuis vingt siècles ses restes tragiques, à l'abandon, semblent attester les malédictions portées dans les oracles des prophètes.

M.-C. HALPERN

© En ce temps-là, la Bible No 6 1 pages II- III.


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